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    Alain Vaillant, Le lyrisme de l'ironie

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Alain Vaillant, Le lyrisme de l'ironie Empty Alain Vaillant, Le lyrisme de l'ironie

    Message par Johnathan R. Razorback Lun 30 Jan - 20:40

    "L’ironie est la forme spécifique de comique qui concilie la dérision et le lyrisme ou, pour le dire plus exactement, qui approfondit et intensifie l’esprit de dérision jusqu’à le confondre paradoxalement avec le lyrisme."

    "Flaubert étant considéré comme l’un des principaux initiateurs de la modernité littéraire, il suggère l’idée que cette ironie si curieusement empathique fait corps avec la modernité, que cette dernière n’est peut-être rien d’autre qu’une philosophie et une esthétique de l’ironie en acte. Cette assimilation entre ironie et modernité, loin de pouvoir apparaître comme originale, est d’ailleurs l’un des lieux communs les plus rebattus du discours contemporain, philosophique, esthétique ou littéraire, sur la culture moderne. Sur le versant philosophique, les romantiques allemands, dont les thèses jouissent aujourd’hui d’une extraordinaire popularité en France, nous ont habitués à voir dans l’ironie la conséquence des contradictions de l’être lui-même : en sorte que tout intellectuel ou artiste qui veut comprendre et embrasser le réel dans la complexité se doit apparemment d’être ironique. Sur le versant littéraire, si l’on admet que l’ironie recouvre toutes les manières de signifier obliquement la chose, il faut en conclure que la littérature tout entière est virtuellement ironique et que la littérature moderne, qui y ajoute la pleine conscience de cette obliquité structurelle, est, elle, effectivement ironique.

    Sur ces deux bases, philosophique et littéraire, on ne compte pas le nombre d’essais, de colloques ou de thèses sur l’ironie – considérée en général ou appliquée à telle époque, à telle pratique artistique ou à tel auteur8 Mais la difficulté est alors que la notion d’ironie perd en précision et en pertinence ce qu’elle gagne en superficie et que, en particulier, elle n’a plus guère de rapport avec le sens étroitement rhétorique et figural qui était le sien dans la culture classique, où l’ironie jouait pourtant un rôle central. En dernière analyse, l’ironie semble tenir seulement lieu de sagesse ou de morale artistique ; au pire, on aboutit à un raisonnement purement tautologique, la modernité se caractérisant par l’esprit d’ironie et, en retour, l’ironie étant définie par la conscience de la modernité et de sa complexité. Au contraire, la thèse que nous défendrons ici est qu’il existe bien, sous des formes et avec des modalités diverses, un seul principe ironique, allant aussi bien pour le modèle canonique de l’ironie antiphrastique de l’âge classique que pour les avatars romantiques de l’écriture oblique ou fragmentaire. Et c’est seulement lorsque nous aurons acquis ce point et que nous camperons solidement sur cette position théorique que nous pourrons envisager de comprendre, cette fois en termes de poétique historique, pourquoi, à l’époque de la modernité (entendons depuis la Révolution), lyrisme et ironie ont partie liée."
    -Alain Vaillant, "Le lyrisme de l'ironie", in Alain Vaillant (dir.), Esthétique du rire, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2012, 408 pages, pp.277-306: https://books.openedition.org/pupo/2328#ftn7




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