http://herve.dequengo.free.fr/Hayek/Hayek1.htm
http://herve.dequengo.free.fr/Hayek/Hayek2.htm
"Il semble également très peu probable, même dans les circonstances les plus favorables, que la nouvelle monnaie [l'euro] sera mieux gérée que les monnaies nationales actuelles."
-Friedrich August Hayek, La dénationalisation de la monnaie (1978).
"Il semble que moins les idées sont spécifiques et précises (ou moins elles sont comprises), plus grande est leur influence."
"Le développement politique a été grandement affecté par des croyances telles que la constante supériorité, également pour les questions sociales, du contrôle délibéré (ou d'une organisation consciente) par rapport aux résultats de processus spontanés qui ne sont pas dirigé par un esprit humain ; ou le caractère préférable d'un ordre basé sur un plan préétabli par rapport à un ordre créé par l'équilibre de forces opposées."
"Comme la démocratie est une bonne chose, plus le principe démocratique est poussé loin, mieux c'est à leurs yeux. La plus puissante de ces idées générales, à l'origine du développement politique récent, est bien sûr l'idée d'égalité matérielle. De façon caractéristique, ce n'est pas une conviction morale qui s'est développée spontanément, d'abord appliquée dans les relations entre les individus particuliers. C'est au contraire une construction intellectuelle conçue au départ dans l'abstrait et dont l'application et la signification pour des cas particuliers sont douteuses."
"Il n'y a pas de doute que la façon dont, durant les cent dernières années, l'homme a appris à maîtriser les forces de la nature a grandement contribué à la formation de la croyance selon laquelle un contrôle similaire des forces de la société améliorerait de même les conditions humaines."
"Il y a en effet peu de tâches moins gratifiantes de nos jours que celle qui consiste à développer le fondement philosophique sur lequel puisse reposer le développement futur de la société libre."
"Récemment, un des plus distingués économistes américains vivants s'est plaint d'une façon similaire que la tâche principale de ceux qui croient aux principes de base du système capitaliste doivent fréquemment défendre ce système contre les capitalistes - en fait, les grands économistes libéraux, depuis Adam Smith jusqu'à nos jours, l'ont toujours su."
"Toute orthodoxie, toute prétention qu'un système d'idées est fini et doit être accepté sans question comme un tout, sont des idées qui s'opposent nécessairement aux intellectuels, quelles que soient leurs opinions sur des questions particulières."
"Nous devons à nouveau rendre la création d'une société libre une aventure intellectuelle, un acte de courage. Ce qui nous manque, c'est une utopie libérale, un programme qui ne semble être ni une simple défense des choses existantes, ni une forme diluée de socialisme, mais un véritable radicalisme libéral qui n'épargne pas les susceptibilités des puissants (y compris les syndicats), qui ne soit pas strictement pratique, et qui ne se confine pas à ce qui semble aujourd'hui politiquement possible. Nous avons besoin de leaders intellectuels qui soient préparés à résister aux flatteries des gens puissants et influents, qui aient envie de travailler pour un idéal, aussi faibles soient les perspectives de sa prochaine réalisation."
-Friedrich August Hayek, Les intellectuels et le socialisme.
"Quels sont, alors, les caractères essentiels du vrai individualisme ? La première chose qui doit être dite est qu'il s'agit d'abord d'une théorie sociale : un essai pour comprendre les forces qui déterminent la vie sociale de l'homme, et ensuite seulement un ensemble de principes politiques déduits de cette vision de la société. Ce fait devrait en lui-même suffire à refuser le plus sot des malentendus qui courent à ce sujet : l'idée suivant laquelle l'individualisme postulerait (ou fonderait ses arguments sur cette hypothèse) l'existence d'individus isolés ou autosuffisants, au lieu de partir de l'étude de gens dont la nature et le caractère sont déterminés par le fait qu'ils existent en société [7] . Si cela était vrai, l'individualisme n'aurait vraiment rien à apporter à notre compréhension de la société. Mais son postulat essentiel est en fait différent, à savoir qu'il n'existe aucun autre moyen de s'assurer des phénom`nes sociaux que de comprendre les actions que les individus entreprennent vis-à-vis des autres, dans l'idée qu'ils se conduiront d'une certaine façon [8]. Cet argument s'attaque principalement aux théories proprement collectivistes de la société, qui se prétendent capables d'appréhender directement des formations sociales comme la société, etc., c'est-à-dire comme des entités en soi, qui seraient censées exister indépendamment des individus qui les composent. L'étape suivante de l'analyse sociale de l'individualisme est dirigée, elle, contre un pseudo-individualisme rationaliste qui ne conduit pas moins au collectivisme dans la pratique. Elle consiste à affirmer que nous pouvons découvrir, en examinant les effets combinés des actions individuelles, que bien des institutions sur lesquelles repose le progrès humain sont apparues et fonctionnent sans qu'aucun esprit ne les ait connues ni ne les contrôle. Que, suivant l'expression d'Adam Ferguson, "Les nations se retrouvent face à des institutions qui sont bel et bien le résultat de l'action des hommes, sans être celui d'un projet humain" et que la collaboration spontanée des hommes libres engendre souvent des résultats qui dépassent ce que leur cervelle d'individus pourra jamais entièrement saisir. C'est bien la grande idée de Josiah Tucker et Adam Smith, d'Adam Ferguson et Edmund Burke, la grande découverte de l'économie politique classique, qui est devenue la base de notre compréhension, non seulement de la vie économique mais de la plupart des phénomènes véritablement sociaux.
La différence entre cette vision des choses qui explique la plus grande part de l'ordre visible dans les affaires humaines, comme le résultat inattendu des actions individuelles, et l'autre vision qui attribue tout ordre observable à un dessein délibéré, est la première grande différence entre le véritable individualisme des penseurs britanniques et le prétendu individualisme de l'école cartésienne. Mais ce n'est là qu'un des aspects de la différence bien plus vaste entre une vision des choses qui attribue dans les affaires humaines une faible part au rôle de la raison, qui affirme que l'homme est parvenu là où il en est malgré le fait qu'il n'est que partiellement guidé par la raison, et que sa raison personnelle est fort limitée et imparfaite, et une vision des choses qui postule que la Raison (avec un grand R) éclaire toujours parfaitement, avec la même intensité, tous les humains, que tout progrès de l'homme est le résultat direct de la raison individuelle et qu'il est donc soumis à son contrôle. On pourrait même dire que la première résulte d'une conscience aiguë des limites de l'esprit individuel, qui entraîne une attitude d'humilité face aux processus impersonnels et anonymes de la société, grâce auxquels les gens contribuent à créer des choses qui dépassent leur entendement, alors que la seconde est le produit d'une croyance excessive dans les pouvoirs de la raison individuelle, avec le mépris qui en découle pour tout ce qui n'a pas été consciemment élabore ou ce qu'elle ne peut pas entièrement expliquer.
L'approche antirationaliste qui considère l'homme non comme un être hautement rationnel et intelligent mais comme une créature bien irrationnelle et bien faillible, dont les erreurs individuelles ne sont corrigées qu'au sein d'un processus social, et qui cherche à tirer le meilleur parti d'un matériau fort imparfait, cette approche est probablement le trait le plus caractéristique de l'individualisme anglais. Son influence dans la pensée britannique me semble principalement due à la profonde influence de Bernard Mandeville, qui avait été le premier à formuler clairement cette idée.
Je ne peux mieux illustrer en quelle opposition l' "individualisme" rationaliste ou cartésien se trouve vis-à-vis de cette pensée qu'en citant un célèbre passage du Discours de la Méthode. Descartes y affirme qu''il n'y a pas tant de perfection dans les ouvrages composés de plusieurs pièces et faits de la main de divers maîtres qu'en ceux auxquels un seul a travaillé". Il poursuit ensuite par la suggestion (après avoir cité l'exemple de l'ingénieur tirant ses plans, ce qui est significatif) que "les peuples qui, ayant été autrefois demi-sauvages et ne s'étant civilisés que peu à peu, n'ont fait leurs lois qu'à mesure que l'incommodité des crimes et des querelles les y a contraints, ne sauraient être si bien policés que ceux qui, des le commencement qu'ils se sont assemblés, ont observé les constitutions de quelque prudent législateur...". Pour bien faire comprendre son argument, Descartes ajoute qu'à son avis "si Sparte a été autrefois très florissante, ce n'a pas été à cause de la bonté de chacune de ses lois en particulier... mais à cause que, n'ayant été inventées que par un seul, elles tendaient toutes à même fin".
Il serait intéressant de suivre le développement ultérieur de cet individualisme de contrat social ou des théories de la "création" des formations sociales, de Descartes à ce qui est encore l'attitude caractéristique des ingénieurs vis-à-vis des questions sociales, en passant par Rousseau et la Révolution Française.
Une telle esquisse montrerait comment le rationalisme à la Descartes s'est constamment révélé un obstacle majeur à la compréhension des phénomènes historiques et prouverait qu'il est largement responsable de la croyance dans les lois du développement historique et du fatalisme moderne qu'elle entraîne. ."
"Le vrai individualisme est, au contraire, d'avis que si les gens sont laissés libres, ils en feront souvent plus que ce que la raison humaine individuelle ne serait capable de planifier ou de prévoir."
"Si pour résumer nous disons que les gens sont guides et doivent être guidés dans leurs actions par leurs intérêts et leurs désirs propres, on déformera immédiatement ces propos pour leur faire dire que les gens doivent exclusivement s'occuper de leurs besoins personnels ou de leurs intérêts égoïstes, alors que ce que nous voulons dire est qu'ils devraient avoir le droit de rechercher tout ce qui leur parait désirable à eux."
"Je pourrais peut-être rappeler que c'est uniquement parce que les hommes sont inégaux que nous pouvons les traiter également. Si tous les gens étaient complètement égaux par leurs dons et par leurs goûts, il nous faudrait les traiter différemment pour obtenir une quelconque forme d'organisation sociale. Ils ne sont pas égaux et c'est heureux : ce n'est que grâce à cela que la différenciation de rôles n'a pas besoin d'être déterminée par la décision arbitraire de quelque volonté organisatrice, mais qu'après avoir établi l'égalité formelle des règles s'appliquant à tous de la même façon, nous pouvons laisser chaque individu trouver son niveau propre.
Il y a toute la différence du monde entre le fait de traiter les gens de façon égale et une tentative pour les rendre égaux. Tandis que le premier est la condition d'une société libre, la seconde signifie, comme Tocqueville l'a décrite, une nouvelle forme de la servitude."
"S'il faut que l'individu soit libre de choisir, il est nécessaire qu'il subisse le risque attache à ce choix."
"[Le vrai individualisme] s'oppose tout particulièrement à la plus malheureuse et la plus dangereuse des erreurs de conception sur la démocratie : la croyance suivant laquelle nous devrions considérer comme vraie l'opinion de la majorité."
"Ce que l'individualisme nous enseigne, c'est que la société ne dépasse l'individu que dans la mesure ou elle est libre. Dans la mesure ou elle est contrôlée ou dirigée, elle trouve sa limite dans le pouvoir des esprits singuliers qui la contrôlent et la dirigent. Si l'arrogance de l'esprit moderne, qui refuse de rien respecter qui ne soit pas consciemment contrôlé par la raison individuelle, n'apprend pas à temps jusqu'où il ne doit pas aller, nous pourrions bien, comme Edmund Burke nous en a avertis, "avoir à tenir pour certain que tout ce qui nous entoure disparaîtra graduellement, jusqu'à ce qu'à la longue notre champ d'action ait rétréci jusqu'aux dimensions de notre esprit."."
-Friedrich August Hayek, Vrai et faux individualisme (1945).
« Loin de plaider pour un tel "État minimal", il nous apparaît hors de doute que dans une société évoluée le gouvernement doive se servir de son pouvoir fiscal pour assurer un certain nombre de services qui, pour diverses raisons, ne peuvent être fournis, du moins adéquatement, par le marché. »
-Friedrich August Hayek.
http://herve.dequengo.free.fr/Hayek/Hayek2.htm
"Il semble également très peu probable, même dans les circonstances les plus favorables, que la nouvelle monnaie [l'euro] sera mieux gérée que les monnaies nationales actuelles."
-Friedrich August Hayek, La dénationalisation de la monnaie (1978).
"Il semble que moins les idées sont spécifiques et précises (ou moins elles sont comprises), plus grande est leur influence."
"Le développement politique a été grandement affecté par des croyances telles que la constante supériorité, également pour les questions sociales, du contrôle délibéré (ou d'une organisation consciente) par rapport aux résultats de processus spontanés qui ne sont pas dirigé par un esprit humain ; ou le caractère préférable d'un ordre basé sur un plan préétabli par rapport à un ordre créé par l'équilibre de forces opposées."
"Comme la démocratie est une bonne chose, plus le principe démocratique est poussé loin, mieux c'est à leurs yeux. La plus puissante de ces idées générales, à l'origine du développement politique récent, est bien sûr l'idée d'égalité matérielle. De façon caractéristique, ce n'est pas une conviction morale qui s'est développée spontanément, d'abord appliquée dans les relations entre les individus particuliers. C'est au contraire une construction intellectuelle conçue au départ dans l'abstrait et dont l'application et la signification pour des cas particuliers sont douteuses."
"Il n'y a pas de doute que la façon dont, durant les cent dernières années, l'homme a appris à maîtriser les forces de la nature a grandement contribué à la formation de la croyance selon laquelle un contrôle similaire des forces de la société améliorerait de même les conditions humaines."
"Il y a en effet peu de tâches moins gratifiantes de nos jours que celle qui consiste à développer le fondement philosophique sur lequel puisse reposer le développement futur de la société libre."
"Récemment, un des plus distingués économistes américains vivants s'est plaint d'une façon similaire que la tâche principale de ceux qui croient aux principes de base du système capitaliste doivent fréquemment défendre ce système contre les capitalistes - en fait, les grands économistes libéraux, depuis Adam Smith jusqu'à nos jours, l'ont toujours su."
"Toute orthodoxie, toute prétention qu'un système d'idées est fini et doit être accepté sans question comme un tout, sont des idées qui s'opposent nécessairement aux intellectuels, quelles que soient leurs opinions sur des questions particulières."
"Nous devons à nouveau rendre la création d'une société libre une aventure intellectuelle, un acte de courage. Ce qui nous manque, c'est une utopie libérale, un programme qui ne semble être ni une simple défense des choses existantes, ni une forme diluée de socialisme, mais un véritable radicalisme libéral qui n'épargne pas les susceptibilités des puissants (y compris les syndicats), qui ne soit pas strictement pratique, et qui ne se confine pas à ce qui semble aujourd'hui politiquement possible. Nous avons besoin de leaders intellectuels qui soient préparés à résister aux flatteries des gens puissants et influents, qui aient envie de travailler pour un idéal, aussi faibles soient les perspectives de sa prochaine réalisation."
-Friedrich August Hayek, Les intellectuels et le socialisme.
"Quels sont, alors, les caractères essentiels du vrai individualisme ? La première chose qui doit être dite est qu'il s'agit d'abord d'une théorie sociale : un essai pour comprendre les forces qui déterminent la vie sociale de l'homme, et ensuite seulement un ensemble de principes politiques déduits de cette vision de la société. Ce fait devrait en lui-même suffire à refuser le plus sot des malentendus qui courent à ce sujet : l'idée suivant laquelle l'individualisme postulerait (ou fonderait ses arguments sur cette hypothèse) l'existence d'individus isolés ou autosuffisants, au lieu de partir de l'étude de gens dont la nature et le caractère sont déterminés par le fait qu'ils existent en société [7] . Si cela était vrai, l'individualisme n'aurait vraiment rien à apporter à notre compréhension de la société. Mais son postulat essentiel est en fait différent, à savoir qu'il n'existe aucun autre moyen de s'assurer des phénom`nes sociaux que de comprendre les actions que les individus entreprennent vis-à-vis des autres, dans l'idée qu'ils se conduiront d'une certaine façon [8]. Cet argument s'attaque principalement aux théories proprement collectivistes de la société, qui se prétendent capables d'appréhender directement des formations sociales comme la société, etc., c'est-à-dire comme des entités en soi, qui seraient censées exister indépendamment des individus qui les composent. L'étape suivante de l'analyse sociale de l'individualisme est dirigée, elle, contre un pseudo-individualisme rationaliste qui ne conduit pas moins au collectivisme dans la pratique. Elle consiste à affirmer que nous pouvons découvrir, en examinant les effets combinés des actions individuelles, que bien des institutions sur lesquelles repose le progrès humain sont apparues et fonctionnent sans qu'aucun esprit ne les ait connues ni ne les contrôle. Que, suivant l'expression d'Adam Ferguson, "Les nations se retrouvent face à des institutions qui sont bel et bien le résultat de l'action des hommes, sans être celui d'un projet humain" et que la collaboration spontanée des hommes libres engendre souvent des résultats qui dépassent ce que leur cervelle d'individus pourra jamais entièrement saisir. C'est bien la grande idée de Josiah Tucker et Adam Smith, d'Adam Ferguson et Edmund Burke, la grande découverte de l'économie politique classique, qui est devenue la base de notre compréhension, non seulement de la vie économique mais de la plupart des phénomènes véritablement sociaux.
La différence entre cette vision des choses qui explique la plus grande part de l'ordre visible dans les affaires humaines, comme le résultat inattendu des actions individuelles, et l'autre vision qui attribue tout ordre observable à un dessein délibéré, est la première grande différence entre le véritable individualisme des penseurs britanniques et le prétendu individualisme de l'école cartésienne. Mais ce n'est là qu'un des aspects de la différence bien plus vaste entre une vision des choses qui attribue dans les affaires humaines une faible part au rôle de la raison, qui affirme que l'homme est parvenu là où il en est malgré le fait qu'il n'est que partiellement guidé par la raison, et que sa raison personnelle est fort limitée et imparfaite, et une vision des choses qui postule que la Raison (avec un grand R) éclaire toujours parfaitement, avec la même intensité, tous les humains, que tout progrès de l'homme est le résultat direct de la raison individuelle et qu'il est donc soumis à son contrôle. On pourrait même dire que la première résulte d'une conscience aiguë des limites de l'esprit individuel, qui entraîne une attitude d'humilité face aux processus impersonnels et anonymes de la société, grâce auxquels les gens contribuent à créer des choses qui dépassent leur entendement, alors que la seconde est le produit d'une croyance excessive dans les pouvoirs de la raison individuelle, avec le mépris qui en découle pour tout ce qui n'a pas été consciemment élabore ou ce qu'elle ne peut pas entièrement expliquer.
L'approche antirationaliste qui considère l'homme non comme un être hautement rationnel et intelligent mais comme une créature bien irrationnelle et bien faillible, dont les erreurs individuelles ne sont corrigées qu'au sein d'un processus social, et qui cherche à tirer le meilleur parti d'un matériau fort imparfait, cette approche est probablement le trait le plus caractéristique de l'individualisme anglais. Son influence dans la pensée britannique me semble principalement due à la profonde influence de Bernard Mandeville, qui avait été le premier à formuler clairement cette idée.
Je ne peux mieux illustrer en quelle opposition l' "individualisme" rationaliste ou cartésien se trouve vis-à-vis de cette pensée qu'en citant un célèbre passage du Discours de la Méthode. Descartes y affirme qu''il n'y a pas tant de perfection dans les ouvrages composés de plusieurs pièces et faits de la main de divers maîtres qu'en ceux auxquels un seul a travaillé". Il poursuit ensuite par la suggestion (après avoir cité l'exemple de l'ingénieur tirant ses plans, ce qui est significatif) que "les peuples qui, ayant été autrefois demi-sauvages et ne s'étant civilisés que peu à peu, n'ont fait leurs lois qu'à mesure que l'incommodité des crimes et des querelles les y a contraints, ne sauraient être si bien policés que ceux qui, des le commencement qu'ils se sont assemblés, ont observé les constitutions de quelque prudent législateur...". Pour bien faire comprendre son argument, Descartes ajoute qu'à son avis "si Sparte a été autrefois très florissante, ce n'a pas été à cause de la bonté de chacune de ses lois en particulier... mais à cause que, n'ayant été inventées que par un seul, elles tendaient toutes à même fin".
Il serait intéressant de suivre le développement ultérieur de cet individualisme de contrat social ou des théories de la "création" des formations sociales, de Descartes à ce qui est encore l'attitude caractéristique des ingénieurs vis-à-vis des questions sociales, en passant par Rousseau et la Révolution Française.
Une telle esquisse montrerait comment le rationalisme à la Descartes s'est constamment révélé un obstacle majeur à la compréhension des phénomènes historiques et prouverait qu'il est largement responsable de la croyance dans les lois du développement historique et du fatalisme moderne qu'elle entraîne. ."
"Le vrai individualisme est, au contraire, d'avis que si les gens sont laissés libres, ils en feront souvent plus que ce que la raison humaine individuelle ne serait capable de planifier ou de prévoir."
"Si pour résumer nous disons que les gens sont guides et doivent être guidés dans leurs actions par leurs intérêts et leurs désirs propres, on déformera immédiatement ces propos pour leur faire dire que les gens doivent exclusivement s'occuper de leurs besoins personnels ou de leurs intérêts égoïstes, alors que ce que nous voulons dire est qu'ils devraient avoir le droit de rechercher tout ce qui leur parait désirable à eux."
"Je pourrais peut-être rappeler que c'est uniquement parce que les hommes sont inégaux que nous pouvons les traiter également. Si tous les gens étaient complètement égaux par leurs dons et par leurs goûts, il nous faudrait les traiter différemment pour obtenir une quelconque forme d'organisation sociale. Ils ne sont pas égaux et c'est heureux : ce n'est que grâce à cela que la différenciation de rôles n'a pas besoin d'être déterminée par la décision arbitraire de quelque volonté organisatrice, mais qu'après avoir établi l'égalité formelle des règles s'appliquant à tous de la même façon, nous pouvons laisser chaque individu trouver son niveau propre.
Il y a toute la différence du monde entre le fait de traiter les gens de façon égale et une tentative pour les rendre égaux. Tandis que le premier est la condition d'une société libre, la seconde signifie, comme Tocqueville l'a décrite, une nouvelle forme de la servitude."
"S'il faut que l'individu soit libre de choisir, il est nécessaire qu'il subisse le risque attache à ce choix."
"[Le vrai individualisme] s'oppose tout particulièrement à la plus malheureuse et la plus dangereuse des erreurs de conception sur la démocratie : la croyance suivant laquelle nous devrions considérer comme vraie l'opinion de la majorité."
"Ce que l'individualisme nous enseigne, c'est que la société ne dépasse l'individu que dans la mesure ou elle est libre. Dans la mesure ou elle est contrôlée ou dirigée, elle trouve sa limite dans le pouvoir des esprits singuliers qui la contrôlent et la dirigent. Si l'arrogance de l'esprit moderne, qui refuse de rien respecter qui ne soit pas consciemment contrôlé par la raison individuelle, n'apprend pas à temps jusqu'où il ne doit pas aller, nous pourrions bien, comme Edmund Burke nous en a avertis, "avoir à tenir pour certain que tout ce qui nous entoure disparaîtra graduellement, jusqu'à ce qu'à la longue notre champ d'action ait rétréci jusqu'aux dimensions de notre esprit."."
-Friedrich August Hayek, Vrai et faux individualisme (1945).
« Loin de plaider pour un tel "État minimal", il nous apparaît hors de doute que dans une société évoluée le gouvernement doive se servir de son pouvoir fiscal pour assurer un certain nombre de services qui, pour diverses raisons, ne peuvent être fournis, du moins adéquatement, par le marché. »
-Friedrich August Hayek.