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    Laura Lo Presti, Terraqueous Necropolitics Unfolding the Low-operational, Forensic, and Evocative Mapping of Mediterranean Sea Crossings in the Age of Lethal Borders

    Johnathan R. Razorback
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    Message par Johnathan R. Razorback Sam 20 Fév - 17:22

    https://acme-journal.org/index.php/acme/article/view/1829


    "Prises ensemble dans une perspective amphibie, la territorialité et la liquidité des politiques frontalières dénotent l'émergence d'une nécropolitique terraqueuse. Dans ce qui suit, la nécropolitique terraqueuse prend deux sens. Elle configure l'espace dans lequel l'enceinte frontalière de la terre et la stratégie de report des opérations de sauvetage en mer se rejoignent pour créer un droit de tuer concerté, mais cette notion peut même s'appliquer à la mer elle-même. Dans le contexte de la migration des bateaux, la mer Méditerranée se configure en effet comme un ordre nécropolitique terraqueux à part entière.  Cela signifie qu'elle comprend l'agence de différentes territorialités aqueuses, c'est-à-dire de "souverainetés incertaines" (Cuttitta, 2018), qui sont à leur tour reconnues ou refusées pour contrôler ou différer les activités migratoires dans l'espace maritime, selon les intérêts des acteurs politiques impliqués. À cet égard, l'adjectif "terraqueux" a récemment été proposé dans l'histoire mondiale pour reconnaître que "le territoire ... peut être aquatique, de la même manière que les espaces aquatiques ont été et continuent d'être territorialisés" (Bashford, 2017, 262). En fusionnant les deux spatialités, la mer et les lieux terrestres tels que le désert ou les espaces semi-terrestres tels que les îles (Mountz, 2011) peuvent être idéalement territorialisés et déterritorialisés, possédés et dépossédés, et visibles et invisibles par les activités des acteurs étatiques et non étatiques en tant que stratégie de gouvernance des migrations." (p.1349)

    "L'intrusion dramatique des catégories de frontières et des organismes humains dans la mer est en effet en train de forger un espace inhumain fait de corps, de vestiges de bateaux et d'objets divers laissés par les migrants lors de leurs traversées en mer et parfois traînés jusqu'au rivage par la marée." (p.1351)

    "Les détenteurs de ce droit décentralisé de tuer sont principalement des États membres de l'UE. Dans l'ensemble, ils ont non seulement réduit leurs opérations de recherche et de sauvetage en mer depuis fin 2014, mais ils ont également criminalisé et entravé les activités de patrouille et de sauvetage des organisations non gouvernementales (ONG), en particulier dans le cas de l'Italie. Enfin, ils ont favorisé la collaboration avec plusieurs pays africains pour renforcer le confinement des migrants sur terre. De facto, les États membres de l'UE ont ralenti les opérations de recherche et de sauvetage en tirant parti de l'application incertaine du cadre réglementaire qui régit la souveraineté maritime et le sauvetage international en mer." (p.1351)

    "Un accord signé par l'Italie et la Libye en février 2017 a permis aux patrouilleurs libyens de participer à de prétendues opérations de recherche et de sauvetage, qui visent en fait à empêcher les migrants d'atteindre l'Europe plutôt qu'à les secourir. En conséquence, au cours des dernières années, la Libye a, à plusieurs reprises, attaqué des navires de sauvetage d'ONG, tant dans les eaux internationales que territoriales, avec le consentement tacite de l'Italie et en violation de la convention des Nations unies. Dix ans auparavant, un accord signé le 28 décembre 2007 entre l'Italie et la Libye avait déjà stipulé que l'Italie donnerait à la Libye un certain nombre de patrouilleurs, bien que la Libye se soit abstenue de participer à des patrouilles communes en Méditerranée (voir Paoletti, 2010). Cette coopération basée sur l'accord de 2007, ainsi que sur le traité d'amitié de 2008, a abouti à des retours forcés et à la fermeture presque totale de la route de la Libye en 2009/2010. Les responsabilités de l'Italie sont apparues en juillet 2017, lorsque l'ancien ministre italien de l'intérieur, Marco Minniti, a exigé la signature d'un code de conduite controversé pour les ONG (actives en mer depuis 2014), ce qui a réduit leur participation aux opérations de sauvetage. Avec l'opération Themis (lancée en février 2018), Frontex a finalement réduit le nombre de navires en mer et limité la zone d'intervention de l'Italie. Ce scénario est rendu encore plus alarmant par le fait que les ports italiens et maltais ont souvent été fermés pendant des jours ou des semaines aux acteurs non gouvernementaux et aux navires marchands transportant des migrants en détresse (dans le cas de l'Italie, des restrictions ont également été appliquées à sa propre marine). Le prétexte est celui de la prévention de nouveaux décès et de la lutte contre la traite des êtres humains, que ces mêmes ONG sont accusées de favoriser." (p.1352)

    "En fait, les opérations de recherche et de sauvetage devraient également être considérées comme des processus de territorialisation [...], parce que, grâce à l'assemblage synergique des acteurs humains, des technologies et de l'observation des conventions maritimes, ils transforment la mer amorphe en un espace cartographié et fonctionnel, prêt à faire l'objet d'une intervention." (pp.1352-1353)

    "En dehors des frontières de l'UE, la biopolitique moderne traduit la volonté de produire et de réguler la vie d'une population principalement par l'affirmation de la mort d'une autre (Esposito, 2016). En d'autres termes, l'Europe préserve sa prétendue intégrité culturelle et éthique en déléguant son droit souverain de tuer des milliers de migrants par an à d'autres acteurs (par exemple, en Libye) et à des instances non humaines, apparemment loin de ses rivages (dans les déserts et les camps). Elle produit aussi et surtout les conditions de vulnérabilité des migrants en interrompant ou en ralentissant les activités de recherche et de sauvetage.  En bref, les pays de l'UE, par leurs politiques, exercent sur eux [les migrants] un "pouvoir indirect de vie et de mort" (Foucault, 1990, 135)." (p.1353)
    -Laura Lo Presti, "Terraqueous Necropolitics", ACME: An International Journal for Critical Geographies, 2019, 18(6), 1347-1367. Retrieved from https://acme-journal.org/index.php/acme/article/view/1829





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