"[Tancrède:] J'ai tant d'ennemis que j'ai au moins la satisfaction de savoir qu'ils ne pourront jamais tous exercer leur vengeance." (p.90)
"Depuis longtemps maintenant, Tancrède essayait d'effacer le souvenir de cette terrible expérience et chaque fois que quelque chose venait la lui rappeler, il sentait son optimisme s'obscurcir aussitôt, comme un verre d'eau claire soudainement brouillé par une goutte d'encre." (p.101-102)
"Un cortège de récits d'aventures et d'actes héroïques l'accompagnait, entourant sa présence d'un halo excitant de rêves et de mystères." (p.112)
" -J'ai failli te manquer. C'est pour te cacher que tu t'es mis sous cet arbre ?
-Non, c'est simplement que j'aime le contact des arbres, de la nature en général. Les jardins du bord sont les seuls endroits où je me sente bien sur le Saint-Michel.
Le jeune inerme eut l'air dubitatif.
-Il est artificiel, pourtant. Rien à voir avec ce qu'on trouve sur Terre.
-Oui, mais il a été conçu par des gens sensibles. La nature n'y semble pas contrainte, les chemins suivent les courbes naturelles des collines et des ruisseaux, et les arbres ont l'air d'avoir poussé là où le vent a porté les graines.
-Ce n'est qu'une illusion. Ce jardin n'est qu'une façade créée de toutes pièces.
-Je le sais. Mais je veux pourtant croire que tout cela est vrai, qu'aucune pompe n'est dissimulée sous les ruisseaux, qu'aucune soufflerie n'est à l'origine du vent qui fait bouger les feuilles, qu'aucun paysagiste n'en a tracé les plans. C'est plus beau si on y croit.
Albéric secoua la tête.
-Je ne suis pas d'accord. Les choses les plus belles sont sans fard. Rien n'est plus beau que la vérité.
-La véritable nature, sans fard, n'est pas toujours belle. Beaucoup de souffrances, de violence, de peur, de froid, de faim. La véritable nature exhale plus souvent l'odeur de la décomposition que le parfum des fleurs.
-Peut-être. Néanmoins, même crue, je préfère la véritable nature à une imitation. Une imitation n'est qu'une falsification de la réalité. Peut-être que tout ce que tu viens d'énumérer est le prix à payer pour la vérité.
Tancrède eut un petit rire amusé, sans mépris.
-Voilà un discours que je n'ai pas l'habitude d'entendre. Dans mon milieu, les apparences comptent plus que tout. C'est l'honneur d'une famille noble que de les maintenir coûte que coûte." (p.427-428)
-François Baranger, Dominium Mundi, Livre I, Éditions Critic, 2013, 708 pages.
"Depuis longtemps maintenant, Tancrède essayait d'effacer le souvenir de cette terrible expérience et chaque fois que quelque chose venait la lui rappeler, il sentait son optimisme s'obscurcir aussitôt, comme un verre d'eau claire soudainement brouillé par une goutte d'encre." (p.101-102)
"Un cortège de récits d'aventures et d'actes héroïques l'accompagnait, entourant sa présence d'un halo excitant de rêves et de mystères." (p.112)
" -J'ai failli te manquer. C'est pour te cacher que tu t'es mis sous cet arbre ?
-Non, c'est simplement que j'aime le contact des arbres, de la nature en général. Les jardins du bord sont les seuls endroits où je me sente bien sur le Saint-Michel.
Le jeune inerme eut l'air dubitatif.
-Il est artificiel, pourtant. Rien à voir avec ce qu'on trouve sur Terre.
-Oui, mais il a été conçu par des gens sensibles. La nature n'y semble pas contrainte, les chemins suivent les courbes naturelles des collines et des ruisseaux, et les arbres ont l'air d'avoir poussé là où le vent a porté les graines.
-Ce n'est qu'une illusion. Ce jardin n'est qu'une façade créée de toutes pièces.
-Je le sais. Mais je veux pourtant croire que tout cela est vrai, qu'aucune pompe n'est dissimulée sous les ruisseaux, qu'aucune soufflerie n'est à l'origine du vent qui fait bouger les feuilles, qu'aucun paysagiste n'en a tracé les plans. C'est plus beau si on y croit.
Albéric secoua la tête.
-Je ne suis pas d'accord. Les choses les plus belles sont sans fard. Rien n'est plus beau que la vérité.
-La véritable nature, sans fard, n'est pas toujours belle. Beaucoup de souffrances, de violence, de peur, de froid, de faim. La véritable nature exhale plus souvent l'odeur de la décomposition que le parfum des fleurs.
-Peut-être. Néanmoins, même crue, je préfère la véritable nature à une imitation. Une imitation n'est qu'une falsification de la réalité. Peut-être que tout ce que tu viens d'énumérer est le prix à payer pour la vérité.
Tancrède eut un petit rire amusé, sans mépris.
-Voilà un discours que je n'ai pas l'habitude d'entendre. Dans mon milieu, les apparences comptent plus que tout. C'est l'honneur d'une famille noble que de les maintenir coûte que coûte." (p.427-428)
-François Baranger, Dominium Mundi, Livre I, Éditions Critic, 2013, 708 pages.