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    Renaud Barbaras, Introduction à la philosophie de Husserl

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Renaud Barbaras, Introduction à la philosophie de Husserl Empty Renaud Barbaras, Introduction à la philosophie de Husserl

    Message par Johnathan R. Razorback Dim 18 Sep - 16:01

    "Il ne s'agit pas d'adopter une position de surplomb qui permettrait d'ordonner, d'organiser le réel, selon la tradition métaphysique, mais au contraire de s'immerger dans le vivre lui-même par lequel quelque chose nous est donné. Pour tel objet, telle région de l'être, il ne s'agit pas de le penser à partir de sa place, dans un ordre absolu -mais plutôt d'en saisir le sens, c'est-à-dire la manière dont nous le vivons. En cela, on peut dire que cette philosophie n'est pas subordonnée au principe de raison suffisante (tout comme Bergson ; cf. la critique du néant dans L'Évolution créatrice: faire sortir l'être du néant, c'est demander pourquoi il y a quelque chose plutôt que rien): le but de la pensée est de s'égaler à une inscription originaire au cœur du réel en tant que vivre de ce réel- si bien que la question n'est plus "pourquoi quelque chose ?", mais "comment se donne-t-il ?". Originalité absolue. Différence donc avec Hegel, car pour Husserl il y a vraiment identité de l'Absolu et de la manifestation, alors que chez Hegel il y a un processus de l'Absolu lui-même qui n'est pas le processus de sa manifestation." (p.10)

    "Ce n'est pas une philosophie argumentative, mais une philosophie de l'intuition. [...] Cela signifie que la justification ultime d'un énoncé réside dans une évidence, c'est-à-dire dans une intuition, un voir où la chose -au sens de ce dont il est question- est présente en personne." (p.10)

    "Tel étant ne peut pas être autrement que selon le mode sous lequel il se donne à une conscience: la scission classique de l'être et de l'apparence disparaît. Cette distinction renvoyait bien sûr à la position d'une finitude anthropologique, source de l'apparence comme telle. Or, pour Husserl, tout homme imaginable, quelle que soit sa modification, ne pourrait faire l'expérience du monde selon d'autres modes de donnée. Ce qui veut dire que la phénoménalité n'est pas le fait de l'humanité, mais plutôt l'humanité, au moins au sens empirique, le fait de la phénoménalité (le fini n'est plus une limitation mais bien la mesure de l'Etre)." (p.15)

    "On mesure d'abord l'originalité et la radicalité philosophique de cet a priori de la corrélation. La position d'un en soi, étranger à la subjectivité, d'une réalité absolue, qui était celle de la métaphysique classique, est récusée. [...] Corrélativement, cela n'a plus de sens de se donner une conscience qui n'aurait affaire qu'à ses représentations de telle sorte que la question du rapport à l'objet, de la valeur objective, se poserait alors. L'a priori de la corrélation implique une conscience transcendantale, en un sens particulier et radical. Cette conscience ne conditionne pas la forme de l'objectivité au sein de phénomènes distincts de l'en soi. Elle est origine du monde, selon la formule de Fink, c'est-à-dire qu'elle est l'absolu." (p.16)

    "C'est à la condition de ne pas penser l'être de la conscience sur le modèle de la chose, donc de ne pas en faire un membre de la nature, bref, une substance, que l'on peut comprendre la corrélation essentielle, l'ouverture de la conscience à autre chose qu'elle. Cependant, la formule citée montre que la réification de la conscience est ce dont nous devons être sauvés, c'est-à-dire ce qui représente un risque majeur, que nous ne sommes jamais sûrs d'avoir évité ou surmonté." (p.17)

    "L'approche de la Philosophie de l'arithmétique est, conformément au courant dominant du temps, psychologiste. Autrement dit, le nombre est réduit à des actes se produisant dans une subjectivité concrète. D'où la difficulté centrale: comment concilier cette production empirique -le nombre renvoie à un événement psychique- avec le caractère de généralité, d'idéalité transcendant les individus empiriques qui caractérise le nombre ? En effet, il est peut-être vrai que nous ne pouvons concevoir tel nombre sans un certain acte de totalisation d'une multiplicité, mais cela ne signifie pas que nous produisons ce nombre en son essence ; ce que nous produisons, c'est sa "représentatibilité" car notre acte de production est réglé par l'essence du nombre. Et c'est pourquoi, précisément, plusieurs sujets empiriques peuvent penser identiquement ce nombre.

    On voit bien la tension entre l'autonomie de l'idéalité vis-à-vis du psychique, qui est la condition de son objectivité, et sa fondation dans des vécus, des actes empiriques. C'est ce que Husserl reconnaît dans la première préface des Recherches logiques." (p.23)

    "Il faudra également parvenir à penser l'idéalité de telle sorte qu'elle puisse ne pas être indépendante des actes d'une subjectivité. Ce qui, négativement, exigera de dépasser une vision "réaliste", "platonisante" au sens naïf, de l'idéalité. [...] Le caractère objectif, c'est-à-dire contraignant, de l'idéalité n'implique pas nécessairement qu'on lui assigne une positivité ontologique." (pp.24-25)

    "Nouveau type de recherches orientées sur ce qui fait défaut aux sciences particulières:
    -recherches visant à mettre au jour et critiquer les présupposés métaphysiques qui sont au fondement de toute science (au moins de la nature)
    -recherches qui portent "sur ce qui fait que des sciences en général sont des sciences" [...] Cette science de la science, discipline normative qui met au jour les critères qu'une science doit respecter pour être une science, circonscrit le domaine de la logique. [...]
    La science est recherche du savoir. Celui-ci est possession de la vérité. Or, la vérité doit être considérée comme évidence: celle-ci est la saisie, l'intuition de la réalité même de ce qui est énoncé, de sa présence effective. Dans l'évidence, la chose ou l'état de choses (par ex. S est P) sont donnés comme sûrs, c'est-à-dire saisis comme existants. Il faut en conclure que cette connaissance véritable, en particulier scientifique, repose sur une évidence [...]
    Seulement, la difficulté est que l'évidence -authentifiant l'existence d'un état de choses- n'est possible que pour un ensemble restreint d'états de choses primitifs. Il y a donc un nombre très élevé de propositions vraies qui le sont parce que fondées sur des évidences, c'est-à-dire déduites selon un certain enchaînement réglé. Une fondation peut donc être caractérisée comme une forme de déduction, propre à une certaine classe de déductions. Par exemple, telle catégorie de syllogisme. Ce qui caractérise précisément une science, c'est qu'elle n'en reste pas à un groupe d'évidences éparses ni même à une fondation : elle est constituée d'un enchaînement ou d'une complexion de fondations, ce qui revient à dire qu'elle est théorie. [...]
    Toute fondation apparaît comme cas d'une loi générale concernant une infinité de fondations possibles. [...]
    Nous sommes maintenant en mesure de répondre à notre question de la possibilité et de la légitimité de la logique. Je cite Husserl [...] "Si la forme réglée rend possible l'existence de sciences, d'un autre côté, l'indépendance, dans une large proportion, de la forme par rapport au domaine du savoir rend possible l'existence d'une théorie de la science".
    [...] L'exactitude inhérente à la science repose sur le fait que telle déduction fait partie d'une classe, douée d'une forme typique, qui lui confère précisément son exactitude. L'indépendance des fondations par rapport aux domaines matériels permet une scientificité générale, qui ne se réduit pas à la diversité des sciences particulières. [...]
    La logique est donc la théorie de la science, qui traite de celle-ci en tant qu'unité systématique, c'est-à-dire unité dans l'enchaînement des fondations. Elle est bien une discipline normative: elle donne une idée de la science, permettant de mesurer si telle ou telle science empirique est conforme à cette idée, c'est-à-dire est une science véritable." (pp.26-28)

    "
    (pp.29-33)

    "
    (pp.34-36)

    "
    (pp.38-41)

    p.108
    -Renaud Barbaras, Introduction à la philosophie de Husserl, Vrin, Paris, 2015, 237 pages.


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    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

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