http://fr.wikipedia.org/wiki/Ayn_Rand
http://aynrandlexicon.com/lexicon/#A_index
http://en.wikipedia.org/wiki/Objectivism's_rejection_of_the_primitive#Arabs_versus_Israel
http://fr.liberpedia.org/Dichotomie_analytique-synth%C3%A9tique
http://www.fichier-pdf.fr/2013/11/01/ayn-rand-la-vertu-d-egoesme/ayn-rand-la-vertu-d-egoesme.pdf
L'extrémisme ou l'art de la délation: https://docs.google.com/document/d/1azCurWYBHFrmp_CdWxU6SXNvPSJJTTowq9sdd9jPiAw/edit
Le nouveau fascisme: le règne du consensus: http://lemennicier.bwm-mediasoft.com/displayArticle.php?articleId=217
Avant-propos à « La Vertu d’Égoïsme » : https://objectivismefr.wordpress.com/2017/11/27/avant-propos-a-la-vertu-degoisme/
François-René Rideau (traduction): La philosophie: qui en a besoin : http://fare.tunes.org/liberalisme/philo.html
Introduction à l'épistémologie objectiviste:
https://docs.google.com/document/d/1Bb9UtmCr4GH70kPxd5TB6tWruS54UbuwaFNLL4eVNIM/edit
https://docs.google.com/document/d/1jUDC9P3f40Oo7s78t7lLjSxQIe8e5epM3wNjrF_7GE8/edit
Les droits de l'homme: https://docs.google.com/document/d/1V-yLt4HLMLed6WCF2_DjrTkcLXgPQA3ViCyuBdaC5QE/edit
La Collectivisation des droits: https://docs.google.com/document/d/1g7bHkieFyYfT056NcE_P7IaVJKTqoSrE12NrrqSp3dc/edit
https://books.google.fr/books?id=pEn4LUKpGecC&pg=PT14&dq=ayn+rand&hl=fr&sa=X&ei=3huoVO7JLJPe7Abd6oDgDg&ved=0CCgQ6AEwADge#v=onepage&q=ayn%20rand&f=false
http://fr.liberpedia.org/Objectivisme
http://fr.liberpedia.org/Les_enseignements_philosophiques_de_Ayn_Rand
"Matter is indestructible, it change its forms, but it cannot cease to exist."
-The Objectivist Ethics.
"JE SUIS, JE PENSE, JE VEUX.
Mes mains... Mon esprit... Mon ciel... Ma forêt... Cette terre qui est mienne. Que dois-je dire de plus ? Ce sont les mots. C'est la réponse.
Je me tiens ici debout au sommet de la montagne. Je lève la tête et je tends les bras. Ceci, mon corps et mon âme, tout ceci représente la fin de la quête. Je désirais connaître le sens des choses. Je suis le sens. Je voulais découvrir ma raison d'être. Je n'ai nul besoin de raison d'être, ni d'autorisation pour mon existence. Je suis la raison d'être et l'autorisation.
Ce sont mes yeux qui voient, et la vision de mes yeux accorde sa beauté à la terre. Ce sont mes oreilles qui entendent, et l'ouïe de mes oreilles offre au monde sa musique. C'est mon esprit qui pense, et le jugement de mon esprit est le seul phare qui puisse éclairer la vérité. C'est ma volonté qui choisit, et le choix de ma volonté est le seul verdict que je me dois de respecter.
De nombreux mots me furent accordés, quelques-uns sont sages et d'autres sont trompeurs, mais trois seulement sont sacrés : « Je le veux ! »
Quelle que soit ma route, la bonne étoile est avec moi : la bonne étoile est la boussole qui m'indique le chemin. Elle n'indique qu'une seule direction. Et cette direction, c'est moi.
J'ignore si cette terre sur laquelle je me trouve est le cœur de l'univers, ou si elle n'est qu'un grain de poussière perdu dans l'éternité. Je l'ignore, et cela m'est égal, car je sais quel bonheur m'est possible sur cette terre. Et mon bonheur n'a pas à se justifier. Mon bonheur n'est pas un moyen d'arriver à une quelconque fin. Il est la fin. Il est son propre but. Il est sa propre raison d'être.
Je ne suis pas non plus un moyen d'arriver à une fin que d'autres voudraient atteindre.
Je ne suis pas un instrument à leur disposition.
Je ne suis pas un serviteur de leurs exigences. Je ne suis pas un baume pour leurs plaies. Je ne suis pas un sacrifice sur leur autel.
Je suis un homme. Je me dois de posséder et conserver, de défendre, d'utiliser, de respecter et de chérir ce miracle.
Je n'abandonne ni ne partage mes trésors. La richesse de mon cerveau ne doit pas être gaspillée en pièces de bronze jetées en aumône, à tous vents, aux pauvres d'esprits. Je défends mes trésors : ma pensée, ma volonté, ma liberté. Et le plus précieux est ma liberté.
Je ne dois rien à mes frères, je ne suis pas leur créancier. Je ne demande à personne de vivre pour moi et je ne vis pas non plus pour les autres. Je ne convoite l'âme d'aucun homme, tout comme mon âme n'a pas à être convoitée.
Je ne suis ni l'ami, ni l'ennemi de mes frères, mais l'un ou l'autre, suivant ce qu'ils méritent. Pour mériter mon amour, mes frères doivent avoir fait plus que se contenter d'être nés. Je n'accorde pas mon amour sans raison, ni à quelque passant qui se hasarderait à le réclamer. J'honore les hommes de mon amour. Mais l'honneur doit se mériter.
Je choisirai des amis parmi les hommes, mais jamais d'esclave ni de maître. Et je ne choisirai que ceux qui me plairont; à eux je montrerai amour et respect, mais jamais domination ni obéissance. Et nous joindrons nos mains lorsque nous le déciderons, ou marcherons seuls si nous le désirons. Car dans le temple de son esprit, chaque homme est seul. Que chaque homme garde son temple pur et intact. Qu'il rejoigne d'autres hommes, qu'il les prenne par la main, s'ils le désirent, mais seulement au-delà de ce seuil sacré.
Car le mot « Nous » ne doit jamais être prononcé, sauf par choix personnel et après réflexion. Ce mot ne doit jamais être privilégié dans l'âme d'un homme, ou il devient monstrueux, l'origine de tous les maux sur terre, l'origine de la torture de l'homme par l'homme et d'une innommable duperie.
Le mot « Nous » est comme de la chaux vive versée sur les hommes, qui se contracte et durcit comme la pierre, écrase tout ce qui se trouve au-dessous, mêlant le noir et le blanc dans son gris. C'est le mot grâce auquel les dépravés volent la vertu des hommes droits, grâce auquel les faibles volent la force des forts, grâce auquel les imbéciles volent la sagesse des sages.
Quelle joie en tirer, si toutes les mains, même impures, peuvent l'atteindre ? Quelle sagesse, si même les imbéciles peuvent me donner des ordres ? Quelle liberté, si toutes les créatures, même les incapables et les impuissants, sont mes maîtres ? Quelle vie, si je ne fais que m'incliner, approuver et obéir ?
Mais j'en ai fini de ce culte de la corruption. J'en ai fini de ce monstre du « Nous », mot de la servitude, du pillage, de la misère, du mensonge et de la honte.
Et je vois maintenant le visage de dieu, et j'élève ce dieu au-dessus de la terre, ce dieu que les hommes cherchent depuis qu'ils existent, ce dieu qui leur accordera joie, paix et fierté.
Ce dieu, ce mot unique, c'est « JE »." -Ayn Rand, Hymne.
« Je peux dire que tous les livres que j'écrirai jamais seront toujours voués à la défense de la cause de l'individu » -Ayn Rand, Ayn Rand Letters, 5/7/1943.
"We'll have to save capitalism from the capitalists." -Ayn Rand, Lettre à Isabel Paterson, 28 août 1945.
"S'il était vrai que la dictature est inévitable et que le fascisme et le communisme sont les deux « extrêmes » au bout de notre course, alors quel serait le choix le plus sûr ?
Eh bien, le centre mou ! Le centre, avec la sécurité indéfinie, indéterminée, de son économie mixte avec un degré « modéré » de privilèges étatiques pour les riches et un montant « modéré » de subventions étatiques pour les pauvres ; avec un respect « modéré » pour les droits et une dose « modérée » de force brute ; avec une mesure « modérée » de liberté et un degré « modéré » d’esclavage ; avec un degré « modéré » de justice et un degré « modéré » d'injustice ; avec un degré « modéré » de sécurité et un degré « modéré » de terreur, et avec un degré modéré de tolérance pour tous, sauf pour ces « extrémistes » qui défendent les principes, la cohérence, l'objectivité, la morale, et qui refusent les compromis.
La notion de compromis comme la vertu suprême qui l’emporte sur tout le reste est l'impératif moral, la condition préalable d'une économie mixte. Une économie mixte est un mélange explosif, instable de deux éléments opposés, qui ne peut demeurer en l’état mais doit finir par glisser dans un sens ou dans l'autre ; c'est un mélange de liberté et d’autoritarisme, ce qui veut dire : non pas de fascisme et de communisme, mais de capitalisme et d’étatisme (dans toutes ses variantes). Dans leur panique, ceux qui souhaitent prolonger ce statu quo intenable et en pleine désintégration, hurlent qu’on pourrait le faire en éliminant les deux « extrêmes » de ses composants essentiels, mais ces deux extrêmes-là sont : le capitalisme, ou la dictature totale.
[...] C’est là que nous pouvons voir les racines profondes, la source qui a rendu possible la propagation de ces « anticoncepts ».
Ce sont ces névrosés mentalement paralysés, anxieux, produits par la désintégration de la philosophie moderne avec son culte de l'incertain, son irrationalisme épistémologique et son subjectivisme normatif, qui sortent de nos universités, brisés d’avance par une terreur chronique et cherchant échapper à l'absolutisme de la réalité qu’ils se sentent incapables d’affronter.
C’est la peur qui les pousse à s'associer à d’habiles et pragmatiques manipulateurs et professionnels de la politique pour rendre le monde plus sûr pour les médiocres, en élevant au statut d'un idéal moral le citoyen archétypique d'une économie mixte : le mollasson docile, malléable, modéré qui jamais ne s'excite ni ne fait d’histoires, ne s’en fait jamais trop, s'adapte à tout et ne se bat pour rien.
La meilleure preuve possible de l'effondrement d'un mouvement intellectuel apparaît le jour où il n'a plus rien à offrir comme idéal ultime qu’un plaidoyer pour la « modération ». La voilà bien, la preuve définitive de la faillite du collectivisme."
-Ayn Rand, L'extrémisme ou l'art de la délation (1964).
"Qu’est-ce que la moralité, ou l’éthique ? C’est un code de valeurs pour guider les choix et actions de l’homme, qui déterminent le but et le cours de sa vie. L’éthique, en tant que science, a pour objet la découverte et la définition d’un tel code.
La première question à laquelle on doit répondre, comme condition préalable à toute tentative de définir, de juger ou d’accepter quelque système éthique que ce soit, est : Pourquoi l’homme a-t-il besoin d’un code de valeurs ?
J’insiste sur ce point. La première question n’est pas : quel code de valeurs particulier l’homme doit-il accepter ? Mais : l’homme a-t-il ou non besoin d’un code de valeurs, et pourquoi ?
Le concept de valeur, du « bon » et du « mauvais », est-il une invention humaine arbitraire, un concept n’ayant aucune relation avec les faits de la réalité, dont la source ne proviendrait pas d’eux ni ne serait fondé sur eux, ou est-il fondé sur un fait métaphysique, une condition invariable de l’existence de l’homme ? (J’utilise le terme « métaphysique » pour signifier ce qui concerne la réalité, la nature des choses, l’existence.) Le fait que l’homme doit guider ses actions suivant un ensemble de principes, est-il décrété par une convention humaine arbitraire, une simple coutume, ou existe-t-il un fait de la réalité qui l’exige ? L’éthique est-elle du domaine de l’irrationnel (caprices, émotions personnelles, contraintes sociales, révélations mystiques), ou du domaine de la raison ? L’éthique est-elle un luxe subjectif, ou une nécessité objective ?
Dans les tristes annales de l’histoire de l’éthique, les moralistes ont, sauf en de très rares et infructueuses exceptions, considéré l’éthique comme étant du domaine de l’irrationnel. Certains l’ont fait d’une manière explicite, intentionnellement ; d’autres, implicitement, par défaut. Est « irrationnel » le désir ressenti par une personne qui n’en connaît pas la cause et ne tient pas à la connaître.
Aucun philosophe n’a donné une réponse scientifique, objectivement démontrable et rationnelle à la question : Pourquoi l’homme a-t-il besoin d’un code de valeurs ? Aussi longtemps que cette question demeura sans réponse, aucun code éthique objectif, scientifique et rationnel n’a pu être découvert ou défini. Le plus grand de tous les philosophes, Aristote, ne considérait pas l’éthique comme une science exacte ; il fonda son système éthique sur l’observation de ce que les hommes sages de son temps choisissaient de faire, laissant sans réponses les questions suivantes : qu’est-ce qui motivait leurs choix ? et pourquoi considérait-il ces hommes comme sages ?
La plupart des philosophes ont considéré l’existence de l’éthique comme allant de soi, comme un fait historique, sans se préoccuper de découvrir sa cause métaphysique ou sa validation objective. Beaucoup d’entre eux tentèrent de briser le monopole traditionnel du mysticisme dans le domaine de l’éthique et de définir une moralité non-religieuse, scientifique et rationnelle.
Mais leurs tentatives reposèrent sur l’acceptation des doctrines éthiques des mystiques, en les justifiant à l’aide de motifs sociaux, substituant ainsi simplement la société à Dieu.
Les mystiques déclarés considéraient l’inexplicable et arbitraire « volonté de Dieu » comme la norme de « ce qui est bon » et comme la validation de leur éthique. Les néomystiques substituèrent « la volonté de Dieu » par « ce qui est bon pour la société », s’enfonçant ainsi dans le cercle vicieux d’une définition telle : « la norme de ce qui est bon est ce qui est bon pour la société ». En toute logique (et aujourd’hui il s’agit d’une pratique répandue partout à travers le monde), cela signifie que la « société » est au-dessus de tout principe éthique, puisqu’elle est la source, la norme et le critère de l’éthique, et que « ce qui est bon » est tout ce qu’elle veut ou considère comme étant favorable à son bien-être ou à son plaisir. Cela signifie que la « société » peut faire tout ce qu’elle veut, puisque tout ce qu’elle choisit de faire est « bon », justement parce qu’elle l’a choisi. Et, puisque la « société » n’est pas une entité comme telle mais seulement un certain nombre d’hommes individuels, cela signifie que quelques-uns d’entre eux (la majorité ou n’importe quel gang qui prétende en être le porte-parole) ont, du point de vue éthique, le droit de réaliser tous leurs désirs (ou atrocités), alors que d’autres sont, toujours du point de vue éthique, obligés d’être à leur service toute leur vie.
Il est difficile de parler de rationalité. Aujourd’hui, la plupart des philosophes affirment que la raison est en faillite, que l’éthique se situe hors des limites de la raison, qu’une éthique rationnelle ne peut être formulée, et que, dans le domaine de l’éthique (c’est-à-dire dans le choix de ses valeurs, de ses actions, de ce qu’il recherche, de ses objectifs vitaux), l’homme doit être guidé par autre chose que la raison. Par quoi ? Par la foi, l’instinct, l’intuition, la révélation, les émotions, les goûts, les pulsions, les désirs ou les caprices ; bref, par l’irrationnel. Aujourd’hui comme avant, la plupart des philosophes conviennent que la norme ultime de l’éthique est l’irrationnel, qu’ils nomment « postulat arbitraire », « choix subjectif » ou « engagement émotionnel ». La seule question étant de savoir quel irrationnel devrait être retenu : le nôtre, celui de la société, du dictateur ou de Dieu ? Quel que soit leur point de divergence, les moralistes contemporains s’entendent tous pour dire que l’éthique est une question subjective et que trois choses ne font pas partie de son domaine : la raison, l’esprit et la réalité.
Si vous vous demandez pourquoi le monde va de plus en plus mal, voilà la raison.
Si vous voulez sauver la civilisation, c’est cette prémisse de l’éthique moderne (comme de toute l’histoire de l’éthique) que vous devez remettre en question.
Pour remettre en question la prémisse fondamentale de n’importe quelle discipline, on doit commencer par le commencement. En éthique, on doit commencer par poser les questions suivantes : Que sont les valeurs ? Pourquoi l’homme en a-t-il besoin ?
Une « valeur » est ce pourquoi l’on entreprend une action pour acquérir et (ou) conserver quelque chose. Le concept de « valeur » n’est pas un primat ; il présuppose une réponse à la question : une valeur pour qui et pour quoi ? Il présuppose une entité capable d’agir pour atteindre un but en face d’une alternative. Là où il n’y pas d’alternative, aucun but ni aucune valeur n’est possible.
[...]
Maintenant, de quelle façon un être humain découvre-t-il le concept de « valeur » ? De quelle façon prend-il d’abord conscience de ce qui est « bon » et de ce qui est « mauvais » dans sa forme la plus simple ? Par les sensations physiques de plaisir et de douleur. De la même façon que les sensations constituent la première étape du développement d’une conscience humaine dans le domaine de la connaissance, elles constituent la
première étape dans le domaine de l’évaluation.
La capacité de faire l’expérience du plaisir ou de la douleur est innée dans le corps de l’homme ; cela fait partie de sa nature, du genre d’entité qu’il est. Il n’a aucun choix à cet égard, ni sur la norme qui détermine ce qui lui procurera une sensation physique de plaisir ou de douleur. Quelle est cette norme ? Sa vie.
[...]
Un organisme qui possède uniquement la faculté sensorielle est guidé par le mécanisme du plaisir et de la douleur propre à son corps, c’est-à-dire par une connaissance et un code de valeurs automatiques. Sa vie est le fondement des valeurs dirigeant ses actions. Dans la sphère des actions qui lui sont possibles, il choisit automatiquement les actions qui préservent sa vie, et rejette celles qui le mèneraient à sa propre destruction.
Les espèces conscientes supérieures possèdent une forme de conscience beaucoup plus développée : elles possèdent la faculté de retenir les sensations, c’est-à-dire la faculté de la perception. Une « perception » est un groupe de sensations automatiquement retenues et intégrées par le cerveau d’un organisme vivant, lui donnant ainsi la capacité d’être conscient non pas d’un seul stimulus, mais d’entités, de choses. Un animal est guidé non seulement par des sensations immédiates, mais par des percepts. Ses actions ne sont pas de simples réponses à des stimuli spécifiques et séparés, mais sont dirigées en fonction d’une conscience intégrée de la réalité perceptuelle à laquelle l’animal fait face. Il est capable de saisir les réalités concrètes perceptuelles immédiatement présentes et est capable de former des associations perceptuelles automatiques, mais ne peut faire plus. Il est capable d’apprendre certaines habiletés pour faire face à certaines situations spécifiques, comme chasser ou se cacher. Dans le cas des animaux plus évolués, ces habiletés sont enseignées aux jeunes par les parents. Mais un animal n’a pas le choix des connaissances et des habiletés qu’il acquiert ; il ne peut que les répéter génération après génération. Et un animal n’a pas le choix de la norme des valeurs dirigeant ses actions : ses sens lui procurent un code de valeurs automatique, c’est-à-dire une connaissance automatique de ce qui est bon ou mauvais pour lui, de ce qui est favorable à sa vie ou de ce qui la met en danger. Un animal n’a pas le pouvoir d’accroître ses connaissances ou de ne pas en tenir compte. Dans les situations où ses connaissances sont inadéquates, il périt ; comme dans le cas de l’animal qui reste paralysé sur une voie de chemin de fer à l’arrivée d’un train. Mais tant qu’il vit, un animal se sert de ses connaissances, ce qui représente pour lui une sécurité automatique, mais aucun pouvoir de choix : il ne peut suspendre sa propre conscience, il ne peut pas choisir de ne pas percevoir, il ne peut pas éviter ses propres perceptions, il ne peut pas ignorer ce qui est bon pour lui, et ne peut choisir ce qui est mauvais et agir contre son propre intérêt.
L’homme n’a pas de code de survie automatique. Il n’a Il n’a pas de processus d’action ou d’ensemble de valeurs automatiques. Ses sens ne lui dictent pas automatiquement ce qui est bon ou mauvais pour lui, ce qui est favorable à sa vie ou la met en danger, quels objectifs il doit poursuivre et les moyens qui lui permettraient de les atteindre, les valeurs dont dépend sa vie, ou le processus d’action qu’il doit suivre. Sa propre conscience doit découvrir les réponses à toutes ces questions. Mais sa conscience ne fonctionnera pas automatiquement. Malgré le fait qu’il soit l’espèce vivante la plus évoluée sur terre, et un être dont la conscience possède une capacité infinie pour acquérir des connaissances, l’homme est la seule entité vivante née sans aucune garantie de demeurer conscient. Ce qui distingue particulièrement l’homme de toutes les autres espèces vivantes est le fait que sa conscience peut vouloir.
[...] Les actions de l’homme, de même que sa survie, nécessitent qu’elles soient guidées en fonction de valeurs conceptuelles, elles-mêmes découlant d’une connaissance conceptuelle. Mais une connaissance conceptuelle ne peut être acquise automatiquement.
Le processus de formation des concepts ne consiste pas simplement à saisir quelques abstractions simples, comme « chaise », « table », « chaud », « froid », ou même comme le fait d’apprendre à parler. C’est une méthode d’utilisation de sa conscience, mieux désignée par le terme « conceptualisation ». Ce n’est pas un état passif d’enregistrement d’impressions aléatoires. C’est un processus activement entretenu qui consiste à identifier ses impressions en termes conceptuels, à intégrer chaque événement et chaque observation dans un contexte conceptuel, à saisir des relations, des différences et des similitudes dans notre matériel perceptuel et à les abstraire en nouveaux concepts, à tirer des inférences, faire des déductions et atteindre des conclusions, à se poser de nouvelles questions et découvrir de nouvelles réponses, développant ainsi continuellement la somme de nos connaissances. La faculté qui dirige ce processus et qui fonctionne au moyen de concepts, est la raison. Le processus est la pensée.
La raison est la faculté qui identifie et intègre le matériel fourni par les sens de l’homme. C’est une faculté que l’homme doit exercer par choix. Penser n’est pas une fonction automatique. En tout moment et dans toutes les circonstances de sa vie, l’homme est libre de penser ou d’éviter cet effort. Penser nécessite un état de conscience d’une complète concentration. L’acte de concentrer notre conscience est volontaire. L’homme peut concentrer son esprit et développer une conscience de la réalité qui soit complète, active, et délibérément orientée ; ou il peut ne pas se concentrer et se laisser dériver dans un état de stupeur semi-consciente, réagissant simplement aux stimuli qui se présentent à lui à tout moment, et à la merci des aléas [...]
Pour l’homme, le moyen fondamental de survie est la raison. L’homme ne peut survivre, comme le font les animaux, au moyen des seuls percepts. Une sensation de faim lui indiquera qu’il a besoin de nourriture – si, au préalable, il a appris à identifier cette sensation comme telle ; toutefois, cette sensation ne lui indiquera nullement comment obtenir sa nourriture, ni si elle sera bonne ou mauvaise pour lui. L’homme ne peut satisfaire ses besoins physiques les plus élémentaires sans un processus rationnel. Ce processus lui est nécessaire pour savoir comment cultiver sa nourriture et fabriquer ses outils de chasse. Ses percepts pourraient le conduire à une caverne (s’il y en a une de disponible) ; mais même pour construire le plus simple des abris, il a besoin de la pensée rationnelle. Aucun percept ni aucun « instinct » ne lui indiquera comment allumer un feu ou tisser des vêtements, comment fabriquer des outils, une roue ou un avion, comment réussir une appendicectomie, comment produire une ampoule électrique, un tube électronique, un cyclotron, ou une boîte d’allumettes. Pourtant sa vie dépend de telles connaissances, et seul un acte volontaire de sa conscience, un processus rationnel, le lui
procurera.
Mais la responsabilité de l’homme va encore plus loin : la pensée rationnelle n’est pas automatique, ni « instinctive », ni involontaire, ni infaillible. L’homme doit en prendre l’initiative, l’entretenir et en être responsable pour en supporter les conséquences. Il doit découvrir comment reconnaître le vrai du faux, comment corriger ses propres erreurs, et comment valider ses concepts, ses conclusions et sa connaissance. Bref, il doit découvrir les règles de la pensée et les lois de la logique, pour diriger sa pensée.
[...]
Un être qui ne sait pas automatiquement ce qui est vrai ou faux, ne peut savoir automatiquement ce qui est bien ou mal, ce qui est bon ou mauvais pour lui. Pourtant, il a besoin de cette connaissance pour vivre. Il n’est pas exempt des lois de la réalité. Il est un organisme spécifique, d’une nature spécifique et qui a besoin, en conséquence, d’actions spécifiques pour se maintenir en vie. Ce qu’il ne peut faire par des moyens arbitraires, des choix aléatoires ou des envies irrésistibles, ni par chance ou par caprice. Ce qui est requis pour sa survie est déterminé par sa nature ; à cet égard, il ne dispose d’aucun choix. Les seuls choix auxquels il doit faire face sont de savoir s’il découvrira ou non ce qui est requis pour sa survie, c’est-à-dire sa nature, et s’il choisira les bons objectifs et les bonnes valeurs ou non. L’homme est libre de faire de mauvais choix, mais non de réussir s’il en fait. L’homme est libre de fuir la réalité, de ne pas concentrer son esprit et de dévaler aveuglément toutes sortes de routes sinueuses et escarpées, mais pas d’éviter l’abîme qu’il refuse de voir. [...]
L’homme est libre de choisir de ne pas être conscient, mais non d’échapper aux conséquences de son inconscience : la destruction. L’homme est la seule espèce vivante qui a le pouvoir d’agir comme son propre fossoyeur. Et c’est la façon dont il a agi la plupart du temps au cours de son histoire. Quels sont, alors, les bons objectifs que l’homme doit poursuivre ? Quelles sont les valeurs que sa survie exige ? Voilà les questions auxquelles doit répondre cette science qu’est l’éthique. Et voilà pourquoi l’homme a besoin d’un code éthique.
Vous êtes maintenant en mesure d’évaluer la signification des doctrines qui prétendent que l’éthique est du domaine de l’irrationnel, que la raison ne peut guider la vie de l’homme, que ses objectifs et ses valeurs devraient être choisis par scrutin ou par caprice, que l’éthique n’a rien à voir avec la réalité, l’existence, nos actions et préoccupations pratiques, que le but de l’éthique se trouve dans l’au-delà et que ce sont les morts qui en ont besoin, et non les vivants.
L’éthique n’est pas une fantaisie mystique, ni une convention sociale, ni un luxe dispendieux et subjectif à écarter en cas d’urgence. L’éthique est une nécessité objective et métaphysique de la survie de l’homme, et ce, non par la grâce d’une quelconque force surnaturelle ou de désirs irrationnels (les vôtres ou ceux des autres), mais par la grâce de la réalité et de la nature de la vie.
[...]
Bien que certains hommes tentent de survivre au moyen de la force brute ou par la fraude, le pillage, le vol ou le mensonge, ou en asservissant ceux qui produisent, le fait demeure que leur survie n’est rendue possible que par leurs victimes, c’est-à-dire ceux qui choisissent d’utiliser leur faculté rationnelle et de produire les biens qu’ils confisquent. De tels pilleurs sont des parasites incapables de survivre, et qui n’existent qu’en détruisant ceux qui sont capables, c’est-à-dire ceux qui suivent un processus d’action qui convienne à l’homme.
Les hommes qui tentent de survivre, non pas au moyen de la raison mais au moyen de la force, tentent de survivre comme le font les animaux. Mais de la même manière que les animaux ne pourraient survivre en tentant de le faire avec les moyens qui conviennent aux plantes, c’est-à-dire en restant là sans bouger et en attendant que le sol les nourrisse, les hommes ne peuvent survivre en tentant de le faire comme le font les animaux, en rejetant la raison et en comptant que les hommes productifs les servent selon leurs désirs. De tels pilleurs ne peuvent atteindre leurs buts que momentanément, et au prix de la destruction de leurs victimes et de la leur.
[...]
L’homme ne peut survivre, comme un animal, dans l’éphémère et le provisoire. La vie d’un animal consiste en une série de cycles bien définis, sans cesse répétés, comme l’élevage des petits, l’accumulation de la nourriture pour l’hiver, etc. ; la conscience d’un animal ne peut intégrer l’ensemble de la durée de sa vie ; l’animal ne peut que répéter les cycles l’un après l’autre, sans pouvoir faire de liens avec le passé. La vie de l’homme est un tout continu : pour le meilleur et pour le pire, chaque jour, chaque année et chaque décennie de sa vie porte en lui la somme de toutes ses expériences passées. Il peut modifier ses choix, et est libre de changer la voie qu’il suit ; il est même libre, dans plusieurs cas, d’expier les fautes de son passé, sans être libre, toutefois, de s’en échapper, ni de vivre sa vie, comme un animal, un play-boy ou une brute, dans l’éphémère et le provisoire sans en subir les conséquences. Pour réussir à survivre et pour faire en sorte que ses actions ne le conduisent pas à sa propre perte, l’homme doit choisir sa voie, ses objectifs et ses valeurs en fonction et dans un contexte de long terme, c’est-à-dire en prenant en considération l’ensemble de sa vie. Aucune sensation, percept, désir ou « instinct » ne peut le faire ; seul un esprit conscient le peut.
Voilà la signification de la définition énoncée plus haut : ce qui est requis pour la survie de l’homme en tant qu’homme. Il ne s’agit pas d’une survie momentanée ou simplement physique. Il ne s’agit pas de la survie physique momentanée d’une brute stupide, attendant qu’une autre brute lui brise le crâne. Il ne s’agit pas de la survie physique momentanée d’un idiot musclé qui est prêt à accepter n’importe quelles contraintes, obéir au premier gangster venu et abandonner toutes ses valeurs, pour ce qu’il est convenu d’appeler « survivre à tout prix », et qui pourrait bien ne durer qu’un temps limité. « La survie de l’homme en tant qu’homme » signifie les exigences, les méthodes, les conditions et les objectifs requis pour la survie d’un être rationnel en fonction de l’ensemble de la durée de sa vie, et en tenant compte de tous les aspects de son existence qui sont
susceptibles de choix.
L’homme ne peut survivre autrement qu’en tant qu’homme. Il peut abandonner son moyen de survie, c’est-à-dire son esprit, il peut s’abaisser à devenir une créature sous-humaine, et il peut faire de sa vie un enfer, le temps que son corps résiste au processus de désintégration auquel il se soumet. Mais en tant que sous-humain, il ne peut réussir qu’à accomplir ce qui est sous-humain, comme le démontrent les atrocités perpétrées au cours des périodes antirationnelles de l’histoire de l’humanité. C’est par choix que l’homme doit être homme, et la tâche de l’éthique est de lui enseigner comment vivre en homme.
L’éthique objectiviste considère la vie de l’homme comme le fondement de toute valeur, et sa propre vie comme le but éthique de chaque individu.
[...]
L’homme doit choisir ses actions, ses valeurs et ses buts en fonction de la norme de ce qui convient à l’homme, de façon à accomplir, conserver, réaliser cette valeur ultime, et cette fin en soi qu’est sa propre vie, et en jouir.
Une valeur est ce pourquoi l’on entreprend une action pour acquérir et (ou) conserver quelque chose. Une vertu est l’action par laquelle on l’acquiert et (ou) la conserve. Les trois valeurs cardinales de l’éthique objectiviste sont la raison, l’intentionnalité et l’estime de soi. Ces trois valeurs sont, ensemble, à la fois le moyen de réaliser et la réalisation de cette valeur ultime qu’est notre propre vie. Leurs vertus correspondantes sont la rationalité, la productivité et la fierté.
Le travail productif est le but central de la vie d’un homme rationnel, la valeur centrale qui intègre et détermine la hiérarchie de toutes ses autres valeurs. La raison est la source, la condition préalable de son travail productif, et la fierté, le résultat.
La rationalité est la vertu fondamentale de l’homme, la source de toutes ses autres vertus. Le vice fondamental de l’homme, la source de tous ses maux, est l’acte de ne pas concentrer son esprit, de « suspendre » sa conscience, c’est-à-dire non d’être aveugle, mais de refuser de voir ; non d’être ignorant, mais de refuser de savoir. L’irrationalité est le rejet du moyen de survie de l’homme, et, par conséquent, un engagement dans la voie de l’autodestruction. Ce qui est contre l’esprit est contre la vie.
[...]
Nous ne devons jamais sacrifier nos opinions aux convictions ou aux désirs irrationnels des autres (ce qui constitue la vertu de l’intégrité) ; [...] nous ne devons jamais tenter de falsifier la réalité de quelque façon que ce soit (ce qui constitue la vertu de l’honnêteté) ; et [...] nous ne devons jamais chercher à nous approprier ou à nous octroyer ce que nous ne méritons pas ou ce qui ne nous revient pas de droit, que ce soit dans le domaine matériel ou spirituel (ce qui constitue la vertu de la justice).
[...]
Le travail productif est le chemin qui permet à l’homme de réaliser tout ce qu’il désire, et fait appel aux plus hauts attributs de son caractère : son habileté créatrice, son ambition, sa confiance en soi, son refus de se laisser abattre par les catastrophes et son dévouement à l’objectif de refaçonner la terre à l’image de ses valeurs. « Travail productif » ne signifie pas la répétition machinale des mouvements d’un travail quelconque. Il signifie le fait de choisir consciencieusement une carrière productive et de s’y adonner au meilleur de ses capacités, quel que soit le domaine d’activité rationnel, qu’il soit grand ou modeste. Ce n’est pas le degré d’habileté d’un homme ni la portée de son travail qui est éthiquement pertinent ici, mais le fait qu’il utilise ou non son esprit de la manière la plus complète et la plus réfléchie possible.
[...]
L’expression « ambition morale » est la meilleure façon de désigner la vertu de fierté. Cela signifie que l’on doit mériter le droit de se considérer soi-même comme notre plus grande valeur en réalisant notre propre perfection morale, c’est-à-dire en refusant d’accepter tout code fondé sur des vertus irrationnelles qui seraient impossibles à pratiquer, et en s’assurant de pratiquer celles qui le sont, en refusant toute culpabilité imméritée, en ne s’y exposant pas et en corrigeant promptement celle que l’on aurait pu mériter, en ne se résignant jamais passivement aux défauts de notre caractère, et en ne laissant jamais quelque inquiétude, caprice, crainte ou humeur momentanée que ce soit l’emporter sur notre propre estime de soi. Et enfin, par-dessus tout, la perfection morale s’accomplit en refusant de jouer le rôle d’un animal sacrificiel et en refusant toute doctrine qui prêche l’auto-immolation
comme une vertu ou un devoir moral.
Le principe social fondamental de l’éthique objectiviste est que tout comme la vie est une fin en soi, chaque être humain vivant est une fin en lui-même, non le moyen pour les fins ou le bien-être des autres. Ainsi, l’homme doit vivre pour son propre intérêt, ne sacrifiant ni lui-même aux autres, ni les autres à lui-même. Vivre pour son propre intérêt signifie que l’accomplissement de son propre bonheur est le plus haut but moral de l’homme.
[...]
La tâche de l’éthique est de définir le code de valeurs qui convient à l’homme pour ainsi lui donner le moyen d’atteindre le bonheur. Déclarer, comme le font les partisans de l’éthique hédoniste que « tout ce qui vous fait plaisir est une valeur adéquate » revient à déclarer que vous pouvez valoriser tout ce que vous voulez, ce qui est un acte d’abdication intellectuelle et philosophique, un acte qui ne fait que démontrer la futilité de l’éthique et invite tous les hommes à en jouer sauvagement.
Les philosophes qui ont tenté d’élaborer un soi-disant code éthique rationnel n’ont donné à l’humanité que le choix entre deux éthiques fondées sur les désirs irrationnels : soit la poursuite « égoïste » de nos propres désirs irrationnels (comme l’éthique de Nietzsche par exemple), soit le service « altruiste » aux désirs irrationnels des autres (comme les éthiques de Bentham, de Mill, de Comte, et de tous les hédonistes sociaux, qui permettent à l’homme de noyer ses propres désirs irrationnels parmi ceux des millions d’autres, ou qui lui recommandent de s’abaisser à devenir une mauviette totalement désintéressée qui ne cherche qu’à se faire dévorer par les autres).
Quand un « désir », sans égard à sa nature ou à sa cause, est utilisé comme primat éthique, et que l’assouvissement de n’importe lequel et de tous les désirs est considéré comme un but éthique (tel que « le plus grand bonheur pour le plus grand nombre »), les hommes n’ont d’autres choix que se haïr et se craindre les uns les autres, et se battre les uns contre les autres, étant donné que leurs désirs et leurs intérêts se contrediront nécessairement. Si le « désir » est la norme éthique, le désir d’un homme de produire et le désir d’un autre homme de le voler ont une validité éthique égale ; le désir d’un homme d’être libre et le désir d’un autre de l’asservir ont aussi une validité éthique égale même chose enfin pour un homme qui désire être aimé et admiré pour ses vertus et un autre qui désire l’être sans justification ni mérite. Et si la frustration de n’importe quel désir constitue un sacrifice, alors un homme qui possède une automobile et se la fait voler, est victime d’un sacrifice, mais cela est vrai aussi d’un homme qui veut ou qui « aspire à » avoir une automobile que le propriétaire refuse de lui donner ; et ces deux « sacrifices » ont un statut éthique égal. De sorte que le seul choix de l’homme est de voler ou d’être volé, de détruire ou d’être détruit et de sacrifier les autres à n’importe lequel de ses propres désirs ou d’être sacrifié aux désirs d’autrui. Ainsi, la seule alternative éthique de l’homme est d’être un sadique ou un masochiste.
Le cannibalisme moral de toutes les doctrines hédonistes et altruistes tient dans la prémisse que le bonheur d’un homme nécessite le malheur d’un autre.
Aujourd’hui, la plupart des gens considèrent cette prémisse comme un absolu qui ne doit pas être remis en question. Et lorsqu’on parle du droit d’un homme d’exister pour son propre bien, pour son propre intérêt rationnel, la plupart des gens supposent automatiquement que cela signifie son droit de sacrifier les autres. Une telle supposition avoue leur propre croyance que nuire, asservir, voler ou assassiner est dans l’intérêt personnel des hommes, mais qu’ils doivent y renoncer d’une manière altruiste. L’idée que l’intérêt personnel de l’homme ne peut être servi que par des relations non-sacrificielles avec les autres n’est jamais venue à l’esprit de ces apôtres humanitaires de l’anti-égoïsme, qui proclament leur désir d’accomplir la fraternité entre tous les hommes. Et il ne leur viendra jamais à l’esprit, ni à personne, tant et aussi longtemps que le concept de rationalité sera dissocié de ceux de « valeurs », « désirs », « intérêt personnel » et de l’éthique.
L’éthique objectiviste considère que ce qui est bon pour l’homme ne nécessite pas de sacrifices humains et ne peut être accompli par le sacrifice des uns en faveur des autres. Elle considère que les intérêts rationnels des hommes ne se contredisent pas, et qu’il ne peut y avoir de conflits d’intérêts entre des hommes qui ne désirent pas ce qu’ils ne méritent pas, qui ne font ni n’acceptent de sacrifices et qui traitent les uns avec les autres sur la base d’un échange librement consenti, donnant valeur pour valeur.
Le principe de l’échange est le seul principe éthique rationnel pour toutes, les relations humaines, personnelles ou sociales, privées ou publiques, spirituelles ou matérielles. C’est le principe de la justice.
Celui qui applique le principe de l’échange est un homme qui gagne ce qu’il obtient et qui ne donne ni ne prend ce qui n’est pas mérité. Il ne traite pas les hommes comme des maîtres ou des esclaves, mais comme des égaux indépendants. Il fait affaire avec eux au moyen d’échanges libres, volontaires, non forcés et non coercitifs, échanges qui bénéficient à chaque partie selon leur propre jugement indépendant. Cet homme ne s’attend pas à être payé pour ses tares, mais seulement pour ses réalisations. Il ne reporte pas sur les autres le fardeau de ses fautes et n’hypothèque pas sa vie pour supporter les leurs.
[...]
Aimer, c’est valoriser. Seul un homme rationnellement égoïste, un homme qui a l’estime de soi, est capable d’amour, parce qu’il est le seul homme capable d’avoir des valeurs fermes et cohérentes, sans compromis et avec intégrité. L’homme qui ne se valorise pas lui-même, ne peut valoriser personne ni quoi que ce soit.
C’est uniquement en se fondant sur l’égoïsme rationnel, sur la justice, que les hommes peuvent avantageusement se réunir pour vivre ensemble dans une société libre, pacifique, prospère, bienveillante et rationnelle.
L’homme peut-il tirer un quelconque avantage personnel à vivre en société ? Oui, s’il s’agit d’une société humaine. Les deux grandes valeurs dont on peut bénéficier par la vie sociale sont la connaissance et l’échange. L’homme est la seule espèce qui peut transmettre et étendre son bagage de connaissances d’une génération à l’autre. La connaissance potentiellement disponible à l’homme qui vit en société est infiniment plus grande que celle qu’il pourrait acquérir seul au cours de sa vie ; chaque homme profite ainsi de l’inestimable avantage des connaissances découvertes par autrui. Le deuxième grand avantage est la division du travail. Il permet à l’homme de se consacrer à un domaine particulier et d’échanger avec ceux qui se spécialisent dans d’autres domaines. Cette forme de coopération permet à tous ceux qui y participent d’atteindre une plus grande connaissance, une plus grande habileté et une plus grande productivité en retour des efforts investis, que si chacun d’eux avait eu à produire tout ce dont ils ont besoin, sur une île déserte ou sur une ferme fonctionnant en autarcie.
Le principe politique fondamental de l’éthique objectiviste est : aucun homme ne peut prendre l’initiative de recourir à la force physique contre les autres. Aucun homme – aucun groupe, aucune société, aucun gouvernement – n’a le droit d’agir en criminel et d’user de contrainte physique contre qui que ce soit. Les hommes peuvent utiliser la force physique seulement par représailles et seulement contre ceux qui y ont eu recours. Le principe éthique en jeu est simple, clair, net et précis : c’est la différence entre le meurtre et la légitime défense. Un cambrioleur cherche à s’emparer de biens en tuant sa victime ; la victime ne devient pas plus riche en tuant un cambrioleur. Le principe est qu’aucun homme ne peut obtenir quoi que ce soit des autres qui ait de la valeur en ayant recours à la force physique.
Le seul but moral qui convienne à un gouvernement est la protection des droits de l’homme. Cela veut dire que le gouvernement doit le protéger de la violence physique, protéger son droit à la vie, à la liberté, à la propriété et à la poursuite de son propre bonheur. Sans droits de propriété, aucun autre droit n’est possible.
[...]
La théorie mystique de l’éthique est explicitement fondée sur la prémisse que la norme fondant les valeurs de l’éthique de l’homme se situe outre-tombe, selon les lois et les exigences d’une autre dimension, une dimension supranaturelle, qu’il est impossible pour l’homme de mettre en pratique son propre code éthique, que celui-ci est impropre et s’oppose à la vie de l’homme sur terre, et que l’homme doit en supporter le blâme et souffrir toute la durée de son existence terrestre pour expier la culpabilité d’être incapable de mettre en pratique l’impraticable. Le haut moyen âge et le moyen âge sont les monuments existentiels de cette éthique.
La théorie sociale de l’éthique substitue la « société » à Dieu, et bien qu’elle prétende que sa préoccupation principale soit la vie sur terre, ce n’est pas la vie de l’homme, pas la vie d’un individu dont il s’agit, mais la vie d’une entité désincarnée, le collectif, qui, par rapport à chaque individu, est tout le monde sauf lui-même. Et autant que l’individu est concerné, son devoir éthique est d’être l’esclave des besoins, des demandes et des exigences revendiqués par autrui, un esclave qui ne peut faire entendre sa voix et dont la personnalité, le moi, l’ego est nié et totalement dépourvu de droits. L’expression « les loups se mangent entre eux » n’est applicable ni au capitalisme ni aux loups, mais bien à la théorie sociale de l’éthique. Les monuments existentiels de cette théorie sont l’Allemagne nazie et la Russie soviétique.
La théorie subjectiviste de l’éthique est, à proprement parler, non une théorie, mais une négation de l’éthique. Plus encore, c’est une négation de la réalité, une négation non seulement de l’existence de l’homme, mais de toute l’existence. Seul le concept d’un univers fluide, plastique, indéterminé, un univers héraclitéen pouvait permettre de penser ou de prêcher que l’homme n’a pas besoin de principes d’action objectifs, que la réalité lui donne carte-blanche sur le choix de ses valeurs, que tout ce qu’il veut bien désigner comme bon ou mauvais le sera, que le désir irrationnel d’un homme peut être une norme morale valide, et que la seule question est de savoir comment on peut s’en tirer. Le monument existentiel de cette théorie est l’état actuel de notre culture.
[...]
C’est la philosophie qui détermine les buts de l’homme et la voie qu’il doit suivre ; c’est seulement la philosophie qui peut maintenant les sauver. Aujourd’hui, le monde est face à un choix : pour que la civilisation survive, les hommes doivent rejeter la morale altruiste.
Je terminerai par ces mots de John Galt, que j’adresse, comme lui, à tous les moralistes de l’altruisme, passés ou présents : « Vous avez utilisé la crainte comme arme et apporté la mort à l’homme comme châtiment d’avoir rejeté votre morale. Nous lui offrons la vie comme récompense pour accepter la nôtre. »
-Ayn Rand, L'Éthique Objectiviste (Texte d’une conférence donnée par Ayn Rand à l’Université du Wisconsin le 9 février 1961), repris dans La Vertu d'Égoïsme, Les Belles Lettres, 2008.
"Consternante insouciance avec laquelle les hommes proposent, discutent et acceptent des projets « humanitaires » qui devront être imposés par des moyens politiques, c’est-à-dire par la force, à un nombre illimité d’êtres humains." (p.42)
"La question non posée et insoluble à l’égard de tous leurs objectifs « désirables » est : Pour qui ? Désirs et objectifs présupposent des bénéficiaires. La science est-elle désirable ? Pour qui ? Pas aux serfs soviétiques qui meurent d’épidémies, d’insalubrité, de faim ou de terreur, ou qui finissent au poteau d’exécution, alors que de brillants jeunes hommes leur font des signes de la main de leurs capsules spatiales circulant au-dessus de leurs porcheries humaines. Non plus qu’à ce père américain qui meurt d’une attaque cardiaque provoquée par une surcharge de travail pour payer les études universitaires de son fils, ou à ce garçon qui n’a pas les moyens d’aller à l’université, ou à ce couple tué dans un accident de la route parce qu’il n’avait pas les moyens de s’acheter une nouvelle automobile, ou à cette mère qui a perdu son enfant parce qu’elle n’avait pas les moyens de l’envoyer dans le meilleur hôpital, non plus qu’à tous ceux dont les taxes paient pour financer la science subventionnée et les projets de recherches publics." (p.42)
-Ayn Rand, "L'Éthique collectivisée", The Objectivist Newsletter, janvier 1963, repris dans La Vertu d'Égoïsme, Les Belles Lettres, 2008.
"Une nation dirigée par la force physique brute n’est pas une nation, mais une horde de brigands, qu’elle ait à sa tête Attila, Genghis Khan, Hitler, Kroutchev ou Castro. Quels droits Attila pourrait-il revendiquer et à quel titre ? [...]
Le droit des nations à l’« auto-détermination » ne s’applique qu’aux sociétés libres ou aux sociétés cherchant à établir la liberté ; il ne s’applique pas aux dictatures." (p.56)
"Les dictatures sont des nations hors-la-loi. Toute nation libre avait le droit d’envahir l’Allemagne nazie et, aujourd’hui, a le droit d’envahir la Russie soviétique, Cuba ou n’importe quel autre enclos d’esclaves. Qu’une nation libre choisisse de le faire ou non dépend de son propre intérêt, pas du respect des « droits » inexistants de chefs de gang. Ce n’est pas le devoir d’une nation libre de libérer les autres nations au prix de se sacrifier soi-même, mais une nation a le droit de le faire, lorsque et si elle choisit de le faire." (p.57)
-Ayn Rand, "Les Droits collectivisés", The Objectivist Newsletter, juin 1963, repris dans La Vertu d'Égoïsme, Les Belles Lettres, 2008.
"Dans une société totalement libre, l’impôt – ou, pour être exact, les contributions pour les services gouvernementaux – serait volontaire. Puisqu’il est démontrable que les services légitimes d’un gouvernement –la police, les forces armées, les tribunaux judiciaires– sont nécessaires pour les citoyens et qu’ils servent leurs intérêts directement, les mêmes citoyens consentiraient (et devraient consentir) à payer pour de tels services, pour les mêmes raisons qu’ils paient pour des assurances." (p.59)
-Ayn Rand, "Le Financement du gouvernement dans une société libre", The Objectivist Newsletter, février 1964, repris dans La Vertu d'Égoïsme, Les Belles Lettres, 2008.
"Une fois que les hommes ont acceptés comme un bien l'idée du sacrifice de soi, ils ont également acceptés l'idée de sacrifier les autres."
-Ayn Rand.
http://aynrandlexicon.com/lexicon/#A_index
http://en.wikipedia.org/wiki/Objectivism's_rejection_of_the_primitive#Arabs_versus_Israel
http://fr.liberpedia.org/Dichotomie_analytique-synth%C3%A9tique
http://www.fichier-pdf.fr/2013/11/01/ayn-rand-la-vertu-d-egoesme/ayn-rand-la-vertu-d-egoesme.pdf
L'extrémisme ou l'art de la délation: https://docs.google.com/document/d/1azCurWYBHFrmp_CdWxU6SXNvPSJJTTowq9sdd9jPiAw/edit
Le nouveau fascisme: le règne du consensus: http://lemennicier.bwm-mediasoft.com/displayArticle.php?articleId=217
Avant-propos à « La Vertu d’Égoïsme » : https://objectivismefr.wordpress.com/2017/11/27/avant-propos-a-la-vertu-degoisme/
François-René Rideau (traduction): La philosophie: qui en a besoin : http://fare.tunes.org/liberalisme/philo.html
Introduction à l'épistémologie objectiviste:
https://docs.google.com/document/d/1Bb9UtmCr4GH70kPxd5TB6tWruS54UbuwaFNLL4eVNIM/edit
https://docs.google.com/document/d/1jUDC9P3f40Oo7s78t7lLjSxQIe8e5epM3wNjrF_7GE8/edit
Les droits de l'homme: https://docs.google.com/document/d/1V-yLt4HLMLed6WCF2_DjrTkcLXgPQA3ViCyuBdaC5QE/edit
La Collectivisation des droits: https://docs.google.com/document/d/1g7bHkieFyYfT056NcE_P7IaVJKTqoSrE12NrrqSp3dc/edit
https://books.google.fr/books?id=pEn4LUKpGecC&pg=PT14&dq=ayn+rand&hl=fr&sa=X&ei=3huoVO7JLJPe7Abd6oDgDg&ved=0CCgQ6AEwADge#v=onepage&q=ayn%20rand&f=false
http://fr.liberpedia.org/Objectivisme
http://fr.liberpedia.org/Les_enseignements_philosophiques_de_Ayn_Rand
"Matter is indestructible, it change its forms, but it cannot cease to exist."
-The Objectivist Ethics.
"JE SUIS, JE PENSE, JE VEUX.
Mes mains... Mon esprit... Mon ciel... Ma forêt... Cette terre qui est mienne. Que dois-je dire de plus ? Ce sont les mots. C'est la réponse.
Je me tiens ici debout au sommet de la montagne. Je lève la tête et je tends les bras. Ceci, mon corps et mon âme, tout ceci représente la fin de la quête. Je désirais connaître le sens des choses. Je suis le sens. Je voulais découvrir ma raison d'être. Je n'ai nul besoin de raison d'être, ni d'autorisation pour mon existence. Je suis la raison d'être et l'autorisation.
Ce sont mes yeux qui voient, et la vision de mes yeux accorde sa beauté à la terre. Ce sont mes oreilles qui entendent, et l'ouïe de mes oreilles offre au monde sa musique. C'est mon esprit qui pense, et le jugement de mon esprit est le seul phare qui puisse éclairer la vérité. C'est ma volonté qui choisit, et le choix de ma volonté est le seul verdict que je me dois de respecter.
De nombreux mots me furent accordés, quelques-uns sont sages et d'autres sont trompeurs, mais trois seulement sont sacrés : « Je le veux ! »
Quelle que soit ma route, la bonne étoile est avec moi : la bonne étoile est la boussole qui m'indique le chemin. Elle n'indique qu'une seule direction. Et cette direction, c'est moi.
J'ignore si cette terre sur laquelle je me trouve est le cœur de l'univers, ou si elle n'est qu'un grain de poussière perdu dans l'éternité. Je l'ignore, et cela m'est égal, car je sais quel bonheur m'est possible sur cette terre. Et mon bonheur n'a pas à se justifier. Mon bonheur n'est pas un moyen d'arriver à une quelconque fin. Il est la fin. Il est son propre but. Il est sa propre raison d'être.
Je ne suis pas non plus un moyen d'arriver à une fin que d'autres voudraient atteindre.
Je ne suis pas un instrument à leur disposition.
Je ne suis pas un serviteur de leurs exigences. Je ne suis pas un baume pour leurs plaies. Je ne suis pas un sacrifice sur leur autel.
Je suis un homme. Je me dois de posséder et conserver, de défendre, d'utiliser, de respecter et de chérir ce miracle.
Je n'abandonne ni ne partage mes trésors. La richesse de mon cerveau ne doit pas être gaspillée en pièces de bronze jetées en aumône, à tous vents, aux pauvres d'esprits. Je défends mes trésors : ma pensée, ma volonté, ma liberté. Et le plus précieux est ma liberté.
Je ne dois rien à mes frères, je ne suis pas leur créancier. Je ne demande à personne de vivre pour moi et je ne vis pas non plus pour les autres. Je ne convoite l'âme d'aucun homme, tout comme mon âme n'a pas à être convoitée.
Je ne suis ni l'ami, ni l'ennemi de mes frères, mais l'un ou l'autre, suivant ce qu'ils méritent. Pour mériter mon amour, mes frères doivent avoir fait plus que se contenter d'être nés. Je n'accorde pas mon amour sans raison, ni à quelque passant qui se hasarderait à le réclamer. J'honore les hommes de mon amour. Mais l'honneur doit se mériter.
Je choisirai des amis parmi les hommes, mais jamais d'esclave ni de maître. Et je ne choisirai que ceux qui me plairont; à eux je montrerai amour et respect, mais jamais domination ni obéissance. Et nous joindrons nos mains lorsque nous le déciderons, ou marcherons seuls si nous le désirons. Car dans le temple de son esprit, chaque homme est seul. Que chaque homme garde son temple pur et intact. Qu'il rejoigne d'autres hommes, qu'il les prenne par la main, s'ils le désirent, mais seulement au-delà de ce seuil sacré.
Car le mot « Nous » ne doit jamais être prononcé, sauf par choix personnel et après réflexion. Ce mot ne doit jamais être privilégié dans l'âme d'un homme, ou il devient monstrueux, l'origine de tous les maux sur terre, l'origine de la torture de l'homme par l'homme et d'une innommable duperie.
Le mot « Nous » est comme de la chaux vive versée sur les hommes, qui se contracte et durcit comme la pierre, écrase tout ce qui se trouve au-dessous, mêlant le noir et le blanc dans son gris. C'est le mot grâce auquel les dépravés volent la vertu des hommes droits, grâce auquel les faibles volent la force des forts, grâce auquel les imbéciles volent la sagesse des sages.
Quelle joie en tirer, si toutes les mains, même impures, peuvent l'atteindre ? Quelle sagesse, si même les imbéciles peuvent me donner des ordres ? Quelle liberté, si toutes les créatures, même les incapables et les impuissants, sont mes maîtres ? Quelle vie, si je ne fais que m'incliner, approuver et obéir ?
Mais j'en ai fini de ce culte de la corruption. J'en ai fini de ce monstre du « Nous », mot de la servitude, du pillage, de la misère, du mensonge et de la honte.
Et je vois maintenant le visage de dieu, et j'élève ce dieu au-dessus de la terre, ce dieu que les hommes cherchent depuis qu'ils existent, ce dieu qui leur accordera joie, paix et fierté.
Ce dieu, ce mot unique, c'est « JE »." -Ayn Rand, Hymne.
« Je peux dire que tous les livres que j'écrirai jamais seront toujours voués à la défense de la cause de l'individu » -Ayn Rand, Ayn Rand Letters, 5/7/1943.
"We'll have to save capitalism from the capitalists." -Ayn Rand, Lettre à Isabel Paterson, 28 août 1945.
"S'il était vrai que la dictature est inévitable et que le fascisme et le communisme sont les deux « extrêmes » au bout de notre course, alors quel serait le choix le plus sûr ?
Eh bien, le centre mou ! Le centre, avec la sécurité indéfinie, indéterminée, de son économie mixte avec un degré « modéré » de privilèges étatiques pour les riches et un montant « modéré » de subventions étatiques pour les pauvres ; avec un respect « modéré » pour les droits et une dose « modérée » de force brute ; avec une mesure « modérée » de liberté et un degré « modéré » d’esclavage ; avec un degré « modéré » de justice et un degré « modéré » d'injustice ; avec un degré « modéré » de sécurité et un degré « modéré » de terreur, et avec un degré modéré de tolérance pour tous, sauf pour ces « extrémistes » qui défendent les principes, la cohérence, l'objectivité, la morale, et qui refusent les compromis.
La notion de compromis comme la vertu suprême qui l’emporte sur tout le reste est l'impératif moral, la condition préalable d'une économie mixte. Une économie mixte est un mélange explosif, instable de deux éléments opposés, qui ne peut demeurer en l’état mais doit finir par glisser dans un sens ou dans l'autre ; c'est un mélange de liberté et d’autoritarisme, ce qui veut dire : non pas de fascisme et de communisme, mais de capitalisme et d’étatisme (dans toutes ses variantes). Dans leur panique, ceux qui souhaitent prolonger ce statu quo intenable et en pleine désintégration, hurlent qu’on pourrait le faire en éliminant les deux « extrêmes » de ses composants essentiels, mais ces deux extrêmes-là sont : le capitalisme, ou la dictature totale.
[...] C’est là que nous pouvons voir les racines profondes, la source qui a rendu possible la propagation de ces « anticoncepts ».
Ce sont ces névrosés mentalement paralysés, anxieux, produits par la désintégration de la philosophie moderne avec son culte de l'incertain, son irrationalisme épistémologique et son subjectivisme normatif, qui sortent de nos universités, brisés d’avance par une terreur chronique et cherchant échapper à l'absolutisme de la réalité qu’ils se sentent incapables d’affronter.
C’est la peur qui les pousse à s'associer à d’habiles et pragmatiques manipulateurs et professionnels de la politique pour rendre le monde plus sûr pour les médiocres, en élevant au statut d'un idéal moral le citoyen archétypique d'une économie mixte : le mollasson docile, malléable, modéré qui jamais ne s'excite ni ne fait d’histoires, ne s’en fait jamais trop, s'adapte à tout et ne se bat pour rien.
La meilleure preuve possible de l'effondrement d'un mouvement intellectuel apparaît le jour où il n'a plus rien à offrir comme idéal ultime qu’un plaidoyer pour la « modération ». La voilà bien, la preuve définitive de la faillite du collectivisme."
-Ayn Rand, L'extrémisme ou l'art de la délation (1964).
"Qu’est-ce que la moralité, ou l’éthique ? C’est un code de valeurs pour guider les choix et actions de l’homme, qui déterminent le but et le cours de sa vie. L’éthique, en tant que science, a pour objet la découverte et la définition d’un tel code.
La première question à laquelle on doit répondre, comme condition préalable à toute tentative de définir, de juger ou d’accepter quelque système éthique que ce soit, est : Pourquoi l’homme a-t-il besoin d’un code de valeurs ?
J’insiste sur ce point. La première question n’est pas : quel code de valeurs particulier l’homme doit-il accepter ? Mais : l’homme a-t-il ou non besoin d’un code de valeurs, et pourquoi ?
Le concept de valeur, du « bon » et du « mauvais », est-il une invention humaine arbitraire, un concept n’ayant aucune relation avec les faits de la réalité, dont la source ne proviendrait pas d’eux ni ne serait fondé sur eux, ou est-il fondé sur un fait métaphysique, une condition invariable de l’existence de l’homme ? (J’utilise le terme « métaphysique » pour signifier ce qui concerne la réalité, la nature des choses, l’existence.) Le fait que l’homme doit guider ses actions suivant un ensemble de principes, est-il décrété par une convention humaine arbitraire, une simple coutume, ou existe-t-il un fait de la réalité qui l’exige ? L’éthique est-elle du domaine de l’irrationnel (caprices, émotions personnelles, contraintes sociales, révélations mystiques), ou du domaine de la raison ? L’éthique est-elle un luxe subjectif, ou une nécessité objective ?
Dans les tristes annales de l’histoire de l’éthique, les moralistes ont, sauf en de très rares et infructueuses exceptions, considéré l’éthique comme étant du domaine de l’irrationnel. Certains l’ont fait d’une manière explicite, intentionnellement ; d’autres, implicitement, par défaut. Est « irrationnel » le désir ressenti par une personne qui n’en connaît pas la cause et ne tient pas à la connaître.
Aucun philosophe n’a donné une réponse scientifique, objectivement démontrable et rationnelle à la question : Pourquoi l’homme a-t-il besoin d’un code de valeurs ? Aussi longtemps que cette question demeura sans réponse, aucun code éthique objectif, scientifique et rationnel n’a pu être découvert ou défini. Le plus grand de tous les philosophes, Aristote, ne considérait pas l’éthique comme une science exacte ; il fonda son système éthique sur l’observation de ce que les hommes sages de son temps choisissaient de faire, laissant sans réponses les questions suivantes : qu’est-ce qui motivait leurs choix ? et pourquoi considérait-il ces hommes comme sages ?
La plupart des philosophes ont considéré l’existence de l’éthique comme allant de soi, comme un fait historique, sans se préoccuper de découvrir sa cause métaphysique ou sa validation objective. Beaucoup d’entre eux tentèrent de briser le monopole traditionnel du mysticisme dans le domaine de l’éthique et de définir une moralité non-religieuse, scientifique et rationnelle.
Mais leurs tentatives reposèrent sur l’acceptation des doctrines éthiques des mystiques, en les justifiant à l’aide de motifs sociaux, substituant ainsi simplement la société à Dieu.
Les mystiques déclarés considéraient l’inexplicable et arbitraire « volonté de Dieu » comme la norme de « ce qui est bon » et comme la validation de leur éthique. Les néomystiques substituèrent « la volonté de Dieu » par « ce qui est bon pour la société », s’enfonçant ainsi dans le cercle vicieux d’une définition telle : « la norme de ce qui est bon est ce qui est bon pour la société ». En toute logique (et aujourd’hui il s’agit d’une pratique répandue partout à travers le monde), cela signifie que la « société » est au-dessus de tout principe éthique, puisqu’elle est la source, la norme et le critère de l’éthique, et que « ce qui est bon » est tout ce qu’elle veut ou considère comme étant favorable à son bien-être ou à son plaisir. Cela signifie que la « société » peut faire tout ce qu’elle veut, puisque tout ce qu’elle choisit de faire est « bon », justement parce qu’elle l’a choisi. Et, puisque la « société » n’est pas une entité comme telle mais seulement un certain nombre d’hommes individuels, cela signifie que quelques-uns d’entre eux (la majorité ou n’importe quel gang qui prétende en être le porte-parole) ont, du point de vue éthique, le droit de réaliser tous leurs désirs (ou atrocités), alors que d’autres sont, toujours du point de vue éthique, obligés d’être à leur service toute leur vie.
Il est difficile de parler de rationalité. Aujourd’hui, la plupart des philosophes affirment que la raison est en faillite, que l’éthique se situe hors des limites de la raison, qu’une éthique rationnelle ne peut être formulée, et que, dans le domaine de l’éthique (c’est-à-dire dans le choix de ses valeurs, de ses actions, de ce qu’il recherche, de ses objectifs vitaux), l’homme doit être guidé par autre chose que la raison. Par quoi ? Par la foi, l’instinct, l’intuition, la révélation, les émotions, les goûts, les pulsions, les désirs ou les caprices ; bref, par l’irrationnel. Aujourd’hui comme avant, la plupart des philosophes conviennent que la norme ultime de l’éthique est l’irrationnel, qu’ils nomment « postulat arbitraire », « choix subjectif » ou « engagement émotionnel ». La seule question étant de savoir quel irrationnel devrait être retenu : le nôtre, celui de la société, du dictateur ou de Dieu ? Quel que soit leur point de divergence, les moralistes contemporains s’entendent tous pour dire que l’éthique est une question subjective et que trois choses ne font pas partie de son domaine : la raison, l’esprit et la réalité.
Si vous vous demandez pourquoi le monde va de plus en plus mal, voilà la raison.
Si vous voulez sauver la civilisation, c’est cette prémisse de l’éthique moderne (comme de toute l’histoire de l’éthique) que vous devez remettre en question.
Pour remettre en question la prémisse fondamentale de n’importe quelle discipline, on doit commencer par le commencement. En éthique, on doit commencer par poser les questions suivantes : Que sont les valeurs ? Pourquoi l’homme en a-t-il besoin ?
Une « valeur » est ce pourquoi l’on entreprend une action pour acquérir et (ou) conserver quelque chose. Le concept de « valeur » n’est pas un primat ; il présuppose une réponse à la question : une valeur pour qui et pour quoi ? Il présuppose une entité capable d’agir pour atteindre un but en face d’une alternative. Là où il n’y pas d’alternative, aucun but ni aucune valeur n’est possible.
[...]
Maintenant, de quelle façon un être humain découvre-t-il le concept de « valeur » ? De quelle façon prend-il d’abord conscience de ce qui est « bon » et de ce qui est « mauvais » dans sa forme la plus simple ? Par les sensations physiques de plaisir et de douleur. De la même façon que les sensations constituent la première étape du développement d’une conscience humaine dans le domaine de la connaissance, elles constituent la
première étape dans le domaine de l’évaluation.
La capacité de faire l’expérience du plaisir ou de la douleur est innée dans le corps de l’homme ; cela fait partie de sa nature, du genre d’entité qu’il est. Il n’a aucun choix à cet égard, ni sur la norme qui détermine ce qui lui procurera une sensation physique de plaisir ou de douleur. Quelle est cette norme ? Sa vie.
[...]
Un organisme qui possède uniquement la faculté sensorielle est guidé par le mécanisme du plaisir et de la douleur propre à son corps, c’est-à-dire par une connaissance et un code de valeurs automatiques. Sa vie est le fondement des valeurs dirigeant ses actions. Dans la sphère des actions qui lui sont possibles, il choisit automatiquement les actions qui préservent sa vie, et rejette celles qui le mèneraient à sa propre destruction.
Les espèces conscientes supérieures possèdent une forme de conscience beaucoup plus développée : elles possèdent la faculté de retenir les sensations, c’est-à-dire la faculté de la perception. Une « perception » est un groupe de sensations automatiquement retenues et intégrées par le cerveau d’un organisme vivant, lui donnant ainsi la capacité d’être conscient non pas d’un seul stimulus, mais d’entités, de choses. Un animal est guidé non seulement par des sensations immédiates, mais par des percepts. Ses actions ne sont pas de simples réponses à des stimuli spécifiques et séparés, mais sont dirigées en fonction d’une conscience intégrée de la réalité perceptuelle à laquelle l’animal fait face. Il est capable de saisir les réalités concrètes perceptuelles immédiatement présentes et est capable de former des associations perceptuelles automatiques, mais ne peut faire plus. Il est capable d’apprendre certaines habiletés pour faire face à certaines situations spécifiques, comme chasser ou se cacher. Dans le cas des animaux plus évolués, ces habiletés sont enseignées aux jeunes par les parents. Mais un animal n’a pas le choix des connaissances et des habiletés qu’il acquiert ; il ne peut que les répéter génération après génération. Et un animal n’a pas le choix de la norme des valeurs dirigeant ses actions : ses sens lui procurent un code de valeurs automatique, c’est-à-dire une connaissance automatique de ce qui est bon ou mauvais pour lui, de ce qui est favorable à sa vie ou de ce qui la met en danger. Un animal n’a pas le pouvoir d’accroître ses connaissances ou de ne pas en tenir compte. Dans les situations où ses connaissances sont inadéquates, il périt ; comme dans le cas de l’animal qui reste paralysé sur une voie de chemin de fer à l’arrivée d’un train. Mais tant qu’il vit, un animal se sert de ses connaissances, ce qui représente pour lui une sécurité automatique, mais aucun pouvoir de choix : il ne peut suspendre sa propre conscience, il ne peut pas choisir de ne pas percevoir, il ne peut pas éviter ses propres perceptions, il ne peut pas ignorer ce qui est bon pour lui, et ne peut choisir ce qui est mauvais et agir contre son propre intérêt.
L’homme n’a pas de code de survie automatique. Il n’a Il n’a pas de processus d’action ou d’ensemble de valeurs automatiques. Ses sens ne lui dictent pas automatiquement ce qui est bon ou mauvais pour lui, ce qui est favorable à sa vie ou la met en danger, quels objectifs il doit poursuivre et les moyens qui lui permettraient de les atteindre, les valeurs dont dépend sa vie, ou le processus d’action qu’il doit suivre. Sa propre conscience doit découvrir les réponses à toutes ces questions. Mais sa conscience ne fonctionnera pas automatiquement. Malgré le fait qu’il soit l’espèce vivante la plus évoluée sur terre, et un être dont la conscience possède une capacité infinie pour acquérir des connaissances, l’homme est la seule entité vivante née sans aucune garantie de demeurer conscient. Ce qui distingue particulièrement l’homme de toutes les autres espèces vivantes est le fait que sa conscience peut vouloir.
[...] Les actions de l’homme, de même que sa survie, nécessitent qu’elles soient guidées en fonction de valeurs conceptuelles, elles-mêmes découlant d’une connaissance conceptuelle. Mais une connaissance conceptuelle ne peut être acquise automatiquement.
Le processus de formation des concepts ne consiste pas simplement à saisir quelques abstractions simples, comme « chaise », « table », « chaud », « froid », ou même comme le fait d’apprendre à parler. C’est une méthode d’utilisation de sa conscience, mieux désignée par le terme « conceptualisation ». Ce n’est pas un état passif d’enregistrement d’impressions aléatoires. C’est un processus activement entretenu qui consiste à identifier ses impressions en termes conceptuels, à intégrer chaque événement et chaque observation dans un contexte conceptuel, à saisir des relations, des différences et des similitudes dans notre matériel perceptuel et à les abstraire en nouveaux concepts, à tirer des inférences, faire des déductions et atteindre des conclusions, à se poser de nouvelles questions et découvrir de nouvelles réponses, développant ainsi continuellement la somme de nos connaissances. La faculté qui dirige ce processus et qui fonctionne au moyen de concepts, est la raison. Le processus est la pensée.
La raison est la faculté qui identifie et intègre le matériel fourni par les sens de l’homme. C’est une faculté que l’homme doit exercer par choix. Penser n’est pas une fonction automatique. En tout moment et dans toutes les circonstances de sa vie, l’homme est libre de penser ou d’éviter cet effort. Penser nécessite un état de conscience d’une complète concentration. L’acte de concentrer notre conscience est volontaire. L’homme peut concentrer son esprit et développer une conscience de la réalité qui soit complète, active, et délibérément orientée ; ou il peut ne pas se concentrer et se laisser dériver dans un état de stupeur semi-consciente, réagissant simplement aux stimuli qui se présentent à lui à tout moment, et à la merci des aléas [...]
Pour l’homme, le moyen fondamental de survie est la raison. L’homme ne peut survivre, comme le font les animaux, au moyen des seuls percepts. Une sensation de faim lui indiquera qu’il a besoin de nourriture – si, au préalable, il a appris à identifier cette sensation comme telle ; toutefois, cette sensation ne lui indiquera nullement comment obtenir sa nourriture, ni si elle sera bonne ou mauvaise pour lui. L’homme ne peut satisfaire ses besoins physiques les plus élémentaires sans un processus rationnel. Ce processus lui est nécessaire pour savoir comment cultiver sa nourriture et fabriquer ses outils de chasse. Ses percepts pourraient le conduire à une caverne (s’il y en a une de disponible) ; mais même pour construire le plus simple des abris, il a besoin de la pensée rationnelle. Aucun percept ni aucun « instinct » ne lui indiquera comment allumer un feu ou tisser des vêtements, comment fabriquer des outils, une roue ou un avion, comment réussir une appendicectomie, comment produire une ampoule électrique, un tube électronique, un cyclotron, ou une boîte d’allumettes. Pourtant sa vie dépend de telles connaissances, et seul un acte volontaire de sa conscience, un processus rationnel, le lui
procurera.
Mais la responsabilité de l’homme va encore plus loin : la pensée rationnelle n’est pas automatique, ni « instinctive », ni involontaire, ni infaillible. L’homme doit en prendre l’initiative, l’entretenir et en être responsable pour en supporter les conséquences. Il doit découvrir comment reconnaître le vrai du faux, comment corriger ses propres erreurs, et comment valider ses concepts, ses conclusions et sa connaissance. Bref, il doit découvrir les règles de la pensée et les lois de la logique, pour diriger sa pensée.
[...]
Un être qui ne sait pas automatiquement ce qui est vrai ou faux, ne peut savoir automatiquement ce qui est bien ou mal, ce qui est bon ou mauvais pour lui. Pourtant, il a besoin de cette connaissance pour vivre. Il n’est pas exempt des lois de la réalité. Il est un organisme spécifique, d’une nature spécifique et qui a besoin, en conséquence, d’actions spécifiques pour se maintenir en vie. Ce qu’il ne peut faire par des moyens arbitraires, des choix aléatoires ou des envies irrésistibles, ni par chance ou par caprice. Ce qui est requis pour sa survie est déterminé par sa nature ; à cet égard, il ne dispose d’aucun choix. Les seuls choix auxquels il doit faire face sont de savoir s’il découvrira ou non ce qui est requis pour sa survie, c’est-à-dire sa nature, et s’il choisira les bons objectifs et les bonnes valeurs ou non. L’homme est libre de faire de mauvais choix, mais non de réussir s’il en fait. L’homme est libre de fuir la réalité, de ne pas concentrer son esprit et de dévaler aveuglément toutes sortes de routes sinueuses et escarpées, mais pas d’éviter l’abîme qu’il refuse de voir. [...]
L’homme est libre de choisir de ne pas être conscient, mais non d’échapper aux conséquences de son inconscience : la destruction. L’homme est la seule espèce vivante qui a le pouvoir d’agir comme son propre fossoyeur. Et c’est la façon dont il a agi la plupart du temps au cours de son histoire. Quels sont, alors, les bons objectifs que l’homme doit poursuivre ? Quelles sont les valeurs que sa survie exige ? Voilà les questions auxquelles doit répondre cette science qu’est l’éthique. Et voilà pourquoi l’homme a besoin d’un code éthique.
Vous êtes maintenant en mesure d’évaluer la signification des doctrines qui prétendent que l’éthique est du domaine de l’irrationnel, que la raison ne peut guider la vie de l’homme, que ses objectifs et ses valeurs devraient être choisis par scrutin ou par caprice, que l’éthique n’a rien à voir avec la réalité, l’existence, nos actions et préoccupations pratiques, que le but de l’éthique se trouve dans l’au-delà et que ce sont les morts qui en ont besoin, et non les vivants.
L’éthique n’est pas une fantaisie mystique, ni une convention sociale, ni un luxe dispendieux et subjectif à écarter en cas d’urgence. L’éthique est une nécessité objective et métaphysique de la survie de l’homme, et ce, non par la grâce d’une quelconque force surnaturelle ou de désirs irrationnels (les vôtres ou ceux des autres), mais par la grâce de la réalité et de la nature de la vie.
[...]
Bien que certains hommes tentent de survivre au moyen de la force brute ou par la fraude, le pillage, le vol ou le mensonge, ou en asservissant ceux qui produisent, le fait demeure que leur survie n’est rendue possible que par leurs victimes, c’est-à-dire ceux qui choisissent d’utiliser leur faculté rationnelle et de produire les biens qu’ils confisquent. De tels pilleurs sont des parasites incapables de survivre, et qui n’existent qu’en détruisant ceux qui sont capables, c’est-à-dire ceux qui suivent un processus d’action qui convienne à l’homme.
Les hommes qui tentent de survivre, non pas au moyen de la raison mais au moyen de la force, tentent de survivre comme le font les animaux. Mais de la même manière que les animaux ne pourraient survivre en tentant de le faire avec les moyens qui conviennent aux plantes, c’est-à-dire en restant là sans bouger et en attendant que le sol les nourrisse, les hommes ne peuvent survivre en tentant de le faire comme le font les animaux, en rejetant la raison et en comptant que les hommes productifs les servent selon leurs désirs. De tels pilleurs ne peuvent atteindre leurs buts que momentanément, et au prix de la destruction de leurs victimes et de la leur.
[...]
L’homme ne peut survivre, comme un animal, dans l’éphémère et le provisoire. La vie d’un animal consiste en une série de cycles bien définis, sans cesse répétés, comme l’élevage des petits, l’accumulation de la nourriture pour l’hiver, etc. ; la conscience d’un animal ne peut intégrer l’ensemble de la durée de sa vie ; l’animal ne peut que répéter les cycles l’un après l’autre, sans pouvoir faire de liens avec le passé. La vie de l’homme est un tout continu : pour le meilleur et pour le pire, chaque jour, chaque année et chaque décennie de sa vie porte en lui la somme de toutes ses expériences passées. Il peut modifier ses choix, et est libre de changer la voie qu’il suit ; il est même libre, dans plusieurs cas, d’expier les fautes de son passé, sans être libre, toutefois, de s’en échapper, ni de vivre sa vie, comme un animal, un play-boy ou une brute, dans l’éphémère et le provisoire sans en subir les conséquences. Pour réussir à survivre et pour faire en sorte que ses actions ne le conduisent pas à sa propre perte, l’homme doit choisir sa voie, ses objectifs et ses valeurs en fonction et dans un contexte de long terme, c’est-à-dire en prenant en considération l’ensemble de sa vie. Aucune sensation, percept, désir ou « instinct » ne peut le faire ; seul un esprit conscient le peut.
Voilà la signification de la définition énoncée plus haut : ce qui est requis pour la survie de l’homme en tant qu’homme. Il ne s’agit pas d’une survie momentanée ou simplement physique. Il ne s’agit pas de la survie physique momentanée d’une brute stupide, attendant qu’une autre brute lui brise le crâne. Il ne s’agit pas de la survie physique momentanée d’un idiot musclé qui est prêt à accepter n’importe quelles contraintes, obéir au premier gangster venu et abandonner toutes ses valeurs, pour ce qu’il est convenu d’appeler « survivre à tout prix », et qui pourrait bien ne durer qu’un temps limité. « La survie de l’homme en tant qu’homme » signifie les exigences, les méthodes, les conditions et les objectifs requis pour la survie d’un être rationnel en fonction de l’ensemble de la durée de sa vie, et en tenant compte de tous les aspects de son existence qui sont
susceptibles de choix.
L’homme ne peut survivre autrement qu’en tant qu’homme. Il peut abandonner son moyen de survie, c’est-à-dire son esprit, il peut s’abaisser à devenir une créature sous-humaine, et il peut faire de sa vie un enfer, le temps que son corps résiste au processus de désintégration auquel il se soumet. Mais en tant que sous-humain, il ne peut réussir qu’à accomplir ce qui est sous-humain, comme le démontrent les atrocités perpétrées au cours des périodes antirationnelles de l’histoire de l’humanité. C’est par choix que l’homme doit être homme, et la tâche de l’éthique est de lui enseigner comment vivre en homme.
L’éthique objectiviste considère la vie de l’homme comme le fondement de toute valeur, et sa propre vie comme le but éthique de chaque individu.
[...]
L’homme doit choisir ses actions, ses valeurs et ses buts en fonction de la norme de ce qui convient à l’homme, de façon à accomplir, conserver, réaliser cette valeur ultime, et cette fin en soi qu’est sa propre vie, et en jouir.
Une valeur est ce pourquoi l’on entreprend une action pour acquérir et (ou) conserver quelque chose. Une vertu est l’action par laquelle on l’acquiert et (ou) la conserve. Les trois valeurs cardinales de l’éthique objectiviste sont la raison, l’intentionnalité et l’estime de soi. Ces trois valeurs sont, ensemble, à la fois le moyen de réaliser et la réalisation de cette valeur ultime qu’est notre propre vie. Leurs vertus correspondantes sont la rationalité, la productivité et la fierté.
Le travail productif est le but central de la vie d’un homme rationnel, la valeur centrale qui intègre et détermine la hiérarchie de toutes ses autres valeurs. La raison est la source, la condition préalable de son travail productif, et la fierté, le résultat.
La rationalité est la vertu fondamentale de l’homme, la source de toutes ses autres vertus. Le vice fondamental de l’homme, la source de tous ses maux, est l’acte de ne pas concentrer son esprit, de « suspendre » sa conscience, c’est-à-dire non d’être aveugle, mais de refuser de voir ; non d’être ignorant, mais de refuser de savoir. L’irrationalité est le rejet du moyen de survie de l’homme, et, par conséquent, un engagement dans la voie de l’autodestruction. Ce qui est contre l’esprit est contre la vie.
[...]
Nous ne devons jamais sacrifier nos opinions aux convictions ou aux désirs irrationnels des autres (ce qui constitue la vertu de l’intégrité) ; [...] nous ne devons jamais tenter de falsifier la réalité de quelque façon que ce soit (ce qui constitue la vertu de l’honnêteté) ; et [...] nous ne devons jamais chercher à nous approprier ou à nous octroyer ce que nous ne méritons pas ou ce qui ne nous revient pas de droit, que ce soit dans le domaine matériel ou spirituel (ce qui constitue la vertu de la justice).
[...]
Le travail productif est le chemin qui permet à l’homme de réaliser tout ce qu’il désire, et fait appel aux plus hauts attributs de son caractère : son habileté créatrice, son ambition, sa confiance en soi, son refus de se laisser abattre par les catastrophes et son dévouement à l’objectif de refaçonner la terre à l’image de ses valeurs. « Travail productif » ne signifie pas la répétition machinale des mouvements d’un travail quelconque. Il signifie le fait de choisir consciencieusement une carrière productive et de s’y adonner au meilleur de ses capacités, quel que soit le domaine d’activité rationnel, qu’il soit grand ou modeste. Ce n’est pas le degré d’habileté d’un homme ni la portée de son travail qui est éthiquement pertinent ici, mais le fait qu’il utilise ou non son esprit de la manière la plus complète et la plus réfléchie possible.
[...]
L’expression « ambition morale » est la meilleure façon de désigner la vertu de fierté. Cela signifie que l’on doit mériter le droit de se considérer soi-même comme notre plus grande valeur en réalisant notre propre perfection morale, c’est-à-dire en refusant d’accepter tout code fondé sur des vertus irrationnelles qui seraient impossibles à pratiquer, et en s’assurant de pratiquer celles qui le sont, en refusant toute culpabilité imméritée, en ne s’y exposant pas et en corrigeant promptement celle que l’on aurait pu mériter, en ne se résignant jamais passivement aux défauts de notre caractère, et en ne laissant jamais quelque inquiétude, caprice, crainte ou humeur momentanée que ce soit l’emporter sur notre propre estime de soi. Et enfin, par-dessus tout, la perfection morale s’accomplit en refusant de jouer le rôle d’un animal sacrificiel et en refusant toute doctrine qui prêche l’auto-immolation
comme une vertu ou un devoir moral.
Le principe social fondamental de l’éthique objectiviste est que tout comme la vie est une fin en soi, chaque être humain vivant est une fin en lui-même, non le moyen pour les fins ou le bien-être des autres. Ainsi, l’homme doit vivre pour son propre intérêt, ne sacrifiant ni lui-même aux autres, ni les autres à lui-même. Vivre pour son propre intérêt signifie que l’accomplissement de son propre bonheur est le plus haut but moral de l’homme.
[...]
La tâche de l’éthique est de définir le code de valeurs qui convient à l’homme pour ainsi lui donner le moyen d’atteindre le bonheur. Déclarer, comme le font les partisans de l’éthique hédoniste que « tout ce qui vous fait plaisir est une valeur adéquate » revient à déclarer que vous pouvez valoriser tout ce que vous voulez, ce qui est un acte d’abdication intellectuelle et philosophique, un acte qui ne fait que démontrer la futilité de l’éthique et invite tous les hommes à en jouer sauvagement.
Les philosophes qui ont tenté d’élaborer un soi-disant code éthique rationnel n’ont donné à l’humanité que le choix entre deux éthiques fondées sur les désirs irrationnels : soit la poursuite « égoïste » de nos propres désirs irrationnels (comme l’éthique de Nietzsche par exemple), soit le service « altruiste » aux désirs irrationnels des autres (comme les éthiques de Bentham, de Mill, de Comte, et de tous les hédonistes sociaux, qui permettent à l’homme de noyer ses propres désirs irrationnels parmi ceux des millions d’autres, ou qui lui recommandent de s’abaisser à devenir une mauviette totalement désintéressée qui ne cherche qu’à se faire dévorer par les autres).
Quand un « désir », sans égard à sa nature ou à sa cause, est utilisé comme primat éthique, et que l’assouvissement de n’importe lequel et de tous les désirs est considéré comme un but éthique (tel que « le plus grand bonheur pour le plus grand nombre »), les hommes n’ont d’autres choix que se haïr et se craindre les uns les autres, et se battre les uns contre les autres, étant donné que leurs désirs et leurs intérêts se contrediront nécessairement. Si le « désir » est la norme éthique, le désir d’un homme de produire et le désir d’un autre homme de le voler ont une validité éthique égale ; le désir d’un homme d’être libre et le désir d’un autre de l’asservir ont aussi une validité éthique égale même chose enfin pour un homme qui désire être aimé et admiré pour ses vertus et un autre qui désire l’être sans justification ni mérite. Et si la frustration de n’importe quel désir constitue un sacrifice, alors un homme qui possède une automobile et se la fait voler, est victime d’un sacrifice, mais cela est vrai aussi d’un homme qui veut ou qui « aspire à » avoir une automobile que le propriétaire refuse de lui donner ; et ces deux « sacrifices » ont un statut éthique égal. De sorte que le seul choix de l’homme est de voler ou d’être volé, de détruire ou d’être détruit et de sacrifier les autres à n’importe lequel de ses propres désirs ou d’être sacrifié aux désirs d’autrui. Ainsi, la seule alternative éthique de l’homme est d’être un sadique ou un masochiste.
Le cannibalisme moral de toutes les doctrines hédonistes et altruistes tient dans la prémisse que le bonheur d’un homme nécessite le malheur d’un autre.
Aujourd’hui, la plupart des gens considèrent cette prémisse comme un absolu qui ne doit pas être remis en question. Et lorsqu’on parle du droit d’un homme d’exister pour son propre bien, pour son propre intérêt rationnel, la plupart des gens supposent automatiquement que cela signifie son droit de sacrifier les autres. Une telle supposition avoue leur propre croyance que nuire, asservir, voler ou assassiner est dans l’intérêt personnel des hommes, mais qu’ils doivent y renoncer d’une manière altruiste. L’idée que l’intérêt personnel de l’homme ne peut être servi que par des relations non-sacrificielles avec les autres n’est jamais venue à l’esprit de ces apôtres humanitaires de l’anti-égoïsme, qui proclament leur désir d’accomplir la fraternité entre tous les hommes. Et il ne leur viendra jamais à l’esprit, ni à personne, tant et aussi longtemps que le concept de rationalité sera dissocié de ceux de « valeurs », « désirs », « intérêt personnel » et de l’éthique.
L’éthique objectiviste considère que ce qui est bon pour l’homme ne nécessite pas de sacrifices humains et ne peut être accompli par le sacrifice des uns en faveur des autres. Elle considère que les intérêts rationnels des hommes ne se contredisent pas, et qu’il ne peut y avoir de conflits d’intérêts entre des hommes qui ne désirent pas ce qu’ils ne méritent pas, qui ne font ni n’acceptent de sacrifices et qui traitent les uns avec les autres sur la base d’un échange librement consenti, donnant valeur pour valeur.
Le principe de l’échange est le seul principe éthique rationnel pour toutes, les relations humaines, personnelles ou sociales, privées ou publiques, spirituelles ou matérielles. C’est le principe de la justice.
Celui qui applique le principe de l’échange est un homme qui gagne ce qu’il obtient et qui ne donne ni ne prend ce qui n’est pas mérité. Il ne traite pas les hommes comme des maîtres ou des esclaves, mais comme des égaux indépendants. Il fait affaire avec eux au moyen d’échanges libres, volontaires, non forcés et non coercitifs, échanges qui bénéficient à chaque partie selon leur propre jugement indépendant. Cet homme ne s’attend pas à être payé pour ses tares, mais seulement pour ses réalisations. Il ne reporte pas sur les autres le fardeau de ses fautes et n’hypothèque pas sa vie pour supporter les leurs.
[...]
Aimer, c’est valoriser. Seul un homme rationnellement égoïste, un homme qui a l’estime de soi, est capable d’amour, parce qu’il est le seul homme capable d’avoir des valeurs fermes et cohérentes, sans compromis et avec intégrité. L’homme qui ne se valorise pas lui-même, ne peut valoriser personne ni quoi que ce soit.
C’est uniquement en se fondant sur l’égoïsme rationnel, sur la justice, que les hommes peuvent avantageusement se réunir pour vivre ensemble dans une société libre, pacifique, prospère, bienveillante et rationnelle.
L’homme peut-il tirer un quelconque avantage personnel à vivre en société ? Oui, s’il s’agit d’une société humaine. Les deux grandes valeurs dont on peut bénéficier par la vie sociale sont la connaissance et l’échange. L’homme est la seule espèce qui peut transmettre et étendre son bagage de connaissances d’une génération à l’autre. La connaissance potentiellement disponible à l’homme qui vit en société est infiniment plus grande que celle qu’il pourrait acquérir seul au cours de sa vie ; chaque homme profite ainsi de l’inestimable avantage des connaissances découvertes par autrui. Le deuxième grand avantage est la division du travail. Il permet à l’homme de se consacrer à un domaine particulier et d’échanger avec ceux qui se spécialisent dans d’autres domaines. Cette forme de coopération permet à tous ceux qui y participent d’atteindre une plus grande connaissance, une plus grande habileté et une plus grande productivité en retour des efforts investis, que si chacun d’eux avait eu à produire tout ce dont ils ont besoin, sur une île déserte ou sur une ferme fonctionnant en autarcie.
Le principe politique fondamental de l’éthique objectiviste est : aucun homme ne peut prendre l’initiative de recourir à la force physique contre les autres. Aucun homme – aucun groupe, aucune société, aucun gouvernement – n’a le droit d’agir en criminel et d’user de contrainte physique contre qui que ce soit. Les hommes peuvent utiliser la force physique seulement par représailles et seulement contre ceux qui y ont eu recours. Le principe éthique en jeu est simple, clair, net et précis : c’est la différence entre le meurtre et la légitime défense. Un cambrioleur cherche à s’emparer de biens en tuant sa victime ; la victime ne devient pas plus riche en tuant un cambrioleur. Le principe est qu’aucun homme ne peut obtenir quoi que ce soit des autres qui ait de la valeur en ayant recours à la force physique.
Le seul but moral qui convienne à un gouvernement est la protection des droits de l’homme. Cela veut dire que le gouvernement doit le protéger de la violence physique, protéger son droit à la vie, à la liberté, à la propriété et à la poursuite de son propre bonheur. Sans droits de propriété, aucun autre droit n’est possible.
[...]
La théorie mystique de l’éthique est explicitement fondée sur la prémisse que la norme fondant les valeurs de l’éthique de l’homme se situe outre-tombe, selon les lois et les exigences d’une autre dimension, une dimension supranaturelle, qu’il est impossible pour l’homme de mettre en pratique son propre code éthique, que celui-ci est impropre et s’oppose à la vie de l’homme sur terre, et que l’homme doit en supporter le blâme et souffrir toute la durée de son existence terrestre pour expier la culpabilité d’être incapable de mettre en pratique l’impraticable. Le haut moyen âge et le moyen âge sont les monuments existentiels de cette éthique.
La théorie sociale de l’éthique substitue la « société » à Dieu, et bien qu’elle prétende que sa préoccupation principale soit la vie sur terre, ce n’est pas la vie de l’homme, pas la vie d’un individu dont il s’agit, mais la vie d’une entité désincarnée, le collectif, qui, par rapport à chaque individu, est tout le monde sauf lui-même. Et autant que l’individu est concerné, son devoir éthique est d’être l’esclave des besoins, des demandes et des exigences revendiqués par autrui, un esclave qui ne peut faire entendre sa voix et dont la personnalité, le moi, l’ego est nié et totalement dépourvu de droits. L’expression « les loups se mangent entre eux » n’est applicable ni au capitalisme ni aux loups, mais bien à la théorie sociale de l’éthique. Les monuments existentiels de cette théorie sont l’Allemagne nazie et la Russie soviétique.
La théorie subjectiviste de l’éthique est, à proprement parler, non une théorie, mais une négation de l’éthique. Plus encore, c’est une négation de la réalité, une négation non seulement de l’existence de l’homme, mais de toute l’existence. Seul le concept d’un univers fluide, plastique, indéterminé, un univers héraclitéen pouvait permettre de penser ou de prêcher que l’homme n’a pas besoin de principes d’action objectifs, que la réalité lui donne carte-blanche sur le choix de ses valeurs, que tout ce qu’il veut bien désigner comme bon ou mauvais le sera, que le désir irrationnel d’un homme peut être une norme morale valide, et que la seule question est de savoir comment on peut s’en tirer. Le monument existentiel de cette théorie est l’état actuel de notre culture.
[...]
C’est la philosophie qui détermine les buts de l’homme et la voie qu’il doit suivre ; c’est seulement la philosophie qui peut maintenant les sauver. Aujourd’hui, le monde est face à un choix : pour que la civilisation survive, les hommes doivent rejeter la morale altruiste.
Je terminerai par ces mots de John Galt, que j’adresse, comme lui, à tous les moralistes de l’altruisme, passés ou présents : « Vous avez utilisé la crainte comme arme et apporté la mort à l’homme comme châtiment d’avoir rejeté votre morale. Nous lui offrons la vie comme récompense pour accepter la nôtre. »
-Ayn Rand, L'Éthique Objectiviste (Texte d’une conférence donnée par Ayn Rand à l’Université du Wisconsin le 9 février 1961), repris dans La Vertu d'Égoïsme, Les Belles Lettres, 2008.
"Consternante insouciance avec laquelle les hommes proposent, discutent et acceptent des projets « humanitaires » qui devront être imposés par des moyens politiques, c’est-à-dire par la force, à un nombre illimité d’êtres humains." (p.42)
"La question non posée et insoluble à l’égard de tous leurs objectifs « désirables » est : Pour qui ? Désirs et objectifs présupposent des bénéficiaires. La science est-elle désirable ? Pour qui ? Pas aux serfs soviétiques qui meurent d’épidémies, d’insalubrité, de faim ou de terreur, ou qui finissent au poteau d’exécution, alors que de brillants jeunes hommes leur font des signes de la main de leurs capsules spatiales circulant au-dessus de leurs porcheries humaines. Non plus qu’à ce père américain qui meurt d’une attaque cardiaque provoquée par une surcharge de travail pour payer les études universitaires de son fils, ou à ce garçon qui n’a pas les moyens d’aller à l’université, ou à ce couple tué dans un accident de la route parce qu’il n’avait pas les moyens de s’acheter une nouvelle automobile, ou à cette mère qui a perdu son enfant parce qu’elle n’avait pas les moyens de l’envoyer dans le meilleur hôpital, non plus qu’à tous ceux dont les taxes paient pour financer la science subventionnée et les projets de recherches publics." (p.42)
-Ayn Rand, "L'Éthique collectivisée", The Objectivist Newsletter, janvier 1963, repris dans La Vertu d'Égoïsme, Les Belles Lettres, 2008.
"Une nation dirigée par la force physique brute n’est pas une nation, mais une horde de brigands, qu’elle ait à sa tête Attila, Genghis Khan, Hitler, Kroutchev ou Castro. Quels droits Attila pourrait-il revendiquer et à quel titre ? [...]
Le droit des nations à l’« auto-détermination » ne s’applique qu’aux sociétés libres ou aux sociétés cherchant à établir la liberté ; il ne s’applique pas aux dictatures." (p.56)
"Les dictatures sont des nations hors-la-loi. Toute nation libre avait le droit d’envahir l’Allemagne nazie et, aujourd’hui, a le droit d’envahir la Russie soviétique, Cuba ou n’importe quel autre enclos d’esclaves. Qu’une nation libre choisisse de le faire ou non dépend de son propre intérêt, pas du respect des « droits » inexistants de chefs de gang. Ce n’est pas le devoir d’une nation libre de libérer les autres nations au prix de se sacrifier soi-même, mais une nation a le droit de le faire, lorsque et si elle choisit de le faire." (p.57)
-Ayn Rand, "Les Droits collectivisés", The Objectivist Newsletter, juin 1963, repris dans La Vertu d'Égoïsme, Les Belles Lettres, 2008.
"Dans une société totalement libre, l’impôt – ou, pour être exact, les contributions pour les services gouvernementaux – serait volontaire. Puisqu’il est démontrable que les services légitimes d’un gouvernement –la police, les forces armées, les tribunaux judiciaires– sont nécessaires pour les citoyens et qu’ils servent leurs intérêts directement, les mêmes citoyens consentiraient (et devraient consentir) à payer pour de tels services, pour les mêmes raisons qu’ils paient pour des assurances." (p.59)
-Ayn Rand, "Le Financement du gouvernement dans une société libre", The Objectivist Newsletter, février 1964, repris dans La Vertu d'Égoïsme, Les Belles Lettres, 2008.
"Une fois que les hommes ont acceptés comme un bien l'idée du sacrifice de soi, ils ont également acceptés l'idée de sacrifier les autres."
-Ayn Rand.
Dernière édition par Johnathan R. Razorback le Ven 15 Juin - 14:10, édité 11 fois