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    Pascal Lebrun, L'économie participaliste. Une alternative contemporaine au capitalisme

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Pascal Lebrun, L'économie participaliste. Une alternative contemporaine au capitalisme Empty Pascal Lebrun, L'économie participaliste. Une alternative contemporaine au capitalisme

    Message par Johnathan R. Razorback Mar 13 Sep - 19:07

    "La chute du mur de Berlin, événement symbolique de l'effondrement des régimes de planification centralisée, a profondément ébranlé l'univers de pensée et d'action de la gauche occidentale. [...] Les effets de ce choc se font encore sentir aujourd'hui, surtout au sein de la gauche radicale qui espère toujours remplacer le capitalisme par autre chose." (p.15)

    "L'option que je me propose ici de faire découvrir est celle de l'économie participaliste (en abrégé, écopar ; en anglais, participatory economics, en abrégé, parecon). Il s'agit de la proposition la plus étoffé parmi celles qui circulent dans les milieux de la gauche radicale." (p.17)

    "Par "économie", j'entends tout ce qui se rapporte à la production, à la distribution et à la consommation des biens et services dans la société." (p.19)

    "L'écopar, solution de rechange progressiste au capitalisme, a été développée à partir de la fin des années 1980 par deux auteurs: Michael Albert, un militant bien connu aux Etats-Unis, et Robin Hahnel, professeur d'économie à l'American University à Washington. L'écopar a été conçue dans un contexte intellectuel difficile pour la gauche radicale. Avec la chute du bloc de l'Est, la faillite des économies planifiées a consolidé, même à gauche, la thèse néolibérale voulant que toute coordination économique collective soit impossible ou néfaste. Le socialisme de marché est l'exemple le plus frappant de cette victoire théorique du libéralisme: même s'il en appelle toujours à la socialisation des moyens de production, il adopte une position favorable à l'économie de marché [...] Albert et Hahnel ont d'abord voulu démontrer qu'une planification économique viable et démocratique était théoriquement possible. [...]
    C'est Normand Baillargeon qui, à ma connaissance, est le premier à en avoir parlé dans le monde francophone." (pp.21-22)

    "Albert et Hahnel dénombrent quatre normes de rémunération différentes [...] La première est celle en vigueur dans les sociétés capitalistes, soit la rémunération en fonction de la valeur du travail personnel et du produit de la propriété. Il existe plusieurs définitions de la valeur, mais les auteurs se réfèrent ici à la théorie marginaliste, à la thèse orthodoxe. Par valeur du travail, ils entendent donc son prix, c'est-à-dire le coût du salaire, comme représentant l'utilité du travail effectué ; c'est la valeur marchande. La seconde norme a souvent été une revendication du socialisme traditionnel et veut qu'une personne soit rémunérée seulement à la valeur de son travail. Dans une telle société, tout le monde serait rémunéré en fonction de l'utilité de son travail ; personne n'y serait capitaliste, rentier ou rentière. La troisième veut que chaque personne soit rémunérée en fonction de ses efforts et de ses sacrifices. C'est cette dernière norme qui est jugée équitable dans l'écopar. Par effort, les auteurs entendent l'ardeur et la motivation au travail, alors que le sacrifice fait quant à lui référence au temps consacré à ce même travail, du temps qui n'est pas utilisé à autre chose, comme le divertissement ou les projets personnels. Enfin, la quatrième norme est la norme communiste qui veut que chaque personne fournisse du travail selon ses capacités et soit rémunérée selon ses besoins, comme l'avait proposé Karl Marx. Pierre Kropotkine appelait quant à lui cette norme la "prise sur le tas". Il existe bien sûr plusieurs interprétations orthodoxe, anarcho-communistes ou autres, différenciées par des subtilités d'ordres divers. Pourtant, pour l'essentiel, la plupart des communistes, toutes tendances confondues, assument une gratuité totale de la consommation et un accès à volonté aux biens et aux services produits dans la société, refusant toute forme de mise en relation de la consommation au travail. [...]

    Plusieurs facteurs influent sur la productivité d'une personne au travail. Pour les auteurs, l'effort et le sacrifice sont les seuls facteurs qu'elle peut contrôler, contrairement au talent, à la chance ou à la valeur marchande. Cela exclut donc d'emblée les premières et deuxièmes normes, jugées profondément iniques parce qu'elles octroient, ou non, à une personne des revenus sur la base de facteurs qu'elle ne contrôle pas, notamment la valeur d'échange du produit du travail et les droits de propriété. Ainsi, rémunérer l'effort et le sacrifice est, selon les auteurs, non seulement équitable, mais constitue aussi la meilleure mesure incitative puisqu'une personne peut réellement augmenter son revenu en ajustant son ardeur au travail, ce qui n'est pas le cas si la seule façon d'y arriver dépend plutôt du talent, de la chance, d'une valeur marchande élevée ou d'un capital hérité.
    Les auteurs considèrent tout de même que cette norme ne peut s'appliquer dans tous les cas. C'est pourquoi l'écopar inclut aussi la norme communiste de rémunération en fonction des besoins pour différents biens et services, notamment pour les soins de santé, ou encore dans le cas de personne rendue invalides par les hasards de la génétique, par un accident ou la maladie. Le contraire aurait été surprenant étant donné que plusieurs sociétés capitalistes ont elles-mêmes plus ou moins accordé ces protections à leurs populations [...] Albert et Hahnel considèrent cependant que cette norme de rémunération au besoin serait généralement impossible à appliquer, d'abord pour des raisons pratiques, mais aussi parce que ce serait inéquitable. [...]
    La norme de rémunération à l'effort de l'écopar vise à assurer que chaque personne consomme plus ou moins en proportion du travail qu'elle fournit, en plus de recevoir certains biens et services essentiels en fonction d'une condition particulière. Par exemple, une personne souffrant d'une maladie, mais pouvant tout de même travailler, recevrait automatiquement et gratuitement ses médicaments en plus d'une rémunération proportionnelle à son effort et à son sacrifice au travail. Selon la norme rémunératoire de l'écopar, ce serait tout simplement inéquitable qu'un événement malheureux vienne diminuer son revenu, puisque, devant payer pour son médicament, elle devrait accepter une diminution de son niveau de vie ou encore travailler plus pour le conserver. Dans les faits, son revenu serait proportionnellement plus faible que celui de la majorité de la population, qui n'a pas besoin dudit médicament. Le fait d'allouer gratuitement le médicament permet à la personne malade de bénéficier du principe universel de la rémunération en fonction de son effort et de son sacrifice malgré sa maladie. [...]
    La seule façon d'assurer l'équité devient donc pour Albert et Hahnel la mise en rapport de la consommation individuelle à l'effort fourni dans la production effective des biens et services, c'est-à-dire qu'une personne désirant consommer plus doit en échange contribuer davantage à la production [...] Cela garantit selon les auteurs que personne ne puisse consommer grâce au travail des autres, et permet d'éviter que des gens travaillent plus qu'ils ne consomment et inversement [...]
    Il existe aussi des raisons pratiques qui rendent, selon les concepteurs de l'écopar, difficile l'application généralisée de la norme de rémunération communiste. Comme cette norme exclut toute forme de mise en rapport de la consommation au travail, la société serait incapable de déterminer si elle produit en proportion de la consommation de ses membres, ce qui provoquerait constamment des surplus et des pénuries pour différents biens et services." (p.31-37)

    "L'autogestion relève de la répartition du pouvoir décisionnel. [...] Il existe dans notre société une division sociale du travail plus ou moins fixe qui sépare de fait les tâches décisionnelles et conceptuelles des tâches d'exécution. C'est ce qu'Albert appelle la division hiérarchisée du travail. La plupart des gens passent la majeure partie de leur vie au travail en position de subordination, ce que les deux auteurs jugent inacceptable. Ils soutiennent que chaque personne devrait avoir une influence sur le processus de décision proportionnelle à l'impact qu'elle en subira. [...] Par exemple, l'organisation de mon espace de travail ne regarde que moi. Pourtant, mes collègues auront leur mot à dire si j'y pose des choses qui les affectent, comme une radio qui joue à tue-tête... Il s'agit là d'un exemple à petit échelle, mais le même principe s'applique à tous les ordres de grandeur, de l'acquisition de chaussures à la gestion de la pollution d'une branche de l'industrie.

    Notons que cette compréhension de l'autogestion n'élimine pas pour autant l'expertise technique. Cela signifie simplement que les expert.e.s doivent rester dans leur rôle d'agent.e.s d'information et de conseil, laissant aux gens directement touchés le soin de prendre les décisions. De même, elle n'élimine pas nécessairement la hiérarchie, tant qu'elle est transitoire. Ainsi, les postes de coordination [...] dont le mandat et la durée sont limités, la discipline et les responsabilités individuelles continent d'exister dans les lieux de travail de l'écopar. [...] Bien que le service soit autogéré, il se peut que son personnel considère utile qu'une personne apte à le faire coordonne les opérations sur le terrain. Cette personne doit cependant être mandatée par l'ensemble du personnel, être élue, et conserver sa confiance pour demeurer en poste. [...] Enfin, un.e membre du service ne respectant pas, par exemple, les règles établies démocratiquement par l'équipe, sans raison valable, doit en répondre devant ses collègues. Si la discussion, puis les avertissements ne suffisent pas, il est possible que les membres du service votent son renvoi. Ainsi, l'autogestion dans l'écopar n'implique pas une absence d'autorité ; seule la hiérarchie fixe des classes sociales est systématiquement abolie." (pp.39-41)

    "
    (pp.45-56)

    "
    (pp.57-58)
    -Pascal Lebrun, L'économie participaliste. Une alternative contemporaine au capitalisme, Lux, 2014, 297 pages.




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    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

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    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".


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