"Difficultés fondamentales des sociétés des pays au stade postindustriel, subissant les effets conjugués, d'une croissance économique incertaine et du grippage des processus d'intégration sociale, économique, voire culturelle, qui ont fonctionné, jusqu'aux années 1970." (p.3)
"Depuis près d'un demi-siècle, les gouvernements successifs confrontés à la persistance de situations de précarité, contraires aux idéaux proclamés de solidarité et celle de bouffées de violences urbaines, sporadiques, ont mis en œuvre en France, une succession de programmes et d'actions focalisés sur les quartiers où se concentrent des populations en situations jugées les plus défavorisées, dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler une politique de la ville. Cette politique s'est appuyée sur le socle législatif de la Loi d'orientation pour la ville (LOV), de 1991, qui se référait aux principes d'un droit à la ville et d'une plus grande cohésion sociale. A partir de 1996, avec le pacte de relance pour la ville, l'Etat associe aux actions concernant la logement des objectifs économiques visant à la création d'emplois. Puis en 2000, la loi SRU relative à la solidarité et au renouvellement urbain, a eu une approche beaucoup plus globale, instaurant de nouveaux documents d'urbanisme, les SCOT et les PLU, leur assignant un principe de mixité sociale et de l'habitat et imposant aux collectivités locales un ratio de logement social locatif. La réalisation de tous ces objectifs a été amenée, comme on le verra, à s'inscrire progressivement, dans le nouveau contexte politico-administratif, résultant des regroupements intercommunaux, selon la loi de 1999.
La persistance des symptômes de fragmentations de l'espace social urbain, leur extension à un grand nombre d'agglomérations ont conduit, depuis, les pouvoirs publics à intensifier des actions prioritaires et les moyens afférents, concernant le logement et l'emploi en les ciblant sur quelque 751 zones urbaines dites sensibles. Telles sont les finalités de la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, de 2003 et de la loi de programmation pour la cohésion sociale, de 2005. La mise en œuvre de leurs objectifs très ambitieux est soutenue par deux nouveaux organismes, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et l'Agence pour la cohésion sociale (ACS). Complété par le programme "Espoir banlieue, une dynamique pour la France", de 2008, le pilotage général de la politique de la ville relève, depuis 2010, du ministre de la Ville qui dispose, en tant que de besoin, de la coopération des services de plusieurs autres ministères, comme en matière de logement, d'affaires sociales, d'enseignement." (p.3-4)
"[Les] effets bénéfices [de cette politique], dans certains cas, ne cessent d'être neutralisés, localement, comme en Seine-Saint Denis, par les flux de primoarrivants et le poids de leur prise en charge." (p.7)
"Objets de la politique de la ville [...] aujourd'hui, quelque 751 territoires urbains, dits zones urbaines sensibles." (p.
"Engagement du budget national, estimés à 40 milliards d'euros, pour l'ensemble des deux dernières décennies et à plus de 8 milliards d'euros, pour chacune des prochaines années." (p.
"On avance un effectif de près de 600 000 sans-logis personnel, en France, représentant une situation de misère absolue et voués à l'accueil de divers "lieux d'errance". Il s'y adjoint le large éventail de situations de pauvreté, plus ou moins relative, en regard des normes nationales de confort. En 2011, l'Insee estime que le fléau d'un état de mal-logement touche près de 3 millions de personnes et M. Mouillart estime la pénurie en logements, entre 600 000 et 900 000 unités. Mais l'on chiffre à environ 1 million le nombre de demandeurs de logements, dont un tiers pour la seule région Ile-de-France. Il faudrait sans doute y adjoindre, en évitant les doubles comptes, une partie de près des 6 millions d'allocataires, soit un ménage sur trois, des diverses formules d'aide au logement locatif. C'est au total un effectif de l'ordre de 4 millions d'habitants qui, à partir du critère synthétique du mal-logement, constitue la masse des urbains connaissant les différentes formes de précarité et relève d'une politique de la ville." (p.12-13)
"Situations, plus aléatoires, des immigrés clandestins -estimés entre 300 000 et 400 000." (p.16)
"Les politiques de la ville consistent souvent plus à gérer des situations jugées inacceptables, plutôt qu'à pouvoir intervenir sur leurs causalités initiales qui pèsent fortement sur l'emploi et le logement, à l'échelle de toutes les agglomérations." (p.17)
"De l'ordre de 300 000 au début des années 2000, [le nombre de logements mis en chantier] s'est rapproché du demi-million entre 2004 et 2006, pour retomber en 2008 et approcher 400 000 en 2011. Cette baisse concerne surtout la construction aidée, qui ne représente annuellement, guère plus de 40% du total. Or la demande sur ce secteur n'a cessé de croître, alimentée par la formation de nouveaux ménages, par l'excédent migratoire et également par les phénomènes de vieillissement et de décohabitation -en Ile-de-France, par exemple, le quart des logements n'a qu'un occupant. Mais il faut aussi renouveler le parc ancien et rattraper les besoins non pourvus. On estime qu'il faudrait relever, chaque année, d'un minimum de quelque 45 000 unités la production de nouveaux logements ; [...]
-les difficultés de la copropriété concernent un nombre considérable de logements collectifs [...] Cette forme d'accession à la propriété avait été conçue, en 1965, comme facteur de progrès social et largement aidée, dans les années 1970 par des prêts, les PAP, accordées par les pouvoirs publics, aux ménages modestes, jusqu'en 1995, lorsque ce dispositif est supprimé. Ce régime est, aujourd'hui, celui du quart du parc immobilier national, mais nombre d'accédants se sont trouvés, depuis, en difficulté, tant par la chute du taux d'inflation qui facilitait les remboursements, que par leur manque de ressources, pour assumer les charges d'entretien. Il s'ensuit une montée des impayés et, en corollaire, la dégradation progressive des bâtiments. Les situations les plus préoccupantes s'observent dans certains quartiers anciens où de petites copropriétés ont de lourds impayés, mais plus encore dans de grands immeubles de cités périphériques comme le Val-Fourré près de Mantes, Grigny 2, Marseille-Nord, les Chamards à Dreux, Vénissieux à Lyon, ainsi qu'en ville nouvelle, comme les quartiers la Bastide et Saint-Christophe, à Cergy." (p.20)
"-le dilemme des organismes HLM. Expression majeure de l'Etat-providence, le parc social locatif représente près de 19% du parc immobilier national, soit quelque 4.2 millions de logements dans lesquels résident environ 13.5 millions de personnes et le tiers de ce patrimoine social se localise en Ile-de-France. Les 800 organismes HLM qui sont soit des établissements publics, soit des sociétés anonymes, soit des coopératives, relevant désormais de l'Union sociale de l'habitat (USH) et tous sont tenus d'équilibrer leur budget. Depuis les années 1980, tandis que le rythme de constructions neuves ralentissait, les responsables des organismes HLM se sont trouvés confrontés à des logiques contradictoires qui remettent en cause une mission initiale qui consistait à offrir du locatif, au-dessous des prix de marché, à des populations diversifiées, mais jouissant de revenus stables, quoique modestes. En effet, on observe, d'un côté, la mise en place des dispositifs financiers qui pénalisent les ménages aux revenus moyens, que l'on rend responsables du faible taux de rotation du parc locatif et l'on prévoit notamment l'instauration de surloyers. D'un autre côté, en réponse à la montée des situations de grande précarité, les pouvoirs publics, avec la loi Besson de 1990, puis à la suite de textes contre les exclusions et des pouvoirs donnés aux préfets, une ouverture systématique du logement social est donnée prioritairement aux catégories sociales considérées comme les plus démunies, même si elles sont peu ou pas solvables. Il est fait obligation aux organismes bailleurs, les HLM de leur réserver des logements, sur demandes de l'administration. Dans ce contexte, différentes formules d'assistance sélective sont assurées par le Fonds de solidarité-logement (FSL) géré par les caisses d'allocations familiales, mais alimenté par l'Etat et les collectivités locales." (p.21-23)
"L'insécurité dans les établissements scolaires a beaucoup progressé depuis une décennie, comme le montre le recensement national, à partir du logiciel Signa, avec une majorité d'incidents déclarés dans les établissements du secondaire, associant vols d'effets, de matériel à l'agression verbale ou physique des personnels, mais aussi des formes de vandalisme culminant avec des incendies volontaires. Sans doute faut-il relativiser le fait en notant que, sur un total de 75 000 écoles et établissements, 300 connaissent des difficultés récurrentes et une quarantaine est classée à haut risque. Mais leur localisation dans les académies de Versailles, Créteil, Lille, Lyon et Aix-Marseille suggère une forte corrélation avec des cités "sensibles" à très forte population issue de l'immigration (L. Mucchielli). Il semble, par ailleurs, que ces données officielles soient très inférieures à la réalité (E. Debarbieux)." (p.38-39)
-Claude Chaline, Les politiques de la ville, PUF, Que sais-je ?, 2011 (1997 pour la première édition), 127 pages.
"Depuis près d'un demi-siècle, les gouvernements successifs confrontés à la persistance de situations de précarité, contraires aux idéaux proclamés de solidarité et celle de bouffées de violences urbaines, sporadiques, ont mis en œuvre en France, une succession de programmes et d'actions focalisés sur les quartiers où se concentrent des populations en situations jugées les plus défavorisées, dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler une politique de la ville. Cette politique s'est appuyée sur le socle législatif de la Loi d'orientation pour la ville (LOV), de 1991, qui se référait aux principes d'un droit à la ville et d'une plus grande cohésion sociale. A partir de 1996, avec le pacte de relance pour la ville, l'Etat associe aux actions concernant la logement des objectifs économiques visant à la création d'emplois. Puis en 2000, la loi SRU relative à la solidarité et au renouvellement urbain, a eu une approche beaucoup plus globale, instaurant de nouveaux documents d'urbanisme, les SCOT et les PLU, leur assignant un principe de mixité sociale et de l'habitat et imposant aux collectivités locales un ratio de logement social locatif. La réalisation de tous ces objectifs a été amenée, comme on le verra, à s'inscrire progressivement, dans le nouveau contexte politico-administratif, résultant des regroupements intercommunaux, selon la loi de 1999.
La persistance des symptômes de fragmentations de l'espace social urbain, leur extension à un grand nombre d'agglomérations ont conduit, depuis, les pouvoirs publics à intensifier des actions prioritaires et les moyens afférents, concernant le logement et l'emploi en les ciblant sur quelque 751 zones urbaines dites sensibles. Telles sont les finalités de la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, de 2003 et de la loi de programmation pour la cohésion sociale, de 2005. La mise en œuvre de leurs objectifs très ambitieux est soutenue par deux nouveaux organismes, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et l'Agence pour la cohésion sociale (ACS). Complété par le programme "Espoir banlieue, une dynamique pour la France", de 2008, le pilotage général de la politique de la ville relève, depuis 2010, du ministre de la Ville qui dispose, en tant que de besoin, de la coopération des services de plusieurs autres ministères, comme en matière de logement, d'affaires sociales, d'enseignement." (p.3-4)
"[Les] effets bénéfices [de cette politique], dans certains cas, ne cessent d'être neutralisés, localement, comme en Seine-Saint Denis, par les flux de primoarrivants et le poids de leur prise en charge." (p.7)
"Objets de la politique de la ville [...] aujourd'hui, quelque 751 territoires urbains, dits zones urbaines sensibles." (p.
"Engagement du budget national, estimés à 40 milliards d'euros, pour l'ensemble des deux dernières décennies et à plus de 8 milliards d'euros, pour chacune des prochaines années." (p.
"On avance un effectif de près de 600 000 sans-logis personnel, en France, représentant une situation de misère absolue et voués à l'accueil de divers "lieux d'errance". Il s'y adjoint le large éventail de situations de pauvreté, plus ou moins relative, en regard des normes nationales de confort. En 2011, l'Insee estime que le fléau d'un état de mal-logement touche près de 3 millions de personnes et M. Mouillart estime la pénurie en logements, entre 600 000 et 900 000 unités. Mais l'on chiffre à environ 1 million le nombre de demandeurs de logements, dont un tiers pour la seule région Ile-de-France. Il faudrait sans doute y adjoindre, en évitant les doubles comptes, une partie de près des 6 millions d'allocataires, soit un ménage sur trois, des diverses formules d'aide au logement locatif. C'est au total un effectif de l'ordre de 4 millions d'habitants qui, à partir du critère synthétique du mal-logement, constitue la masse des urbains connaissant les différentes formes de précarité et relève d'une politique de la ville." (p.12-13)
"Situations, plus aléatoires, des immigrés clandestins -estimés entre 300 000 et 400 000." (p.16)
"Les politiques de la ville consistent souvent plus à gérer des situations jugées inacceptables, plutôt qu'à pouvoir intervenir sur leurs causalités initiales qui pèsent fortement sur l'emploi et le logement, à l'échelle de toutes les agglomérations." (p.17)
"De l'ordre de 300 000 au début des années 2000, [le nombre de logements mis en chantier] s'est rapproché du demi-million entre 2004 et 2006, pour retomber en 2008 et approcher 400 000 en 2011. Cette baisse concerne surtout la construction aidée, qui ne représente annuellement, guère plus de 40% du total. Or la demande sur ce secteur n'a cessé de croître, alimentée par la formation de nouveaux ménages, par l'excédent migratoire et également par les phénomènes de vieillissement et de décohabitation -en Ile-de-France, par exemple, le quart des logements n'a qu'un occupant. Mais il faut aussi renouveler le parc ancien et rattraper les besoins non pourvus. On estime qu'il faudrait relever, chaque année, d'un minimum de quelque 45 000 unités la production de nouveaux logements ; [...]
-les difficultés de la copropriété concernent un nombre considérable de logements collectifs [...] Cette forme d'accession à la propriété avait été conçue, en 1965, comme facteur de progrès social et largement aidée, dans les années 1970 par des prêts, les PAP, accordées par les pouvoirs publics, aux ménages modestes, jusqu'en 1995, lorsque ce dispositif est supprimé. Ce régime est, aujourd'hui, celui du quart du parc immobilier national, mais nombre d'accédants se sont trouvés, depuis, en difficulté, tant par la chute du taux d'inflation qui facilitait les remboursements, que par leur manque de ressources, pour assumer les charges d'entretien. Il s'ensuit une montée des impayés et, en corollaire, la dégradation progressive des bâtiments. Les situations les plus préoccupantes s'observent dans certains quartiers anciens où de petites copropriétés ont de lourds impayés, mais plus encore dans de grands immeubles de cités périphériques comme le Val-Fourré près de Mantes, Grigny 2, Marseille-Nord, les Chamards à Dreux, Vénissieux à Lyon, ainsi qu'en ville nouvelle, comme les quartiers la Bastide et Saint-Christophe, à Cergy." (p.20)
"-le dilemme des organismes HLM. Expression majeure de l'Etat-providence, le parc social locatif représente près de 19% du parc immobilier national, soit quelque 4.2 millions de logements dans lesquels résident environ 13.5 millions de personnes et le tiers de ce patrimoine social se localise en Ile-de-France. Les 800 organismes HLM qui sont soit des établissements publics, soit des sociétés anonymes, soit des coopératives, relevant désormais de l'Union sociale de l'habitat (USH) et tous sont tenus d'équilibrer leur budget. Depuis les années 1980, tandis que le rythme de constructions neuves ralentissait, les responsables des organismes HLM se sont trouvés confrontés à des logiques contradictoires qui remettent en cause une mission initiale qui consistait à offrir du locatif, au-dessous des prix de marché, à des populations diversifiées, mais jouissant de revenus stables, quoique modestes. En effet, on observe, d'un côté, la mise en place des dispositifs financiers qui pénalisent les ménages aux revenus moyens, que l'on rend responsables du faible taux de rotation du parc locatif et l'on prévoit notamment l'instauration de surloyers. D'un autre côté, en réponse à la montée des situations de grande précarité, les pouvoirs publics, avec la loi Besson de 1990, puis à la suite de textes contre les exclusions et des pouvoirs donnés aux préfets, une ouverture systématique du logement social est donnée prioritairement aux catégories sociales considérées comme les plus démunies, même si elles sont peu ou pas solvables. Il est fait obligation aux organismes bailleurs, les HLM de leur réserver des logements, sur demandes de l'administration. Dans ce contexte, différentes formules d'assistance sélective sont assurées par le Fonds de solidarité-logement (FSL) géré par les caisses d'allocations familiales, mais alimenté par l'Etat et les collectivités locales." (p.21-23)
"L'insécurité dans les établissements scolaires a beaucoup progressé depuis une décennie, comme le montre le recensement national, à partir du logiciel Signa, avec une majorité d'incidents déclarés dans les établissements du secondaire, associant vols d'effets, de matériel à l'agression verbale ou physique des personnels, mais aussi des formes de vandalisme culminant avec des incendies volontaires. Sans doute faut-il relativiser le fait en notant que, sur un total de 75 000 écoles et établissements, 300 connaissent des difficultés récurrentes et une quarantaine est classée à haut risque. Mais leur localisation dans les académies de Versailles, Créteil, Lille, Lyon et Aix-Marseille suggère une forte corrélation avec des cités "sensibles" à très forte population issue de l'immigration (L. Mucchielli). Il semble, par ailleurs, que ces données officielles soient très inférieures à la réalité (E. Debarbieux)." (p.38-39)
-Claude Chaline, Les politiques de la ville, PUF, Que sais-je ?, 2011 (1997 pour la première édition), 127 pages.