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    Matière Prométhéenne

    Johnathan R. Razorback
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    Matière Prométhéenne  - Page 2 Empty Re: Matière Prométhéenne

    Message par Johnathan R. Razorback Ven 4 Juil - 8:59

    « Quand les hommes et les dieux furent nés ensemble, d’abord les célestes habitants de l'Olympe créèrent l'âge d'or pour les mortels doués de la parole. Sous le règne de Saturne qui commandait dans le ciel, les mortels vivaient comme les dieux, ils étaient libres d'inquiétudes, de travaux et de souffrances ; la cruelle vieillesse ne les affligeait point ; leurs pieds et leurs mains conservaient sans cesse la même vigueur, et loin de tous les maux, ils se réjouissaient au milieu des festins, riches en fruits délicieux et chers aux bienheureux Immortels. Ils mouraient comme enchaînés par un doux sommeil. Tous les biens naissaient autour d'eux. La terre fertile produisait d'elle-même d'abondants trésors ; libres et paisibles, ils partageaient leurs richesses avec une foule de vertueux amis. Quand la terre eut renfermé dans son sein cette première génération, ces hommes, appelés les génies terrestres, devinrent les protecteurs et les gardiens tutélaires des mortels : ils observent leurs bonnes ou leurs mauvaises actions, et, enveloppés d'un nuage, parcourent toute la terre en répandant la richesse : telle est la royale prérogative qu'ils ont obtenue.»
    -Hésiode, Les travaux et les jours.

    « L’Âge d’or fut le premier. Sans magistrats, sans loi, il cultivait de lui-même la justice et la vertu. La crainte du châtiment était inconnue ; on ne lisait pas des paroles menaçantes gravées sur l’airain suspendu ; une foule suppliante ne redoutait pas les regards de son juge ; mais il n’y avait pas de juges, et l’on vivait en sûreté. Le pin, abattu sur les montagnes, n’était point encore descendu dans les ondes pour aller visiter un monde étranger, et les mortels ne connaissaient d’autres rivages que ceux qui les avaient vus naître. Les villes n’étaient pas encore entourées de fossés escarpés ; il n’y avait ni casques, ni épées ; et, sans soldats, les nations tranquilles goûtaient les douceurs de la paix. La terre elle-même, exempte de tribut, donnait tout volontairement, sans être ni remuée par le hoyau, ni jamais déchirée par le fer. Les hommes, satisfaits des aliments qu’elle leur présentait sans y être contrainte, cueillaient les fruits de l’arbousier, les fraises des montagnes, les baies du cornouiller, les mûres suspendues aux ronces épineuses, et les glands que laissait tomber le chêne aux larges rameaux. Le printemps était éternel, et les doux Zéphyrs caressaient de leurs tièdes haleines les fleurs écloses sans semence. En outre, la terre, sans être labourée, se couvrait bientôt de moissons, et les guérets n’avaient pas besoin de repos pour se dorer de lourds épis. On voyait aussi couler des fleuves de nectar, et des fleuves de lait ; la verte écorce de l’yeuse distillait un miel vermeil. »
    -Ovide, Les Métamorphoses.


    Dernière édition par Johnathan R. Razorback le Mar 29 Déc - 11:44, édité 1 fois


    _________________
    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

    « Rien de grand ne s’est jamais accompli dans le monde sans passion. » -Hegel, La Raison dans l'Histoire.

    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".

    Johnathan R. Razorback
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    Message par Johnathan R. Razorback Ven 4 Juil - 14:53

    "Les champs d’action de la politique et de la bureaucratie ont nécessairement des limites, et cela n’est pas agréable pour l’amour-propre ou pour l’égotisme de la classe providentielle – tous ceux qui pensent que, sans leur administration minutieuse et leur législation détaillée, la société est condamnée à errer perpétuellement dans les ténèbres de l’ignorance, de la maladie, du vice, et du désordre."
    -Théodore Dalrymple, Etre ou avoir ? (source: http://aristidebis.blogspot.fr/2014/07/obesite-et-responsabilite.html ).


    _________________
    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

    « Rien de grand ne s’est jamais accompli dans le monde sans passion. » -Hegel, La Raison dans l'Histoire.

    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".

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    Message par Johnathan R. Razorback Ven 4 Juil - 14:58

    "Que l’on traite chacun selon ses mérites, et qui échappera au fouet ?"
    -Shakespeare, Hamlet.

    "Trop ardent, on est moins délicat."
    -Vivant Denon, Point de lendemain (1777).

    "L'historien face aux intellectuels communistes ressemble souvent au Parisien ébahi des Lettres persanes. Il s'étonne d'en rencontrer tant en France et à ce point soumis à l' "esprit de parti". Il est vrai que l'engagement des intellectuels et des artistes y a été, au regard des autres démocraties occidentales, quantitativement important et que, contrairement aux pays du Bloc de l'Est, et a fortiori de l'URSS, il a reposé sur le "choix", et non sur la contrainte ou l'enrôlement obligatoire dans les organisations corporatistes. De même, dans les années 1950, période sur laquelle les ouvrages se sont focalisés, ces intellectuels se sont parfois montrés plus "orthodoxes" que leur homologues soviétiques et les artistes ont volontiers produit un "art de parti" ainsi que sa théorisation."

    "Peu sensibles aux différences entre intellectuels communistes comme à leur évolution historique, les analystes s'en tiennent souvent à la description d'un "intellectuel organique" et d'un "artiste de parti" qui, dépourvus de ressources légitimes et de reconnaissance dans leur univers professionnel, accepteraient de se soumettre à l'autorité partisane, en échange d'un ersatz de carrière."

    "Comme l'atteste la confession de J. Kanapa, les rapports entre les intellectuels et l'institution partisane dans les années 1950 n'offraient guère qu'une seule alternative: se soumettre ou se démettre. En revanche, la libéralisation du statut des intellectuels et des créateurs, "codifiée" au Comité central d'Argenteuil en 1966, ouvre la gamme des rapports à l'autorité qui vont de la soumission à la révolte, et passent désormais par la ruse, le double langage, l'avancée timide, la critique."

    "La publication d'un document ancien dans un contexte politique devenu radicalement différent peut à elle seule être considérée comme le rappel déplacé qu'une autre politique a été pratiquée puis délaissée."

    "Que les intellectuels ou les artistes soient obligés de ruser signifie bien qu'une autorité les y contraint. Mais cette autorité est, en l'occurrence, détenue par un parti qui ne contingente que la place de ses intellectuels et ne leur fait guère courir d'autres risques que symboliques, aussi douloureux soient-ils...
    Dans ces circonstances, accepter de s'en tenir aux "tempêtes dans un verre d'eau", ou plus généralement aux pratiques de cryptage, c'est simplement ruser avec la domination politique, c'est-à-dire au bout du compte, lui accorder crédit
    ."

    "Le rejet de la thèse du parti unique est adopté lors du XVIème congrès en 1961 et constamment réaffirmé dès lors."

    "Avec l'arrivée du général De Gaulle au pouvoir, le PCF, qui rassemblait régulièrement plus de 25% des suffrages depuis la Libération, connaît une première érosion: à partir des législatives de 1958 où il passe sous la barre des 20%, il oscille, pendant toute la période qui nous occupe, entre moins d'un quart et moins d'un cinquième des voix."

    "[La] modification des positions au sein du champ des revues et, au-delà, au sein des champs littéraire et intellectuel est inséparable du bouleversement du monde universitaire. En premier lieu, compte tenu de l'accroissement brutal du nombre des étudiants dans les années 1960, les enseignants, dont le nombre est aussi allé croissant, connaissent des carrières bien plus rapides que leurs ainés. L'autonomisation, par la création de licences, de disciplines autrefois auxiliaires -sociologie, psychologie-, oblige, faute de concours de recrutement propres, à nommer des personnels enseignants pourvus de titres universitaires moins prestigieux. Moins attachés aux normes universitaires, ces jeunes prétendants bouleversent les anciennes règles du jeu, produisent par exemple plus vite des thèses plus légères et moins académiques et, par conséquent, accélèrent parfois encore leur carrière. En second lieu, les années 1960 voient une consécration des "hérétiques", c'est-à-dire d'hommes des disciplines nouvelles, de recherche plus que d'enseignement, de colloques plus que de jurys d'agrégation, qui accèdent alors à une reconnaissance extérieure au strict monde universitaire. Ainsi, après un début de carrière de professeur de philosophie dans le secondaire, puis comme chargé de cours de sociologie à l'université de Sao Paulo, C. Lévi-Strauss n'a quasiment plus jamais enseigné: après son départ pour les États-Unis pendant la guerre, un début de carrière dans les institutions culturelles, il est recruté au Musée de l'Homme, puis élu à l'EPHE et finalement au Collège de France. R. Barthes, que la tuberculose a contraint à interrompre ses études, est licencié de lettres classiques et n'a, jusqu'à son élection au Collège de France en 1976, d'autre ancrage universitaire que sa fonction de directeur d'études à l'EPHE. M. Foucault, normalien, agrégé de philosophie et diplômé en psychopathologie, a enseigné à Lille, Clermont-Ferrand et après Mai 68 à Vincennes, universités peu prestigieuses, une discipline qui l'est encore moins, la psychologie. J. Lacan est à l'intersection de la pratique analytique et du champ intellectuel, notamment grâce à son séminaire à Sainte-Anne puis à l'ENS."

    "Parce que la théorie althussérienne est suspectée au sein du PCF de "déviationnisme", elle fragilise politiquement la NC."
    -Frédérique Matonti, Intellectuels communistes: Essai sur l'obéissance politique.

    "Les membres de l'assemblée municipale, sans cesse contrôlés, surveillés, discutés par l'opinion, sont révocables, comptables et responsables."
    -Le Comité Central de la Garde Nationale, appel aux électeurs, 22 mars 1871.

    "Ce n'est point pour ramper qu'on rêve aux solitudes.
    La foule et le songeur ont des rencontres rudes.

    [...] Certes, nous vénérons Sparte, Athènes, Paris,
    Et tous les grands forums d'où partent les grands cris ;
    Mais nous plaçons plus haut la conscience auguste.
    Un monde, s'il a tort, ne pèse pas un juste ;
    Tout un océan fou bat en vain un grand cœur.
    O multitude, obscure et facile au vainqueur,
    Dans l'instinct bestial trop souvent tu te vautres,
    Et nous te résistons ! Nous ne voulons, nous autres,
    Ayant Danton pour père et Hampden pour aïeul,
    Pas plus du tyran Tous que du despote Un Seul.

    Voici le peuple : il meurt, combattant magnifique,
    Pour le progrès ; voici la foule : elle en trafique ;
    Elle mange son droit d'aînesse en ce plat vil
    Que Rome essuie et lave avec Ainsi-soit-il !
    Voici le peuple : il prend la Bastille, il déplace
    Toute l'ombre en marchant ; voici la populace :
    Elle attend au passage Aristide, Jésus,
    Zénon, Bruno, Colomb, Jeanne, et crache dessus.
    Voici le peuple avec son épouse, l'idée ;
    Voici la populace avec son accordée,
    La guillotine. Eh bien, je choisis l'idéal.
    Voici le peuple : il change avril en Floréal,
    Il se fait république, il règne et délibère.
    Voilà la populace : elle accepte Tibère.
    Je veux la république et je chasse César
    ."

    "O caresse sublime et sainte du tombeau
    Au grand, au pur, au bon, à l'idéal, au beau !
    En présence de ceux qui disent : Rien n'est juste !
    Devant tout ce qui trouble et nuit, devant Locuste,
    Devant Pallas, devant Carrier, devant Sanchez,
    Devant les appétits sur le néant penchés,
    Les sophistes niant, les cœurs faux, les fronts vides,
    Quelle affirmation que ces grands suicides !
    Ah ! quand tout paraît mort dans le monde vivant,
    Quand on ne sait s'il faut avancer plus avant,
    Quand pas un cri du fond des masses ne s'élance,
    Quand l'univers n'est plus qu'un doute et qu'un silence,
    Celui qui dans l'enceinte où sont les noirs fossés
    Ira chercher quelqu'un de ces purs trépassés
    Et qui se collera l'oreille contre terre,
    Et qui demandera : Faut-il croire, ombre austère ?
    Faut-il marcher, héros sous la cendre enfoui ?
    Entendra ce tombeau dire à voix haute : Oui.
    "

    "J'entreprends de conter l'année épouvantable,
    Et voilà que j'hésite, accoudé sur ma table.
    Faut-il aller plus loin ? dois-je continuer ?
    France ! ô deuil ! voir un astre aux cieux diminuer !
    Je sens l'ascension lugubre de la honte.
    Morne angoisse ! un fléau descend, un autre monte.
    N'importe. Poursuivons. L'histoire en a besoin.
    Ce siècle est à la barre et je suis son témoin
    ."

    "Il advint que cet homme un jour songea : - Je règne.
    Oui. Mais on me méprise, il faut que l'on me craigne
    J'entends être à mon tour maître du monde, moi.
    Terre, je vaux mon oncle, et j'ai droit à l'effroi.
    Je n'ai pas d'Austerlitz, soit, mais j'ai mon Brumaire.
    Il a Machiavel tout en ayant Homère,
    Et les tient attentifs tous deux à ce qu'il fait ;
    Machiavel à moi me suffit. Galifet
    M'appartient, j'eus Morny, j'ai Rouher et Devienne.
    Je n'ai pas encor pris Madrid, Lisbonne, Vienne,
    Naples, Dantzick, Munich, Dresde, je les prendrai.
    J'humilierai sur mer la croix de Saint-André,
    Et j'aurai cette vieille Albion pour sujette.
    Un voleur qui n'est pas le roi des rois, végète.
    Je serai grand. J'aurai pour valets, moi forban,
    Mastaï sous sa mitre, Abdul sous son turban,
    Le czar sous sa peau d'ours et son bonnet de martre ;
    Puisque j'ai foudroyé le boulevard Montmartre,
    Je puis vaincre la Prusse ; il est aussi malin
    D'assiéger Tortoni que d'assiéger Berlin ;
    Quand on a pris la Banque on peut prendre Mayence.
    Pétersbourg et Stamboul sont deux chiens de fayence ;
    Pie et Galantuomo sont à couteaux tirés ;
    Comme deux boucs livrant bataille dans les prés,
    L'Angleterre et l'Irlande à grand bruit se querellent ;
    D'Espagne sur Cuba les coups de fusil grêlent ;
    Joseph, pseudo-César, Wilhelm, piètre Attila,
    S'empoignent aux cheveux ; je mettrai le holà ;
    Et moi, l'homme éculé d'autrefois, l'ancien pitre,
    Je serai, par-dessus tous les sceptres, l'arbitre ;
    Et j'aurai cette gloire, à peu près sans débats,
    D'être le Tout-Puissant et le Très-Haut d'en bas.
    De faux Napoléon passer vrai Charlemagne,
    C'est beau. Que faut-il donc pour cela ? prier Magne
    D'avancer quelque argent à Leboeuf, et choisir,
    Comme Haroun escorté le soir par son vizir,
    L'heure obscure où l'on dort, où la rue est déserte,
    Et brusquement tenter l'aventure ; on peut, certe,
    Passer le Rhin ayant passé le Rubicon.
    Piétri me jettera des fleurs de son balcon.
    Magnan est mort, Frossard le vaut ; Saint-Arnaud manque,
    J'ai Bazaine. Bismarck me semble un saltimbanque ;
    Je crois être aussi bon comédien que lui.
    Jusqu'ici j'ai dompté le hasard ébloui ;
    J'en ai fait mon complice, et la fraude est ma femme.
    J'ai vaincu, quoique lâche, et brillé, quoique infâme.
    En avant ! j'ai Paris, donc j'ai le genre humain.
    Tout me sourit, pourquoi m'arrêter en chemin ?
    Il ne me reste plus à gagner que le quine.
    Continuons, la chance étant une coquine.
    L'univers m'appartient, je le veux, il me plaît ;
    Ce noir globe étoffé tient sous mon gobelet.
    J'escamotai la France, escamotons l'Europe.
    Décembre est mon manteau, l'ombre est mon enveloppe ;
    Les aigles sont partis, je n'ai que les faucons ;
    Mais n'importe ! Il fait nuit. J'en profite. Attaquons
    ."
    -Victor Hugo, L'Année terrible (1871).

    "Au printemps de l’année 323, Alexandre était emporté tout à coup dans la force de la jeunesse et au comble de sa merveilleuse puissance. Aussitôt que la nouvelle en fut connue, une grande partie de la Grèce se souleva. Athènes donna le signal. Elle avait sagement résisté l’année précédente aux sollicitations d’Harpale, qui voulait l’engager dans une révolte inutile ; cette fois l’entreprise était beaucoup moins aventureuse. La Macédoine, épuisée par les besoins de l’armée d’Orient, ne pouvait fournir à son gouverneur Antipater que des forces insuffisantes, et les grands intérêts de succession et de partage qui s’agitaient en Asie y retenaient, au moins pour un temps, les secours qui lui seraient nécessaires. En Grèce au contraire, huit mille mercenaires exercés, congédiés sur l’ordre d’Alexandre par ses satrapes, étaient tout rassemblés au cap Ténare sous le commandement d’un chef habile, l’Athénien Léosthène. Une mesure récente avait d’ailleurs aigri contre la Macédoine plusieurs peuples qu’elle atteignait gravement dans leurs intérêts ou dans leur sécurité : le rappel des exilés, solennellement proclamé aux jeux olympiques, menaçait en particulier Athènes, qui avait envoyé ses colons dans les terres des Samiens expulsés, et la belliqueuse nation des Étoliens, que le retour de la puissante famille des Œniades allait livrer à la révolution. Presque partout on ne supportait la domination macédonienne que comme un joug. N’était-ce pas le moment de la secouer ? Athènes se précipita dans cette espérance. Vainement Phocion et la faction des riches essayèrent de la retenir ; la masse du peuple entraîna tout dans un mouvement irrésistible. Hypéride dans la ville, Démosthène, alors exilé, dans les cités grecques, enflammèrent les âmes pour la sainte guerre de l’indépendance. Les temps de l’enthousiasme et des sacrifices semblaient revenus. Athènes décréta que tous ses citoyens seraient soumis au service militaire jusqu’à quarante ans ; elle en fit partir 5,000 dans l’infanterie et 500 dans la cavalerie, avec 2,000 mercenaires, et, tandis que Léosthène soulevait l’Étolie, elle adressait au Péloponèse, à la Grèce du centre, à la Thessalie, même aux barbares de l’Illyrie et de la Thrace, un appel auquel répondit bientôt le plus grand nombre. Ainsi se forma une ligue redoutable malgré l’abstention de Sparte, réduite à l’impuissance par l’issue malheureuse de la tentative d’Agis, et l’hostilité de la Béotie, attachée à la cause macédonienne par le partage du territoire de Thèbes.

    Deux victoires inaugurèrent l’entreprise. Les Béotiens, soutenus par une partie de l’Eubée et par les garnisons macédoniennes, voulurent s’opposer à la jonction des Athéniens avec les troupes de Léosthène, déjà maîtresses des défilés de la Phocide : ils furent défaits. Antipater lui-même, complètement battu près des Thermopyles, fut réduit à se renfermer dans Lamia. Léosthène l’y gardait étroitement serré ; n’ayant pu réussir dans un assaut, il maintenait un blocus rigoureux, et la famine était sur le point de lui livrer son ennemi prisonnier. Le malheur de la Grèce voulut qu’en visitant une tranchée il fut atteint d’un coup de pierre, et au bout de deux jours il mourut de sa blessure. Aussitôt les efforts des Grecs se ralentirent, et l’indécision du commandement hâta les effets de leur mollesse. Déjà auparavant les Étoliens étaient retournés chez eux ; la rigueur du blocus se relâcha, et Antipater put attendre les secours qu’il avait demandés. Bientôt même il sortit de la ville, car la fatigue avait pris les confédérés, la ligue se fondait, et il ne restait pas assez de troupes pour continuer le siège et marcher en même temps à la rencontre des nouveaux ennemis. Ce furent les causes morales, le défaut de persévérance et d’énergie, qui perdirent la cause des Grecs. Le successeur de Léosthène, Antiphile, qui ne manquait pas de capacité militaire, remporta encore un avantage avec l’aide de l’excellente cavalerie thessalienne, commandée par Ménon. Il se défendit même honorablement contre les forces très supérieures d’Antipater, dont les troupes s’étaient augmentées de deux années, celles de Léonat et de Cratère. La victoire décisive de Cranon n’était en elle-même qu’un succès peu considérable ; mais les ressorts de la résistance étaient déjà usés en Grèce. Le vainqueur acheva de rompre l’union de ses adversaires, qui leur donnait encore une certaine force, en ne consentant à traiter avec eux qu’isolément. Il n’eut qu’à dicter ses conditions. Athènes lui livra ses orateurs, reçut une garnison macédonienne à Munychie, paya les frais de la guerre, chassa de ses murs 21,000 de ses citoyens, et n’en garda que 9,000, les plus riches et les plus sages, et tout fut dit pour toujours. Elle ne connut désormais que des vicissitudes dans la dépendance.

    Tous ces événements n’avaient pas duré une année entière. En ce peu de temps, Athènes passa d’un retour inattendu de puissance et de gloire à un abaissement complet et irrémédiable. Jamais elle n’avait paru plus près de reprendre son rang dans le monde grec, et ce fut précisément cet effort qui consomma sa perte. On suit avec un intérêt profond cette crise suprême. La rapidité et la grandeur des péripéties, le contraste des émotions, surtout cette fièvre d’enthousiasme et d’espérance qui dut saisir les patriotes en face de tels périls, notre connaissance du résultat final vers lequel conspirait avec l’ennemi extérieur l’ennemi du dedans, c’est-à-dire la décadence, déjà trop avancée, tout cela donne à ce dernier drame politique et militaire un degré de pathétique auquel n’atteignent pas les temps plus heureux. C’est du reste le meilleur de la civilisation antique, c’est l’élite de l’humanité qui dispute à une ruine fatale son honneur et sa vie. Si ce spectacle procure la triste satisfaction de discerner nettement les causes qui frappèrent de stérilité une tentative généreuse, il nous réserve aussi une consolation : nous voyons qu’une certaine gloire ne manque pas à cette résurrection des meilleurs sentiments, et à la défaite définitive survit un beau souvenir, consacré par l’histoire et par l’éloquence
    ."
    -Jules Girard, Le dernier discours du patriotisme athénien (1871).

    "[Les anarchistes individualistes ]dressent en effet un constat pessimiste de l’état d’aliénation dans lequel se trouvent plongées les masses, de leur faible combativité, de leur trop forte natalité, de leur consommation excessive d’alcool et de tabac.

    Leur critique de l’ouvriérisme est féroce. Ils accusent les révolutionnaires et les syndicalistes de rendre un culte au travailleur, un travailleur d’image d’Epinal, sain, vigoureux, et fier. À la classe ouvrière rédemptrice, sujet de l’histoire, ils opposent « le lamentable troupeau » dont la résignation confirme la thèse de la servitude volontaire développée par La Boétie. Persuadés que l’oppression ne se maintient que par la complicité des opprimés, ils considèrent que la lutte contre les tyrans intérieurs doit accompagner la lutte contre les tyrans extérieurs
    ."
    -Anne Steiner, Les militantes anarchistes individualistes : des femmes libres à la Belle Époque (source: http://amnis.revues.org/1057 ).

    "Seul l'exemple d'êtres grands et purs peut conduire à de nobles pensées et à de nobles actes."
    -Albert Einstein.

    "Des types qui s'intéressent vraiment aux livres, y en a très peu."

    "En ce moment si je vend c'est parce que j'ai été en prison. J'aurais pas été en prison, on me lirait plus du tout."

    "J'appartiens à personne."

    "Le goût profond de l'homme c'est la mise à mort douloureuse et la vivisection sous ses yeux."

    "Je suis l'ennemi de la violence, et par-là un monstre."
    -Louis-Ferdinand Céline, Entretien avec Francine BLOCH (1959).

    "Je les vois pas venir, les ascètes."
    -Louis Ferdinand Céline, Entretien avec Marc HANREZ (1959).

    "Les styles, y en a trois ou quatre par génération, faut dire la vérité parce que si j'la dit pas bah, personne la dira."

    "Au Commencement était l'émotion, le verbe est venu ensuite pour remplacer l'émotion."
    -Louis-Ferdinand Céline.

    « Cher Ricardo, J'ai lu avec beaucoup d'intérêt le livre de votre ami Georges Laffly, les catholiques extrémistes sont les seuls qui me paraissent sympathiques, Léon Bloy notamment. Cest un livre comme on en rencontre très peu : il a un air de parfaite sincérité ».
    -Extrait d'une lettre de Guy Debord à Ricardo Paseyro, 12 avril 1994.

    "L'intelligentsia de gauche, c'est la bonne conscience plus la subvention". -Jean-François Revel.

    "Il n’y a encore jamais eu de littérature vraiment grande qui soit passée négligemment à côté des grandes questions de leur époque."
    -Georg Lukács, Traiter l'actualité ou la fuir (1941). Cf: http://fr.scribd.com/doc/217220714/Georg-Lukacs-Actualite-fuite

    "Tout concoure au bien, jusqu’au sombre plaisir d’un coeur mélancolique"
    -Jean de La Fontaine.

    « La vie est un sommeil, l’amour en est le rêve et tu auras vécu, si tu as aimé »
    -Alfred de Musset.

    « Si toute vie va inévitablement vers sa fin, nous devons durant la nôtre, la colorier avec nos couleurs d’amour et d’espoir. »
    -Anonyme.

    "Naître païen, sans raison, sans réflexion, sans carcan, tout naturellement.

    Puis grandir un peu et sourire au soleil, danser sous la pluie, se rouler dans l'herbe et parler aux fées !

    Décider un jour de prendre son sac à dos et de se lancer sur les routes de l'aventure, le cœur hardi et pur, là où tous les défis sont permis, là où il n'existe comme limites que soi-même. Découvrir ses limites, puis apprendre à les dépasser et sentir s'ouvrir le passage sur l'Autre-Monde...

    Marcher sans repos sous le ciel étoilé et sentir sur sa joue le souffle mystérieux de la nuit. Prier dans la forêt immense et se perdre sous les arcades feuillues à la  recherche de clairières secrètes. Crier, hurler sa colère sous l'orage et défier les éléments en furie.

    Partir à la conquête des sommets, crier sa joie et son ivresse, là, debout près des Dieux, sous la lumière dorée d'une aurore triomphante. Éclater de rire sous la froide cascade et capter sa jeunesse tonifiante.

    [...]

    Ne pas avoir peur du combat, car de l'effort et du dépassement naît et croît la lumière et la force intérieure. Rêver de gloire éternelle, vouloir aller au-delà de la mort sans jamais la craindre, car nous sentons bien que derrière elle la vie revient sans cesse comme le soleil triomphant de l'obscurité. Conserver la jeunesse de son âme et le regard clair de l'enfant afin que notre passage sur terre soit un enchantement. Vouloir renaître plus fort et plus sage à chaque épreuve, à l'image de la nature au sortir de l'hiver. Soumettre son corps à son âme à l'endurance et prendre conscience de la douceur d'un foyer et de la force d'un clan.
    "
    -Galadrie.

    "Faites confiance à quelques-uns et de tors à aucun."
    -William Shakespeare.

    "La Fanfiction est une manière pour la culture de réparer les dégâts commis dans un système où les mythes contemporains sont la propriété des entreprises au lieu d'être celle des gens."
    -Henry Jenkins.

    « Nous contemplons tous les mêmes astres, le ciel nous est commun à tous, le même univers nous entoure : qu'importe la philosophie par laquelle chacun cherche la vérité ? Un seul chemin ne suffit pas pour accéder à un si grand mystère. »
    -Quintus Aurelius Symmaque, aristocrate romain et défenseur du paganisme (cf: http://fr.wikipedia.org/wiki/Quintus_Aurelius_Symmaque#cite_note-3 ).

    « Du poignet jaillit l'immortel sang de la déesse,
    L'ichor, tel qu'on le voit couler chez les dieux bienheureux :
    Ne consommant ni pain ni vin aux reflets flamboyants,
    Ils n'ont pas notre sang et portent le nom d'Immortels
    . »
    -Homère, L’Iliade, chant V.

    "Je suis vivant parmi des hommes, qui le semblent, et dont je sais bien qu'ils sont morts, aussi morts que leurs dieux."
    -Albert Caraco, Ma confession (1975).

    "La solitude de l’homme s’accroît, le désert s’étend autour de nous, mais peut-être est-ce dans ce désert que les dieux viendront."
    -Ernst Jünger, Entretien avec Gilles Lapouge, La quinzaine littéraire, 16 février 1980.

    "Ils reviendront, ces Dieux que tu pleures toujours !"
    -Gérard de Nerval, Delfica.

    « Et de croire qu’il y est des dieux ou demi-dieux qui se délectent de meurtre et d’effusion de sang humain, à l’aventure est-ce une folie ? »
    -Jacques Amyot, Pélopidas.

    "Il y a des limites à la sagesse de l’être humain, arbrisseau fragile secoué par le vent.

    * * *

    Réprimander et corriger quelqu’un pour ses erreurs est important. Cet acte essentiellement charitable est la première obligation du Samouraï.

    Mais il faut s’efforcer de le faire de façon convenable
    . Il est, en effet, aisé de trouver des qualités et des imperfections dans la conduite d’un tiers. Il est également facile de le critiquer. La plupart des gens s’imaginent que c’est par gentillesse qu’ils disent aux autres ce qu’ils ne désirent pas entendre et si jamais leurs critiques sont mal accueillies, ils considèrent qu’ils sont incurables.

    Une telle façon de penser est déraisonnable. Elle donne d’aussi mauvais résultats que si on mettait délibérément quelqu’un dans l’embarras ou que si on l’insultait. Elle n’est souvent qu’une mauvaise manière de sortir ce que l’on a sur le cœur.

    La critique ne doit intervenir qu’après avoir discerné si oui ou non la personne l’acceptera, qu’après s’en être fait une amie, qu’après avoir partagé ses intérêts et s’être comporté de façon telle qu’elle nous accorde son entière confiance, afin qu’elle ait foi en toutes nos paroles. C’est ensuite qu’intervient le tact. Il faut sentir le bon moment et la bonne manière d’exercer sa critique — par missive ou au retour d’une réunion particulièrement agréable —. Il faut commencer par faire état de ses propres imperfections puis amener l’interlocuteur à comprendre, sans prononcer plus de mots qu’il n’est nécessaire.

    Il faut louer ses mérites ; s’efforcer de l’encourager, de préparer son humeur ; le rendre aussi réceptif aux observations que l’homme assoiffé l’est à l’eau. C’est alors qu’il faut corriger ses erreurs.

    La critique constructive est délicate
    ."

    "Seul un Samouraï négligent n’envisage pas toutes les éventualités avant le moment de l’action."

    "Exécrer le mal et conduire sa vie avec rectitude se révèle extrêmement difficile."

    "On s’enrichit toujours de l’expérience des Anciens."

    "Yagyu, le maître de la Voie du Sabre, auprès du Shogun Tokugawa disait : « je ne sais pas comment surpasser les autres. Tout ce que je sais, c’est comment me surpasser ».

    Il se disait : « Je suis aujourd’hui meilleur qu’hier, demain je serai encore supérieur ».

    Un vrai Samouraï consacre tout son temps au perfectionnement de lui-même. C’est pourquoi, l’entraînement est un processus sans fin
    ."

    "Éviter le déshonneur est un fait distinct de la victoire ou de la défaite."

    "Ai-je besoin d’ajouter qu’un Samouraï qui oublie ses obligations envers les autres est un minable, un lâche et un être indigne ?"

    "Quand on apprend à apprécier les points forts d’autrui, tout un chacun peut devenir le modèle de quelqu’un d’autre, tout le monde peut devenir un maître pour autrui."

    "Maltraiter quelqu’un est une conduite digne d’un laquais."

    "On dit : « Si vous désirez sonder le cœur d’un ami, tombez malade ».

    Une personne que vous considérez comme amie quand tout va bien et qui vous tourne le dos comme un étranger en cas de maladie ou d’infortune n’est qu’un lâche.

    Il est bien plus important, lorsqu’un ami doit faire face à l’infortune, de se tenir près de lui, de lui rendre visite et de le secourir.

    Un Samouraï ne doit jamais, aussi longtemps qu’il vit, se permettre de s’éloigner de ceux auxquels il est redevable spirituellement.

    Voilà donc un moyen pour mesurer les véritables sentiments d’un homme. La plupart du temps, nous nous tournons vers les autres pour les appeler à l’aide et nous les oublions dès que la crise est passée
    ."

    "Un homme qui ne cesse de calculer est un poltron. Je dis cela parce que les supputations ont toujours un lien avec les idées de profit et de perte ; l’individu qui les fait est tout le temps préoccupé par des notions de gain ou de perte."

    "Quand survient le malheur, le Samouraï doit s’en réjouir et saisir la chance qui lui est ainsi offerte de mettre à profit son énergie et son courage."

    "Ceux qui vantent leurs talents et s’estiment supérieurs à leurs contemporains seront inévitablement punis par quelque manifestation du Ciel."

    "Au temps du Seigneur Katsushige, les Samouraïs avaient une devise favorite : « Si vous n’avez pas été rônin sept fois, vous ne pourrez revendiquer le titre véritable de Samouraï. Trébuchez et tombez sept fois, mais relevez-vous à la huitième »."

    "[Les] remarques attentionnées sont d’une grande importance."

    "Les hommes qui recherchent les critiques des autres sont déjà supérieurs à la plupart."

    "Les dieux n’aiment guère la souillure du sang."

    "La vie humaine ne dure qu’un instant, il faut avoir la force de la vivre en faisant ce qui nous plait le plus.

    Dans ce monde fugace comme un rêve, vivre dans la souffrance en ne faisant que des choses déplaisantes est pure folie
    ."

    "Fondamentalement, un homme qui est sorti du rang n’a pu le faire que parce qu’il possédait plus d’habileté et de mérite que tous ceux qui sont initialement placés à un échelon élevé.

    C’est la raison pour laquelle nous devons toujours lui témoigner un plus grand respect
    ."
    -Tsunetomo Yamamoto, L'Hagakure (1716).

    "On ne trébuche pas sur une montagne, mais sur une pierre."
    -Confucius.

    "Le procès d’une malheureuse qui n’a ni crédit, ni protection, est promptement fait dans un pays où l’on croit la vertu incompatible avec la misère, où l’infortune est une preuve complète contre l’accusé ; là, une injuste prévention fait croire que celui qui a dû commettre le crime l’a commis ; les sentiments se mesurent à l’état où l’on trouve le coupable ; et sitôt que de l’or ou des titres n’établissent pas son innocence, l’impossibilité qu’il puisse être innocent devient alors démontrée."
    -Le Marquis de Sade, Justine ou les Malheurs de la vertu (1791).

    "Toutes les religions se valent dans l'égarement."
    -Abu-l-Ala al-Maari, poète syrien (source: http://fr.wikipedia.org/wiki/Abu-l-Ala_al-Maari ).

    "La politique est l'art d'obtenir de l'argent des riches et des suffrages des pauvres, sous prétexte de les protéger les uns des autres."
    -Gustave Vapereau.

    « La tolérance n'est point l'indifférence, elle n'est point de s'abstenir d'exprimer sa pensée pour éviter de contredire autrui, elle est le scrupule moral qui se refuse à l'usage de toute autre arme que l'expression de la pensée. »
    -Jean-François Revel.

    « Si un prince légitime gouverne tyranniquement, et qu’il n’existe aucun autre moyen de se préserver que l’expulsion et la déposition du roi, alors le peuple, agissant comme un tout, peut le déposer. »
    -Francisco Suárez.


    Dernière édition par Johnathan R. Razorback le Ven 20 Nov - 14:11, édité 21 fois


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    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

    « Rien de grand ne s’est jamais accompli dans le monde sans passion. » -Hegel, La Raison dans l'Histoire.

    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".

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    Matière Prométhéenne  - Page 2 Empty Re: Matière Prométhéenne

    Message par Johnathan R. Razorback Sam 12 Juil - 22:19

    "Jünger doit supporter l’opprobre d’avoir été contemporain des nazis et de les avoir physiquement côtoyés, plutôt que de choisir un exil pour lui dépourvu de sens."
    -F. Poncet (source: http://www.franceculture.fr/oeuvre-fascisme-et-litterature-pure-la-fabrique-d-ernst-juenger-de-michel-vanoosthuyse ).

    "Bien des hommes et bien des femmes ont accompli une grande œuvre, sans avoir vécu une grande vie. Bien des gens sont intéressants, bien que leur vie puisse avoir été tout à fait insignifiante et banale. La vie de Kropotkine est à la fois grande et intéressante.

    [...] Il a vécu la vie de l’aristocrate et celle de l’ouvrier ; il a été page de l’empereur et il a été un écrivain bien pauvre ; il a vécu la vie de l’étudiant, de l’officier, de l’homme de science, de l’explorateur de pays inconnus, de l’administrateur et du révolutionnaire banni. En exil il a dû parfois vivre de pain et de thé comme un paysan russe ; et il a été exposé à l’espionnage et aux tentatives d’assassinat comme un empereur de Russie.

    [...] C’est un révolutionnaire sans emphase et sans emblème. Il rit des serments et des cérémonies par lesquels se lient les conspirateurs dans les drames et les opéras. Cet homme est la simplicité en personne. Sous le rapport du caractère il peut soutenir la comparaison avec tous ceux qui ont lutté pour la liberté. Aucun n’a été plus que lui désintéressé, aucun n’a aimé l’humanité plus que lui.

    Mais il ne permettrait point d’inscrire au frontispice de son livre tout le bien que je pense de lui, et si je lui faisais, je dépasserais les limites d’une préface raisonnable
    ."
    -Georges Brandès, préface aux Mémoires d'un révolutionnaire de Pierre Kropotkine.

    "Nul homme n’est une île, un tout en soi; chaque homme est partie du continent, partie du large; si une parcelle de terre est emportée par les flots, pour l’Europe c’est une perte égale à celle d’un promontoire, autant qu’à celle d’un manoir de tes amis ou du tien. La mort de tout homme me diminue parce que je suis membre du genre humain. Aussi n'envoie jamais demander pour qui sonne le glas : il sonne pour toi."
    -John Donne, chef de file des poètes métaphysiques, in Devotions upon Emergent Occasions, 1624.

    « Quand nous prendrons conscience de notre rôle, même le plus effacé, alors seulement nous serons heureux. Alors seulement nous pourrons vivre en paix et mourir en paix, car ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort. »
    -Antoine de Saint-Exupéry, Terre des hommes.

    « Ô fils sublime de la sage Thémis ! contre mon gré, malgré toi, par d’indissolubles chaînes, je te lierai à cette roche inaccessible aux hommes, là où tu n’entendras la voix, où tu ne verras la face d’aucun mortel, où, lentement consumé par l’ardente flamme de Hèlios, tu perdras la fleur de ta peau ! Tu seras heureux quand la Nuit, de sa robe enrichie d’étoiles, cachera l’éclat du jour, et quand Hèlios dissipera de nouveau les gelées matinales. Elle te hantera à jamais, l’horrible angoisse de ta misère présente, et voici qu’il n’est pas encore né, Celui qui te délivrera ! C’est le fruit de ton amour pour les hommes. Étant un Dieu, tu n’as pas craint la colère des Dieux. Tu as fait aux Vivants des dons trop grands. Pour cela, sur cette roche lugubre, debout, sans fléchir le genou, sans dormir, tu te consumeras en lamentations infinies, en gémissements inutiles. »
    -Eschyle, poète grec, Prométhée enchaîné.

    « Pour être un héros, il faut avoir au moins une fois en sa vie senti l'inutilité de l'héroïsme et de quel poids infime pèse l'acte héroïque dans l'immense déroulement des effets et des causes, réconcilié son âme avec l'idée de la lâcheté, bravé par avance la faible, l'impuissante, l'oublieuse réprobation des gens de bien, senti monter jusqu'à son front la chaleur du plus sûr et du plus profond repaire, l'universelle complicité des lâches, toujours béante, avec l'odeur des troupeaux d'hommes. Qui n'a pas une fois désespéré de l'honneur ne sera jamais un héros. »
    -Georges Bernanos, Scandale de la vérité.

    "L’idée du surhomme est une idée raisonnable et nous ne devons désormais prétendre à moins."
    -Albert Caraco, Ma Confession (1975).

    "Au-dessus de la vertu, il y a la vie."
    -Laconique, L'ivresse de la vertu (cf: http://www.legoutdeslettres.com/2013/01/livresse-de-la-vertu.html ).

    "Peut-être le temps est-il venu de contester cette prétention qu’a le réel à régenter nos vies."
    -Laconique, Le réel et l'idéal (cf: http://www.legoutdeslettres.com/2013/01/le-reel-et-lideal.html ).

    "On remarque dans tout l’ouvrage un esprit juste, élevé, nerveux, pathétique, également capable de réflexion et de sentiment, et doué avec avantage de cette invention qui distingue la main des maîtres et qui caractérise le génie."
    -Vauvenargues.

    « Mais comme la réflexion et la pensée ont supplanté les beaux-arts, l’action et l’intervention sociale supplanteront désormais la véritable philosophie. Aussi la conscience, à cet instant précis, se hâte-t-elle de pénétrer partout et à peine parvenue à elle-même, cherche maintenant à précipiter l’action. »
    -August von Cieszkowski, Prolégomènes à l'historiosophie.

    « Toute philosophie qui croit qu’un événement politique est susceptible de différer, ou qui plus est de résoudre le problème de l’existence est une philosophie pour rire, une pseudo-philosophie. »
    -Nietzsche.

    "Rechercher et de créer, à partir de la négation, les valeurs positives qui permettront de concilier une pensée pessimiste et une action optimiste. C’est là le travail des philosophes."
    -Albert Camus, La crise de l'homme.

    "Nous devons le respect aux femmes, nous leur devons infiniment de politesse, ceux qui les blâment tombent sous leur coupe et ceux qui les déchirent ne manquent de se traîner à leurs pieds: nous les honorerons pour mieux les éviter, nous les encenserons pour mieux les repousser et nous les diviniserons pour mieux les écraser sous leur symbole."

    "Il est bien rare qu’une femme se rende auteur d'une œuvre remarquable, mais il est fréquent – avouons-le – qu'elle la suscite, l'ombre où la femme se dérobe est une source de grandeur et plus que la lumière où trop de femmes cherchent à paraître."

    "L'école du consentement prélude à la grandeur et la vie éternelle est celle dont nous participons ici-bas, jamais ailleurs, ailleurs n'est plus quand nous ne sommes. Voilà ce qu'il faut enseigner, voilà ce que nous méritons d'apprendre et voilà pourtant ce qu'on nous refuse et qu'on nous punirait même de croire !"
    -Albert Caraco, Post Mortem (1968).

    "Mon Père est en relation avec des gens, qui gagnent magnifiquement leur vie, entrepreneurs, industriels, négociants, banquiers, épiciers et bouchers. Toutes ces brutes se déclarent satisfaites, cela ne lit presque jamais ou seulement un mauvais livre, cela calcule en évitant de réfléchir, cela travaille et jouit durement, ce sont les forces vives de la nation, le monde est plein de pareils hommes et beaucoup les envient, en souhaitant de prendre un jour leur ressemblance. Les voilà, pourtant, ceux qui poussent à la catastrophe, plus que les Nihilistes, qui s’en vantent !"

    "Nous demandons une métaphysique, qui fasse droit à la Nature au lieu de s’opposer à la Nature et de la réputer la fille du péché : cette doctrine est une insulte au genre humain, une menace à son intégrité charnelle."

    "Nous voulons que les dieux aient, comme nous, un sexe et qu’ils en usent, l’idée de les avoir privés de cet organe est une insulte au genre humain."
    -Albert Caraco, Ma Confession (1975).

    "Une fête implique la fierté, l’exubérance, la gaieté, la raillerie à l'égard de tout ce qui est grave, bourgeois, une divine affirmation de soi née d'un sentiment de plénitude et de perfection animales, autant d'état que le chrétien ne peut approuver sincèrement. Toute fête est païenne par essence !"
    -Nietzsche.

    "Qu'est-ce que des hiéroglyphes ? Ce sont des signes plus forts que le texte qu'ils représentent: ils entaillent en profondeur, par-delà la surface, par-delà les époques et les conjonctures, ils décrivent, sous les vêtements, ce qui s'y drape et s'y transmue."
    -Ernst Jünger, Philémon et Baucis (1972).

    "Quels sont les sentiments qui ont gouverné et animé la chevalerie moderne ? D’abord la générosité, d’où naît le respect et la protection de la faiblesse, la libéralité naît aussi de la générosité qui lui a donné son nom. Un autre sentiment domine la chevalerie, c’est le culte de la femme, de la femme envisagée comme le principe de tout bien, de toute élévation morale, excitant l’homme à la vaillance, adoucissant et purifiant ses mœurs, exaltant ses facultés morales. Dès à présent, on peut en revoir plusieurs conséquences de ces sentiments fondamentaux : l’une d’elles est le combat désintéresse pour acquérir non pas des terres ou des richesses, mais seulement de l’honneur, sans mélange de passion égoïste ou haineuse. Deux chevaliers se rencontrent et combattent pour la beauté du fait, pour le plaisir et la gloire du combat, et pour honorer, pour glorifier leurs dames. Les tournois, les joutes sont des luttes sans inimitié entre hommes qui s’estiment, qui s’aiment quelquefois, et qui ne croisent leurs lances que pour accomplir de belles emprises d’armes, comme dit Froissart, ce dilettante de la chevalerie. Rien ne peint d’une manière plus vive et plus piquante cette générosité chevaleresque que ces deux paladins de l’Arioste qui, encore tout meurtris des grands coups qu’ils se sont portés, l’un païen et l’autre chrétien, enfourchent le même cheval et le piquent de quatre éperons."
    -Jean-Jacques Ampère, La Chevalerie (1838). Source: http://fr.wikisource.org/wiki/La_Chevalerie.

    "Nous croyons toujours que tout est nouveau, alors que nous refaisons les expériences que les hommes des autres siècles ont faites et que nous repassons par les mêmes chemins qu’eux."
    -Jacques Bainville, Les Dictateurs (1935). Source: http://fr.wikisource.org/wiki/Les_Dictateurs

    "Qui donc aussi plaça jamais la musique si haut et si bas ! Qui lui reconnut jamais tant de pouvoir, que de la déclarer maîtresse toute-puissante, pour le bien et même pour le mal, non seulement de notre âme, mais de notre esprit, et de nos idées autant que de nos sentiments !"
    -Camille Bellaigue, L’Évolution musicale de Nietzsche (1905).

    "Machiavel marque imperturbablement la séparation entre la politique et la morale. Il sous-entend partout : la morale fait un, et la politique fait deux. Nulle part il ne dit qu’il est bien qu’il en soit ainsi, mais il constate qu’il en est ainsi ; puis, l’ayant constaté, il n’essaye pas de se duper et de nous duper, il s’en garde, au contraire, et il nous en garde. Il déclare d’une voix tranquille : « Cela veut du sang, cela veut du fer, » comme le chimiste, pour pousser la comparaison, déclare, sans s’en réjouir ni s’en affliger : « Ceci est du vitriol, » ou : « Ceci est du sucre. » En Machiavel, aucune hypocrisie ; il n’a de scandaleux, et de presque effrayant parfois, que sa sincérité."
    -Charles Benoist, Machiavel et le Machiavélisme (1906).

    "Tandis que le Naturalisme essaye vainement de casser les ailes à la fantaisie et de mettre l’imagination sous clef, la fantaisie s’enfonce dans le pays des rêves d’un vol fou et l’imagination vagabonde dans les plus étranges sentiers. Jamais on n’aura mieux vu combien l’esprit humain est incompressible, et combien il est chimérique de prétendre l’enfermer dans les règles étroites d’un système qu’à notre époque, où à côté d’une brillante école de romanciers uniquement épris de réalités, s’est formée une école de poètes réfugiés, comme le savant de Hawthorne en sa serre, dans un monde absolument artificiel. Point d’antithèse plus tranchée.

    Bien qu’ils n’aient, comme jadis les Parnassiens, ni éditeur commun, ni recueil à eux, où leur groupe apparaisse nettement délimité, ceux qui s’occupent de vers savent qui l’on désigne par ce nom ironique de décadents. Baudelaire est leur père direct, et toute l’école danse et voltige sur le rayon macabre qu’il a ajouté au ciel de l’art, suivant l’expression de Victor Hugo
    ."
    -Chronique de Paul Bourde sur les Poètes décadents, Le Temps, 6 aout 1885.

    "C’est toujours le fait des esprits bas de ne pas croire ceux qui valent mieux qu’eux."

    "Et il y avait parmi eux un homme d’un rare savoir, versé au plus haut point en toute espèce d’œuvres sages, un homme qui avait acquis la plus grande richesse en connaissances ; car lorsqu’il tendait les forces de son esprit, il voyait facilement chacune des choses qui sont en dix, en vingt vies d’hommes."

    "Jeûnez de la méchanceté !"

    "Enfin, ils apparaissent parmi les hommes mortels comme prophètes, poètes, médecins et princes ; et ensuite ils s’élèvent au rang de dieux comblés d’honneurs, participant au foyer des autres dieux et à la même table, libres des misères humaines, assurés contre la destinée et à l’abri des offenses."
    -Empédocle, Fragments.

    "En Égypte chaque dynastie mettait en lumière le dieu du pays d'où elle venait et le faisait prévaloir. Ce dieu, avec ceux de son cycle, entrait alors dans la religion commune, soit pour y partager le rôle de ceux qui s’y trouvaient déjà, soit pour les supplanter. Le panthéon égyptien alla grossissant et finit, sous le nouvel Empire, par admettre même des dieux étrangers."
    -Émile-Louis Burnouf, La Science des religions (1885).

    « Est-ce ici la région, le sol, le climat, dit alors l’archange perdu, est-ce ici le séjour que nous devons changer contre le Ciel, cette morne obscurité contre cette lumière céleste ? Soit ! Puisque celui qui maintenant est souverain peut disposer et décider de ce qui sera justice. Le plus loin de lui est le mieux, de lui qui, égalé en raison, s’est élevé au-dessus de ses égaux par la force. Adieu, champs fortunés où la joie habite pour toujours ! Salut, horreurs ! Salut, monde infernal ! Et toi, profond Enfer, reçois ton nouveau possesseur. Il t’apporte un esprit que ne changeront ni le temps ni le lieu. L’esprit est à soi-même sa propre demeure ; il peut faire en soi un Ciel de l’Enfer, un Enfer du Ciel. Qu’importe où je serai, si je suis toujours le même et ce que je dois être, tout, quoique moindre que celui que le tonnerre a fait plus grand ? Ici du moins nous serons libres. Le Tout-Puissant n’a pas bâti ce lieu pour nous l’envier ; il ne voudra pas nous en chasser. Ici nous pourrons régner en sûreté ; et, à mon avis, régner est digne d’ambition, même en Enfer ; mieux vaut régner dans l’Enfer que servir dans le Ciel. »
    -John Milton, Le Paradis perdu (1667).

    "Je ne connais rien de plus odieux que d’empêcher de sortir de son pays un homme qui y est assez mal pour désirer de le quitter malgré tous les sentiments de la nature et toutes les forces de l’habitude qui l’y retiennent."

    "L'échange est une transaction admirable dans laquelle les deux contractants gagnent toujours."
    -Destutt de Tracy, Traité d'économie politique.


    Dernière édition par Johnathan R. Razorback le Lun 26 Nov - 15:27, édité 16 fois


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    Matière Prométhéenne  - Page 2 Empty Re: Matière Prométhéenne

    Message par Johnathan R. Razorback Mer 23 Juil - 15:35

    "Mais avant de passer outre, j’ajouterai ici un document curieux, négligé par M. Rossetti, et qui est de nature cependant à jeter du jour sur l’état des esprits, en Italie, à l’époque où les guerres des partis gibelin et guelfe étaient dans toute leur force ; où la littérature en langue vulgaire prévalait, et où tous les hommes mécontens, et exprimant la haine que leur inspirait la cour de Rome, appelaient de tous leurs vœux l’arrivée de l’empereur, comme celle d’un messie. D’après les promesses de l’empereur Henri VII, ce grand évènement devait avoir lieu en 1314. Or, sept ans avant, on brûla vif un certain Dulcinus, hérétique patarin, qui fut pris avec toute sa secte, auprès de Verceil en Piémont, après un combat long et opiniâtre. Muratori, parmi les écrits du moyen-âge qu’il a fait connaître, donne une relation latine, écrite par un contemporain, de l’histoire et des opinions de la secte dont ce Dulcinus était alors le chef. Voici les principaux points de la profession de foi que firent ce sectaire et ses disciples, lorsqu’ils furent condamnés au supplice : ils prenaient le titre d’apôtres, disant que leur ordre ou communauté avait été ainsi institué et nommé par Gérard Seguerelli de Parme, lequel avait été brûlé quelques années auparavant ; que Seguerelli était le fondateur de leur secte ; qu’ils ne reconnaissaient ni l’église romaine, ni les cardinaux, ni le pape ; qu’eux seuls Patarins, avaient la véritable tradition des vertus évangéliques ; que les dîmes ne devaient pas être payées au clergé romain qui avait abandonné cette perfection morale et cette véritable pauvreté dans lesquelles vivaient les premiers apôtres ; que l’homme et la femme avaient le droit de vivre ensemble et de satisfaire leurs désirs mutuels, sans commettre un péché ; que la vie est plus parfaite sans vœux qu’avec des vœux ; outre cela, ils croyaient que pour aucune cause, dans aucun cas, on ne devait jamais jurer, si ce n’est à l’occasion des articles de foi et des commandemens de Dieu ; que quant à tout le reste, on pouvait cacher ce que l’on savait, en jurant même de dire la vérité aux cardinaux et aux inquisiteurs ; que l’on n’était nullement tenu par ce serment de révéler ses opinions et sa doctrine, et qu’on n’était point obligé de se défendre par ses paroles, mais dans son cœur. Il leur était recommandé de dogmatiser toutefois, quand et où ils pourraient, en cachette ; qu’en tous cas si on les forçait de jurer en les menaçant de la mort, ils pouvaient mentir, sans crainte de commettre un péché ; qu’enfin s’ils ne pouvaient échapper au supplice, alors ils devaient avouer et défendre ouvertement leur doctrine et mourir avec courage sans trahir leurs co-sectaires.

    Ce Dulcinus déclara qu’il avait reçu le don de prophétie, et que Dieu lui avait révélé, vers l’année 1305, que Frédéric, roi de Sicile, fils de Pierre d’Aragon, deviendrait empereur, instituerait dix rois en Italie, mettrait à mort le pape, les cardinaux, les prélats de l’église romaine et tous les religieux, excepté ceux d’entre eux qui viendraient se joindre à sa secte ; et qu’enfin lui, Dulcinus, serait placé sur le siège du bienheureux saint Pierre, d’où il ferait connaître la vérité.

    D’après les statuts de la secte, Dulcinus avait une femme qui vivait avec lui. Elle se nommait Marguerite. Tous les sectaires étaient à peu près dans le même cas, et ils donnaient à la femme qui leur était attachée, le nom de sœur en Jésus-Christ[2].

    Je dois à la vérité de dire que dans cette curieuse chronique je n’ai rien trouvé qui indiquât que, parmi ces hérétiques, on eût l’usage d’une langue figurée, d’un argot et de signes convenus. L’histoire des Albigeois et Vaudois en France, écrite par Pierre de Vaucernay, moine de Citeaux et contemporain, ne donne non plus aucun renseignement sur ce fait.

    Quoi qu’il en soit, M. Rossetti croit reconnaître qu’à la secte anti-papiste des Patarini a succédé ou s’est mêlée celle des Gibelins ; que les signes conventionnels, par le geste, la parole et l’écriture, ont été transmis par les premiers aux seconds ; et qu’enfin le fond de cette langue figurée, de cet argot, qui était employé également par les chevaliers du Temple, tire son origine du livre de l’Apocalypse. Faute de pouvoir rapporter ici des citations trop longues et trop nombreuses, on ne donnera qu’un échantillon du vocabulaire commun au visionnaire de Pathmos et au grand poète gibelin Dante. Ainsi, l’enfer des vivans veut dire le monde corrompu par la direction des papes ; Béatrice, Laure, Fiametta et tant d’autres femmes imaginaires sont la personnification de la puissance impériale, de la monarchie environnée de toutes les vertus et de tous les bienfaits. La Rome des papes est tour à tour la louve, Babylone, la grande prostituée ; le loup, le guelfe, mot qui vient du saxon wolf, Satan, Lucifer, etc., sont les noms donnés au pape, et par lesquels il est désigné. L’empereur est ordinairement indiqué par la figure d’un levrier. La mort et la vie, deux expressions que l’on rencontre sans cesse dans tous les écrits des poètes éroto-platoniques, et dont on a ordinairement beaucoup de peine à saisir l’acception dans leurs vers, indiquent, en argot gibelin, le premier, le papisme, et le second, la puissance impériale. Ainsi, lorsque Dante dit que le levrier, héritier de l’aigle, viendra au secours de l’Italie et punira la louve, selon M. Rossetti, qu’il est assez difficile de contredire en cette occasion, cela signifie : L’empereur viendra au secours de l’Italie, et punira la Rome papale
    ."
    -Étienne-Jean Delécluze, Dante était-il hérétique ? (1834).

    "Marx y a maintes fois insisté: ce n'est pas l'observation empirique des prolétaires qui permet de connaître leur mission de classe. C'est, au contraire, la connaissance de leur mission de classe qui permet de discerner l'être des prolétaires dans sa vérité. Peu importe, par conséquence, le degré de conscience que les prolétaires ont de leur être ; et peu importe ce qu'ils croient faire ou vouloir: seul importe ce qu'ils sont. Même si, présentement, leurs conduites sont mystifiés et les fins qu'ils croient poursuivre contraires à leur mission historique, tôt ou tard l'être triomphera des apparences et la Raison des mystifications. Autrement dit, l'être du prolétariat est transcendant aux prolétaires ; il constitue une garantie transcendantale de l'adoption par les prolétaires de la juste ligne de classe.

    Une question se pose aussitôt: qui est capable de connaître et de dire ce que le prolétariat est quand les prolétaires eux-mêmes n'ont de cet être qu'une conscience brouillée ou mystifiée ? Historiquement, la réponse à cette question est : seul Marx a été capable de connaître et de dire ce que le prolétariat et sa mission historique sont en vérité. Leur vérité est inscrite dans l'œuvre de Marx. Celui-ci est l'alpha et l'oméga ; il est le fondateur.

    Cette réponse n'est évidemment pas satisfaisante. En effet: pourquoi et comment l'être transcendant du prolétariat a-t-il été accessible à la conscience de Marx [et de lui seul]
    ?"
    -André Gorz, Adieux du prolétariat.

    "Nul ne peut pénétrer le mal qui me détruit, pas plus les hommes que les anges ou les génies, car il ne leur a pas été donné de pouvoir le comprendre."
    -Abd al Qadir al-Jilani, soufiste.

    « Il n'est point de conjoncture où l'on puisse se dispenser d'être juste. »
    -Cicéron.

    « Nous avons besoin d'une éthique ou d'une foi, ce qui fait rire les idiots ; ce n'est pas un besoin de croire à autre chose, mais un besoin de croire à ce monde ci, dont les idiots font partie. »
    -Gilles Deleuze.

    "Délire des grandeurs, trafics et basses manœuvres, enjeux de pouvoir et pratiques de l’exclusion, le Maître nous dit-on était vil, on a des anecdotes à foison pour en fournir la preuve, on a des dossiers là-dessus, on a des fiches et des témoins, il avait tout de même bien mérité, lui aussi, son Livre Noir – diront tous les valets."
    -Frédéric Neyrat, Le cinéma de Guy Debord (source: http://www.debordements.fr/spip.php?article171 ).



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    Message par Johnathan R. Razorback Dim 10 Aoû - 19:44

    "La vie de Baudelaire méritait d’être écrite, parce qu’elle est le commentaire et le complément de son œuvre."

    "Baudelaire eût dit volontiers :« Tout poète qui ne sait pas être à volonté brillant, sublime, ou terrible, ou grotesque, ne mérite pas le nom de poète. » Il s’est vanté plus d’une fois de tenir école de poésie & de rendre en vingt leçons le premier venu capable de faire convenablement des vers épiques ou lyriques. Il prétendait d’ailleurs qu’il existe des méthodes pour devenir original, & que le génie est affaire d’apprentissage."

    "Une question saugrenue, une affirmation paradoxale lui servaient à juger l’homme à qui il avait affaire ; & si au ton de la réponse & à la contenance il reconnaissait un pair, un initié, il redevenait aussitôt ce qu’il était naturellement, le meilleur & le plus franc des camarades."

    "Ni l’argent ni les« positions » n’étaient pour rien dans les rêves d’avenir."4

    "Vers ce temps-là (1840) une évolution se fit dans l’esprit public. Les luttes littéraires étaient closes ; Victor Hugo, déformais incontesté, consacrait son triomphe par les Burgraves & les Rayons & les Ombres. L’intérêt, qui toujours déserte les causes gagnées, se tourna d’un autre côté : la Peinture détrôna la Poésie.

    Delacroix, dont le génie commençait à s’imposer, ralliait autour de lui les braves qui n’attendent pas les décrets du suffrage universel pour reconnaître & défendre ce que leur jugement approuve. La bataille était là : Baudelaire y courut. Tout l’y invitait : son goût, sa nature d’artiste, son amour du combat, son mépris des majorités qui lui faisait prendre plaisir à se faire injurier par les myopes & les routiniers
    ."

    "Nul doute que ces apologies raisonnées, la seconde surtout, plus complète & plus travaillée, n’aient conduis parmi les contemporains de vives sympathies à Eugène Delacroix, qui s’en montra reconnaissant, en témoignant jusqu’à la fin de sa vie, à leur auteur, la plus bienveillante amitié."

    "Baudelaire, malgré son amour de l’éclat & de la violence, malgré sa curiosité déjà notée des procédés & des raffinements, a toujours été dans sa critique de l’école philosophique. Il a écrit un jour cet axiome :« Pas de grande peinture sans de grandes pensées. »"

    "Toute génération, toute famille d’écrivains que groupe une communauté d’idées & de goûts, trouve ou crée un endroit, journal ou revue, pour poser son programme.  Ce journal fut, après 1840, le Corsaire-Satan, dirigé par Lepoittevin Saint-Alme, un vieillard solennel, à mine de vieux troupier, qui découvrait majestueusement ses cheveux blancs devant quiconque s’avisait de venir se plaindre des vivacités de la rédaction. Là débutèrent Champfleury, Murger, Th.. de Banville, Antoine Fauchery, Marc Fournier, A. Vitu, Henri Nicolle, A. Busquet, Édouard Plouvier, Charles de la Ronnat, Alexandre Weill, préludant de concert à des destinées bien diverses. Baudelaire s’y trouva porté tout naturellement ; & l’on vit alors apparaître sur le boulevard son fantastique habit noir, dont la coupe imposée au tailleur contredisait insolemment la mode, long & boutonné, évasé par en haut comme un cornet et terminé par deux pans étroits et pointus."

    "La révolution de 1848 arrêta l’essor de ces jeunes talents & rompit le faisceau des camaraderies littéraires. La passion politique, le besoin subit d’action, la curiosité, l’esprit d’utopie créèrent, de ci, de là, des diversions & même des divergences. S’il ne prit pas activement part aux événements, Baudelaire en ressentit le contrecoup, & devait le ressentir. Il était loin de la sécurité olympienne qui fait rimer le Divan pendant la guerre, & peindre la Naissance de Vénus au bruit de l’émeute. Le poète qui a plongé si résolument dans les misères des infimes, qui a compati à leur perversité comme à leur détresse (Le Vin de l’assassin, Les deux Crépuscules), & tiré de leurs douleurs & de leurs joies, de leurs désespoirs, des chants si éloquents de pitié mélancolique, celui là, certes, était un poète humain."

    "Le but pour Baudelaire, c’était le Beau ; sa seule ambition était la gloire littéraire. On échappe ainsi aux préjugés &. aux illusions imposées par la solidarité : on voit les torts des uns & des autres ; on n’est dupe d’aucun côté. Et c’est ainsi que l’on peut dire que pour les esprits élevés la sagesse est faite de contradictions."

    "Vers ce temps-là aussi, une curiosité nouvelle s’empara de l’esprit de Baudelaire & remplit sa vie. On devine que je veux parler d’Edgar Poë, qui lui fut révélé par les traductions de Mme Adèle Meunier, publiées en feuilletons dans les journaux. Dès les premières lectures il s’enflamma d’admiration pour ce génie inconnu qui affinait au sien par tant de rapports. J’ai peu vu de possessions aussi complètes, aussi rapides, aussi absolues. À tout venant, où qu’il se trouvât, dans la rue, au café, dans une imprimerie, le matin, le soir, il allait demandant : — Connaissez-vous Edgar Poë ?"

    "Je sens encore son regard chargé de mépris et de fureur, & qui voulait dire : Vous ne comprenez donc pas que toute chose que j’écris doit être irréprochable ?"

    "Baudelaire travaillait en dandy. Nul ne fut moins besogneur que lui. S’il aimait le travail, comme art, il avait en horreur le travail-fonction. J’ai entendu des gens qui l’avaient mal connu, ou qui l’avaient connu trop tard, s’étonner que,« avec un si grand talent » Baudelaire ne gagnât pas beaucoup d’argent. C’était le méconnaître absolument. Quoiqu’il ait longtemps manifesté la prétention & même la conviction de s’enrichir par son travail, Baudelaire était trop délicat & trop respectueux de lui-même pour devenir jamais un money-making author."

    "Les Fleurs du mal ont gagné leur procès en appel au tribunal de la littérature & de l’opinion publique. Les magnifiques plaidoyers de Théophile Gautier, les approbations, tant publiques que particulières, des maîtres de la poésie contemporaine, de Victor Hugo, de Sainte-Beuve, d’Émile Deschamps, &c., &c., ont effacé jusqu’au souvenir de ce« malentendu, » dont notre ami avait été si vivement choqué. Reste le livre, désormais serein & inattaquable, & dont les blessures ont été richement réparées par de nouvelles pousses."

    "Charles Baudelaire, ne craignons pas de le dire, est, après les grands maîtres de 1830, le seul écrivain de ce temps, à propos duquel on ait pu prononcer sans ridicule le mot de génie."

    "Quand il sentait que ce qu’il faisait cessait d’être du Baudelaire, il s’arrêtait ; & nulle considération, nul avantage, ni d’argent, ni de faveur, ni de publicité ne lui aurait fait faire un pas plus loin. Aussi est-il resté intègre & intact."

    "Quiconque l’avait connu l’aimait.

    Cet homme, que de certains esprits obtus & malveillants ont voulu faire passer pour insociable, était la bonté & la cordialité mêmes. Il avait la qualité des forts, la gaîté, au point d’aimer à divertir à ses dépens
    ."

    "II reste à ses amis son œuvre, son souvenir & le bonheur d’avoir vécu dans la confidence d’un esprit rare, d’une âme élevée, forte & sympathique, d’un de ces génies d’exception, sans pairs ni sans analogues, qui poussent en ce monde comme des fleurs magiques, dont la couleur, dont la feuille & le parfum ne sont qu’à elles, & qui disparaissent comme elles sont nées, mystérieusement ; de l’un des hommes, en un mot, les plus complets, les plus exquis & les mieux organisés qui aient été donnés à ce siècle."
    -Charles Asselineau, Charles Baudelaire, sa vie et son œuvre (1869)

    "Février 1848. Le Quartier Latin est en folie. Partout dans Paris, des barricades et des hommes exaltés annoncent la République et ses lendemains qui chantent. Carrefour de Buci, quelques insurgés viennent de mettre à sac la boutique d'un armurier. L'un d'entre eux se détache de ce groupe révolté. Pour lui, la révolution n'est qu'un prétexte pour crier sa fureur. Il porte "un beau fusil à deux coups et une superbe cartouchière de cuir jaune". Il cri à tue-tête: "Il faut aller fusiller le général Aupick !". Ce pilleur de magasins, cet homme qui vuet exécuter son beau-père, le second mari de sa mère, c'est Charles Baudelaire, le poète, le dandy, le solitaire, le dégoûté de la politique et des politiciens ! L'ivresse de la révolution l'emporte ce jour-là, un court mais spectaculaire moment, sur les autres ivresses, celles du vin, de la poésie, des paradis artificiels, de l'amour ou du sexe...Baudelaire, qui a vingt-sept ans, ne tuera pas le général Aupick qu'il hait pourtant au plus profond de son être. Mais, peu à peu, armé de sa plume et d'un sombre talent, il va fusiller pour de bon quelque chose de plus solide encore: la vieille poésie."

    "[Baudelaire] ne croit pas à l'amour mais croit encore à la tendresse ; il ignore le progrès et la philanthropie, mais il croit à la charité et au courage ; il connaît le vice mais ne désespère pas de la vertu -la vraie, celle qui n'est pas simple hypocrisie ; il se souvient des heures d'extase et de rêverie mais se rappelle mieux encore les jours de solitude et d'angoisse ; il chante l'oubli du temps dans l'instant, mais montre aussi la marche intraitable des heures et le poids accablant des souvenirs ; il a conscience du mal qui est le propre de l'homme, mais proclame aussi que cette conscience dans le mal fait la gloire de l'homme...C'est ce mélange radical qui donne aux Fleurs du Mal leur inquiétante unité. Baudelaire accepte de vivre dans un monde absurde et cruel ; son œuvre est la saisie de ce monde ; la quintessence qu'il en a extraite après l'avoir serré dans sa main et d'être aussi laissé broyer par lui : double mouvement de connaissance du monde et de naissance de la poésie."
    -Gilbert Maurin, Les grands écrivains.

    "Tout livre qui ne s’adresse pas à la majorité [...] est un sot livre."

    "Il faut mettre de l’importance à tout ce qu’on fait. C’est le seul moyen de ne jamais s’ennuyer."
    -Charles Baudelaire.


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    Message par Johnathan R. Razorback Dim 10 Aoû - 20:24

    « Craignez de mal juger, — mais non pas de punir.»
    -Xavier Forneret.



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    Message par Johnathan R. Razorback Dim 10 Aoû - 23:42

    "Courte est la vie ; consumons donc ce peu d'années, dociles aux désirs qui nous emportent."
    -Machiavel, La Mandragore.

    "Ceux qui prétendent tout savoir et tout régler finissent par tout tuer."

    "Tout vie dirigée vers l'argent est une mort."

    "Il n'y a pas d'amour de vivre sans désespoir de vivre."
    -Albert Camus.

    "Je vois tomber en silence les étoiles des mondes détruits...De qui vous souvenez-vous, hommes de la terre, au milieu de ces mondes sans fins, qui tombent ainsi dans les nuits éternelles, sans se souvenir les uns des autres ?"

    "Qui de nous, qui de nous va devenir un dieu ?"
    -Alfred de Musset.

    "2 juillet 1789. Le plus intraitable, le plus orgueilleux, le plus violent des prisonniers de la Bastille entend de sa cellule monter le grondement de la foule en colère. La Révolution est en marche. Enfermé sur lettre de cachet depuis douze ans, non seulement pour ses écrits et sn libertinage mais aussi grâce à l'influence de sa belle-mère, son implacable ennemie, le marquis de Sade rumine sa vengeance et trouve ce jour-là une bonne occasion de crier sa haine. Il prend un long tuyau de fer blanc au bout duquel est fixé une sorte d'entonnoir et de sa fenêtre hurle qu'on est en train d'égorger les prisonniers de la Bastille et qu'il faut les délivrer ! Inquiet, le gouverneur, désireux de se débarrasser de cet encombrant locataire, rebelle et fauteur de troubles, le fait transférer à Charenton, à l'hospice des déments. Mais le mal est fait, la foule a entendu ce cri terrible et la clameur se fait plus menaçante encore. De tous côtés on vocifère: "A bas la Bastille ! A bas la Bastille !". Douze jours plus tard, la prison -presque vide- sera envahie, son gouverneur massacré et l'histoire du monde sera bientôt bouleversée..."

    "Rarement persécution aura été si minutieuse et têtue que celle dont a pâti le marquis de Sade..."
    -Gilbert Maurin, Les grands écrivains.

    "Vous avez imaginé faire merveille, je le parierais, en me réduisant à une abstinence atroce sur le péché de la chair. Eh bien vous vous êtes trompés: vous avez échauffé ma tête, vous m'avez fait former des fantômes qu'il faudra que je réalise."
    -Sade.

    « Ce mot de Bohème vous dit tout. La Bohème n’a rien et vit de tout ce qu’elle a. L’espérance est sa religion, la foi en soi-même est son code, la charité passe pour être son budget. Tous ces jeunes gens sont plus grands que leur malheur, au-dessous de la fortune mais au-dessus du destin. »
    -Balzac, Un prince de la bohème.

    "[Shakespeare] va maintenir presque toute sa vie un équilibre entre un pessimisme profond et instinctif et un amour de la vie qui, non moins enraciné que lui, le ramène malgré tout vers le riant visage du monde.
    D'où ce mélange, essentiel, entre le drame et la gaieté, le comique et le tragique.
    Si ce mélange est tel, c'est d'abord que la vie n'a pas de vraie signification, et en tout pas de signification surnaturelle: le royaume de Shakespeare est un royaume sans Dieu
    ."
    -Gilbert Maurin, Les grands écrivains.

    "Pour conquérir, on ne combat jamais avec autant d'ardeur que pour se défendre."

    "Écoutez-moi un moment, et jugez si mes conjectures sont bien ou mal fondées."

    "La bienveillance peut-elle jamais s'établir entre les membres d'une oligarchie et un peuple souverain, entre la passion de dominer et l'égalité civique ?"

    "Persuadés qu'Athènes seule est capable de ramener la liberté, ils voudront détruire Athènes, comme une ennemie dont ils craindront les coups."

    "Il faut, dans la prospérité, montrer toujours une grande bienveillance aux malheureux, puisque l'avenir est voilé pour tous les hommes."

    "Il sied mal de venir vous faire la leçon sur l'équité, quand on ne la pratique pas soi-même."

    "Je crois juste de rétablir la démocratie rhodienne."

    "J'opine donc pour que vous preniez avec énergie la défense des Rhodiens, pour que vous agissiez d'une manière digne d'Athènes."
    -Démosthène, DISCOURS SUR LA LIBERTE DES RHODIENS (source: http://remacle.org/bloodwolf/orateurs/demosthene/liberterhodiens.htm ).


    Dernière édition par Johnathan R. Razorback le Dim 23 Avr - 13:03, édité 5 fois


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    Message par Johnathan R. Razorback Jeu 14 Aoû - 19:55

    « Les gueulements dictatoriaux vont partout à présent à la rencontre des hantés alimentaires innombrables, de la monotonie des tâches quotidiennes, de l'alcool, des myriades refoulées, tout cela plâtre dans un immense narcissisme sadico-masochiste toute issue de recherches, d'expériences et de sincérité sociale. On me parle beaucoup de jeunesse, le mal est plus profond que la jeunesse ! Je ne vois en fait de jeunesse qu'une mobilisation d'ardeurs apéritives, sportives, automobiles, spectaculaires, mais rien de neuf. Les jeunes, pour les idées au moins, demeurent en grande majorité à la traîne des R A.T. bavards, filoneux, homicides. A ce propos, pour demeurer équitables, notons que la jeunesse n'existe pas au sens romantique que nous prêtons encore à ce mot. Dès l'âge de dix ans, le destin de l'homme me semble à peu près fixé, dans ses ressorts émotifs tout au moins, après ce temps nous n'existons plus que par d'insipides redites, de moins en moins sincères de plus en plus théâtrales. Peut-être, après tout, les "civilisations" subissent-elles le même sort ? La nôtre semble bien coincée dans une incurable psychose guerrière. Nous ne vivons plus que pour ce genre de redites destructrices. Quand nous observons de quels préjugés rancis, de quelles fariboles pourries peut se repaître le fanatisme absolu de millions d'individus prétendus évolués, instruits dans les meilleures écoles d'Europe, nous sommes autorisés, certes, à nous demander si l'instinct de mort chez l'Homme, dans ces sociétés, ne domine pas déjà définitivement l'instinct de vie. Allemands, Français, Chinois, Valaques... Dictatures ou pas ! Rien que des prétextes à jouer à la mort.

    Je veux bien qu'on peut tout expliquer par les réactions malignes de défense du capitalisme ou l'extrême misère. Mais les choses ne sont pas si simples ni aussi pondérables. Ni la misère profonde, ni l'accablement policier ne justifient ces ruées en masse vers les nationalismes extrêmes, agressifs, extatiques de pays entiers. On peut expliquer certes ainsi les choses aux fidèles, tout convaincus d'avance, les mêmes auxquels on expliquait il y a douze mois encore l'avènement imminent, infaillible, du communisme en Allemagne. Mais le goût des guerres et des massacres ne saurait avoir pour origine essentielle l'appétit de conquête, de pouvoir et de bénéfices des classes dirigeantes. On a tout dit, exposé, dans ce dossier, sans dégoûter personne. Le sadisme unanime actuel procède avant tout d'un désir de néant profondément installé dans l'Homme et surtout dans la masse des hommes, une sorte d'impatience amoureuse, à peu près irrésistible, unanime, pour la mort. Avec des coquetteries, bien sûr, mille dénégations, mais le tropisme est là, et d'autant plus puissant qu'il est parfaitement secret et silencieux.

    Or, les gouvernements ont pris la longue habitude de leurs peuples sinistres, ils leur sont bien adaptés. Ils redoutent, dans leur psychologie, tout changement. Ils ne veulent connaître que le pantin, l'assassin sur commande, la victime sur mesure. Libéraux, marxistes, fascistes ne sont d'accord que sur un seul point : des soldats !... Et rien de plus et rien de moins. Ils ne sauraient que faire en vérité de peuples absolument pacifiques
    . »
    -Louis-Ferdinand Céline, Hommage à Zola (1933).


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    Message par Johnathan R. Razorback Jeu 14 Aoû - 19:58

    « Tout ce que l’écrivain peut et doit faire, c’est offrir à chacun de ceux entraînés par le mouvement tectonique des foules des raisons de le contester et de s’en détacher, s’ils le peuvent. »
    -Virgil Tanase, Saint-Exupéry.

    « Rien de ce qui fait l’excellence de Saint-Exupéry ne passe dans le cinéma, qui n’a les moyens de retenir d’une œuvre littéraire que ce Saint-Exupéry a toujours raté, l’intrigue et le personnage. »
    -Virgil Tanase, Saint-Exupéry.

    « Il n’est pas très original d’accompagner le Babbitt’ d’aujourd’hui, de le voir acheter son journal matinal, digéré cette pensée toute faite, choisir entre trois opinions parce que trois lui sont proposées, puis visser d’un septième de tour, onze fois par minute, l’écrou que lui affecte son travail à la chaîne, puis déjeuner à son drugstore où un esclavage de fer interdit toute réalisation du moindre souhait individuel. Puis à la séance de cinéma où Mr. Zanuck l’écrase lui-même de sa bêtise dictatoriale, puis à sa séance de base-ball, les jours de congé. Mais nul ne s’épouvante de cette effroyable liberté qui n’est que liberté de n’être point. […] Est caricature de la liberté celle dont je crois user quand je décide entre les quatre types de voiture de la General Motors ou encore entre les trois films de Mr. Zanuck ou entre les onze plats du drugstore. La liberté n’est plus que le choix d’un article standard, dans l’ordre d’une similitude universelle. Il donne le choix au condamné d’être empalé ou pendu, et j’admire qu’il soit libre. »

    « Une civilisation est à sauver en permanence. »

    « Nous ne sommes pas un cheptel à l’engrais. »
    -Antoine de Saint-Exupéry.

    « La colonisation ruine une race d’hommes qui va disparaître ; que ceux qui leur succèdent ou eux-mêmes soient repus en engraissent n’enlèvent rien au tragique de ce deuil. »
    -Antoine de Saint-Exupéry, Carnet I.

    « Il faut changer l’homme et la seule méthode consiste à lui assurer d’abord le loisir. »
    -Antoine de Saint-Exupéry, Carnet V.


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    Message par Johnathan R. Razorback Jeu 14 Aoû - 19:59

    « De même que dans la vie privée, on distingue entre ce qu'un homme dit ou pense de lui et ce qu'il est et fait réellement, il faut distinguer, encore davantage dans les luttes historiques, entre la phraséologie et les prétentions des partis et leur constitution et leurs intérêts véritables, entre ce qu'ils s'imaginent être et ce qu'ils sont en réalité».
    -Karl Marx, Le 18 brumaire de Louis Bonaparte.

    « Si tu veux marcher vers le futur retourne toujours à tes racines. »
    -Machiavel.

    « Ma poésie ne consistera qu’à attaquer, par tous les moyens. »
    -Lautréamont, Les Chants de Maldoror.

    « Nous cependant, nous voulons être les poètes de notre vie, et cela avant tout dans les plus petites choses quotidiennes
    -Nietzsche.

    « Tant la religion peut enfanter de maux ! »
    -Lucrèce.

    « Il n’y a rien dans l’intelligence qui n’ait été auparavant dans le sens. »
    -Aristote.

    « [L’Art] diminue le respect qu’il a de lui-même lorsqu’il se prosterne devant la réalité extérieure. »
    -Baudelaire, critiquant le réalisme esthétique.

    « La plus grand-chose du monde, c’est de savoir être à soi. »
    -Montaigne.

    « L’homme est un animal métaphysique. »
    -Schopenhauer.

    « Nous crevons de la Nostalgie de l’Etre. »
    -Léon Bloy, Belluaires et porchers.

    « Quand l’homme a reconnu et organise ses propres forces en forces sociales et donc ne sépare plus de soi la force sociale sous la forme de la force politique, c’est alors seulement que s’achève l’émancipation humaine. »
    -Karl Marx, La question juive.

    « Parler, c’est engager les intérêts des hommes. La responsabilité serait l’essence du langage. »
    -Emmanuel Levinas, Quatre lectures talmudiques.

    « Celui-là seul est digne de la liberté, qui sait la conquérir. »
    -Baudelaire.

    « Quand les citoyens se rebellent contre l’État, ils sont la multitude contre le peuple. »
    -Thomas Hobbes.

    « L’adolescence est une catégorie récente créée par les exigences de la consommation de masse, où elle figure précisément comme la « période de la vie définie par un rapport de pure consommation à la société civile ». »
    -Stuart Ewen, Consciences sous influence.

    « C’est le fait que les choses « continuent à aller ainsi » qui est la catastrophe. »
    -Walter Benjamin.

    « C’est à coup de fouet qu’on mène le bétail au pâturage. »
    -Héraclite.

    « Un seul homme suffit à attester que la liberté n’est pas encore disparue. »

    « Aujourd’hui comme de tout temps, ceux qui ne craignent pas la mort sont infiniment supérieur aux plus grands des pouvoirs temporels. »
    -Ernst Jünger, Passage de la ligne.

    « Au genre et aux proportions de la panique à laquelle se laisse aller un esprit, on reconnait son rang. »
    - Ernst Jünger, Le mur du Temps.

    « La vérité et la justice exigent le calme, mais n’appartiennent qu’aux violents. »
    -Georges Bataille, La littérature et le mal.

    « La philosophie ne se lassera pas de jeter à ses adversaires le cri d’Épicure : « L’impie n’est pas celui qui méprise les dieux de la foule, mais celui qui adhère à l’idée que la foule se fait des dieux ». »
    -Karl Marx, Différence de la philosophie de la nature de Démocrite et d’Épicure.


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    Message par Johnathan R. Razorback Jeu 14 Aoû - 20:28

    « On ne peut déterminer quelles lois observe la civilisation dans son développement, sans remonter à son origine. »

    « Nous y tirons des ténèbres profondes où ils étaient restés ensevelis, des hommes et des faits remarquables, qui ont puissamment influé sur le cours des choses humaines. »

    « On regarde généralement les Chaldéens comme les premiers sages du paganisme, en plaçant Zoroastre à leur tête. »

    « Le déluge universel est notre point de départ. La confusion des langues qui suivit… »

    « L’époque de Thucydide est celle où Socrate fondait la morale, où Platon cultivait avec tant de gloire la métaphysique ; c’est pour Athènes l’âge de la civilisation la plus raffinée. »

    « Tous les savants […] n’ont pas manqué de juger d’après leur temps, des premiers âges de l’humanité, qui naturellement ne devaient être que grossièreté, faiblesse, obscurité. »

    « Trois point capitaux : existence d’une Providence divine, nécessité de modérer les passions humaines et d’en faire des vertus humaines, immortalité de l’âme. »

    « Les philosophes grecs […] parurent dans la Grèce lorsqu’elle était encore toute barbare, et la firent passer immédiatement à la civilisation la plus raffinée. »

    « Dieu défendit la divination aux Hébreux ; cette défense est la base de leur religion ; la divination au contraire est le principe de la société chez toutes les nations païennes. »

    « L’histoire grecque […] prend son commencement du déluge et de l’existence des géants. »

    « Pourtant la société a commencé par la religion. C’est le premier des trois principes de la science nouvelle. »

    « Hobbes ne pouvait voir la société commencer ainsi parmi les hommes violents et farouches de son système, lui qui, pour en trouver l’origine, s’adresse au hasard d’Épicure. Il entreprit de remplir la grande lacune laissée par la philosophie grecque, qui n’avait point considéré l’homme dans l’ensemble de la société du genre humain. Effort magnanime auquel le succès n’a pas répondu ! »

    « Les premiers sages parmi les Grecs furent les poètes théologiens. […] Qu’on y réfléchisse, on trouvera que le vrai poétique est vrai métaphysiquement. […] La poésie fonda la civilisation païenne. »

    « L’histoire sainte [du christianisme] ne présente aucun récit dont il ait à rougir. »

    « Autre passage remarquable de la Politique d’Aristote : Les anciennes républiques n’avaient point de lois pour punir les offenses et redresser les tors particuliers ; ce défaut de lois est commun à tous les peuples barbares. En effet les peuples ne sont barbares dans leur origine que parce qu’ils ne sont pas encore adoucis par les lois. –De là la nécessité des duels et des représailles personnelles dans les temps barbares, où l’on manque de lois judiciaires. […]
    Troisième passage non moins précieux du même livre : Dans les anciennes républiques, les nobles juraient aux plébéiens une éternelle inimité. Voilà ce qui explique l’orgueil, l’avarice, et la barbarie des nobles à l’égard des plébéiens, dans les premiers siècles de l’histoire romaine. Au milieu de cette prétendue liberté populaire que l’imagination des historiens nous montre dans Rome, ils pressaient les plébéiens, et les forçaient de les servir à la guerre à leurs propres dépens ; ils les enfonçaient, pour ainsi dire, dans un abîme d’usure ; et lorsque ces malheureux n’y pouvaient satisfaire, ils les tenaient enfermés toute leur vie dans leurs prisons particulières, afin de se payer eux-mêmes par leurs travaux et leurs sueurs ; là, ces tyrans les déchiraient à coup de verges comme les plus vils esclaves
    . »

    « Les faibles veulent les lois ; les puissants les repoussent ; les ambitieux en présentent de nouvelles pour se faire un parti. »

    « Pour que les hommes se décident à abandonner pour toujours la terre où ils sont nés, et qui naturellement leur est chère, il faut les plus extrêmes nécessités. »

    « La grâce suppose le libre-arbitre. »

    « Le monde social est certainement l’ouvrage des hommes. »

    « L’homme déchu, n’espérant aucun secours de la nature, appelle de ses désirs quelque chose de surnaturel qui puisse le sauver ; or cette chose surnaturelle n’est autre que Dieu. »

    « La science nouvelle sera donc sous l’un de ses principaux aspects une théologie civile de la Providence divine. […] Cette Providence a gouverné, à l’insu des hommes, et souvent malgré eux, la grande cité du genre humain. »

    « Des mondes infinis  [naissant] pendant l’éternité ; hypothèse indubitablement fausse. »

    « La sagesse poétique, la première sagesse du paganisme, dut commencer par une métaphysique, non point de raisonnement et d’abstraction, comme celle des esprits cultivés de nos jours, mais de sentiment et d’imagination. »

    « L’ironie ne peut prendre naissance que dans les temps où l’on réfléchit. »

    « Homère est indubitablement le premier auteur de la langue grecque ; et puisque nous tenons des Grecs tout ce que nous connaissons de l’antiquité païenne, il se trouve aussi le premier auteur que puisse citer le paganisme. »

    « Il est naturel de connaître d’abord les choses, et ensuite de les juger. »

    « La vertu commença par l’effort. »

    « Ils devinrent héros par la vertu. »

    « La souveraineté des lois est une dépendance de la souveraineté des armes. »

    « Les peuples civilisés eux-mêmes n’admettent d’étrangers que ceux qui ont obtenus une permission expresse d’habiter parmi eux. »

    « Lorsque les citoyens des démocraties ne considèrent plus que leurs intérêts particuliers, et que, pour atteindre ce but, ils tournent les forces nationales à la ruine de leur patrie, alors il s’élève un seul homme. »

    « La monarchie est le gouvernement le plus conforme à la nature humaine. »
    -Giambattista Vico, Principes de la Philosophie de l’Histoire (titre d’origine : Cinq Livres sur les principes d’une Science nouvelle, relative à la nature commune des nations, 1744.)
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    Message par Johnathan R. Razorback Jeu 14 Aoû - 22:38

    « Tous les hommes aujourd’hui s’écartent de la vérité et de la justice, tout entiers à l’ambition et à la gloire, les misérables insensés ! Pour moi qui ignore complétement le mal, qui n’ai rien tant à cœur que d’éviter l’envie importune et d’échapper à l’orgueil de la puissance, je ne mettrai pas le pied sur la terre des Perses. Je me contente de peu et je vis à ma fantaisie. »
    -Héraclite, au roi Darius.

    « Je vous le dis : il faut porter encore en soi un chaos, pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante. »
    -Nietzsche.

    « Quand un génie véritable apparaît en ce bas monde, on peut le reconnaître à ce signe que les imbéciles sont tous ligués contre lui. »
    -Jonathan Swift.

    « Le refus abstentionniste de l’écriture, et de n’importe quelle forme de manifestation […] constitue une démission malhonnête et réactionnaire. »
    -Guy Debord, Potlatch n°25 (25 janvier 1956).

    « Et voilà que sur les grisailles de tous les doutes ceci apparaît en l’éclat d’une couleur vigoureuse.
    La Volonté de Vivre
    . »
    -Zo d’Axa, En-Dehors ! (1895).

    « Nous trouvons monstrueux qu’on ait essayé de contester à l’homme son droit à ne rien faire. »
    -Le Second Manifeste du Surréalisme (1929).

    « Ceux qui auront lu, beaucoup lu pour eux-mêmes, avec la conscience qu'il leur faut se délester des écritures, - eux se seront libérés. Sans cette libération, la littérature n'a pas de sens. Partir en corps libre & en esprit libre, en vitaliste, sur les routes sans éclairage -, contre la grande Paix de la Mort. »
    -Donoso Vanhove, Sang-Azur, 26 mai 2013.

    « Amis, c'est un des plus beaux jours de ma vie. Voici les joies de pareils moments que je vis : regardez combien de gens on a pu sortir du ghetto ! Je ne peux rien vous promettre. Nous essayons de survivre, mais nous pouvons mourir. Et nous tenterons de conserver la vie le plus longtemps possible. Nous acceptons tout le monde et ne rejetons personne, ni les vieillards, ni les enfants, ni les femmes. Nous sommes à l'affut de tous les dangers, mais si notre sort est de mourir, nous voulons au moins mourir comme des hommes. »
    - Tuvia Bielski.

    « Héraclite est le premier à déclarer […] que l’essence est un processus. L’origine de la philosophie remonte à Héraclite. »
    -Hegel.

    « J’étais content d’avoir, en 1967, et tout au contraire de ce sombre dément d’Althusser, tenté une sorte de «sauvetage par transfert» de la méthode marxiste en y remettant une grande dose de Hegel, en même temps qu’une reprise de la critique de l’économie politique qui veuille aussi tenir compte de ses développements constatables dans notre pauvre siècle, comme ils ont été prévisibles dès le précédent. Et j’admire beaucoup comme, cette fois, vous avez très légitimement ramené en plus Héraclite, à propos de l’expropriation effectivement totale du langage, qui précédemment avait été le «commun» ! C’est assurément la bonne direction pour reprendre la vraie tâche ; qui auparavant avait pu être appelée «remettre sur ses pieds» le monde, ou «philosopher à coups de marteau». »
    -Lettre de Guy Debord à Giorgio Agamben.

    « Loin d'imiter les autres, nous donnons l'exemple à suivre. »
    -Périclès.

    « Je sers les intérêts d'hommes innombrables en vivant comme je vis et en m'efforçant de vivre plus intensément, plus librement. »
    -Raoul Vaneigem, La Révolution de la vie quotidienne (1967).

    « Fondre la lutte pour une nouvelle culture, c'est-à-dire pour un nouvel humanisme, la critique des murs, des sentiments et des conceptions du monde, avec la critique esthétique ou purement artistique, dans une ferveur passionnée, même sous la forme du sarcasme. »
    -Antonio Gramsci, Problèmes de civilisation et de culture (1930-1935).

    « Le chef d’œuvre de la politique est de modifier par l’éducation, par l’exemple, par le raisonnement, par l’opinion et par l’attrait du plaisir, le cœur humain. »
    -Source Perditae.

    « S’il y a quelque chose de dérisoire à parler de révolution, c’est évidemment parce que le mouvement révolutionnaire organisé a disparu depuis longtemps des pays modernes, où sont précisément concentrées les possibilités d’une transformation décisive de la société. Mais tout le reste est bien plus dérisoire encore, puisqu’il s’agit de l’existant, et des diverses formes de son acceptation. »
    -Guy Debord.

    « Les gens sont prêts à se battre et à mourir pour des mots, plus que pour n’importe quoi d’autre. Les mots façonnent la pensée, suscitent des émotions, et incitent à l’action ; ils tuent et ils ressuscitent, ils corrompent et ils corrigent. »
    -Graham McNeil, Les Faux Dieux.

    « [Machiavel] a toujours été pour la liberté et a donné sur les moyens de la défendre des conseils très-salutaires. »
    -Spinoza, Traité politique.

    « Je viens offrir de grandes idées : on les écoutera, elles seront réfléchies ; si toutes ne plaisent pas, au moins en restera-t-il quelques-unes ; j'aurai contribué en quelque chose au progrès des lumières, et j'en serai content. »
    -Le Marquis de Sade, La philosophie dans le boudoir (1795).

    « Je considère la vie comme une expérience, à vrai dire comme une série d'expériences, qu'il s'agit de rendre les plus riches, les plus abondantes, les plus variées possible. […]

    Je ne pense pas d'ailleurs que l'homme puisse être rendu " bon ", c'est-à-dire à même de comprendre les situations diverses de ses semblables […] s'il n'a pas passé par le creuset de l'expérience
    . »
    -Émile Armand, La vie comme Expérience, 1916.

    « Même de petits opuscules ordinaires peuvent être aussi l'expression de mouvements extrêmement importants et pleins de vie. »
    -Antonio Gramsci, Religion, philosophie, politique (1935).

    « Il y a mille sentiers qui n’ont jamais été parcourus, mille santés et mille terres cachées de la vie. L’homme et la terre des hommes n’ont pas encore été découverts et épuisés. »
    -Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra.

    « Il faut savoir que la guerre est liaison, union, que la justice est lutte, que toutes choses se produisent conformément à la lutte. »
    -Héraclite.

    « Un être qui n’aurait pas la libre disposition de soi et qui manquerait de loisirs, — à nos yeux, ce ne serait là nullement quelque chose de méprisable ; car ce genre de servilité adhère encore trop à chacun de nous, selon les conditions de notre ordre et de notre activité sociales, qui sont foncièrement différentes de celles des anciens. — Le philosophe grec traversait la vie avec le sentiment intime qu’il y avait beaucoup plus d’esclaves qu’on se le figurait — c’est-à-dire que chacun était esclave pour peu qu’il ne fût point philosophe ; son orgueil débordait lorsqu’il considérait que, même les plus puissants de la terre, se trouvaient parmi ses esclaves. Cette fierté, elle aussi, est devenue, pour nous, étrangère et impossible ; pas même en symbole le mot « esclave » ne possède pour nous toute son intensité. »
    -Nietzsche, Le Gai Savoir.

    « La duplicité hypocrite à l’égard de la prostitution est caractéristique de la bourgeoisie et met en relief le fait que là aussi, dans cette question qui semble concerner l’humanité tout entière, elle a une position de classe. En effet, la prostitution, cet appendice obligatoire de la société de classes contemporaine, ce correctif à la forme coercitive désuète de la famille actuelle, pèse de tout son poids sur les classes non possédantes. C’est ici, dans les bas-fonds obscurs et nauséabonds, que poussent ses germes funestes; c’est dans le corps du prolétariat qu’elle plante le plus souvent ses griffes empoisonnées, et bien que son haleine fétide pourrisse toute l’atmosphère sociale, c’est d’abord pour la classe ouvrière qu’elle est un fléau. […]
    Il est clair que le problème de l’abolition de la prostitution, le problème de l’assainissement des rapports entre les sexes, c’est le problème de la classe prolétarienne, problème lié de la façon la plus étroite et la plus indissoluble aux conditions du travail et de la production
    . »
    -Alexandra Kollontaï, Les problèmes de la prostitution (1909).

    « Absorbez les enseignements et les idées de vos prédécesseurs, car cela ne peut que vous améliorez en tant qu’homme. »
    - Dan Abnett, L’Ascension d’Horus.

    « Que le passé nous instruise. »
    -Saint-Just.

    « L’écriture est de plus en plus aseptisée, les plumes se trempent de plus en plus dans la poussière et de moins en moins dans le vitriol. »
    -Victor Hugo.

    « Savoir bien rapprocher les choses, voilà l’esprit juste. »
    -Vauvenargues, Réflexions et maximes.

    « Chaque citoyen ou sujet a d’autant moins de droit que l’État tout entier a plus de puissance que lui. »
    -Spinoza, Traité politique.

    « La Commune ne fut pas une révolution contre une forme quelconque de pouvoir d’État, légitimiste, constitutionnelle, républicaine ou impériale. Elle fut une révolution contre l’État comme tel, contre cet avorton monstrueux de la société (…) Elle ne fut pas une révolution ayant pour but de transférer le pouvoir d’État d’une fraction des classes dominantes à une autre mais une révolution tendant à détruire cette machine abjecte de la domination de classe
    -Karl Marx, Lettre à Louis Kugelmann, 17 avril 1871.

    « Qu’est-ce qui définit le pouvoir des Conseils ? La dissolution de tout pouvoir extérieur ; la démocratie directe et totale ; l’unification pratique de la décision et de l’exécution ; le délégué révocable à tout instant par ses mandants ; l’abolition de la hiérarchie et des spécialisations indépendantes ; la gestion et la transformation conscientes de toutes les conditions de la vie libérée ; la participation créative permanente des masses ; l’extension et la coordination internationalistes. »
    -Adresse à tous les Travailleurs, par le Conseil pour le maintien des occupations, 30 mai 1968.

    « La vie du prolétariat commence quand cesse son travail. »
    -Karl Marx, Le Capital.

    « Il faut permettre aux hommes de faire de grandes fautes contre eux-mêmes, pour éviter un plus grand mal : la servitude. »
    -Vauvenargues, Réflexions et maximes.

    "Nous serons peut-être tous mort demain matin. Mais en quoi serait-ce différent de n'importe quel autre jour ?"
    -Matrix Reloaded.

    « Il est temps de réagir enfin contre ce qui nous choque et nous courbe si souverainement. »
    -Lautréamont, Poésie I.

    « Ce qui arrive ne se produit pas tant parce que quelques-uns le veulent, que parce que la masse des hommes abdique toute volonté, laisse faire, laisse assembler les nœuds que seule l'épée pourra trancher ensuite, laisse promulguer les lois que seule la révolte fera ensuite abroger, laisse s'élever au pouvoir les hommes que seule une révolte pourra renverser par la suite. »
    -Antonio Gramsci, Les indifférents.

    « Tolstoï […] s’attaque à l’art contemporain et constate, vu qu’il ne s’accorde à la réalité dans aucun domaine ni à aucun point de vue, que l’art existant dans son ensemble - mis à part quelques petites exceptions - est incompréhensible à la grande masse de la société, à savoir le peuple laborieux. Au lieu d’en conclure suivant l’opinion commune à la barbarie spirituelle de la grande masse et à la nécessité de son « élévation » à la compréhension de l’art actuel, Tolstoï en tire la conclusion inverse. Il déclare l’ensemble de l’art existant comme « faux art ».

    […] Depuis que la société s’est divisée entre une grande masse exploitée et une petite minorité dominante, l’art ne sert plus qu’à exprimer les sentiments de la minorité riche et oisive, mais comme celle-ci a aujourd’hui perdu toute vision du monde, c’est pourquoi nous avons la dégénérescence et le déclin qui caractérisent l’art moderne.

    […] Il y a une grandeur véritablement classique dans la réflexion de Tolstoï sur l’avenir de l’art qu’il voit à la fois comme l’union de l’art, en tant que moyen d’expression, aux sentiments sociaux de l’humanité laborieuse et à la pratique de celui-ci ; c’est-à-dire la fusion de la carrière d’artiste avec la vie normale de tout membre laborieux de la société.
    »
    -Rosa Luxembourg, Tolstoï comme penseur social (1908).

    « Le style de Machiavel n'est pas celui d'un écrivain qui écrit un traité en forme de système, comme en connaissaient le Moyen Age et l'Humanisme, bien au contraire. C'est le style d'un homme d'action, de quelqu'un qui veut pousser à l'action, c'est le style propre au « manifeste » d'un parti. […] On peut donc penser que Machiavel a en vue ceux « qui ne savent pas », qu'il entend faire l'éducation politique de ceux « qui ne savent pas », non pas l'éducation politique négative des hommes qui haïssent les tyrans, comme semblerait l'entendre Foscolo, mais l'éducation positive de ceux qui doivent reconnaître comme nécessaire l'emploi de moyens déterminés, même s'ils appartiennent aux tyrans, parce qu'ils veulent des fins déterminées.

    […] Qui est-ce donc « qui ne sait pas ? » La classe révolutionnaire du temps, le « peuple » et la « nation » italienne, la démocratie des villes. […]Le machiavélisme a servi à améliorer la technique politique traditionnelle des groupes dirigeants conservateurs, aussi bien que la politique de la philosophie de la praxis ; cela ne doit pas dissimuler son caractère essentiellement révolutionnaire, qui est senti aujourd'hui encore, et qui explique tout l'anti-machiavélisme
    »
    -Antonio Gramsci, Carnets de Prison.

    « Ils étaient là comme dans une cage dont la porte eût été grande ouverte, sans qu'ils puissent s'en évader. Rien n'avait plus d'importance en dehors de cette cage, parce qu'il n'existait plus rien d'autre. Ils demeuraient dans cette cage, étrangers à tout ce qui n'était pas elle, sans même l'ombre d'un désir de tout ce qui était au-delà des barreaux. »
    -Raoul Vaneigem, La Révolution de la vie quotidienne (1967).

    « Que signifie vivre. — Vivre — cela signifie : repousser sans cesse quelque chose qui veut mourir. »
    -Nietzsche, Le Gai Savoir.
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    Message par Johnathan R. Razorback Ven 15 Aoû - 19:39

    "Lorsqu’il s’agit de le défendre, cet argument de l’efficacité est éclipsé par un autre argument de type stratégique: l’État-providence ne devrait son existence qu’à la seule obligation d’apaiser des classes laborieuses qui furent tentées par le socialisme et la révolution.

    Même si les tensions sociales des XIXe et XXe siècles ont joué un rôle important dans la genèse de l’État-providence, il faut se rendre compte que ce dernier (en partie au travers de l’assurance publique) a assis sa légitimité par sa capacité à se poser en acteur incontournable du développement économique des nations industrialisées. En Allemagne, aux États-Unis, en France ou encore au Japon, il a été la «main visible» de l’industrialisation. Mais la peur qu’inspirait le communisme n’étant plus qu’un lointain souvenir, la tentation devient de plus en plus forte de démanteler ce qui apparaît désormais aux yeux de beaucoup au mieux comme un archaïsme, au pire comme un des multiples errements des Trente Glorieuses
    ."
    -Xavier Landes, Mettons fin aux fantasmes sur l’Etat-providence (source: http://www.slate.fr/tribune/81955/demantelement-etat-providence ).
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    Message par Johnathan R. Razorback Ven 15 Aoû - 19:43

    "Les hommes politiques [...] se caractérisent par leur passion du pouvoir et adorent régler la vie des gens selon leur propre goût, considérant les citoyens comme des mineurs."
    -Un internaute francophone.

    "John Locke est perçu comme le penseur qui initia le libéralisme, mais sa vision du travail est commune aussi bien au capitalisme qu’au communisme : la récompense est matérielle. Descartes et Locke façonnent une nouvelle conception du travail. Ce dernier n’est plus conçu comme une réparation du péché originel, mais comme un moyen de participer à l’élaboration du paradis sur Terre (bien commun), en particulier du nôtre."
    -Joaquim Defghi, Comment le travail devint l’instrument du salut terrestre.

    "Depuis 1989, l’économie spéculative du capitalisme néolibéral engloutit des sommes d’argent énormes dans le marché de l’art. La conséquence pour l’art aujourd’hui est qu’il se trouve étroitement lié à la circulation transnationale du capital. En même temps, les gouvernements nationaux, les régions et les villes utilisent l’art comme un instrument marchand dans la compétition fébrile pour avoir de la main d’œuvre, des investissements et des touristes. Ce développement de liens toujours plus étroits entre l’art et le capital, et entre l’art et l’ordre dominant, est incontestablement la tendance prédominante dès qu’on aborde l’art contemporain."
    -Mikkel Bolt Rasmussen, Remarques éparses (en style marxiste occidental) sur l’art contemporain, ses problèmes et ses contradictions.
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    Message par Johnathan R. Razorback Ven 15 Aoû - 23:12

    "Repousse (le mal) par ce qui est meilleur; et voilà que celui avec qui tu avais une animosité devient tel un ami chaleureux."
    -Le Coran [Sourate 41 34-35].

    "Appointé par l'État en vue de fins politiques, (le philosophe) trouvera bon de faire l'apothéose de celui-ci, de le regarder comme le sommet de tout effort humain et de toutes choses. Il transformera ainsi non seulement le cours de philosophie en une école du plus plat philistinisme, mais finira par aboutir, comme Hegel, par exemple, à la doctrine révoltante que la destination de l'homme trouve sa plénitude dans l'État, à peu près comme celle de l'abeille dans la ruche : ce qui a pour effet de dérober complètement aux yeux le but élevé de notre existence."
    -Arthur Schopenhauer.

    « La faute de tout incombe à tous. »
    -Dostoïevski.


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    Message par Johnathan R. Razorback Dim 17 Aoû - 15:31

    « Rien de vivant n'est une unité, c'est toujours une pluralité. »
    -Goethe.

    "La nature protège son œuvre. Un Archimède, un Newton, sont indispensables à la culture du monde ; aussi les préserve-t-elle par une certaine sécheresse. S’ils avaient été de bons vivants, aimant la danse, le Porto et les clubs, nous n’aurions ni la « Théorie de la Sphère », ni les « Principes » . Ils avaient ce besoin d’isolement qu’éprouve le génie."

    "Les amis les plus chers sont séparés par d’infranchissables abîmes."

    "Il n’est point de métaphysique qui puisse légitimer ou rendre tolérable cet exil parmi les rochers et les échos."

    "Le monde ne peut se passer d’hommes cultivés. Dès que les premiers besoins sont satisfaits, les besoins supérieurs se font sentir impérieusement."

    "Les bienfaits de l’affection sont immenses ; et l’événement qui ne perd jamais son charme, c’est la rencontre d’êtres supérieurs en des conditions qui permettent les plus heureux rapports."

    "Le défaut capital des natures froides et arides, c’est le manque d’énergie vitale. [...] L’énergie vitale constitue le pouvoir du présent, et ses hauts faits sont comme la structure d’une pyramide."

    "Les gens doivent être pris à très petites doses. Si la solitude est orgueilleuse, la société est vulgaire. Dans le monde, les capacités supérieures de l’individu sont considérées comme choses qui disqualifient. La sympathie nous abaisse aussi facilement qu’elle nous élève. Je connais tant d’hommes que la sympathie a dégradés, des hommes ayant des vues natives assez hautes, mais liés par des rapports trop affectueux aux personnes grossières qui les entouraient ! Les hommes n’arrivent pas à s’unir par leurs mérites, mais s’ajustent les uns aux autres par leurs infériorités — par leur amour du bavardage, ou par simple tolérance ou bonté animale. Ils troublent et font fuir l’être qui a de hautes aspirations"

    "Assortissez vos hôtes, ou n’invitez personne."

    "Une civilisation plus haute restaurera dans nos mœurs un certain respect que nous avons perdu."

    "Beaucoup d’hommes sont intimidés dans la société, et vous disent des choses justes en particulier, mais ne s’y tiennent pas en public."
    -Ralph Waldo Emerson, Société et solitude.

    "L'encre rouge
    a tatoué
    sur ma peau
    les signes du désordre
    "
    -Rose Ausländer, poétesse allemande.

    « Qui veut décrire la guerre, le sang versé et les pilonnages, n'est qu'un insensé ».
    -Ernst Wiechert, écrivain allemand.

    « La littérature n'est pas convaincante lorsqu'elle est fidèle à la réalité, mais lorsqu'elle correspond à une vérité supérieure. C'est cette vérité qui est morale. »
    -Heinrich Böll, écrivain allemand.

    « Parier contre l’or revient à parier sur les gouvernements. Celui qui parie sur les gouvernements et leur papier monnaie parie contre 6 000 années d’histoire de l’humanité. »
    -Charles de Gaulle.

    « L’État enrichit des fainéants de la dépouille des hommes utiles. »
    -Jean-Jacques Rousseau.

    « Un gouvernement assez fort pour vous donner tout ce que vous voulez l'est assez pour vous enlever tout ce que vous avez. »
    -Thomas Jefferson.


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    Message par Johnathan R. Razorback Mar 19 Aoû - 18:53

    « Comme tous les esprits adolescents, ils ressentaient en même temps le doute et le besoin de croire. Leur solution
    personnelle consiste à donner à leur négation l'intransigeance, la passion de la foi. Quoi d'étonnant, au demeurant ?
    »
    -Albert Camus, L'Homme révolté (sur les jeunes nihilistes russes).

    "[Au yeux de Nietzsche] le dépassement d'un monde conjointement ordonné à l'ancienne métaphysique, au divin et au nihilisme passif qui le
    sanctionne, ne peut plus reposer sur aucune
    transcendance religieuse ou métaphysique."

    "S'il reste en effet au Bloom, avant sa perte définitive, la possibilité d'un réveil de la conscience pour parvenir entre autre chose au politbureau du Parti Imaginaire (c'est à dire rejoindre le noyau dur des conscients), il demeure, comme ses chefs, simple agent d'un destin historico-religieux tracé en dehors de sa seule bonne volonté. On aura alors beau jeu de dénoncer la transcendance historique développée par la philosophie hégéliano-marxiste, puisque, en désespoir de cause, on rehausse le cadavre divin."
    -D. Caboret et P. Garrone, La Tiqouennerie.

    "Il faut en finir avec les métaphysiciens dans l'I.S."
    -Guy Debord, Lettre à Gianfraco Sanguinetti.

    "C’est le seul vœu du Peuple qui doit approuver ou non les lois faites pour le captiver ; il faut donc [dans les assemblées populaires] qu’il s’y trouve en masse , sans élection."
    -Le Marquis de Sade, Idée sur le mode de la sanction des lois (1792).

    "Dans les relations d'hommes à homme, le pis qui puisse arriver à l'un est de se trouver à la discrétion d'un autre."
    -Rousseau.

    "Nul ne sait jamais exactement ce qui motive un autre être humain, d’autant que nul ne sait clairement ce qui le motive lui-même."
    -Stéphane Zagdanski.

    "Les antisémites -autre nom des "pauvres d'esprit"."
    -Nietzsche, La volonté de puissance.

    « Le courage dans le désordre infini de la vie qui nous sollicite de toutes parts, c’est de choisir un métier et de le bien faire, quel qu’il soit ; c’est de ne pas se rebuter du détail minutieux ou monotone ; c’est de devenir, autant que l’on peut, un technicien accompli ; c’est d’accepter et de comprendre cette loi de la spécialisation du travail qui est la condition de l’action utile, et cependant de ménager à son regard, à son esprit, quelques échappées vers le vaste monde et des perspectives plus étendues. »

    "Le courage, c’est d’aimer la vie et de regarder la mort d’un regard tranquille ; c’est d’aller à l’idéal et de comprendre le réel ; c’est d’agir et de se donner aux grandes causes sans savoir quelle récompense réserve à notre effort l’univers profond, ni s’il lui réserve une récompense. Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe, et de ne pas faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques."
    -Jean Jaurès, Discours à la Jeunesse (Albi).


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    Message par Johnathan R. Razorback Mer 20 Aoû - 11:19

    « La concentration excessive de la richesse grippe la machine économique jusqu’à provoquer son arrêt par deux effets combinés : d’une part, la baisse du pouvoir d’achat pour la grande masse de la population force à un développement du crédit qui fragilise, à terme, le secteur financier en raison du risque croissant de défaut de l’emprunteur ; d’autre part, les capitaux disponibles au sommet de la pyramide sociale iront, faute de débouchés suffisants dans la production, se placer dans des activités spéculatives, déréglant entièrement le mécanisme de la formation des prix ».
    -Paul Jorion, Misère de la pensée économique.

    « Keynes ne regarde pas les crises et des dépressions comme étant des aspects nécessaires de la formation du capital ; elles ne sont telles que dans les conditions du laisser-faire et que dans le sens de l’équilibre économique qui n’inclut pas le plein emploi. Pour Marx, cependant, une accumulation continue du capital présuppose des périodes de crises et de dépression, car la crise n’est que « le mécanisme d’équilibre » qui agit dans le capitalisme à l’égard de son développement. C’est dans la période de dépression que la structure du capital subit les changements nécessaires qui rétablissent la rentabilité perdue et qui permettent l’expansion nouvelle du capital. »
    -Paul Mattick, Marx et Keynes (1955).
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    Message par Johnathan R. Razorback Jeu 21 Aoû - 7:44

    "Jusqu'à ce que la douleur le lui enseigne, l'homme ne sait pas quel trésor est l'eau."
    -Lord Byron.

    "Les grandes personnes aiment les chiffres. Quand vous leur parlez d’un nouvel ami, elles ne vous questionnent jamais sur l’essentiel. Elles ne vous disent jamais: «Quel est le son de sa voix? Quels sont les jeux qu’il préfère? Est-ce qu’il collectionne les papillons?» Elles vous demandent: «Quel âge a-t-il? Combien a-t-il de frères? Combien pèse-t-il? Combien gagne son père?» Alors seulement elles croient le connaître."
    -Antoine de Saint-Exupéry, Le petit prince.

    "Sans doute avons-nous besoin aujourd’hui de la poésie, plus que jamais. Afin de recouvrer notre sensibilité et notre conscience de notre humanité menacée et de notre capacité à poursuivre l’un des plus beaux rêves de l’humanité, celui de la liberté, celui de la prise du réel à bras le corps, de l’ouverture au monde partagé et de la quête de l’essence."

    "Nous souffrons d'un mal incurable qui s'appelle l'espoir. Espoir de libération et d'indépendance. Espoir d'une vie normale où nous ne serons ni héros, ni victimes. Espoir de voir nos enfants aller sans danger à l'école. Espoir pour une femme enceinte de donner naissance à un bébé vivant, dans un hôpital, et pas à un enfant mort devant un poste de contrôle militaire. Espoir que nos poètes verront la beauté de la couleur rouge dans les roses plutôt que dans le sang. Espoir que cette terre retrouvera son nom original : terre d'amour et de paix. Merci pour porter avec nous le fardeau de cet espoir."

    "Aux vivants de pleurer l'accalmie du vent."

    "La terre se transmet comme la langue."
    -Mahmoud Darwich, poète palestinien.

    "Créer, voilà le grand rachat de la souffrance et ce qui rend la vie légère."
    -Mahmoud Darwich, Éloge de l'ombre.
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    Message par Johnathan R. Razorback Ven 22 Aoû - 22:35

    "Et l’on nous parle d’individus ? Et cette société serait individualiste ?

    Allons-donc ! L’individualisme est-il la marche forcée et mimétique, la course bouffonne pour attraper l’os que brandit le maître arrogant ?
    L’individualisme est-il cet effort grotesque afin de ressembler au modèle, le pitoyable sacrifice de soi devant l’idole autoritaire ?
    Est-il l’ambition de devenir soi-même un de ces modèles établissant sa norme, que d’autres suivront aveuglément ?
    L’individualisme est-il l’uniformité dans la tristesse et le désespoir ?
    L’individualisme est-il autre chose qu’un mensonge que cette société de masse et de désolation nous vend au prix fort ?
    Est-il le retrait hors de toute lutte, le repli à la campagne en attendant que le ciel continue à nous tomber sur la tête, la négation des relations
    humaines, de l’affinité et de l’amitié ?
    Nous voyons au contraire brimades, sanctions, répression, punitions, menaces, corruption, rackets en tout genre et chantages exercés sur les millions de personnes humaines devenues indésirables.
    Nous voyons mil barrières sociales érigées par des siècles de civilisation et de domestication, faire obstacle à toute possibilité de développement réel de l’individualité.

    L’individu ?
    C’est notre recherche, notre effort propre, la tension qui nous anime, qui tendent à la réalisation de nos rêves anormaux de liberté. La recherche d’une plus grande cohérence possible entre nos idées et nos pratiques. C’est notre volonté d’agir le plus possible selon l’éthique que nous nous
    donnons à nous-mêmes.
    "
    -Guerre au Paradis, n°1 (2010).
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    Message par Johnathan R. Razorback Sam 23 Aoû - 14:29

    "Cécile Laborde est en effet très sensible à la question des préférences adaptatives : à savoir le fait que les relations de domination ont souvent pour résultat de se rendre invisibles en modifiant les attentes de ceux (celles) qui en sont victimes. On parlera de « préférences adaptatives » lorsque des personnes sont satisfaites de leur situation seulement parce qu’elles n’ont pas conscience que d’autres options seraient possibles. C’est évidemment un concept à manipuler avec prudence, mais qui est essentiel du point de vue de la non-domination : on peut dominer les plus faibles en leur ôtant la possibilité même d’imaginer un autre sort."

    "Pas d’émancipation sans la possibilité d’exprimer soi-même ses griefs et ses revendications. Le premier et fondamental pouvoir dont doivent bénéficier les plus faibles, c’est le droit à la parole."
    -Marc Jacquemain, Cécile Laborde ou le républicanisme critique.
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    Message par Johnathan R. Razorback Lun 25 Aoû - 12:33

    "Je ne croirais point que cette espèce humaine qui est à la tête de la création visible soit devenue ce troupeau abâtardi que vous nous dites et qu’il n’y ait plus qu’à la livrer sans avenir et sans ressource à un petit nombre de bergers qui, après tout, ne sont pas de meilleurs animaux que nous et souvent en sont de pires."
    -Alexis de Tocqueville, Lettre à Arthur de Gobineau (24 janvier 1857).

    "Je la regarde [la religion musulmane] relativement au paganisme lui-même comme une décadence plutôt que comme un progrès."
    -Alexis de Tocqueville, Lettre à Arthur Gobineau (22 octobre 1843).

    "Bien des livres et des articles savants, certains de la plus haute qualité, ont été écrits pour élucider la conception noble mais énigmatique qu’avait Tocqueville de la liberté et de la dignité humaine. Nous avons déjà vu que celle-ci n’a presque rien en commun avec le libéralisme contractualiste de Hobbes ou de Locke – en fait, elle en contient même une critique radicale – qui posent l’hypothèse de la liberté et de l’égalité originelle des êtres humains dans un « état de nature » pré-politique. Les êtres humains échappent aux « inconvénients » de l’état de nature (les menaces qui pèsent sur la vie, l’intégrité physique, ainsi que sur la possibilité de « vivre dans l’aisance », et qui résultent de l’absence d’autorité politique dominante) afin de se procurer la sécurité et ce que le philosophe politique Léo Strauss a appelé une « préservation confortable. » Tocqueville appartient à un univers moral et politique entièrement différent. Dans un célèbre passage du troisième chapitre du livre III de L’Ancien Régime et la Révolution (« Comment les Français ont voulu des réformes avant de vouloir des libertés ») Tocqueville avertit que quiconque « cherche dans la liberté autre chose qu’elle-même est fait pour servir. » Ailleurs, Tocqueville reconnaît que la doctrine de « l’intérêt bien entendu » est un instrument (ou un concept) utile pour faire sortir d’eux-mêmes les hommes démocratiques, pour leur rappeler qu’ils vivent en société et qu’ils ont des obligations envers d’autres êtres humains. Mais elle est dépourvue de grandeur et elle risque de transformer la liberté en simple instrument, comme si celle-ci n’avait d’utilité que pour les biens matériels qu’elle tend à produire sur le long terme. Tocqueville défendait et, pourrait-on dire, a même incarné personnellement une conception de la liberté qui met en avant le charme propre de celle-ci, « indépendant de ses bienfaits. »."
    -Daniel Mahoney, Les fondements conservateurs de l’ordre libéral (2011).


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    Message par Johnathan R. Razorback Mar 26 Aoû - 12:21

    "N'est-ce pas là le coeur du socialisme...Si j'aide les gens, alors j'ai le droit de m'accorder des petits privilèges."
    -Pierre (Source: http://aristidebis.blogspot.fr/2012/12/quitter-lunion-europeenne-12.html#comment-form ).

    « Les braves gens ne savent pas ce qu'il en coûte de temps et de peine pour apprendre à lire. J'ai travaillé à cela quatre-vingts ans, et je ne peux pas dire encore que j'y sois arrivé. »
    -Goethe.

    "La qualification [...] est le facteur le plus explicatif des disparités salariales."
    -Laurent Vassille, Les écarts de salaires à l'intérieur de huit pays de la Communauté européenne. Des pratiques nationales divergentes, 1989 (cf: http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/estat_0336-1454_1989_num_219_1_5304 ).

    "La part des salaires est passée sous son niveau du début des années 1970 depuis le début des années 1990."
    -Nicolas Canry, La part salariale dans le PIB en France (cf: http://www.insee.fr/fr/ppp/sommaire/IM118f.pdf ).

    "Ce vocable [d'élite(s)], catégorie du discours politique dans les sociétés occidentales (p. ex. comme registre de dénonciation de l'action des gouvernants), a eu du mal pour être reconnu comme une catégorie d'analyse opératoire dans les sciences sociales."

    "Les premières théories élitistes voient le jour au tournant du XXème siècle au moment où les masses et le peuple des citoyens font leur entrée sur la scène politique et, en réaction à la pensée marxiste, elles annoncent l'inévitable venue d'élites détentrices du pouvoir. Il s'agit pour les auteurs qui s'en prévalent, comme Gaetano Mosca ou Vilfredo Pareto, de trouver une alternative à la lutte des classes comme clef de l'histoire en affirmant la nécessité et la légitimité des minorités dirigeantes. Dans une perspective "désenchantée du politique", ces penseurs, à l'instar de Machiavel, insistent sur le caractère incontournable du pouvoir politique [...]. C'est sous l'appellation de machiavéliens que ces auteurs, dont les points de vue ont parfois été trop hâtivement confondus [...] vont ériger un paradigme selon lequel, quelle que soit la forme du régime, c'est toujours une minorité qui gouverne. Dès lors, on comprend mieux pourquoi en opposant les élites qui gouvernent par la ruse ("les renards") à celles qui ont recours à l'usage de la force ("les lions"), Pareto a pu se montrer indulgent devant la montée du fascisme italien. La concordance des temporalités entre l'émergence des régimes totalitaires et autoritaires et la formulation des théories élitistes fut perçue par la critique comme un facteur de contingence voire une relation de cause à effet. Or, rien ne prouve que ces théories se soient retrouvées dans l'idéologie de ces régimes. Bien au contraire, on sait que l'autoritarisme comme le totalitarisme se sont construits contre l'action des élites libérales et démocratiques."

    "Qui fait les élites ? C'est le pouvoir qu'on leur attribue ou qu'on leur associe aujourd'hui, ce qui veut dire qu'il est nécessaire qu'elles soient perçues par les acteurs sociaux comme celles qui le possèdent et qui occupent une place en haut d'une hiérarchie sociale quelconque."

    "La prise en compte de l'historicité du mot élite permet de rappeler que lorsqu'il fut introduit il était porteur d'une charge sémantique positive."

    "En France, la domination quasi-hégémonique du structuralo-marxisme dans les sciences sociales a empêché l'essor d'une sociologie de l'autonomie des acteurs politiques malgré les efforts répétés de Raymond Aron."

    "Si l'existence dans chaque société d'élites dirigeantes ou gouvernantes est une donnée de fait, un tel fait ne peut être ni démocratique ni antidémocratique, car ce qui va à l'encontre de la démocratie c'est de poursuivre des fins antidémocratiques et non de rechercher la vérité expérimentale."
    -William Genieys, Sociologie des élites.


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    Message par Johnathan R. Razorback Mar 26 Aoû - 21:24

    "Le devoir essentiel du chrétien, c'est de réprimer son ambition."
    -Bossuet, Sermon sur l'ambition.

    "Le christianisme [a] propagé dans notre Occident la même révolution que le bouddhisme."
    -Pierre Leroux.

    "Environ 23 heures, une vingtaine d'officiers de la Garde Nationale et de membres du Comité Central pénètrent dans l'Hôtel de ville abandonné. Ils se réunissent dans la salle des conférences après avoir fait placer quelques sentinelles au dehors. Dans cette salle immense éclairée par quelques flambeaux, la poignée d'hommes que la révolte a placée à sa tête, est soudain prise d'une angoisse compréhensible devant le poids de ses responsabilités. Le Comité Central est maître de la situation, mais en raison de la disparition de ses adversaires, il lui faut au plus tôt pallier la carence gouvernementale.
    On ne saurait en vouloir à ces humbles citoyens, hier encore à l'établi, à la forge ou au bureau, d'hésiter sur les mesures à prendre. Les nouveaux maîtres de Paris, s'ils ont la confiance de leur bataillon, ne sont guère connus à l'exception de militants ouvriers éprouvés tels que Varlin ou Assi. Quelques-uns émettant des doutes sur la légitimité de leur présence dans le palais municipal. Il suffirait à ce moment d'un propos défaitiste pour que beaucoup abandonnent la place.
    Soudain, dans l'assemblée, un jeune homme se lève et déclare qu'en attendant des élections régulières, il faut conserver l'Hôtel de ville au peuple. Paroles décisives qui vont avoir des conséquences considérables sur la suite des événements. En quelques mots qui galvanisent les esprits, il est devenu le porte-parole des masses laborieuses. Pour la plupart des assistants, ce jeune homme est un inconnu ; son nom : Edouard Moreau.
    Beau garçon, physionomie intelligente et fine, une chevelure blonde abondante bien que dégarnie sur les tempes, toute sa barbe ; ses yeux bleus donnent à ce regard une grande douceur traversée pourtant d'éclairs de fermeté ; ses mains sont petites et soignées. De taille moyenne (1m 70) mais de belle prestance, il en impose immédiatement à l'ensemble de ses collègues par la sincérité de son éloquence. [...]

    Voilà donc les nouveaux gouvernants installés dans les salons où dansèrent les élégants courtisans de l'Empire. La belle salle du trône n'est plus qu'un immense campement. Paille, couvertures, sacs, fusils sont placés à même le sol. Dans les escaliers des gardes cassent la croûte ou gisent affalés, fourbus, sur les marches. Les membres du Comité Central légifèrent gravement, les uns en uniforme -capote poussiéreuse ou vareuse délavée, la culotte à larges bandes rouges, les gros godillots du premier siège ou les courtes bottes molles. D'autres sont en civil, ne portant que le képi fièrement planté sur leur chevelure hirsute. Beaucoup ont des revolvers glissés dans la ceinture ou traînent un sabre pour martialiser leur allure débonnaire. [...]

    Ce sont donc des hommes probes et sincères qui tiennent momentanément les rênes du pouvoir ; si l'on doit leur reprocher quelque chose c'est plutôt leur pusillanimité. Le général Vinoy ne s'y est pas trompé: pour lui: "le Comité Central commit une grande et irréparable faute en ne poursuivant pas ses avantages, en s'abstenant de marcher immédiatement sur Versailles".

    On craignait un retour offensif de Thiers, et des barricades furent établies à Paris dans cette attente. On redoutait aussi l'intervention des bataillons de l'ordre et plus encore celle des Prussiens. Ces hommes vont pourtant faire la démonstration à la bourgeoisie stupéfaite qu'ils sont capables de gouverner la capitale dans l'intérêt des travailleurs. Les politiciens professionnels qui avaient espéré que Paris aurait sombré dans la famine, les crimes et la violence, doivent s'incliner. "Je croyais que les insurgés de Paris ne pourraient pas conduire leur barque", a consigné Jules Favre au cours de l'enquête parlementaire sur le 18 mars ; peut-on espérer plus merveilleux éloge de la compétence de ces hommes obscurs ?
    ."

    "Tableau de la morale crapuleuse et hypocrite du Second Empire ; les riches bourgeois s'ébaudissent en secret avec les demi-mondaines mais exigent que l'on fasse un procès pour immoralité à Baudelaire et Flaubert."

    "A une proposition de décoration, Moreau répondra par ces mots: "Je ne reconnais pas à un gouvernement lâche le droit d'attester que je suis brave."."

    "Thiers estima d'ailleurs à sa juste valeur Edouard Moreau, et il essaya plusieurs fois, mais sans succès, de l'enlever à l'insurrection."
    -Marc Cerf, Edouard Moreau, l'âme du Comité Central de la Commune, Denoël, Dossiers des Lettres Nouvelles, 1971.

    "Sans l'amitié où est le dévouement à la Patrie et tous les grands sentiments qui élèvent l'homme ?"
    -Edouard Moreau, Journal, 16 juin 1855.

    "Le sang est un hasard, l'amitié est un choix."

    "Les chefs du gouvernement de la Défense Nationale, en livrant la France à la Prusse n'ont eu en vue que tuer la République qu'ils craignaient de voir consolidée par la victoire."
    -Edouard Moreau.

    "L'honnête homme garde toujours sa supériorité que rien ne peut lui ravir. Triomphant, la confiance l'entoure ; tombé, la sympathie l'accompagne ; mais il n'est jamais vaincu, ni par la fortune ni par les malheurs."
    -Edouard Moreau, Lettre à son fils, 26 août 1870.

    "Ne fais jamais la plus petite transition avec ta conscience et abandonne honneurs, distributions, profits, plutôt que de les devoir à une complaisance coupable."
    -Edouard Moreau, Lettre à son fils, 30 août 1870.

    "Il y a eu hier une affaire très vive ; mais le tout s'est passé sur la rive gauche de la Seine, du côté d'Issy, Vanves et Montrouge. L'avantage a été pour nous ; nous avons tué beaucoup d'hommes, fait beaucoup de veuves, beaucoup d'orphelins, privé beaucoup de vieillards de leurs soutiens ; c'est cela qu'on appelle la gloire ! Triste, triste gloire que celle qui s'élève dans le sang et que les innocents paient avec leurs larmes..."
    -Edouard Moreau, Lettre à son fils, 14 novembre.

    "L'homme qui cherche à être bon à quelque chose pour ses semblables y trouve une récompense intérieure beaucoup au-dessus de celle que le monde décerne."
    -Edouard Moreau, Lettre à son fils, 14 novembre 1870.


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