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    Paul Foulquié, La dialectique

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Paul Foulquié, La dialectique Empty Paul Foulquié, La dialectique

    Message par Johnathan R. Razorback Dim 19 Mar - 19:40



    "Le renouveau d’intérêt que suscite la pensée hégélienne et, d’autre part, la propagande marxiste, tendent à intégrer dans le vocabulaire courant le mot « dialectique », réservé jusque-là au vocabulaire technique de la philosophie.

    Malheureusement, ce mot a un long passé et a connu pas mal de vicissitudes. Or — c’est, nous le verrons, une des thèses essentielles de la conception dialectique de la pensée chez nos contemporains — si la signification d’un terme dépend de la constellation mentale de celui qui l'utilise, elle reste aussi plus ou moins affectée par les significations successives qu’il eut au cours de son histoire." (p.5)

    "L’ancienne dialectique s’est prolongée jusqu’à Hegel (1770-1831). Durant cette longue période, la dialectique est conçue comme un art analogue à la logique ou même s’identifiant avec elle. En tout cas, la valeur du principe de contradiction, fondement essentiel de la logique classique, n’y est pas mise en doute : la même chose ne peut pas à la fois être et n’être pas ; des propriétés contradictoires sont incompossibles.

    Pour Hegel, au contraire, la contradiction conditionne la pensée comme les choses, et le néant seul répond aux exigences de non-contradiction formulées parla logique classique. Par là était inaugurée une dialectique nouvelle, fort différente de l’ancienne." (p.6)

    "En s’en tenant à l’étymologie, la dialectique peut être conçue : d’abord comme l’art de la parole, non pas de la parole qui touche et persuade c'est l’objet de la rhétorique —, mais de celle qui fait comprendre et convainc ; ensuite comme l’art de la discussion. Elle comprend l’art de la démonstration et celui de la réfutation. Le dialecticien sait organiser son savoir en un système cohérent et surtout trouver un fondement logique à ses opinions ; mais il se distingue principalement par son habileté à discerner le vrai et le faux dans les affirmations des autres, à découvrir le point faible de leur thèse et l'argument décisif capable de réduire l’objectant au silence. La dialectique est donc étroitement apparentée à la logique. Mais ce dernier terme désigne plutôt la théorie de la pensée rationnelle, tandis que la dialectique consiste dans l’art d’appliquer à la discussion la connaissance des règles de la logique. Le dialecticien est au logicien ce que l’avocat est au juriste.

    Le levier essentiel de l’activité logique est le principe d’identité qui, sous sa forme négative, devient le principe de contradiction sur lequel se fondent les preuves par l’absurde. C’est sur ce dernier que s’appuie presque exclusivement le dialecticien qui discute avec un adversaire : le réfuter consiste à faire voir que sa thèse contredit soit les faits les plus évidents soit une autre de ses thèses ; des propositions contradictoires ne pouvant être vraies à la fois, cet adversaire est acculé à reconnaître qu’il s’est trompé." (pp.7-8 )

    "Les thèses que Parménide établissait déductivement à partir de la notion d’être, son disciple Zénon entreprend de les défendre par l’absurde, en montrant que les thèses opposées amènent à des conséquences contradictoires : c’est sur le principe de contradiction que se fonde essentiellement celui qui passe pour l’inventeur de la dialectique.

    On le voit, Zénon ne prétend pas démontrer une thèse ; il se contente de réfuter celle de ses adversaires.

    Ces adversaires, nous l’avons dit, ce sont d’abord les pythagoriciens pour qui les choses sont nombres : les corps sont constitués par une somme de points et leurs propriétés dépendent de celles des nombres exprimant ces sommes. Cette thèse, Zénon la traduit et l’attaque sous cette forme : les choses sont multiples, ou : les choses sont une pluralité. [...]
    Partant de la thèse professée ou approuvée par son adversaire, le partisan de l’imité des choses argumente ainsi : la pluralité impliquant la divisibilité, ou bien les éléments auxquels aboutit la division sont sans grandeur, mais alors une somme d’éléments sans grandeur ne fera pas une chose d’une certaine grandeur ; ou bien ces éléments possèdent une grandeur, et dans ce cas ils sont indéfiniment divisibles en sorte que la chose qu’ils constituent est infiniment grande. Il ne peut donc pas y avoir de pluralité dans les choses.

    Les arguments relatifs au mouvement, que nous a conservés Aristote au livre VI de sa Physique, sont plus célèbres. Dans le système de Parménide, nous l’avons vu, le mouvement est impossible ; or la négation du mouvement est si paradoxale qu’elle écartait de la thèse unitaire de l’être et amenait au pluralisme. Zénon se propose de défendre son maître et pour cela attaque ceux qui l’abandonnent en montrant qu’une théorie pluraliste comme celle des pythagoriciens est aussi incapable que la théorie moniste d’expliquer le mouvement.

    Si l’espace se compose de parties distinctes et divisibles, le mobile qui le parcourt devra d’abord traverser la première moitié de la trajectoire, puis la moitié de ce qui reste et ainsi de suite indéfiniment ; par suite, ü s’approchera de plus en plus près du but mais il n’y parviendra jamais. [...]

    On voit ainsi les caractéristiques essentielles de la dialectique de Zénon. D’abord, son but immédiat n’est pas d’édifier un système ou de prouver une thèse, mais de démolir les conceptions de l’adversaire : c’est une dialectique négative. Ensuite, elle part, non de prémisses certaines, mais de prémisses admises ou approuvées par l’adversaire : elle argumente ad hominem." (pp.12-14)

    "
    (pp.16-18)
    -Paul Foulquié, La dialectique, PUF, 1966 (1949 pour la première édition), 128 pages.



    _________________
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