https://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_d%27Avenel
https://archive.org/details/lesfranaisdem00aven
"Les choses folles sont dites par la France qui se voit ; les choses sages sont faites par la France qui ne se voit pas." (p.11)
"Les mutations fréquentes dans l'étiquette de l'Etat, depuis un siècle, ont crée ce qui n'existait pas antérieurement chez nous: des partis. L'un agit, les autres critiquent. Ils se détestent, mais ils ne se font pas grand mal.
C'est un exutoire à l'éternel instinct de combativité et d'incompatibilité des hommes entre eux. La civilisation l'atténue sans l'abolir. Les ennemis d'autrefois se prenaient la vie, la terre, les troupeaux, les objets mobiliers ; ils se prenaient leurs femmes et leurs enfants. On le voit encore chez les sauvages. En se poliçant ils se prirent moins, tout en se battant presque autant.
Aujourd'hui ils se prennent seulement les emplois, les dignités, l'influence ; ils s'appliquent à se vexer les uns les autres sur certaines idées morales.
C'est un grand progrès ; nous n'en jouissons pas assez. Il en résulte ce bien tout moderne: la sécurité des personnes. Elle n'avait presque jamais existé, depuis les Gaulois du temps de César jusqu'à nos jours: car nul n'était sûr, sous l'ancien régime, de ne pas coucher à la Bastille." (p.17)
"La dignité, la liberté de la personne ont gagné beaucoup de terrain, en théorie, depuis un siècle, dans les monarchies comme dans les républiques: mais, dans les républiques comme dans les monarchies, l’autoritarisme gouvernemental a fait, en pratique, beaucoup de progrès." (p.23)
"Si le suffrage universel n'a pas les grandes vertus qu'on lui prête, il en a de petites à quoi l'on n'avait point songé: il accointe ensemble des gens qui, sans lui, n'auraient point de contact ; il n'unit peut-être pas les classes, mais il les force à faire connaissance. C'est son meilleur côté.
L'émiettement des citoyens qui n'ont plus rien à craindre ou à espérer les uns des autres et se retranchent volontiers dans une individualité ombrageuse, l'organisation usinière de l'industrie, la cherté des loyers dans les villes qui groupe les maisons en quartiers riches et pauvres -tout cela tend à restreindre de plus en plus, dans ce peuple de soi-disant égaux, la pénétration des classes entre elles." (p.32-33)
"A la Chambre française -en ceci semblable à toutes celles de l'ancien et du nouveau continent- il se rencontre un fort contingent de nullités dont la situation est indestructible ; et il se trouve, dans le pays, un lot respectable d'individus tout à fait propres, par leurs capacités spéciales, à entrer au Parlement qui ne peuvent, malgré des tentatives réitérées, en forcer les portes. Les premiers finissent par sembler dignes de la place, puisqu'ils l'occupent depuis longtemps, et l'on reproche aux seconds leurs échecs successifs, comme si la sottise devait constituer un grief contre ceux qui en sont les victimes trop constantes.
Ce qui les doit consoler c'est que, fussent-ils députés et même ministres, ils ne réaliseraient aucune des réformes qu'ils projettent. Émus des dangers qu'offraient leurs vues incohérentes, les élus du peuple ont pris le parti de chercher le salut dans l'impuissance." (p.40)
"Dans ce pays qui a douté de tout et tout bafoué, le culte de l'Etat n'a presque pas un athée ; il grandit avec les révolutions ; chaque régime lui bâtit de nouveaux temples, lui recrute de nouveaux prêtres, et le peuple(roi adore obstinément les décrets de cette idole par la bouche de qui le pouvoir central fait parler ses chefs de bureau." (p.45)
-Georges d'Avenel, Les Français de mon temps, Paris, Librairie Plon, 1904, 368 pages.
https://archive.org/details/lesfranaisdem00aven
"Les choses folles sont dites par la France qui se voit ; les choses sages sont faites par la France qui ne se voit pas." (p.11)
"Les mutations fréquentes dans l'étiquette de l'Etat, depuis un siècle, ont crée ce qui n'existait pas antérieurement chez nous: des partis. L'un agit, les autres critiquent. Ils se détestent, mais ils ne se font pas grand mal.
C'est un exutoire à l'éternel instinct de combativité et d'incompatibilité des hommes entre eux. La civilisation l'atténue sans l'abolir. Les ennemis d'autrefois se prenaient la vie, la terre, les troupeaux, les objets mobiliers ; ils se prenaient leurs femmes et leurs enfants. On le voit encore chez les sauvages. En se poliçant ils se prirent moins, tout en se battant presque autant.
Aujourd'hui ils se prennent seulement les emplois, les dignités, l'influence ; ils s'appliquent à se vexer les uns les autres sur certaines idées morales.
C'est un grand progrès ; nous n'en jouissons pas assez. Il en résulte ce bien tout moderne: la sécurité des personnes. Elle n'avait presque jamais existé, depuis les Gaulois du temps de César jusqu'à nos jours: car nul n'était sûr, sous l'ancien régime, de ne pas coucher à la Bastille." (p.17)
"La dignité, la liberté de la personne ont gagné beaucoup de terrain, en théorie, depuis un siècle, dans les monarchies comme dans les républiques: mais, dans les républiques comme dans les monarchies, l’autoritarisme gouvernemental a fait, en pratique, beaucoup de progrès." (p.23)
"Si le suffrage universel n'a pas les grandes vertus qu'on lui prête, il en a de petites à quoi l'on n'avait point songé: il accointe ensemble des gens qui, sans lui, n'auraient point de contact ; il n'unit peut-être pas les classes, mais il les force à faire connaissance. C'est son meilleur côté.
L'émiettement des citoyens qui n'ont plus rien à craindre ou à espérer les uns des autres et se retranchent volontiers dans une individualité ombrageuse, l'organisation usinière de l'industrie, la cherté des loyers dans les villes qui groupe les maisons en quartiers riches et pauvres -tout cela tend à restreindre de plus en plus, dans ce peuple de soi-disant égaux, la pénétration des classes entre elles." (p.32-33)
"A la Chambre française -en ceci semblable à toutes celles de l'ancien et du nouveau continent- il se rencontre un fort contingent de nullités dont la situation est indestructible ; et il se trouve, dans le pays, un lot respectable d'individus tout à fait propres, par leurs capacités spéciales, à entrer au Parlement qui ne peuvent, malgré des tentatives réitérées, en forcer les portes. Les premiers finissent par sembler dignes de la place, puisqu'ils l'occupent depuis longtemps, et l'on reproche aux seconds leurs échecs successifs, comme si la sottise devait constituer un grief contre ceux qui en sont les victimes trop constantes.
Ce qui les doit consoler c'est que, fussent-ils députés et même ministres, ils ne réaliseraient aucune des réformes qu'ils projettent. Émus des dangers qu'offraient leurs vues incohérentes, les élus du peuple ont pris le parti de chercher le salut dans l'impuissance." (p.40)
"Dans ce pays qui a douté de tout et tout bafoué, le culte de l'Etat n'a presque pas un athée ; il grandit avec les révolutions ; chaque régime lui bâtit de nouveaux temples, lui recrute de nouveaux prêtres, et le peuple(roi adore obstinément les décrets de cette idole par la bouche de qui le pouvoir central fait parler ses chefs de bureau." (p.45)
-Georges d'Avenel, Les Français de mon temps, Paris, Librairie Plon, 1904, 368 pages.