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    Bernard Gabin, L’art en philosophie : quelques thèses incontournables + Philosophie du langage : les principales thèses à connaître + La culture en philosophie : les thèses et idées à connaître

    Johnathan R. Razorback
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    Message par Johnathan R. Razorback Sam 17 Déc - 14:56

    https://misterprepa.net/lart-en-philosophie-quelques-theses-incontournables/

    PLATON, La République, Livre X : l’art n’est qu’imitation et illusion
    La poésie, génératrice d’illusion, est bannie de la cité idéale chez Platon. Dans un extrait, le philosophe grec prend l’image des trois lits : son essence, celui du menuisier (matériel) et celui du peintre (idéal). L’artiste copie en réalité le lit de l’artisan, lui-même créé à partir du concept. De ce fait, l’art est mensonge et illusion, il ne fait que copier la représentation matérielle d’un concept et non le concept même. “Est-ce représenter ce qui est tel qu’il est, ou ce qui paraît tel qu’il paraît; est-ce l’imitation de l’apparence ou de la réalité ? – De l’apparence dit-il.” Le Beau artistique n’existe pas pour Platon.



    ARISTOTE, Poétique : l’art est imitation
    Le disciple de Platon s’en distingue nettement ici. Il observe que les hommes ont tendance à imiter : “Imiter est en effet, dès leur enfance, une tendance naturelle aux hommes”, et ils prennent plaisir à contempler ces imitations. De plus, l’homme aime à apprendre par la contemplation. “Apprendre est un grand plaisir […]. On se plaît en effet à regarder les images car leur contemplation apporte un enseignement.” Notons que Pascal fait référence à cet extrait dans ses Pensées : “Quelle vanité que la peinture qui n’attire l’admiration que par la ressemblance des choses, dont on admire point les originaux.” En résumé, selon Aristote, l’art prend sa source dans le plaisir de l’imitation.

    Lire plus : Philosophie du langage : les principales thèses à connaître



    HEGEL, Esthétique : distinction entre beauté naturelle et beauté esthétique
    L’Esthétique chez Hegel renvoie à la philosophie des beaux-arts. “L’esthétique a pour objet le vaste empire du beau […] c’est la philosophie de l’art, ou plus précisément des beaux-arts.” Mais cette définition exclut le beau dans la nature et ne considère que le beau dans l’art. Cela est d’autant plus vrai que les thèses courantes privilégient le beau naturel. “Mais il est permis de soutenir dès maintenant que le beau artistique est plus élevé que le beau dans la nature.” L’esprit est toujours supérieur à la nature, en toute idée sont présents toujours l’esprit et la liberté. Hegel conclut : la beauté artistique est supérieure à la beauté naturelle car elle est le fruit de l’esprit.



    HEGEL, Esthétique : l’art n’est pas pure imitation
    L’art ne saurait se borner à une simple imitation de la nature. L’opinion courante considère que l’art doit imiter la nature. L’imagination désigne donc cette habileté à reproduire avec fidélité les objets naturels et constituerait alors le but essentiel de l’art. Mais cette idée restreint l’art à ne reproduire que ce qui existe déjà dans le monde, or l’art est création, il introduit de la nouveauté. Cette tâche reproductrice est inutile (“cette reproduction est du travail superflu”) et présomptueuse. L’art, “limité dans ses moyens d’expression et ne peut produire que des illusions partielles.”

    L’art, en s’en tenant à cette définition, ne nous donne qu’une “caricature de la vie”. L’art d’imitation est mesquin et sans grandeur pour Hegel. “L’art, quand il se borne à imiter, ne peut rivaliser avec la nature, et qu’il ressemble à un ver qui s’efforce en rampant d’imiter un éléphant.” L’art est donc médiocre quand il se borne à la simple imitation de la nature. L’art a quelque chose de surnaturel dans son caractère créateur.



    HEGEL, Esthétique : l’art doit exclure tout désir
    Notre rapport pratique au réel est le désir : “le mode de relations aux choses extérieures est le désir”. L’homme est un être de désir (idée qu’on retrouve chez de nombreux philosophes, dont Spinoza et son conatus en particulier). Dans ce rapport pratique, l’objet est détruit par le sujet. L’homme puise dans les objets sa subsistance, en fait usage et les sacrifie à sa satisfaction personnelle. Le désir maintient l’objet dans son existence sensible et concrète. “Il n’a que faire de tableaux”.

    Ainsi, ni l’objet ni le sujet n’y sont libres et indépendants : l’objet est destiné à être détruit et le sujet est prisonnier des intérêts individuels. Au contraire, l’art est libre contemplation par l’esprit : “Les relations de l’homme à l’œuvre d’art ne sont pas de l’ordre du désir. Il la laisse exister pour elle-même, librement, en face de lui, il la considère sans la désirer.” L’œuvre d’art est vue comme un objet théorique et non pratique. Dès lors, sans même avoir une réalité tangiblement concrète, l’œuvre d’art est dotée d’une existence sensible. L’art est donc libre contemplation par l’esprit, dénuée de tout désir.



    HEGEL, Esthétique : l’art est l’esprit se prenant pour objet
    L’esprit a la faculté de se considérer lui-même (par la pensée) : l’esprit peut se prendre lui-même pour objet de pensée. Quant à l’œuvre d’art, bien qu’elle se rapporte au sensible, elle est œuvre d’esprit, “dans la mesure où elles sont jaillies de l’esprit et produites par lui.”. De ce fait, l’art se rapproche plus de l’esprit et de la pensée que de la nature. Les créations de l’art ne sont pas des pensées et des concepts mais “un déploiement extérieur du concept, une aliénation qui le porte vers le sensible.” L’art est l’expression de l’esprit sous forme sensible.



    ARENDT, Condition de l’homme moderne : la durabilité de l’œuvre d’art
    L’œuvre d’art, unique, n’est pas échangeable. Elle donne à l’artifice humain sa stabilité. Elle n’a pas d’utilité pratique : « l’œuvre d’art doit être soigneusement écartée du contexte des objets d’usage ordinaires.” “Les œuvres d’art sont de tous les objets tangibles les plus intensément du monde; leur durabilité est presque invulnérable aux effets corrosifs des processus naturels.” Les véritables œuvres d’art traversent les temps, demeurant souvent inaltérées.

    Elles acquièrent un statut d’objet immortel créé par l’homme. Arendt met en évidence la permanence de l’art, ce pressentiment d’immortalité “d’une chose immortelle accomplie par des mains mortelles.” L’œuvre d’art échappe par ailleurs à la pensée créatrice lorsqu’elle se matérialise. Le processus de la pensée doit s’interrompre pour la réification matérialisatrice de l’oeuvre. Dans la création de l’œuvre d’art, la pensée est inutile.

    Lire plus : Le Monde chez Nietzsche



    NIETZSCHE, La généalogie de la morale (IIIe Dissertation) : le Beau ne relève pas d’une connaissance mais d’une promesse de bonheur
    Nietzsche, au début de cette troisième dissertation, propose une réflexion sur le Beau. Il prend ainsi partie pour la vision de Stendhal, lequel voit dans l’art “une promesse de bonheur”. Au contraire, Kant a défini le beau du point de vue du spectateur désintéressé. Son point de vue est marqué par l’impersonnalité et l’universalité.

    “Au lieu d’envisager le problème esthétique en partant de l’expérience de l’artiste, Kant a médité sur l’art et le beau du seul point de vue du spectateur”. Ce spectateur n’éprouve aucun ravissement face à la beauté: “Est beau, dit Kant, ce qui provoque un plaisir désintéressé.” A l’opposé, Stendhal voit dans le beau “une promesse de bonheur”, il récuse le désintéressement avancé par Kant. La beauté chez Nietzsche ne relève pas d’une connaissance, n’est pas théorique, mais est une expérience érotique.



    NIETZSCHE, La volonté de puissance : l’art désigne un total épanouissement
    “Sans la musique, vivre aurait été une erreur.” écrit Nietzsche. Pour ce dernier, l’art est d’une importance vitale, il est joie et plénitude radicale, en plus d’apparaître comme le premier degré de l’effort vers le surhumain. “Ce qui est essentiel dans l’art, c’est qu’il parachève l’existence, c’est qu’il est générateur de perfection et de plénitude: l’art est essentiellement l’affirmation, la bénédiction, la divinisation de l’existence.” L’art, par essence, est affirmation de l’existence, création de nouvelles valeurs.



    PLATON, Ion : le poète crée par don divin
    D’où vient le génie qu’on accorde aux poètes ? Cette question suscite encore débat aujourd’hui. La vision de Platon est aussi celle de nombreux poètes tel Ronsard. C’est l’inspiration qui anime l’artiste. Le poète est inspiré, il perd la raison : ‘il n’est pas en état de créer avant d’être inspiré par un dieu”. Son privilège divin expliquerait sa spécialisation: il est le réceptacle de la Divinité. C’est aussi cette part de divin qui écarte l’artiste de la société et en fait un homme à part. Le poète crée par l’effet d’un don divin et se fait l’intermédiaire de cette divinité.



    KANT, Critique du jugement : le beau plaît universellement sans concept
    “Le beau est ce qui est représenté, sans concept, comme l’objet d’une satisfaction universelle.” Citation extrêmement connue, Kant pointe la satisfaction désintéressée et universelle comportant une ressemblance avec le jugement logique. Celui-ci constitue par des concepts une connaissance de l’objet esthétique. Toutefois, cette universalité est subjective et non pas logique: “il a droit à une universalité subjective.” L’universalité du jugement esthétique ne repose pas sur des concepts.



    KANT, Critique de la faculté de juger : le jugement de goût ne peut se prouver
    Le jugement de goût, dire si l’on apprécie ou non une œuvre, ne peut pas se prouver. Il se situe entre subjectivité et objectivité. En effet, chacun connaît le poncif : “à chacun son propre goût”. Il fonde le goût sur la pure subjectivité. Le second lieu commun du goût est le suivant : “on ne dispute pas du goût”. Celui-ci reconnaît l’absence de concepts déterminés du goût. Néanmoins, pour Kant, il manque une proposition intermédiaire : “on peut discuter du goût.” Or, “là où il est permis de discuter, on doit aussi avoir l’espoir de s’accorder”.

    On constate donc l’antinomie du jugement de goût : le jugement ne se fonde pas sur des concepts (autrement on pourrait discuter à ce sujet), et pourtant le jugement se fonde aussi sur des concepts (autrement on ne pourrait même pas discuter à ce sujet). Le jugement de goût ne peut se prouver, et pourtant on peut en discuter.



    KANT, Critique du jugement : le génie est une disposition innée par laquelle la nature fournit des règles à l’art
    “Le génie est le talent de produire ce dont on ne peut donner de règle déterminée.” Par conséquent, “l’originalité est sa première qualité.” Donnant des règles à l’art, “ses productions doivent être des modèles, elles doivent être exemplaires”. Le génie ne peut “lui-même décrire” ou expliquer comment il a accompli ses productions “mais il donne la règle par une inspiration de la nature”. Dans le génie, la nature donne des règles à l’art.



    NIETZSCHE, Humain trop humain : le génie n’est pas une disposition innée de l’esprit
    Encore une fois Nietzsche s’oppose à Kant. Selon lui, c’est le travail qui crée l’œuvre. “L’activité du génie ne paraît pas le moins du monde quelque chose de foncièrement différent de l’activité de l’inventeur en mécanique”. Le génie représente un long travail. Nietzsche l’associe à quelque chose proche de l’activité artisanale. En réalité, c’est pour éviter de l’envier que l’on a employé le terme de génie (“Nommer quelqu’un “divin”, c’est dire: “ici nous n’avons pas à rivaliser.””) mais aussi par aversion pour la genèse laborieuse. Le génie ne relève d’un miracle, d’un talent inné, il est le fruit d’un long travail.



    Bergson, Le Rire : Quel est l’objet de l’art ?
    “Quel est l’objet de l’art ? Si la réalité venait frapper directement nos sens et notre conscience, si nous pouvions entrer en communication immédiate avec les choses et avec nous-mêmes, je crois bien que l’art serait inutile, ou plutôt que nous serions tous artistes, car notre âme vibrerait alors continuellement à l’unissons de la nature.” Bergson

    D’après sa thèse sur le langage “nous ne voyons pas les choses mêmes; nous nous bornons, le plus souvent, à lire des étiquettes collées sur elles.” Le langage est trompeur. “Ce sont aussi nos propres états d’âme qui se dérobent à nous dans ce qu’ils ont d’intime, de personnel, d’originalement vécu.” Nous n’apercevons de notre état d’âme “que son déploiement extérieur. Nous ne saisissons de nos sentiments que leur aspect impersonnel”.

    L’individualité nous échappe, “nous vivons dans une zone mitoyenne entre les choses et nous, extérieurement aux choses, extérieurement aussi à nous-mêmes.” Au contraire, l’artiste vit détaché de tout cela. Le détachement de l’artiste est naturel, inné, mais imparfait. “Si ce détachement était complet, si l’âme n’adhérait plus à l’action par aucune de ses perceptions, elle serait l’âme d’un artiste comme le monde n’en a point vu encore. Elle excellerait dans tous les arts à la fois […]. Elle apercevrait toutes choses dans leur pureté originelle.”

    L’art n’a qu’un objet. Celui d’écarter les symboles pratiquement utiles, les généralités conventionnellement et socialement acceptées, tout ce masque la réalité même. Bergson conclut avec cette fameuse phrase : “L’art n’est sûrement qu’une vision plus directe de la réalité.”


    BOURDIEU, La Distinction : Le goût est un habitus qui s’ignore
    On finit par un peu de sociologie. Le goût est le produit d’un déterminisme social qui permet de se distinguer. D’après Bourdieu, la dimension esthétique s’élabore comme rapport désintéressé au monde: ce désintérêt est un signe distinctif d’une position privilégiée dans la société. La disposition esthétique “est aussi une expression distinctive d’une position privilégiée dans l’espace social“. “Comme toute espèce de goût, elle unit et sépare”. Le goût est également un marqueur social.

    Il est “ce par quoi on se classe et par quoi on est classé.”, il est “l’affirmation pratique d’une différence inévitable.” De plus, Bourdieu fait remarquer que ce sont les dégoûts qui sont le plus révélateurs de cet habitus et finit même par affirmer : “les goûts sont avant tout des dégoûts”

    Ainsi, le goût est un habitus qui s’ignore.


    _________________
    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

    « Rien de grand ne s’est jamais accompli dans le monde sans passion. » -Hegel, La Raison dans l'Histoire.

    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".

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    Message par Johnathan R. Razorback Sam 17 Déc - 14:57

    ARISTOTE, Politique : l’homme est un animal politique
    Aristote fait ce constat aujourd’hui élémentaire mais doté d’une importance cruciale. L’homme est un animal politique. Seul lui a l’usage de la parole: “la voix est le signe de la douleur et du plaisir”; elle permet de se faire comprendre par les autres, de communiquer sur le juste et l’injuste. Le langage apparaît ainsi comme un caractère distinctif du politique. En effet, les animaux sociables (abeilles, fourmis par exemple) disposent d’un système de communication complexe, mais cela ne lui permet pas d’avoir des débats d’ordre éthiques ou politiques.



    DESCARTES, Lettre au marquis de Newcastle : Parler est le propre de l’homme
    Descartes, avec sa thèse de l’animal-machine, conçoit la parole comme le propre de l’homme. Tous les hommes emploient des signes pour communiquer leurs pensées. En revanche, l’absence de ces signes chez l’animal montre qu’il ne pense pas. D’après ce postulat, la parole est le reflet de nos pensées Seuls les hommes ont des pensées qu’ils peuvent communiquer. On peut toutefois se demander s’il est nécessaire de communiquer ses pensées pour en avoir. De plus, ce que transmet la parole n’est pas nécessairement notre pensée sous sa forme la plus complète.



    ROUSSEAU, Essai sur l’origine des langue : les passions à l’origine des premières langues
    Rousseau se pose la question de l’apparition des premières langues. Selon lui, les langues méridionales sont nées des passions, les langues du Nord des besoins. Ce sort funeste réservé aux langues du Nord, menacerait l’évolution de la langue au fur et à mesure que la société évolue. Lorsque se formèrent les premiers liens sociaux, naquirent aussi les passions. Les langues furent d’abord familiales et limitées aux proches. “Il y avait des familles, mais il n’y avait point de nation; il y avait des langues domestiques; mais il n’y avait point de langues populaires.”

    De fait, “il fallut toute la vivacité des passions agréables pour commencer à faire parler les habitants.” Ainsi, les premières langues sont “filles du plaisir et non du besoin”, elles sont l’expression des premières passions. La langue changea lorsque les besoins “forcèrent chacun à ne songer qu’à lui-même”. Cette dernière phrase peut faire penser à la transition entre un état de nature et un état politique.

    Lire plus : La culture en philosophie : les thèses et idées à connaître



    SARTRE, Qu’est-ce que la littérature ? : les mots à l’état sauvage
    Sartre s’intéresse ici au sens des mots et du langage en littérature. En effet, le signe linguistique constitue la matière première de ces artistes. Il est donc pertinent de se demander quel sens leur est accordé. “Les poètes sont des hommes qui refusent d’utiliser le langage”. Ils ne voient pas les mots comme des objets mais pour ce qu’ils sont, des mots. Les poètes “ne nomment rien du tout”; la nomination impliquant un perpétuel sacrifice du nom à l’objet nommé. “Le nom s’y révèle l’inessentiel, en face de la chose qui est essentielle.”

    Contre l’utilisation du langage, le poète sert les mots en les considérant comme des choses et non comme des signes. Le poète est au-deçà des mots: les mots sont pour lui des choses naturelles. En résumé, le langage poétique est l’envers du langage instrument.



    HABERMAS, Monde et communication : Que signifie communiquer ?
    L’échange linguistique est au cœur de la réflexion d’Habermas. Le langage ne semble exister véritablement et n’avoir de sens qu’au sein d’un dialogue, d’une communication. Il faut être plusieurs pour mettre en œuvre le langage. Dans le libre débat communicationnel, une coordination et une entente se dessinent.

    “J’appelle communicationnelles, les interactions dans lesquelles les participants sont d’accord pour coordonner en bonne intelligence leurs plans d’action.” écrit Habermas. A travers la communication transparaît une exigence de vérité, de justesse ou de sincérité selon que l’on se réfère à quelque chose du monde objectif, social ou subjectif.

    Dans l’activité communicationnelle, chacun est motivé rationnellement par l’autre à agir conjointement. L’intercompréhension linguistique est ainsi liée à la reconnaissance intersubjective des exigences de validité. En d’autres termes, la communication passe par un phénomène d’intercompréhension lié à l’engagement volontaire des deux sujets.



    SAUSSURE, Cours de linguistique générale : “le signe linguistique est arbitraire.”
    On passe maintenant à l’étude du sens dans le langage. D’où vient le sens des mots ? Pour Saussure, celui est purement arbitraire, conventionnel. Entre signifiant et signifié existe un lien de convention. Le philosophe prend pour preuves les différences entre les langages existants.

    Le signe linguistique diffère en-cela du symbole qui lui est universel. “Le symbole a pour caractéristique de n’être jamais tout à fait arbitraire.” A l’inverse, l’alphabet latin est en lui-même une convention, il suffit de regarder la multitude d’alphabets existants, et ne parlons même pas des langues qui en découlent.

    Dès lors, le signifiant n’a pas de lien naturel avec le signifié. Le signifiant est immotivé, c’est-à-dire arbitraire par rapport au signifié, avec lequel il n’a aucune attache naturelle dans la réalité. On l’aura compris, le signe linguistique est arbitraire et conventionnel. Saussure penche en faveur de cette thèse, mais de nombreux philosophes sont du côté inverse .



    WITTGENSTEIN, Le Cahier bleu : d’où vient le sens des mots ?
    Wittgenstein était persuadé de la perfection de la langue ordinaire, en raison de sa subjectivité. “Les mots n’ont d’autre signification que celle que vous leur avez donnée » déclara-t-il un jour à ses étudiants. Le sens des mots repose sur les explications que nous pouvons en donner. Or, nous ne pouvons pas dans la plupart des cas. “Nombreux sont les mots qui n’ont pas de sens précis.” “C’est nous qui avons donné leur sens aux mots”, nous pouvons donc enquêter sur leur sens. En bref, le sens des mots vient de l’usage que nous en faisons. Une forme de liberté semble exister dans l’usage de la langue.



    WITTGENSTEIN, Tractatus logico-philosophicus : le langage exprime-t-il la pensée ?
    voir Descartes et sa thèse selon laquelle le langage est la preuve que l’homme pense. Néanmoins, Wittgenstein constate les pièges du langage. Selon lui, “le langage travestit la pensée”, il est mensonger. Le philosophe français fournit une invitation au silence quand cela est nécessaire. “Il y assurément de l’inexprimable. Celui-ci se montre, il est l’élément mystique.” Il conclut ainsi parfaitement : “Ce dont on ne peut pas parler, il faut le taire.”



    BENVENISTE, Problèmes de linguistique générale : entre signifiant et signifié, un lien nécessaire
    Ce linguiste s’oppose à Saussure en s’intéressant à la structure du signe linguistique. Il cherche à aller à la structure intime des choses, à “retrouver la structure intime du phénomène dont on ne perçoit que l’apparence extérieure.” Le signe linguistique est symbiose du signifiant et du signifié: leur lien est psychologiquement nécessaire. Pour rappel, en linguistique, le signifiant désigne l’image acoustique et le signifié le concept.

    “Entre le signifiant et le signifié, le lien n’est pas arbitraire, au contraire, il est nécessaire.” . Le concept est en réalité l’image phonique dans notre esprit. Ils sont consubstantiels: “L’esprit n’accueille de forme sonore que celle qui sert de support à une représentation identifiable pour lui; sinon, il la rejette comme inconnue ou étrangère.” Signifiant et signifié = les 2 faces d’une même notion et se composent ensemble. “Cette consubstantialité […] assure l’unité structurale du signe linguistique.” Signifiant et signifié sont nécessairement liés, autrement le sens disparaît.



    BENVENISTE, Problèmes de linguistique générale : le sujet se constitue dans et par le langage
    Le langage est la nature de l’homme: il lui permet de se définir. Si le langage n’était qu’un instrument de communication adapté à cet emploi, il ne s’agirait que du discours. Le langage est bien plus que cela. Lorsqu’il est apte à servir d’instrument, qu’il se prête à transmettre ce qu’on lui confie, c’est le discours. Toutefois, le langage, partie constitutive de la nature humaine, ne peut être qu’un simple instrument.

    “Le langage est dans la nature de l’homme, qui ne l’a pas fabriqué.” Benveniste réaffirme ici le caractère dominant du langage sur les conventions sociales. “Le langage enseigne la définition même de l’homme.” Ainsi, “c’est dans et par le langage que l’homme se constitue comme sujet.” Il est l’unité psychique qui transcende la totalité des expériences vécues et qui assure la permanence de la conscience. Pour faire simple, la subjectivité humaine se définit par le langage.



    NIETZSCHE, Humain, trop humain : langage et logique n’expriment pas le réel
    Le langage et la logique n’expriment pas le réel, ils contribuent en vérité aux illusions de la métaphysique. D’après Nietzsche, le langage ne dévoile pas l’essence du réel : les mots sont davantage des instruments d’action que de connaissance. Il est pourtant longtemps apparu comme un moyen de maîtriser le monde et de le connaître entièrement, mais cela s’est avéré être une illusion.

    “C’est parce que l’homme a cru […] aux concepts et aux noms des choses comme à des aeternae veritates qu’il s’est donné cet orgueil avec lequel il s’élevait au-dessus de la bête.” Nietzsche conclut : “en fait, le langage est le premier degré de l’effort vers la science”. Or, d’après celui-ci, la science ne s’oppose pas à l’idéal ascétique, à l’idée d’une vérité métaphysique et ne fait que renforcer la croyance aux arrières-mondes. Retenons surtout que le langage, s’il apparaît comme la condition de l’action, n’exprime pas le réel.



    LEIRIS, Biffures : le mot écorché
    Comment le sujet rencontre-t-il le langage ? C’est la question que se pose Leiris. Il y a en effet un apprentissage inhérent à la connaissance d’un langage, d’une langue. Surtout, un rapport tragique et structurant lie le sujet au langage. Pour l’exprimer, Leiris prend l’exemple d’un mot écorché (mal prononcé). Une fois le sujet confronté à sa véritable prononciation, le mot qui auparavant avait toujours été écorché, prend une allure de découverte.

    “De chose propre à moi, il devient chose commune et ouverte.” Ce n’est pas une exclamation confuse, c’est un des éléments constituant du langage, “ce vaste instrument de communication dont une observation fortuite m’a permis d’entrevoir l’existence extérieure à moi-même et remplie d’étrangeté”. Le constat de Leiris est relativement clair : l’extériorité du langage s’impose à l’intimité du sujet.



    MERLEAU-PONTY, Signes : le langage traduit-il la pensée ?
    Le langage n’est pas un simple outil au service du sens: “la parole joue toujours sur fond de parole, elle n’est jamais qu’un plis dans l’immense tissu du parler.” La parole ne renvoie jamais à une pure pensée sans parole. La réflexion de Merleau-Ponty se rapproche de celle de Wittgenstein mais la conclusion n’est pas la même.

    Il y a bien une “opacité du langage”, laquelle n’est jamais limitée que par du langage. Le langage ne traduit pas une sorte de texte idéal: “Si la parole le satisfait, c’est par un équilibre dont elle définit elle-même les conditions.” Pour Merleau-Ponty, bien plus qu’un moyen, qu’un instrument, “le langage est quelque chose comme un être.”

    “Le sens est le mouvement total de la parole et c’est parce que notre pensée traîne dans le langage.” La parole est une perfection sans modèle, elle est la pensée.



    BERGSON, Le Rire : le langage nous éloigne des choses
    Les mots se glissent entre les choses et nous, “nous ne voyons pas les choses mêmes”, mais “des étiquettes collées sur elles.” Ils nous dérobent de notre individualité: « nous apercevons de notre état d’âme que son déploiement extérieur.” “Nous ne saisissons de notre état d’âme que leur aspect impersonnel […] l’individualité nous échappe.”

    L’utilité et l’action nous imposent ce langage abstrait et anonyme: “nous vivons […] extérieurement aux choses, extérieurement aussi à nous-mêmes.” Dans La Pensée et le mouvant, Descartes fournit un conseil : il faut se confier à l’immédiat et à l’intuition pour éviter toute déformation du langage. Par ailleurs, c’est en raison de ce caractère factice du langage que l’art existe. Les artistes sont ceux qui voient l’intimité des choses mêmes et non pas le nom inscrit sur leur étiquette.



    AUSTIN, Quand dire, c’est faire : le langage de la vie ordinaire
    Il est des moments durant lesquels : “Dire, c’est faire”. Parfois, le simple fait d’énoncer la phrase, la réalise. Il ne s’agit pas de phrase descriptive ou affirmative en elles-mêmes. Austin les nomme “phrase performative”. De ce point de vue, dire, c’est agir et produire des effets. Pour approfondir, on observe que ce type de phrase est fréquente dans un cadre très formel comme lors des mariages par exemple. Cette réflexion montre en quoi le langage dispose d’un pouvoir politique et administratif suivant le contexte, et que certaines déclarations sont dotées d’une puissance effective.



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    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

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    Bernard Gabin, L’art en philosophie : quelques thèses incontournables + Philosophie du langage : les principales thèses à connaître + La culture en philosophie : les thèses et idées à connaître Empty Re: Bernard Gabin, L’art en philosophie : quelques thèses incontournables + Philosophie du langage : les principales thèses à connaître + La culture en philosophie : les thèses et idées à connaître

    Message par Johnathan R. Razorback Sam 17 Déc - 14:58

    Traduction œcuménique de la Bible : l’homme est fait pour dominer la nature
    On commence d’abord par un texte ancien. L’étude de la Bible est intéressante en philosophie sur de nombreux sujets. En effet, ce texte est fondateur de nos valeurs morales et de notre culture. Il y a beaucoup à analyser dans ces écrits. Selon eux, l’homme aurait été créé à l’image de Dieu afin de dominer toutes les créatures. L’homme est défini comme maître sur Terre (ici équivalent de Monde). “Soyez féconds et prolifiques, remplissez la terre et dominez-la.” est-il écrit de manière injonctive dans la Bible. Le monde a été fait pour l’homme en vue de sa domination. Ici s’observe les prémices de l’idée d’une supériorité de la culture sur la nature.



    FREUD, L’Avenir d’une illusion : la civilisation se dresse contre l’individu
    Dans un extrait de cet ouvrage, Freud explique en quoi la culture, faite pour l’homme, doit se défendre contre lui. “La culture humaine comprend tout le savoir et le pouvoir qu’ont acquis les hommes afin de maîtriser les forces de la nature [et] toutes les dispositions nécessaires pour régler les rapports des hommes entre eux”. La culture humaine regroupe l’ensemble des moyens de maîtriser la nature et des règles régissant les rapports humains. Ces deux orientations de la culture sont interdépendantes et renvoient toutes deux à l’intérêt de l’humanité, lequel est mal supporté par l’individu. “La civilisation doit ainsi être défendue contre l’individu”, contre le naturel, le caractère primaire de l’homme.



    LINTON, De l’Homme : la culture produit l’individu et la société
    Dans ce livre, Linton s’intéresse à l’héritage social et ses modes de transmission. Selon lui, la société produit la culture, qu’elle transmet pour assurer sa survie. “Le langage et la vie sociale organisée ont fourni à l’homme des instruments pour la transmission et la préservation de la culture.” “Les sociétés humaines se maintiennent par l’apprentissage […] et sont ainsi, en elles-mêmes, un produit de la culture”. Un apprentissage réglé et organisé des individus est donc indispensable pour que la culture forme les hommes: “L’héritage social, c’est-à-dire la culture, des êtres humains a ainsi acquis une double fonction. Il contribue à adapter l’individu à la fois à sa place dans la société et à son environnement naturel.”



    LINTON, De l’Homme : la culture, phénomène du vivant
    De cette première thèse découle la suivante. “Le caractère supra-individuel de la culture est prouvé par son aptitude à se perpétuer et à survivre à la disparition des individus qui la partagent.” La culture surplombe l’individu, elle le façonne presque entièrement, et il la transmet à son tour. Chaque individualité est façonnée et donc soumise à l’influence d’une certaine culture.

    “La culture est entièrement extérieure à l’individu à sa naissance, mais au cours du développement de cet individu elle devient partie intégrante de sa personnalité.” Alors qu’elle se pose comme extérieure à notre individualité au départ, la culture devient rapidement un fondement inconscient de la personnalité. “Son transfert d’individu à individu […] ne peut se faire que par des contacts individuels”, cependant la vie d’une culture dépend de cette transmission directe. Si celle-ci est rompue, la culture meurt.

    “Ces idées et valeurs sont pour toute culture l’étincelle de vie […]. Sans elles, une culture, même si son contenu est parfaitement connu, n’est qu’un sujet d’étude anatomique.” Ce qu’a voulu montrer Linton ici, c’est le caractère vivant de la culture, laquelle demeure mouvante par transmission directe d’un individu à l’autre.

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    LEIRIS, Race et civilisation : l’homme est d’abord culture = “être doué de culture
    Seul l’homme peut créer une culture, par sa capacité à symboliser et accumuler. La culture est propre à notre espèce. C’est par la tradition que se perpétue la culture, sous toutes ses formes : “Alors que la race est strictement affaire d’hérédité, la culture est essentiellement affaire de tradition”. La culture transmet (par la voie du langage, de l’image ou simplement de l’exemple) une façon de vivre, elle est “caractéristique de la façon de vivre d’un certain milieu d’une certaine société pour une époque d’une durée plus ou moins longue”. On observe en effet différents types de cultures : la culture humaine mais aussi celle d’un milieu social particulier par exemple. Pour faire simple, Leiris considère la culture comme l’âme de la société, elle comprend tout ce qui est socialement hérité ou transmis.”



    LEIRIS, Race et civilisation : la puissance de la culture
    “Si forte est, d’une manière générale, l’emprise de la culture sur l’individu” constate Leiris. La culture donne forme à la satisfaction des besoins les plus élémentaires : la nutrition, les vêtements, les relations sexuelles, le rêve lui-même. “La culture intervient donc à tous les niveaux de l’existence individuelle et se manifeste aussi bien dans la façon dont l’homme satisfait ses besoins physiques que dans sa vie intellectuelle et dans ses impératifs moraux.” Rien, dans l’existence humaine, ne peut échapper à la culture.



    LEIRIS, Race et civilisation : la culture, un système temporaire d’une grande plasticité
    Dans tous les domaines, les inventions se succèdent par modification de la culture existante. Il peut s’agir de la religion; la réflexion morale, les œuvres artistiques, les relations sociales, etc. La culture “résulte d’une coopération” et non du génie. C’est toute la société qui participe à l’évolution culturelle. Il n’y a de culture que vivante, cette dernière est donc par essence évolutive.


    HOBBES, Le Citoyen : le monde à l’état de nature
    Tout d’abord, il convient de savoir que l’état de nature est une hypothèse permettant de penser le statut de l’homme hors de la société, de l’état de société. Hobbes distingue les deux et constate. Hors de la société civile, la liberté humaine est très entière mais infructueuse, chacun empiète sur celle de l’autre. En revanche, ”dans le gouvernement d’un État bien établi, chaque particulier ne se réserve qu’autant de liberté qu’il lui en faut pour vivre commodément”. De même, hors de la société, « chacun a tellement de droit sur toute choses qu’il ne s’en peut prévaloir et n’a la possession d’aucune; mais dans la république, chacun jouit paisiblement de son droit particulier”

    Hors de la société règne un continuel brigandage, une exposition continue à la violence, “mais dans l’État, cette puissance n’appartient qu’à un seul”. Hors de la société, “les passions règnent”, “dans l’ordre du gouvernement, la raison exerce son empire, la paix revient au monde,la sûreté publique est rétablie, les richesses abondent”. Après cette énumération, les bienfaits et avantages de la société civile apparaissent évidents. La raison assure une liberté réelle. En entrant dans la société, l’individu acquiert une réelle sécurité et intègre une civilisation.



    ROUSSEAU, Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes : l’homme à l’état de nature
    A l’image de Hobbes, Rousseau s’intéresse à l’état de nature, en particulier la condition de l’homme. Contrairement à lui, Rousseau regrette l’état de nature, état d’insouciance et de paix selon lui. L’homme, à l’état de nature, vit sans liens sociaux: “l’homme sauvage, sujet à peu de passions et se suffisant à lui-même, n’avait que les sentiments et les lumières propres à cet état; qu’il ne sentait que ses vrais besoins.” Sans éducation, histoire, ni évolution, l’homme à l’état de nature ne vit que pour lui-même. Ses seuls besoins étaient naturels (se nourrir, boire, dormir, se reproduire). Rousseau attribue ainsi aux progrès sociaux la cause du malheur des hommes, et leur impossibilité à vivre heureux et en paix. La culture n’a donc pas toujours belle allure aux yeux de certains philosophes.



    KANT, Idée d’une histoire universelle du point de vue cosmopolitique : l’insociable sociabilité
    Dans cet extrait bien connu, Kant dresse un constat fondamental de la psychologie humaine. D’après lui, deux principes antagonistes assurent le développement de la société. Ce sont deux penchants humains : s’associer et rechercher son intérêt privé. Dès lors apparaît “l’insociable sociabilité des hommes, c’est-à-dire leur inclination à entrer en société, inclination qui est cependant doublée d’une répulsion générale à le faire”.

    “L’homme a un penchant à s’associer […] mais il manifeste aussi une grande propension à se détacher (s’isoler)”. “C’est cette résistance qui éveille toutes les forces de l’homme.” Loin d’être mauvaise, l’opposition à autrui éveille les forces humaines qui conduiront à la culture et à la moralité. Au fil du temps “commence à se fonder une forme de pensée qui peut, avec le temps, transformer la grossière disposition naturelle au discernement moral en des principes pratiques déterminés.” Contre-intuitivement, la recherche égoïste des intérêts privés stimule et développe les dispositions de l’homme.



    MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception : tout est fabriqué et est naturel chez l’homme
    Chez l’homme, tout est construit : “Il est impossible de superposer chez l’homme une première couche de comportements que l’on appellerait “naturels” et un monde culturel ou spirituel fabriqué. Tout est fabriqué et tout est naturel chez l’homme.” Cette réflexion nous rapproche de ce qu’est le propre de l’homme et tente de résoudre un conflit interne. Il n’y aurait pas d’un côté un caractère naturel, instinctif, et d’autre part une facette culturelle qui entrerait en conflit. La culture ne serait pas une opposition à notre nature, mais bien une part de notre nature elle-même. En d’autres termes, c’est dans la nature de l’homme que d’être cultivé.

    Pour ceux qui le voudrait, il est possible d’approfondir encore cette pensée, à la manière de Philippe Descola (Par-delà nature et culture) qui parvient même à dépasser cette dualité. En somme, l’homme est en même temps nature et culture.



    LÉVI-STRAUSS, Tristes Tropiques : comment connaître l’homme naturel ?
    Grand anthropologue, Lévi-Strauss a mené de nombreuses études sur des peuples primitifs en vue d’en apprendre davantage sur les sociétés modernes. “L’étude de ces sauvages apporte autre chose que la révélation d’un état de nature utopique ou la découverte de la société parfaite au cœur des forêts; elle nous aide à bâtir un modèle théorique de la société humaine”. l’anthropologie doit “parvenir à démêler “ce qu’il y a d’originaire et d’artificiel dans la nature actuelle de l’homme.” L’étude des peuples primitifs, loin de s’attarder uniquement sur l’homme naturel, nous permet de penser la condition humaine.

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    MONTAIGNE, Essais, Livre I : civilisation et barbarie
    Nous appelons barbares les mœurs des étrangers en les comparant à celles “parfaites” de notre pays: “chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage.” De même disons-nous sauvages les produits naturels alors que nous devrions le dire de nos produits artificiels. En réalité, la barbarie est un préjugé de la coutume.Nous appelons barbarie ce qui ne correspond pas à nos mœurs.



    LÉVI-STRAUSS, Race et histoire : la racine de l’inhumanité
    L’on s’est beaucoup interrogé sur ce qui nous rend humain (la culture), mais peut-être faut-il prendre la question à revers pour mieux comprendre. Lévi-Strauss tente donc ici de définir l’inhumanité. On voit bien que les groupes humains se rejettent les uns les autres, c’est “l’attitude la plus marquante et la plus distinctive de ces sauvages mêmes”. En réalité, la notion d’humanité est apparue tardivement. Les hommes se pensent d’abord contre les autres, contre les voisins ou les étrangers.

    C’est là tout le paradoxe du relativisme culturel : “c’est dans la mesure même où l’on prétend établir une discrimination entre les cultures et les coutumes que l’on s’identifie le plus complètement avec celle qu’on essaye de nier.” Lévi-Strauss conclut ainsi parfaitement : “Le barbare, c’est d’abord l’homme qui croît à la barbarie.”, c’est celui qui n’est pas capable de reconnaître l’humanité de l’autre

    Concernant la barbarie, vous pourrez approfondir avec l’ouvrage de Tzvetan Todorov, La peur des barbares. Au-delà du choc des civilisations. Ces thèses peuvent également être mises en relief avec les problématiques actuelles d’appropriation culturelle, voire celles moins modernes sur le mouvement tiers-mondiste par exemple.


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    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

    « Rien de grand ne s’est jamais accompli dans le monde sans passion. » -Hegel, La Raison dans l'Histoire.

    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".


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