https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre-Michel_Menger
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(pp.11-13)
[Chapitre 2 : Est-il rationnel de travailler pour s'épanouir ?]
"Le travail est généralement traité comme une grandeur négative en analyse économique classique, où il reçoit la qualité restrictive de « désutilité », de dépense d' énergie individuelle en échange d'un salaire et de biens de consommation auxquels ce salaire donne accès. Ce sont le loisir et les biens de consommation qui sont source de satisfaction et de bien-être individuel, le travail apparaissant alors comme une consommation négative. De la sorte, l'engagement sur le marché du travail et le choix d'exercer tel ou tel emploi relèvent intégralement d'une axiomatique classique de la rationalité du comportement de maximisation sous contrainte : le choix d'exercer une activité rémunérée ne se distingue en rien d'une dépense d'énergie, et peut être entièrement compris comme un arbitrage entre le sacrifice de bien-être qu'impose l'effort et le gain de bien-être que procurent les biens et le loisir acquis en contrepartie de la rémunération de l'effort productif." (p.147)
"Pour comprendre en quoi le travail a pu être analysé comme une condition de la réalisation de soi, je dois introduire la dimension de l'incertitude. Si l'on admet, d'une part, que les travaux traditionnellement considérés comme épanouissants se caractérisent par le caractère faiblement routinier des tâches et des situations de travail, et par une forte composante de prise de risque, et que, corrélativement, ces métiers font appel à des talents et des compétences dont l'individu n'est pas certain d'être doté au départ, et qui ne lui sont révélés ou procurés que dans l'exercice même du travail concerné, on concevra qu'il peut être rationnel pour un individu de choisir les emplois ou les séquences d'emploi qui le renseignent le mieux sur ses aptitudes, et que ces choix sont risqués." (p.149)
-Pierre-Michel Menger, Le travail créateur. S'accomplir dans l'incertain, Seuil, 2009, 974 pages.
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(pp.11-13)
[Chapitre 2 : Est-il rationnel de travailler pour s'épanouir ?]
"Le travail est généralement traité comme une grandeur négative en analyse économique classique, où il reçoit la qualité restrictive de « désutilité », de dépense d' énergie individuelle en échange d'un salaire et de biens de consommation auxquels ce salaire donne accès. Ce sont le loisir et les biens de consommation qui sont source de satisfaction et de bien-être individuel, le travail apparaissant alors comme une consommation négative. De la sorte, l'engagement sur le marché du travail et le choix d'exercer tel ou tel emploi relèvent intégralement d'une axiomatique classique de la rationalité du comportement de maximisation sous contrainte : le choix d'exercer une activité rémunérée ne se distingue en rien d'une dépense d'énergie, et peut être entièrement compris comme un arbitrage entre le sacrifice de bien-être qu'impose l'effort et le gain de bien-être que procurent les biens et le loisir acquis en contrepartie de la rémunération de l'effort productif." (p.147)
"Pour comprendre en quoi le travail a pu être analysé comme une condition de la réalisation de soi, je dois introduire la dimension de l'incertitude. Si l'on admet, d'une part, que les travaux traditionnellement considérés comme épanouissants se caractérisent par le caractère faiblement routinier des tâches et des situations de travail, et par une forte composante de prise de risque, et que, corrélativement, ces métiers font appel à des talents et des compétences dont l'individu n'est pas certain d'être doté au départ, et qui ne lui sont révélés ou procurés que dans l'exercice même du travail concerné, on concevra qu'il peut être rationnel pour un individu de choisir les emplois ou les séquences d'emploi qui le renseignent le mieux sur ses aptitudes, et que ces choix sont risqués." (p.149)
-Pierre-Michel Menger, Le travail créateur. S'accomplir dans l'incertain, Seuil, 2009, 974 pages.