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    Gérard Duménil, Michael Löwy et Emmanuel Renault, Les 100 mots du marxisme

    Johnathan R. Razorback
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    Gérard Duménil, Michael Löwy et Emmanuel Renault, Les 100 mots du marxisme Empty Gérard Duménil, Michael Löwy et Emmanuel Renault, Les 100 mots du marxisme

    Message par Johnathan R. Razorback Ven 3 Fév - 18:47

    "Chez Marx, la notion d'aliénation [Entfremdung ou Entäusserung en allemand] désigne: a) une séparation (séparation de l'homme avec sa nature, séparation du travailleur d'avec ses produits) ; b) une inversion (inversion des rapports de l'homme et de Dieu, de la vie sociale et de la vie politique, de l'activité humaine et des rapports économiques) ; et c) une oppression du sujet par l'objet (soumission des hommes aux représentations religieuses, domination de la vie sociale par l'Etat, oppression des travailleurs par le capital)." (p.10)

    "Avec ce mot d'ordre [Socialisme ou barbarie] -qui, contrairement à ce qu'elle laisse entendre, ne vient pas de Marx ou Engels, mais apparaît pour la première fois dans sa brochure [La crise de la social-démocratie]- Rosa Luxemburg, se dissocie de la vision déterministe traditionnelle du socialisme comme résultat inévitable des contradictions du capitalisme." (p.18)

    "Chez Marx, le rapport entre la base économique et le reste de la vie sociale n'est ni mécanique, ni direct. Le propre de la conception matérialiste de l'histoire est certes d'expliquer l'édifice des institutions et des représentations à partir des facteurs économiques. Mais Marx insiste également sur l'importance des dynamiques spécifiques de la lutte des classes et il souligne l'action réciproque entre les différents éléments d'une même formation sociale. C'est en ce sens qu'Engels parlera d'autonomie relative des superstructures et dira des conditions économiques qu'elles sont déterminantes en "dernière instance" seulement." (p.19)

    "Pour Marx, le capital est de la valeur en mouvement, le mouvement du capital passant d'une forme à l'autre et à la recherche de son accroissement [...] Tout ce qui rassemble à du capital mais ne répond pas à cette définition est déclaré "capital fictif". [...]
    Il y a deux degrés principaux de "fictivité". D'abord tous les titres émis par l'Etat en vue de financer ses déficits représentent du capital fictif. L'Etat n'investit pas les fonds collectés par emprunt dans une activité capitaliste d'entreprise (en faisant abstraction ici de la nationalisation d'entreprises industrielles). Cet argent est dépensé en salaires, achats de fournitures, constructions, infrastructures, mais il n'y a pas de circuit du capital mis en mouvement. Ces crédits rapportent à leurs auteurs des intérêts qui sont des fractions de l'impôt collecté par l'Etat (ou de nouveaux emprunts). Les emprunts des entreprises ou les actions qu'elles émettent sont également classés par Marx à la rubrique "capital fictif", bien que les fonds soient investis en capital au sens plein du terme
    ." (p.26)

    "On ne saurait définir un capital comme une somme d'argent, un ensemble de marchandises, ou des machines et autres intrants dans l'atelier. Chaque petite parcelle, un atome, d'un capital passe d'une forme à l'autre et se conserve au fil de ces mutations. Par exemple, on peut saisir un atome de capital sous la forme d'argent ; le voir se métamorphoser en marchandise sur le marché lorsque l'entreprise achète une matière première ; entrer dans l'atelier pour y subir le travail ; être présenté sur le marché dans le corps de la marchandise où il a été rejoint par beaucoup de ses semblables ; et retrouver sa forme d'argent lorsque la marchandise est vendue." (p.28)

    "Ce n'est pas Marx, bien entendu, qui a crée le concept de classes sociales: on le trouve chez les économistes classiques, les historiens et les socialistes utopiques. Marx n'a d'ailleurs pas donné une définition précise de la classe sociale. Le dernier chapitre du volume III du Capital, consacré aux classes, est resté inachevé. Mais il existe une approche proprement marxienne des classes sociales; qui les rattache aux rapports sociaux de production: la classe dominante est celle des propriétaires des moyens de production, qui s'approprie, chaque fois d'une manière spécifique, le surplus produit par la classe des travailleurs directs ; entre ces deux pôles principaux se distribue tout un éventail de situations sociales intermédiaires." (p.30)

    "Marx et Engels désignent comme communisme primitif le mode de production existant dans les périodes préhistoriques, avant l'apparition de la propriété privée, des classes sociales, du patriarcat et de l'Etat." (p.34)

    "Marx n'attribue pas les crises du capitalisme à l'insuffisance du salaire, provoquant une insuffisance de débouchés. Il réfute explicitement cette thèse au livre II du Capital en rappelant que les épisodes de crise sont généralement précédés des phases de hausse du salaire." (p.46)

    "Le fait que les produits du travail deviennent des marchandises suppose qu'ils soient fabriqués en vue d'être présentés sur un marché pour y être échangés. C'est le résultat d'un ensemble de pratiques sociales. La transformation générale des produits en marchandises ne se réalise pleinement que dans le mode de production capitaliste." (p.76)

    "Idéalisme [...] primat des idées sur le réel." (p.78)

    "La notion de pratique (Praxis) désigne précisément l'activité humaine comme conditionnée par des conditions matérielles indépendantes d'elle et néanmoins modifiables par elle. Le nouveau matérialisme sera nommé dans L'Idéologie allemande (1846) "matérialisme pratique"." (p.79)

    "Marx développa une interprétation de l'histoire des sociétés humaines fondée sur la distinction de grandes périodes qu'il appela des "modes de production". Une liste type de ces modes de production est: "asiatique, antique, féodal et bourgeois moderne". Le mode de production bourgeois n'est autre que le mode de production capitaliste. A chacun de ces modes est associée une structure de classe. En simplifiant, on peut opposer une classe dominante et une classe dominée. Côté dominants, dans l'ordre de la liste ci-dessus, on trouve le despote asiatique et la classe des notables (prêtres, fonctionnaires) qui l'entourent, les maîtres, les seigneurs et les bourgeois. Du côté des dominés, on trouve les paysans encadrés par les notables, les esclaves, les serfs et les prolétaires. Les classes dominantes s'approprient une fraction du travail (un surtravail) des classes dominées, ou du produit de ce travail, selon un processus désigné comme "exploitation" [...] Ce rapport fondamental se complique toujours du fait de l'existence de classes de commerçants et d'artisans, ou de salariés, dont le rapport aux classes dominantes est plus complexe. [...]
    Les forces productives et les rapports de production. Les premiers regroupent les déterminants de la capacité de produire: les ressources naturelles, la technique et l'organisation (dans l'entreprise mais aussi la division du travail entre entreprises). Les seconds renvoient aux rapports entre les hommes qui confèrent aux classes leurs positions sociales respectives, comme la propriété des moyens de production pour les capitalistes, et l'absence d'une telle propriété pour les prolétaires
    ." (p.82)

    "Marx s'est référé à différentes reprises à l'idée que le capitalisme tend à transformer le travail en une chose, ou à le faire apparaître comme une chose. C'est ce processus qui est rendu par le terme "réification" (Verdinglichung/Versachlichung).
    C'est à Georg Lukács, dans
    Histoire et conscience de classe (1923), que l'on doit d'avoir transformé les remarques éparses de Marx en une véritable théorie de la réification." (p.100-101)
    -Gérard Duménil, Michael Löwy et Emmanuel Renault, Les 100 mots du marxisme, PUF, coll "Que sais-je ?", 2009, 126 pages.


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