"Dans l’antiquité grecque puis romaine l’amitié – la philia grecque puis l’amicitia latine – apparaît déjà comme une notion polysémique qui, si elle signifie bien un sentiment et un lien interpersonnel, a avant tout un sens juridique, social et politique, désignant un rapport juridique et social de propriété, une institution semi-formelle permettant des prêts ou encore le fait pour des hommes de se reconnaître comme faisant partie d’une même communauté. Avec Aristote, le premier à avoir véritablement théorisé l’amitié, celle-ci prend désormais aussi une dimension éthique. Elle comprend une large gamme de relations interpersonnelles qui peuvent aller de la camaraderie au lien filial ou familial, à l’entente entre citoyens d’une même cité ou même à la philanthropie. [...]
L’amitié se décline de bien des façons : « banale et nécessaire, plurielle et inscrite dans le tissu courant des relations sociales, […] exceptionnelle et singulière », elle peut revêtir des formes variées et se manifester à des degrés divers pour les individus mais aussi dans les pratiques sociales. Elle peut engager des familles ou seulement des individus qui se sont choisis librement."
"Donner une définition globale de l’amitié s’avère d’ailleurs impossible. À chaque période, au sein de chaque civilisation, la notion n’a pas eu la même signification : derrière la permanence d’une dénomination, les frontières se sont souvent déplacées aussi bien au niveau des pratiques amicales que des regards portés sur l’amitié. Par ailleurs, pour chaque individu, tout au long de sa vie, il peut exister différents types d’amis et différents types d’échanges possibles entre eux : relation de confiance fondée sur l’échange de confidences ou plutôt sur le partage d’activités ; lien affectif ou de proximité (intellectuelle, politique, spirituelle, sociale, générationnelle, etc.) ; relation désintéressée ou non ; basée sur l’échange de services ou l’entraide (matérielle et morale) ; relation nouée depuis l’enfance ou plus tardivement au cours du cycle de vie, choisie volontairement à la différence de tant d’autres liens noués dans le cadre professionnel, du voisinage ou de la parenté."
"Platon est le premier à avoir théorisé une dissociation entre l’amitié et l’amour, comme le met en évidence Pierre Macherey. Dans son article publié dans ce dossier, Thomas Römer montre comment, dans la Bible hébraïque, la distinction entre ces deux types de relations intimes n’est peut-être pas toujours si évidente qu’il n’y paraît d’emblée, alors même que l’hébreu biblique ne distingue pas, au niveau du vocabulaire, l’amitié et l’amour. Pour sa part, le psychosociologue italien Francesco Alberoni fait une analyse approfondie de la distinction entre amour et amitié, examinant, dans les deux cas, la manière dont ces liens se créent, s’entretiennent voire s’achèvent, mais aussi leur rapport au temps, au corps, à l’exclusivité, à la réciprocité, au choix. Nombreux sont les chercheurs qui font remarquer qu’il y a aussi de l’amour dans l’amitié, ne serait-ce que par le vocabulaire qui est employé lorsque l’on qualifie le sentiment pour l’un de ses amis : « on aime son ami », même si on ne l’aime pas du même amour que l’être aimé. Dimitri El Murr souligne la différence entre amitié et amour par le rapport respectif que ces deux concepts ont au langage : l’amitié n’a pas besoin de se dire pour exister ; à la différence de l’amour, elle ne se dit qu’après, elle se confirme mais ne s’affirme pas (il n’y a pas de déclaration d’amitié). La proposition du philosophe Gilles Tiberghien est alors de créer le verbe « amitier » pour pouvoir spécifier la manière que l’on a d’aimer ses amis. Le rapport entre l’amour et l’amitié prend une dimension encore différente avec saint Augustin : l’amitié se situe désormais à la jonction entre « l’amour d’amitié » (la dilectio, l’amour parfait qui vient de la terre et caractérise les amitiés choisies à un stade inférieur à celui de la charité), et la charité qui vient du ciel et motive l’amour du prochain, comme le met en évidence Jean-François Petit dans son article publié dans les pages qui suivent. Il distingue l’amitié qui naît de l’accoutumance de celle que légitime la raison, qui est bien une amitié supérieure, car alors « nous aimons un homme parce que nous avons foi en lui, et que la volonté de chacun tend au bonheur de l’autre, dans cette vie mortelle ». À ses yeux, les liens d’amitié l’emportent même sur l’amour conjugal ou filial ; ils supposent la réciprocité et l’égalité entre amis."
"À la différence de ce qui se passe avec le sentiment amoureux, l’amitié requiert toujours de la réciprocité : « je ne puis être l’ami de quelqu’un qui n’est pas mon ami » analyse Francesco Alberoni. Si, pour Platon, un être humain peut être ami avec des animaux, aux yeux d’Aristote, l’amitié avec les choses inanimées n’existe pas faute de pouvoir être réciproque.
Cette interrogation sur la réciprocité dans le lien amical ne peut être comprise sans prendre en compte la question de la similitude et de la différence entre les amis, aussi commune à tous ceux qui ont écrit sur l’amitié : l’ami est-il un autre soi-même ou quelqu’un différent de soi ? Ainsi que celle, qui lui est étroitement liée, de l’égalité : autrement dit, est-ce que l’amitié peut exister entre des personnes différentes sur les plans du statut, de la fortune, de la profession, de la race, de l’âge, du sexe, de la confession, entre des personnes ayant des convictions politiques, religieuses différentes, des intérêts différents ? Pour Aristote, l’amitié peut être déclinée suivant trois critères : elle est en effet fondée sur l’utilité, le plaisir et la vertu. Dans une relation d’amitié entre personnes différentes prime l’utilité, mais l’amitié ne peut non plus se satisfaire de la seule utilité. La « véritable » amitié reste, à ses yeux, la vertueuse, car l’ami est apprécié alors pour ce qu’il est. L’ami ne pourra, de toute façon, être qu’un autre soi-même, donc un égal, mais l’amitié entre personnes inégales (entre subordonnant – supérieur – et subordonné, entre père et fils, etc.) doit aussi être prise en compte, selon lui. Si la catégorisation aristotélicienne de l’amitié se retrouve à l’époque hellénistique, elle est désormais infléchie : avec les écrits d’Épicure, l’amitié est appréhendée comme un idéal plus accessible pour chacun et ce, quelles que soient les distinctions sociales des uns et des autres.
De l’analyse des Mémoires de Saint-Simon, l’historien moderniste Maurice Aymard met en évidence comment le duc a su diversifier avec soin ce capital, qu’il a en partie hérité de sa famille mais qu’il a aussi constamment entretenu et enrichi tout au long de sa vie. L’amitié se combine alors avec la parenté et l’alliance, et définit un cercle plus large et complémentaire sur lequel compter dans un système fondé sur l’échange. Géré comme un bien, il est, à son tour, transmis à ses successeurs : il est constitué d’égaux et de supérieurs mais aussi d’inférieurs ; ces derniers sont d’ailleurs « les meilleurs des amis car ils sont des débiteurs éternels pour peu qu’ils soient reconnaissants ». Pour autant, ces liens inégaux n’interdisent ni la confiance, ni l’intimité, ni le secret partagé. Dans ce dossier thématique, s’appuyant sur des entretiens semi-directifs auprès d’adultes et de jeunes (entre 18 et 23 ans), la sociologue Claire Bidart analyse l’évolution des pratiques amicales avec l’avancée en âge, c’est-à-dire avec les étapes du cours de la vie et l’évolution des rôles qui leur sont liés. Elle montre comment les amis d’une même personne ne se ressemblent pas, n’ont pas été choisis comme amis de la même façon, et ne tiennent pas la même place, ni le même rôle auprès de celle-ci, ne serait-ce que parce qu’ils ont été rencontrés à des époques différentes. Parce que différent, chaque lien amical noué ouvre, pour l’individu, un morceau de société auquel il lui donne accès ; il l’introduit dans des lieux, des milieux, des savoirs nouveaux. Le réseau d’amis, dans sa diversité (et plus largement, le réseau relationnel dans son ensemble), apparaît comme l’expression des contradictions personnelles, des différentes facettes de la personnalité de l’individu ; il joue un rôle essentiel dans la construction de l’identité de l’individu, de ses attitudes, de ses choix, de son comportement.
Mais l’article qui pose avec le plus de force les questions de la réciprocité et de la différence/similitude dans l’amitié est incontestablement celui de Dominique Greiner, publié dans ce numéro. Se plaçant dans une perspective théologique, il prend ses distances avec la compréhension aristotélicienne de l’amitié comme activité rationnelle. Il montre comment celle-ci est peu susceptible de rendre compte des relations de profonde amitié qui sont nouées entre personnes handicapées et non-handicapées, donc entre personnes nécessairement différentes. Pourtant, dans ce cas aussi, la réciprocité existe. Il analyse comment la relation d’amitié ne naît de toute façon pas d’un acte d’auto-affirmation de soi mais du recevoir d’un autre."
"Dans la France des XVIIIe et XIXe siècles, la lecture des correspondances amicales met aussi en évidence comment l’amitié semble se situer hors de la sphère des échanges et des contrats : ainsi, si les manifestations d’affection entre amis s’expriment aisément, y compris dans un débordement d’effusions, le service rendu entre amis (remboursement d’une dette, besoin d’une aide matérielle, etc.) ne s’énonce qu’avec difficulté, risquant à chaque fois d’entraîner un malentendu dans la relation et dans l’idéal amical. Empreint de délicatesse, le lien amical doit permettre d’annuler les inégalités de fortune entre amis et de parvenir à une réciprocité des échanges."
"Pour Aristote, sans amitié, pas de communauté possible car c’est elle qui constitue le lien premier dans la cité et c’est d’elle que procède le sentiment de justice. L’amitié s’inscrit alors dans une perspective politique. C’est l’amitié « politique » qui intéresse aussi Jacques Derrida dans plusieurs de ses ouvrages, et plus particulièrement dans les Politiques de l’amitié. L’amitié apparaît alors « constitutive du politique comme tel, donc de toute communauté humaine et finalement de la communauté de tous les hommes. » Universelle et inconditionnelle, elle ne présuppose aucune identité d’être, aucun lien de filiation ; elle est simplement accueil de l’autre."
"Pour la majorité des enquêtés, le nombre d’amis tourne autour de trois ou quatre lorsqu’il s’agit d’intimes, de « vrais amis » pour reprendre les qualificatifs employés par les enquêtés pour qualifier cette relation. Un chiffre qui n’a pas changé depuis les premières enquêtes des années 1960."
-Marie-Carmen Smyrnelis, « Amitiés, des sciences sociales aux réseaux sociaux de l'internet », Transversalités, 2010/1 (N° 113), p. 7-30. DOI : 10.3917/trans.113.0007. URL : https://www.cairn.info/revue-transversalites-2010-1-page-7.htm
Jean Maisonneuve, Psychologie de l’amitié, Paris, PUF, 2004, p. 4.
Claire Bidart, L’amitié, un lien social, Paris, La Découverte, 1997, p. 5.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Francesco_Alberoni
L’amitié se décline de bien des façons : « banale et nécessaire, plurielle et inscrite dans le tissu courant des relations sociales, […] exceptionnelle et singulière », elle peut revêtir des formes variées et se manifester à des degrés divers pour les individus mais aussi dans les pratiques sociales. Elle peut engager des familles ou seulement des individus qui se sont choisis librement."
"Donner une définition globale de l’amitié s’avère d’ailleurs impossible. À chaque période, au sein de chaque civilisation, la notion n’a pas eu la même signification : derrière la permanence d’une dénomination, les frontières se sont souvent déplacées aussi bien au niveau des pratiques amicales que des regards portés sur l’amitié. Par ailleurs, pour chaque individu, tout au long de sa vie, il peut exister différents types d’amis et différents types d’échanges possibles entre eux : relation de confiance fondée sur l’échange de confidences ou plutôt sur le partage d’activités ; lien affectif ou de proximité (intellectuelle, politique, spirituelle, sociale, générationnelle, etc.) ; relation désintéressée ou non ; basée sur l’échange de services ou l’entraide (matérielle et morale) ; relation nouée depuis l’enfance ou plus tardivement au cours du cycle de vie, choisie volontairement à la différence de tant d’autres liens noués dans le cadre professionnel, du voisinage ou de la parenté."
"Platon est le premier à avoir théorisé une dissociation entre l’amitié et l’amour, comme le met en évidence Pierre Macherey. Dans son article publié dans ce dossier, Thomas Römer montre comment, dans la Bible hébraïque, la distinction entre ces deux types de relations intimes n’est peut-être pas toujours si évidente qu’il n’y paraît d’emblée, alors même que l’hébreu biblique ne distingue pas, au niveau du vocabulaire, l’amitié et l’amour. Pour sa part, le psychosociologue italien Francesco Alberoni fait une analyse approfondie de la distinction entre amour et amitié, examinant, dans les deux cas, la manière dont ces liens se créent, s’entretiennent voire s’achèvent, mais aussi leur rapport au temps, au corps, à l’exclusivité, à la réciprocité, au choix. Nombreux sont les chercheurs qui font remarquer qu’il y a aussi de l’amour dans l’amitié, ne serait-ce que par le vocabulaire qui est employé lorsque l’on qualifie le sentiment pour l’un de ses amis : « on aime son ami », même si on ne l’aime pas du même amour que l’être aimé. Dimitri El Murr souligne la différence entre amitié et amour par le rapport respectif que ces deux concepts ont au langage : l’amitié n’a pas besoin de se dire pour exister ; à la différence de l’amour, elle ne se dit qu’après, elle se confirme mais ne s’affirme pas (il n’y a pas de déclaration d’amitié). La proposition du philosophe Gilles Tiberghien est alors de créer le verbe « amitier » pour pouvoir spécifier la manière que l’on a d’aimer ses amis. Le rapport entre l’amour et l’amitié prend une dimension encore différente avec saint Augustin : l’amitié se situe désormais à la jonction entre « l’amour d’amitié » (la dilectio, l’amour parfait qui vient de la terre et caractérise les amitiés choisies à un stade inférieur à celui de la charité), et la charité qui vient du ciel et motive l’amour du prochain, comme le met en évidence Jean-François Petit dans son article publié dans les pages qui suivent. Il distingue l’amitié qui naît de l’accoutumance de celle que légitime la raison, qui est bien une amitié supérieure, car alors « nous aimons un homme parce que nous avons foi en lui, et que la volonté de chacun tend au bonheur de l’autre, dans cette vie mortelle ». À ses yeux, les liens d’amitié l’emportent même sur l’amour conjugal ou filial ; ils supposent la réciprocité et l’égalité entre amis."
"À la différence de ce qui se passe avec le sentiment amoureux, l’amitié requiert toujours de la réciprocité : « je ne puis être l’ami de quelqu’un qui n’est pas mon ami » analyse Francesco Alberoni. Si, pour Platon, un être humain peut être ami avec des animaux, aux yeux d’Aristote, l’amitié avec les choses inanimées n’existe pas faute de pouvoir être réciproque.
Cette interrogation sur la réciprocité dans le lien amical ne peut être comprise sans prendre en compte la question de la similitude et de la différence entre les amis, aussi commune à tous ceux qui ont écrit sur l’amitié : l’ami est-il un autre soi-même ou quelqu’un différent de soi ? Ainsi que celle, qui lui est étroitement liée, de l’égalité : autrement dit, est-ce que l’amitié peut exister entre des personnes différentes sur les plans du statut, de la fortune, de la profession, de la race, de l’âge, du sexe, de la confession, entre des personnes ayant des convictions politiques, religieuses différentes, des intérêts différents ? Pour Aristote, l’amitié peut être déclinée suivant trois critères : elle est en effet fondée sur l’utilité, le plaisir et la vertu. Dans une relation d’amitié entre personnes différentes prime l’utilité, mais l’amitié ne peut non plus se satisfaire de la seule utilité. La « véritable » amitié reste, à ses yeux, la vertueuse, car l’ami est apprécié alors pour ce qu’il est. L’ami ne pourra, de toute façon, être qu’un autre soi-même, donc un égal, mais l’amitié entre personnes inégales (entre subordonnant – supérieur – et subordonné, entre père et fils, etc.) doit aussi être prise en compte, selon lui. Si la catégorisation aristotélicienne de l’amitié se retrouve à l’époque hellénistique, elle est désormais infléchie : avec les écrits d’Épicure, l’amitié est appréhendée comme un idéal plus accessible pour chacun et ce, quelles que soient les distinctions sociales des uns et des autres.
De l’analyse des Mémoires de Saint-Simon, l’historien moderniste Maurice Aymard met en évidence comment le duc a su diversifier avec soin ce capital, qu’il a en partie hérité de sa famille mais qu’il a aussi constamment entretenu et enrichi tout au long de sa vie. L’amitié se combine alors avec la parenté et l’alliance, et définit un cercle plus large et complémentaire sur lequel compter dans un système fondé sur l’échange. Géré comme un bien, il est, à son tour, transmis à ses successeurs : il est constitué d’égaux et de supérieurs mais aussi d’inférieurs ; ces derniers sont d’ailleurs « les meilleurs des amis car ils sont des débiteurs éternels pour peu qu’ils soient reconnaissants ». Pour autant, ces liens inégaux n’interdisent ni la confiance, ni l’intimité, ni le secret partagé. Dans ce dossier thématique, s’appuyant sur des entretiens semi-directifs auprès d’adultes et de jeunes (entre 18 et 23 ans), la sociologue Claire Bidart analyse l’évolution des pratiques amicales avec l’avancée en âge, c’est-à-dire avec les étapes du cours de la vie et l’évolution des rôles qui leur sont liés. Elle montre comment les amis d’une même personne ne se ressemblent pas, n’ont pas été choisis comme amis de la même façon, et ne tiennent pas la même place, ni le même rôle auprès de celle-ci, ne serait-ce que parce qu’ils ont été rencontrés à des époques différentes. Parce que différent, chaque lien amical noué ouvre, pour l’individu, un morceau de société auquel il lui donne accès ; il l’introduit dans des lieux, des milieux, des savoirs nouveaux. Le réseau d’amis, dans sa diversité (et plus largement, le réseau relationnel dans son ensemble), apparaît comme l’expression des contradictions personnelles, des différentes facettes de la personnalité de l’individu ; il joue un rôle essentiel dans la construction de l’identité de l’individu, de ses attitudes, de ses choix, de son comportement.
Mais l’article qui pose avec le plus de force les questions de la réciprocité et de la différence/similitude dans l’amitié est incontestablement celui de Dominique Greiner, publié dans ce numéro. Se plaçant dans une perspective théologique, il prend ses distances avec la compréhension aristotélicienne de l’amitié comme activité rationnelle. Il montre comment celle-ci est peu susceptible de rendre compte des relations de profonde amitié qui sont nouées entre personnes handicapées et non-handicapées, donc entre personnes nécessairement différentes. Pourtant, dans ce cas aussi, la réciprocité existe. Il analyse comment la relation d’amitié ne naît de toute façon pas d’un acte d’auto-affirmation de soi mais du recevoir d’un autre."
"Dans la France des XVIIIe et XIXe siècles, la lecture des correspondances amicales met aussi en évidence comment l’amitié semble se situer hors de la sphère des échanges et des contrats : ainsi, si les manifestations d’affection entre amis s’expriment aisément, y compris dans un débordement d’effusions, le service rendu entre amis (remboursement d’une dette, besoin d’une aide matérielle, etc.) ne s’énonce qu’avec difficulté, risquant à chaque fois d’entraîner un malentendu dans la relation et dans l’idéal amical. Empreint de délicatesse, le lien amical doit permettre d’annuler les inégalités de fortune entre amis et de parvenir à une réciprocité des échanges."
"Pour Aristote, sans amitié, pas de communauté possible car c’est elle qui constitue le lien premier dans la cité et c’est d’elle que procède le sentiment de justice. L’amitié s’inscrit alors dans une perspective politique. C’est l’amitié « politique » qui intéresse aussi Jacques Derrida dans plusieurs de ses ouvrages, et plus particulièrement dans les Politiques de l’amitié. L’amitié apparaît alors « constitutive du politique comme tel, donc de toute communauté humaine et finalement de la communauté de tous les hommes. » Universelle et inconditionnelle, elle ne présuppose aucune identité d’être, aucun lien de filiation ; elle est simplement accueil de l’autre."
"Pour la majorité des enquêtés, le nombre d’amis tourne autour de trois ou quatre lorsqu’il s’agit d’intimes, de « vrais amis » pour reprendre les qualificatifs employés par les enquêtés pour qualifier cette relation. Un chiffre qui n’a pas changé depuis les premières enquêtes des années 1960."
-Marie-Carmen Smyrnelis, « Amitiés, des sciences sociales aux réseaux sociaux de l'internet », Transversalités, 2010/1 (N° 113), p. 7-30. DOI : 10.3917/trans.113.0007. URL : https://www.cairn.info/revue-transversalites-2010-1-page-7.htm
Jean Maisonneuve, Psychologie de l’amitié, Paris, PUF, 2004, p. 4.
Claire Bidart, L’amitié, un lien social, Paris, La Découverte, 1997, p. 5.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Francesco_Alberoni