"Comment [...] est-on passé d'un empire, autrefois immense territoire s'étendant sur trois continents, à un pays quasiment réduit au plateau anatolien ? D'un empire musulman, dirigé par un sultan-calife confiné dans ses palais du Bosphore, à un pays laïc ayant pour capitale Ankara ?" (p.7)
"Le début du règne d'Abdülhamid II est catastrophique. Neuf mois après son accession au trône, le souverain est confronté à une nouvelle guerre avec la Russie. Mais contrairement à la guerre de Crimée (1854-1856), cette fois-ci l'Empire n'est pas soutenu par la France et l'Angleterre ; il est seul. Le 24 avril 1877, les troupes russes lancent leur assaut. La guerre sera courte et s'achève, au bout de neuf mois, par une défaite écrasante des armées ottomanes, les troupes russes s'arrêtant à seulement dix kilomètres d'Istanbul. Les Anglais sauvent la capitale in extremis en envoyant des navires dans le Bosphore ; le prix à payer sera Chypre quelque mois plus tard. [...]
Le congrès de Berlin, qui se réunit du 13 juin au 13 juillet 1878, marque une nouvelle étape dans l'affaiblissement de l'Empire en Europe. La Serbie est déclarée indépendante ; le Monténégro obtient des gains territoriaux. [...] En Anatolie orientale, les Russes conservent les provinces de Kars et d'Ardahan [...] Les provinces de Bosnie et d'Herzégovine sont occupées et administrées par l'Autriche-Hongrie." (p.29)
"Le 23 juillet 1908, sous la menace d'un coup de force militaire, Abdülhamid rétablit la monarchie constitutionnelle. C'est la révolution jeune-turque, soutenue par des patriotes, à l'esprit progressiste et séculariste. Ils veulent sauver l'Empire par une constitution, instaurer l'égalité entre les communautés. A Istanbul et dans les grandes villes de l'Empire, une foule en liesse applaudit la fin du despotisme hamidien et le début d'une nouvelle ère. L'Empire se retrouve doté d'une constitution, d'un parlement, d'élection et, pendant un certain temps, d'une grande liberté d'expression et d'association.
Mais les jeunes-turcs subissent trois déconvenues en octobre 1908. Tout d'abord, la Bulgarie, encore vassale théoriquement, proclame son indépendance (5 octobre). Le même jour, l'Autriche-Hongrie annexe la Bosnie-Herzégovine qu'elle administre depuis le congrès de Berlin. Enfin, le lendemain, la Crète demande son rattachement à la Grèce." (p.30)
"Les guerres balkaniques (octobre 1912-août 1913) se soldent par un bilan catastrophique: perte de Salonique, foyer de la révolution jeune-turque ; perte de l'Albanie, de l'Épire, de la Macédoine et d'une bonne partie de la Thrace. Amputée de ses possessions, la Turquie ne conserve plus en Europe qu'Istanbul et la Thrace orientale.
En 1913, après l'échec d'un contre-coup d'Etat libéral, le CUP [Comité Union et Progrès] prend le pouvoir et décrète des mesures d'exception: état de siège, arrestations, condamnations à mort ou à l'exil, suspension des journaux hostiles et suppression des partis d'opposition. Dominé par les chefs du mouvement, Talat, Enver pacha et Cemal pacha, il dispose de pouvoirs quasi dictatoriaux et tient à l'écart les non-Turcs.
A la veille de la Première Guerre mondiale, l'opinion publique est favorable à la France et à la Triple-Entente, mais le CUP, par hostilité envers les russes, conclut une alliance secrète avec l'Allemagne. Les Turcs entrent en guerre le 11 novembre 1914. [...]
L'attaque russe de 1915-1916 en Anatolie est très meurtrière, tandis que dans les provinces arabes, les Arabes et les Anglais progressent [...]
Acculé, à bout de souffle, l'Empire ottoman n'a pas d'autre issue que de signer l'armistice de Moudros (30 octobre 1918). Tandis que les Alliés pénètrent en Thrace orientale et que la flotte anglaise arrive dans la mer de Marmara, les dirigeants du CUP s'enfuient de la capitale où les troupes alliées entrent le 13 novembre 1918. L'Empire a cessé d'exister, même s'il se maintient encore officiellement jusqu'à la fondation de la République turque en 1923." (p.33)
"1793: Selim III procède à des réformes. Création de nouvelles troupes dans le cadre du nazam-i cedid ("le nouvel ordre")." (p.34)
"1807: révolte des janissaires, opposés au nizam-i cedid. Déposition de Selim III (29 mai), assassiné le 28 juillet 1808." (p.35)
"1808-1839: Règne de Mahmud II.
Début d'un vaste programme de réformes. Cette politique est lancée au moment où de graves conflits menacent l'intégrité de l'Empire: la Serbie accède à l'autonomie (1815-1829), le châh de Perse obtient des concessions (1821-1823), la Grèce devient indépendante (1821-1829), et l'Égypte autonome [...]
1826: Massacre et abolition des janissaires (16 juin). Création d'une nouvelle armée [...] dont l'uniforme et la formation sont inspirés du modèle occidental.
1827: Traité de Londres scellant l'alliance entre la Grande-Bretagne, la France et la Russie afin de libérer la Grèce (6 juil.). Défaite de la flotte ottomane dans la baie de Navarin, à l'ouest du Péloponnèse (27 oct).
1829: Traité d'Andrinople (14 sep.). Indépendance de la Grèce, autonomie reconnue de la Serbie, de la Moldavie et de la Valachie." (p.35)
"1839-1861: Règne d'Abdülmecid Ier. [...]
1839: Proclamation de la charte impériale (Hatt-i Serif) de Gülhane (3 nov.) annonçant la période des réformes (Tanzimat). Tous les sujets de l'Empire ottoman sont désormais égaux, sans distinction de religion ; la justice est la même pour tous.
1839-1840: Crise d'Orient liée à la question d'Égypte. Elle se solde, grâce à l'intervention des grandes puissances, par le rétablissement de l'autorité ottomane sur la Syrie, province provisoirement occupée par les troupes égyptiennes de Méhémet Ali.
1841: Convention de Londres. Elle ferme les Détroits (Bosphore, Dardanelles) à tous les vaisseaux de guerre et confirme la souveraineté héréditaire de Méhémet Ali sur l'Égypte (13 juil.). [...]
1853-1856: Un conflit entre catholiques et orthodoxes pour le contrôle des sanctuaires de Terre sainte déclenche la guerre de Crimée. Français et Anglais soutiennent les Ottomans face aux Russes. [...]
1856: [...] Un nouveau rescrit impérial (18 fév.), Islâhat Hatt-i Hümayunu, deuxième grand texte des Tanzimat, confirme et amplifie les principes de celui de 1839 en réaffirmant la liberté des cultes, l'égalité civile, la suppression de l'affermage des impôts, l'admisibilité des non-musulmans à tous les emplois et leur représentation accrue dans les institutions administratives. [...]
1861-1876: Règne d'Abdülaziz." (p.36)
"1872: Reconquête du Yémen, prise de Sanaa [capitale]." (p.37)
"1876-1909: Règne d'Abdülhamid II.
1876: Le 23 décembre, le grand vizir Midhat pacha annonce la promulgation d'une constitution. [...]
1877: Midhat pacha exilé (5 fév.). Avec lui s'achève l'époque des grands vizirs et des ministres réformateurs [...]
1876-1878: Guerre avec la Serbie et la Russie.
1877: Invoquant le droit de porter secours aux Slaves des Balkans, la Russie déclare la guerre (19 avr.)." (p.38)
"1878: Abdülhamid II suspend la Constitution (14 fév.), dissout le Parlement. [...]
Armistice signé à Edirne (31 janvier). Les troupes russes avancent jusqu'à San Stefano (Yesilköy), à seulement dix kilomètres de la capitale ottomane ; la flotte anglaise entre dans la mer de Marmara. Traité de San Stefano (3 mars).
Le congrès de Berlin marque une nouvelle étape dans l'affaiblissement de l'Empire en Europe (13 juil.): indépendance de la Serbie, de la Roumanie et de la Bulgarie. Occupation de la Bosnie et de l'Herzégovine par les Autrichiens, de l'Anatolie orientale par les Russes (Batum, Kars, Ardahan). L'île de Chypre cédée à l'Angleterre. La Thessalie rattachée à la Grèce." (p.39)
"1895-1896: Révoltes arméniennes et répression." (p.40)
"1908: Le 24 juillet, après trente année de pouvoir despotique et devant les menaces de coup d'Etat qui viennent de l'armée de Macédoine, le sultan Abdülhamid II consent à rétablir la Constitution suspendue depuis 1878 et annonce les élections d'un nouveau Parlement. La révolution jeune-turque est en train de s'accomplir." (p.41)
-Frédéric Hitzel, Le dernier siècle de l’Empire Ottoman (1789-1923), Les Belles Lettres, coll Guide Belles Lettres des civilisations, 2015, 319 pages.
"Le début du règne d'Abdülhamid II est catastrophique. Neuf mois après son accession au trône, le souverain est confronté à une nouvelle guerre avec la Russie. Mais contrairement à la guerre de Crimée (1854-1856), cette fois-ci l'Empire n'est pas soutenu par la France et l'Angleterre ; il est seul. Le 24 avril 1877, les troupes russes lancent leur assaut. La guerre sera courte et s'achève, au bout de neuf mois, par une défaite écrasante des armées ottomanes, les troupes russes s'arrêtant à seulement dix kilomètres d'Istanbul. Les Anglais sauvent la capitale in extremis en envoyant des navires dans le Bosphore ; le prix à payer sera Chypre quelque mois plus tard. [...]
Le congrès de Berlin, qui se réunit du 13 juin au 13 juillet 1878, marque une nouvelle étape dans l'affaiblissement de l'Empire en Europe. La Serbie est déclarée indépendante ; le Monténégro obtient des gains territoriaux. [...] En Anatolie orientale, les Russes conservent les provinces de Kars et d'Ardahan [...] Les provinces de Bosnie et d'Herzégovine sont occupées et administrées par l'Autriche-Hongrie." (p.29)
"Le 23 juillet 1908, sous la menace d'un coup de force militaire, Abdülhamid rétablit la monarchie constitutionnelle. C'est la révolution jeune-turque, soutenue par des patriotes, à l'esprit progressiste et séculariste. Ils veulent sauver l'Empire par une constitution, instaurer l'égalité entre les communautés. A Istanbul et dans les grandes villes de l'Empire, une foule en liesse applaudit la fin du despotisme hamidien et le début d'une nouvelle ère. L'Empire se retrouve doté d'une constitution, d'un parlement, d'élection et, pendant un certain temps, d'une grande liberté d'expression et d'association.
Mais les jeunes-turcs subissent trois déconvenues en octobre 1908. Tout d'abord, la Bulgarie, encore vassale théoriquement, proclame son indépendance (5 octobre). Le même jour, l'Autriche-Hongrie annexe la Bosnie-Herzégovine qu'elle administre depuis le congrès de Berlin. Enfin, le lendemain, la Crète demande son rattachement à la Grèce." (p.30)
"Les guerres balkaniques (octobre 1912-août 1913) se soldent par un bilan catastrophique: perte de Salonique, foyer de la révolution jeune-turque ; perte de l'Albanie, de l'Épire, de la Macédoine et d'une bonne partie de la Thrace. Amputée de ses possessions, la Turquie ne conserve plus en Europe qu'Istanbul et la Thrace orientale.
En 1913, après l'échec d'un contre-coup d'Etat libéral, le CUP [Comité Union et Progrès] prend le pouvoir et décrète des mesures d'exception: état de siège, arrestations, condamnations à mort ou à l'exil, suspension des journaux hostiles et suppression des partis d'opposition. Dominé par les chefs du mouvement, Talat, Enver pacha et Cemal pacha, il dispose de pouvoirs quasi dictatoriaux et tient à l'écart les non-Turcs.
A la veille de la Première Guerre mondiale, l'opinion publique est favorable à la France et à la Triple-Entente, mais le CUP, par hostilité envers les russes, conclut une alliance secrète avec l'Allemagne. Les Turcs entrent en guerre le 11 novembre 1914. [...]
L'attaque russe de 1915-1916 en Anatolie est très meurtrière, tandis que dans les provinces arabes, les Arabes et les Anglais progressent [...]
Acculé, à bout de souffle, l'Empire ottoman n'a pas d'autre issue que de signer l'armistice de Moudros (30 octobre 1918). Tandis que les Alliés pénètrent en Thrace orientale et que la flotte anglaise arrive dans la mer de Marmara, les dirigeants du CUP s'enfuient de la capitale où les troupes alliées entrent le 13 novembre 1918. L'Empire a cessé d'exister, même s'il se maintient encore officiellement jusqu'à la fondation de la République turque en 1923." (p.33)
"1793: Selim III procède à des réformes. Création de nouvelles troupes dans le cadre du nazam-i cedid ("le nouvel ordre")." (p.34)
"1807: révolte des janissaires, opposés au nizam-i cedid. Déposition de Selim III (29 mai), assassiné le 28 juillet 1808." (p.35)
"1808-1839: Règne de Mahmud II.
Début d'un vaste programme de réformes. Cette politique est lancée au moment où de graves conflits menacent l'intégrité de l'Empire: la Serbie accède à l'autonomie (1815-1829), le châh de Perse obtient des concessions (1821-1823), la Grèce devient indépendante (1821-1829), et l'Égypte autonome [...]
1826: Massacre et abolition des janissaires (16 juin). Création d'une nouvelle armée [...] dont l'uniforme et la formation sont inspirés du modèle occidental.
1827: Traité de Londres scellant l'alliance entre la Grande-Bretagne, la France et la Russie afin de libérer la Grèce (6 juil.). Défaite de la flotte ottomane dans la baie de Navarin, à l'ouest du Péloponnèse (27 oct).
1829: Traité d'Andrinople (14 sep.). Indépendance de la Grèce, autonomie reconnue de la Serbie, de la Moldavie et de la Valachie." (p.35)
"1839-1861: Règne d'Abdülmecid Ier. [...]
1839: Proclamation de la charte impériale (Hatt-i Serif) de Gülhane (3 nov.) annonçant la période des réformes (Tanzimat). Tous les sujets de l'Empire ottoman sont désormais égaux, sans distinction de religion ; la justice est la même pour tous.
1839-1840: Crise d'Orient liée à la question d'Égypte. Elle se solde, grâce à l'intervention des grandes puissances, par le rétablissement de l'autorité ottomane sur la Syrie, province provisoirement occupée par les troupes égyptiennes de Méhémet Ali.
1841: Convention de Londres. Elle ferme les Détroits (Bosphore, Dardanelles) à tous les vaisseaux de guerre et confirme la souveraineté héréditaire de Méhémet Ali sur l'Égypte (13 juil.). [...]
1853-1856: Un conflit entre catholiques et orthodoxes pour le contrôle des sanctuaires de Terre sainte déclenche la guerre de Crimée. Français et Anglais soutiennent les Ottomans face aux Russes. [...]
1856: [...] Un nouveau rescrit impérial (18 fév.), Islâhat Hatt-i Hümayunu, deuxième grand texte des Tanzimat, confirme et amplifie les principes de celui de 1839 en réaffirmant la liberté des cultes, l'égalité civile, la suppression de l'affermage des impôts, l'admisibilité des non-musulmans à tous les emplois et leur représentation accrue dans les institutions administratives. [...]
1861-1876: Règne d'Abdülaziz." (p.36)
"1872: Reconquête du Yémen, prise de Sanaa [capitale]." (p.37)
"1876-1909: Règne d'Abdülhamid II.
1876: Le 23 décembre, le grand vizir Midhat pacha annonce la promulgation d'une constitution. [...]
1877: Midhat pacha exilé (5 fév.). Avec lui s'achève l'époque des grands vizirs et des ministres réformateurs [...]
1876-1878: Guerre avec la Serbie et la Russie.
1877: Invoquant le droit de porter secours aux Slaves des Balkans, la Russie déclare la guerre (19 avr.)." (p.38)
"1878: Abdülhamid II suspend la Constitution (14 fév.), dissout le Parlement. [...]
Armistice signé à Edirne (31 janvier). Les troupes russes avancent jusqu'à San Stefano (Yesilköy), à seulement dix kilomètres de la capitale ottomane ; la flotte anglaise entre dans la mer de Marmara. Traité de San Stefano (3 mars).
Le congrès de Berlin marque une nouvelle étape dans l'affaiblissement de l'Empire en Europe (13 juil.): indépendance de la Serbie, de la Roumanie et de la Bulgarie. Occupation de la Bosnie et de l'Herzégovine par les Autrichiens, de l'Anatolie orientale par les Russes (Batum, Kars, Ardahan). L'île de Chypre cédée à l'Angleterre. La Thessalie rattachée à la Grèce." (p.39)
"1895-1896: Révoltes arméniennes et répression." (p.40)
"1908: Le 24 juillet, après trente année de pouvoir despotique et devant les menaces de coup d'Etat qui viennent de l'armée de Macédoine, le sultan Abdülhamid II consent à rétablir la Constitution suspendue depuis 1878 et annonce les élections d'un nouveau Parlement. La révolution jeune-turque est en train de s'accomplir." (p.41)
-Frédéric Hitzel, Le dernier siècle de l’Empire Ottoman (1789-1923), Les Belles Lettres, coll Guide Belles Lettres des civilisations, 2015, 319 pages.