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    Jean-Guy Prévost, De L'étude des Idées Politiques

    Johnathan R. Razorback
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    Jean-Guy Prévost, De L'étude des Idées Politiques Empty Jean-Guy Prévost, De L'étude des Idées Politiques

    Message par Johnathan R. Razorback Lun 23 Oct - 13:58

    https://books.google.fr/books?id=wRBJpbbAf5UC&pg=PA15&lpg=PA15&dq=choses+politiques&source=bl&ots=oGZzB-DcXc&sig=DpIErAtCDJs_zGXfXgQf-0MTrQk&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiuv6Gm8YbXAhXDMBoKHQsIBq0Q6AEIUjAH#v=onepage&q=choses%20politiques&f=false

    "Interprétation générale que propose Strauss de la pensée de Platon: il faudrait lire La République non pas le projet de la Cité idéale, mais précisément la démonstration du caractère utopique et de l'impossibilité d'une telle Cité. La Grande Tradition inaugurée par Socrate et Platon est donc marquée par la sobriété politique plutôt que par l'hubris. Cette imputation d'une intention ironique à Platon -qui va à rebours de l'opinion dominante chez les interprètes de Platon, pour qui les propositions politiques de ce dernier doivent être prises "au sérieux" -repose sur le caractère d'absurdité évidente -selon Strauss et Bloom- de l'Etat idéal décrit dans La République, tel qu'il s'exprime par exemple dans l'exigence qu'hommes et femmes aillent nus. Ce que la remarque de Burnyeat laisse entendre -et d'autres critiques abondent en ce sens-, c'est que Strauss (et Bloom) fondent leur interprétation sur une série de détails isolés de leur contexte." (p.18)

    "L'approche mise en avant par Strauss et ses disciples n'a pas manqué de susciter des critiques, parfois virulentes. On lui a reproché notamment d'évacuer complètement les circonstances historiques entourant la rédaction des œuvres. Ainsi, Pensées sur Machiavel, hormis quelques références à Savonarole, fait abstraction de l'Italie de la Renaissance. La plupart des chapitres de History of Political Philosophy ne nous fournissent à peu près aucun détail sur la biographie des auteurs considérés, sur les problèmes pratiques politiques et sociaux auxquels ils cherchaient à répondre ou sur le public auquel ils s'adressaient: leurs dates de naissance et de décès constituent pour ainsi dire les seuls points de repère auxquels peut se raccrocher le lecteur. [...] Si la philosophie politique a pour objet les questions pérennes, notamment celle du régime le meilleur, si la postérité est le public auquel s'adresse véritablement le philosophe, et surtout si l'exigence d'une compréhension historique de la philosophie politique n'est qu'un préjugé contemporain, alors non seulement l'évacuation de l'histoire est-elle justifiée, mais elle s'impose à titre de clarification. [...]
    Ceux qui refusent [la] primauté de l'idée sur l'histoire se retrouvent dès lors devant une double obligation. Ils doivent 1) formuler autrement la relation entre circonstances historiques et philosophie politique et 2) démontrer que cette nouvelle relation génère des aperçus différents et plus justes. Il existe un groupe d'auteurs qui, s'inspirant des travaux de Marx sur l'idéologie, se sont fixés une telle tâche. Pour eux, le contexte pertinent à l'étude des œuvres politiques n'est pas la tradition, mais l'environnement social et économique qui les a vues naître ; les philosophes politiques ne sont pas d'abord des esprits contemplatifs, mais bien
    "des partisans préoccupés de façon vitale par des problèmes politiques urgents originant de leurs propres contextes historiques et souvent eux-mêmes des acteurs politiques". La philosophie politique a donc "une nature fondamentalement idéologique" (Wood, 1972: 341-343). La relation que postulaient les straussiens est en quelque sorte inversée: les idées sont vues ici comme une rationalisation ou un reflet de la conduite et des intérêts des auteurs ou de la classe sociale dont ceux-ci se font les porte-parole." (pp.33-34)

    "Ainsi Lucien Goldmann (1959: 108-110) voit-il dans l'histoire de la philosophie un objet "inexistant et mal découpé": l'étude d'une œuvre suppose que celle-ci soit insérée dans une "totalité significative" et celle-ci ne peut être que "l'ensemble de [la] vie économique, sociale, politique et idéologique" d'un groupe social. On se trouve ici aux antipodes de la vision straussienne: la césure entre la philosophie politique, activité théorique centrée sur les questions éternelles et dotée de ses normes propres, et la pensée politique ou l'idéologie, activités partisanes centrées sur le hic et nunc, ne peut être maintenue." (p.35)

    "S'intéressant à Montesquieu, Louis Althusser (1964: 120) refuse d'endosser l'opinion, présente jusque chez Marx lui-même, qui voit en l'auteur de L'Esprit des lois un porte-parole de la bourgeoisie qui conquerra le pouvoir en 1789. Selon lui, Montesquieu -chez qui, note-il, on n'observe pas de recours à la théorie du contrat social, lieu commun des hérauts du nouvel ordre- exprime surtout un parti pris féodal, puisqu'il propose en somme à la monarchie de s'allier contre le peuple à une noblesse restaurée dans ses privilèges préabsolutistes. Les commentateurs qui ont vu chez Montesquieu une théorie de la séparation des pouvoirs ont construit un "mythe" dont le véritable contenu tient à ce compromis entre forces féodales: la suprématie de l'exécutif sur le législatif (par le veto), protège le roi contre le despotisme populaire, l'indépendance du judiciaire à l'égard de l'exécutif protège en revanche les nobles contre une éventuelle tyrannie, alors que la distinction entre une Chambre haute et une Chambre basse assure la domination de ces derniers sur le peuple. La thèse d'Althusser repose essentiellement sur une analyse historique qui situe "l'antagonisme fondamental" de cette époque dans l'opposition entre "le régime féodal [...] et [les] masses soumises à son exploitation" et, par conséquent, refuse de voir dans la bourgeoisie intégrée à l'appareil d'Etat de la monarchie absolue et au circuit économique qui en dépend "une classe radicalement antagoniste à la classe féodale" (p.117-118)." (p.36-37)
    -Jean-Guy Prévost, De l'étude des Idées Politiques, Presse de l'Université du Québec, 1995, 103 pages.



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