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    Didier Lett, « Avant-propos. Sexualités illicites, douces et violentes » + Élodie Guilhem et Catherine Kikuchi, « Introduction »

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Didier Lett, « Avant-propos. Sexualités illicites, douces et violentes » + Élodie Guilhem et Catherine Kikuchi, « Introduction » Empty Didier Lett, « Avant-propos. Sexualités illicites, douces et violentes » + Élodie Guilhem et Catherine Kikuchi, « Introduction »

    Message par Johnathan R. Razorback Ven 25 Oct - 22:35

    https://journals.openedition.org/questes/4458

    "Si l’on observe attentivement les rubriques des statuts communaux italiens de la fin du Moyen Âge, on note que seules les vierges, les femmes mariées, les veuves et les moniales peuvent ne pas être consentantes. Pour les autres femmes (célibataires, femmes de renommées douteuses, prostituées, etc.), le viol est ignoré. Il existe également une hiérarchie à l’intérieur de cette sexualité illicite violente car la sévérité de la peine est bien plus forte à l’encontre des crimes perpétrés sur les nonnes, épouses du Christ, et sur les vierges, à jamais corrompues et offertes, gâtées, sur le marché matrimonial."
    -Didier Lett, « Avant-propos. Sexualités illicites, douces et violentes », Questes [En ligne], 37 | 2018, mis en ligne le 01 février 2018, consulté le 26 octobre 2019. URL : http://journals.openedition.org/questes/4458

    https://journals.openedition.org/questes/4459

    "Au XVIe siècle, en raison de la théorie des humeurs, la masturbation féminine était recommandée, si le mari n’était pas très doué. Les prêtres conseillaient aussi cette pratique puisque la seule finalité de la sexualité dans le mariage est de concevoir des enfants. C’était un moyen de ne pas condamner le couple au péché de copulation sans progéniture."

    "Certains auteurs constatent le changement de considération du viol dans sa pénalisation quand il concerne des prostituées qui deviennent à la fin du Moyen Âge des sujets de droit, susceptibles de porter plainte pour viol comme n’importe quelle autre femme honnête. La vie d’une femme vénale est bien entendu réprouvée par les autorités religieuses comme civiles. Cependant, la prostitution est un mal nécessaire. À partir de 1100, les meretrices publicae, loin d’être marginales, sont omniprésentes dans les récits, les représentations, et dans la réalité quotidienne des villes64. Elles sont identifiées par des marques vestimentaires pour éviter toute confusion. Ainsi à Toulouse, elles protestent contre la trop grande visibilité des signes qui leur échoient. Dans ce cadre, les politiques urbaines ségrègent puis institutionnalisent les prostituées, créant à partir de 1300 des prostibulae publicae : il s’agit finalement de « contrôler et profiter du phénomène sans le réprimer ». De même, la prostitution est très tôt contrôlée en Islam avec des maisons de tolérance et une taxation officielle mise en place notamment dans l’Égypte fatimide.

    Où est l’interdit alors, quand la fin du Moyen Âge et le début de l’époque moderne voient apparaître des figures de courtisanes splendides et bien en vue ? C’est l’excès que l’on réprime plus que les faits ponctuels. Sans doute l’interdit est-il dans l’excès. Si les hommes mariés ne sont pas interdits de maisons closes, ceux-ci ne sont cependant pas censés y aller trop souvent, au risque de se voir qualifiés de « concubinaires de bordel » et parfois poursuivis pour adultère. Les juifs, les lépreux, les adolescents et les « putiers », ou hommes de mauvaise vie, en sont aussi exclus. Par ailleurs, le vent tourne au début du xvie siècle : des interdictions municipales touchent la prostitution, par peur du mal de Naples et sous l’influence morale de la Réforme. Enfin, si les femmes prostituées sont considérées comme accoutumant les hommes à l’amour licite, les garçons qui se vendent « a uso di donna », comme c’est le cas dans certaines cités italiennes, et surtout leurs clients, sont poursuivis et sévèrement condamnés.

    La prostitution répond donc finalement à un impératif social et politique. Elle est autorisée en tant qu’elle permet l’équilibre de la société ; elle est réprouvée quand elle le perturbe. Quand elle se mêle à l’homosexualité, qui est perçue à la fin du Moyen Âge comme un retournement complet de l’ordre naturel et social, elle est fondamentalement interdite et réprimée
    ."

    "Les relations homosexuelles semblent également assez répandues en Islam, particulièrement dans les élites abbassides, malgré la condamnation religieuse. Du côté de l’Occident, l’homosexualité masculine n’est pas la principale préoccupation des clercs au haut Moyen Âge. L’amour entre hommes ne devient un réel problème qu’à partir des XIIIe–XIVe siècles. La répression est organisée par les autorités publiques. Un fuero en Castille punit la sodomie de la castration et du bûcher ; les coutumiers français et les lois communales italiennes oscillent entre le bannissement et le bûcher ; au XVe siècle en Italie, des institutions ad hoc sont créées. La pratique semble largement répandue : à Florence, entre 1432 et 1502, 15 à 16 000 individus sont impliqués dans des affaires de sodomies et entre 2 400 et 3 000 sont condamnées. À Venise, la pratique est bien attestée dans les archives. Mais on peut se demander s’il ne s’agit pas d’un effet de source. Élisabeth Crouzet-Pavan a ainsi supposé que les accusations de sodomie touchaient particulièrement les artisans et les patriciens parce qu’il s’agissait des catégories de la population les plus surveillées par les autorités et les plus à risque pour l’ordre social et politique. Puisque l’homosexualité est pensée comme perturbant l’ordre social, cette accusation est également retournée contre des groupes qui sont soupçonnés d’œuvrer contre l’équilibre politique. À l’inverse, l’homosexualité féminine attire bien moins l’attention et est moins perçue comme problématique : des rapports entre deux femmes n’impliquent pas de gaspillage de sperme et celles-ci sont censées revenir naturellement à l’amour des hommes. De telles affaires sont donc très peu présentes dans les archives judiciaires. Cette absence de considération, tout comme la méfiance qui entourait l’homosexualité masculine, révèle donc également une certaine perception des rapports entre hommes et femmes."
    -Élodie Guilhem et Catherine Kikuchi, « Introduction », Questes [En ligne], 37 | 2018, mis en ligne le 01 février 2018, consulté le 26 octobre 2019. URL : http://journals.openedition.org/questes/4459 ; DOI : 10.4000/questes.4459



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