https://fr.wikipedia.org/wiki/Adolphe_Franck
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligue_nationale_contre_l%27ath%C3%A9isme
https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Communisme_jug%C3%A9_par_l%E2%80%99histoire
"Le danger qui nous menaçait, il y a près d’un quart de siècle, est toujours le même ; seulement il est devenu plus pressant et plus général. Le communisme dirige ses attaques, non-seulement contre la société française, mais contre la société européenne. Il ne se contente plus de parler et d’écrire, il livre des batailles." (pp.5-6)
"C’est le communisme qui a dicté les règlements et les programmes de la Société Internationale des travailleurs, et c’est lui que les missionnaires et les fondés de pouvoir de cette association redoutable promènent impunément de ville en ville et de congrès en congrès. Enfin, le doute n’est plus permis aux plus aveugles : s’abritant sous un nom équivoque et profitant de la faveur attachée aux franchises municipales pour élever son pouvoir sur les débris de la société, c’est le communisme qui, dans la fatale journée du 18 mars, s’est installé à l’Hôtel de Ville de Paris. C’est lui qui, depuis bientôt deux mois, sous les yeux et à la satisfaction, peut-être avec le concours d’un ennemi victorieux, tournant à notre ruine les instruments mêmes de notre défense, opprime et déshonore, remplit de désespoir et de deuil notre malheureuse capitale." (p.6)
"Toutes les écoles par lesquelles, depuis bientôt un demi-siècle, le socialisme est représenté parmi nous, l’école de Saint-Simon, celle de Charles Fourier, le communisme pur, le mutuellisme, sont d’accord sur ce point que les souffrances et la misère des classes laborieuses prennent leur source dans la liberté de l’industrie, principe d’une concurrence illimitée, et qu’il est temps d’y mettre un terme par l’organisation du travail.
Mais si le travail, perfectionné sans cesse par le temps et par l’expérience, ne réussit pas à se donner lui-même peu à peu les lois les plus propres à le régler, quelle autre puissance que l’État pourra lui imposer tout d’un coup l’organisation qu’il réclame ? L’État organisant le travail, c’est l’État qui dispose souverainement des capitaux, des instruments et du personnel de l’industrie, soit agricole, soit manufacturière ; c’est l’État dirigeant à son gré, avec une autorité sans bornes, non-seulement toutes les forces matérielles de la société, mais les facultés de l’intelligence, l’activité de l’âme et de la pensée. L’État sera le maître unique, absolu, des hommes et des choses, des biens et des personnes. Nous serons en plein communisme, et le communisme lui-même ne pourra s’établir et se conserver que sous la règle du despotisme."
"Un autre principe mis en circulation et soutenu avec opiniâtreté par le socialisme contemporain, c’est la gratuité du crédit ; c’est pour tous les membres de la société, dispensés de fournir des garanties, soit matérielles, soit morales, le droit au crédit, digne pendant de ce qu’on appelait en 1848 le droit au travail. La gratuité du crédit se confond nécessairement avec l’abolition de l’intérêt. L’intérêt de l’argent une fois aboli, pourquoi conserverait-on la rente de la terre ? pourquoi le loyer des maisons ? Les maisons et les terres ne sont-elles pas des capitaux aussi bien que les billets de banque et les espèces sonnantes ? La faculté d’habiter les unes et de cultiver les autres ne doit-elle pas être regardée comme un véritable crédit ? Or, si les capitaux et les immeubles, si les valeurs et les signes de la valeur appartiennent indistinctement à tout le monde, ils n’appartiennent plus à personne, ils sont la propriété de l’État, et nous voilà encore une fois dans le communisme.
Mais, à parler rigoureusement, la conséquence qu’apporterait avec elle la gratuité du crédit serait encore moins la communauté de la propriété que celle de la misère. Qui se donnerait la peine d’amasser des capitaux qui ne devraient produire aucun intérêt ? de faire construire des maisons qui se loueraient gratis ? de faire défricher des terres qui seraient au premier occupant ? Les capitaux absents, le crédit n’est plus qu’un mot vide de sens. La gratuité du crédit n’est donc pas autre chose que la destruction du crédit.
La gratuité du crédit fait naturellement penser au Manifeste dans lequel, il n’y a pas longtemps, la soi-disant Commune de Paris nous promettait des « institutions propres à universaliser le pouvoir et la propriété. » Universaliser le pouvoir, s’il y a une pensée renfermée dans ces mots, c’est amener la destruction du pouvoir et laisser le champ libre à l'anarchie. Universaliser la propriété, si l'on entend par là, non le progrès du bien-être et de la richesse publique, tel qu'on peut l’attendre avec certitude du développement de l'industrie, de instruction et de la moralité des peuples, mais une mesure législative ou une action gouvernementale ; universaliser la propriété, c’est l’anéantir en lui enlevant son caractère individuel."
"Le droit au travail était revendiqué surtout par l’école fouriériste ou phalanstérienne, et se distingue essentiellement de la liberté du travail. Il consiste dans le prétendu droit qui appartiendrait à chaque membre de la société de réclamer d’elle un emploi et des moyens d’existence, sans être astreint d’ailleurs à aucune condition d’intelligence ou de valeur personnelle. [...]
Si l’État se voit obligé de pourvoir à tout, il faut qu’on lui laisse le droit de disposer de tout ; il ne saurait prendre à sa charge toutes les existences sans posséder les moyens de soutenir un tel fardeau, et la somme de ces moyens est la même que celle des richesses que recèle le corps social."
"[M. Louis Blanc] a consacré tant d’années de sa laborieuse vie, tant de productions de sa plume féconde à développer dans le cœur des masses pauvres et ignorantes toutes les passions envieuses et implacables que peuvent exciter la richesse, le pouvoir, la supériorité de l’intelligence ou de l’instruction et même la simple aisance." (p.18)
"[La Commune] pille les caisses des compagnies, elle fait saisir ou mettre en pièces le mobilier des particuliers, elle ordonne la démolition des maisons de ses adversaires, elle supprime des offices qui représentent des patrimoines privés, elle supprime des journaux et ferme des imprimeries." (p.21)
"Quant à la famille, ce premier fondement des sociétés humaines, cette première école de dévouement et de respect sur les ruines de laquelle ne pourront germer que brutales passions et orgueil sauvage, pour savoir en quelle estime la tient la Commune, il suffit de se rappeler ce fameux décret, où admettant à une pension les veuves des gardes nationaux morts sous les armes, elle efface toute distinction entre les femmes soi-disant légitimes et les autres. La patrie, encore plus maltraitée que la famille, est formellement reniée. On a remplacé son glorieux drapeau par un autre qui ne peut guère nous rappeler que la livrée du bagne et la soif du sang. C’est celui que, dans les arènes, on agite sous les yeux du taureau sauvage pour attiser sa fureur. Est-ce le même effet que l'on veut produire sur le peuple ? Avec le drapeau de la patrie on s’efforce de répudier toutes ses traditions et tous ses souvenirs, on a décrété la destruction de ses monuments les plus chers, on voudrait supprimer jusqu’à son histoire.
Il ne faudrait pas se figurer que ces violences et ces ruines se sont rencontrées par hasard. Elles procèdent toutes du même principe, qui est celui du communisme. Pour réussir à absorber l'individu dans cette masse confuse, inconsciente, impersonnelle, qui n’est plus seulement l'Etat ou la Commune, mais la communauté, il faut le dépouiller de ses plus nobles prérogatives, de ses plus généreux instincts, de ses plus précieuses facultés ; il faut lui ôter la liberté, la responsabilité morale, la puissance et jusqu’à l’idée du dévouement et du sacrifice, par conséquent la famille, la patrie, la religion ; il faut qu’à la place d’une âme on ne laisse plus subsister qu’une unité dans un nombre ; il faut éteindre toutes les splendeurs et abaisser tous les sommets de la nature humaine." (pp.22-24)
"La Commune de Paris n’est qu’un instrument et une émanation de la Société internationale des travailleurs. C’est là qu’est le véritable danger de notre temps, c’est là que se trame depuis des années une formidable conspiration contre la liberté et la civilisation de l’Europe." (p.25)
"Le temps est venu où chacun dans sa sphère, par un moyen ou par un autre, est obligé de se prononcer pour la société ou pour le socialisme. Une voie de conciliation ou de transaction entre ces deux puissances contraires, il n’y en a pas, et celui qui a la prétention d’en proposer une se fait justement soupçonner de complicité ou de démence."(pp.25-26)
-Adolphe Franck, préface du 15 mai 1871 à Le Communisme jugé par l’histoire. Depuis son origine jusqu'en 1871, Librairie E. Lachaud, 1871 (1848 pour la première édition), 99 pages.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligue_nationale_contre_l%27ath%C3%A9isme
https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Communisme_jug%C3%A9_par_l%E2%80%99histoire
"Le danger qui nous menaçait, il y a près d’un quart de siècle, est toujours le même ; seulement il est devenu plus pressant et plus général. Le communisme dirige ses attaques, non-seulement contre la société française, mais contre la société européenne. Il ne se contente plus de parler et d’écrire, il livre des batailles." (pp.5-6)
"C’est le communisme qui a dicté les règlements et les programmes de la Société Internationale des travailleurs, et c’est lui que les missionnaires et les fondés de pouvoir de cette association redoutable promènent impunément de ville en ville et de congrès en congrès. Enfin, le doute n’est plus permis aux plus aveugles : s’abritant sous un nom équivoque et profitant de la faveur attachée aux franchises municipales pour élever son pouvoir sur les débris de la société, c’est le communisme qui, dans la fatale journée du 18 mars, s’est installé à l’Hôtel de Ville de Paris. C’est lui qui, depuis bientôt deux mois, sous les yeux et à la satisfaction, peut-être avec le concours d’un ennemi victorieux, tournant à notre ruine les instruments mêmes de notre défense, opprime et déshonore, remplit de désespoir et de deuil notre malheureuse capitale." (p.6)
"Toutes les écoles par lesquelles, depuis bientôt un demi-siècle, le socialisme est représenté parmi nous, l’école de Saint-Simon, celle de Charles Fourier, le communisme pur, le mutuellisme, sont d’accord sur ce point que les souffrances et la misère des classes laborieuses prennent leur source dans la liberté de l’industrie, principe d’une concurrence illimitée, et qu’il est temps d’y mettre un terme par l’organisation du travail.
Mais si le travail, perfectionné sans cesse par le temps et par l’expérience, ne réussit pas à se donner lui-même peu à peu les lois les plus propres à le régler, quelle autre puissance que l’État pourra lui imposer tout d’un coup l’organisation qu’il réclame ? L’État organisant le travail, c’est l’État qui dispose souverainement des capitaux, des instruments et du personnel de l’industrie, soit agricole, soit manufacturière ; c’est l’État dirigeant à son gré, avec une autorité sans bornes, non-seulement toutes les forces matérielles de la société, mais les facultés de l’intelligence, l’activité de l’âme et de la pensée. L’État sera le maître unique, absolu, des hommes et des choses, des biens et des personnes. Nous serons en plein communisme, et le communisme lui-même ne pourra s’établir et se conserver que sous la règle du despotisme."
"Un autre principe mis en circulation et soutenu avec opiniâtreté par le socialisme contemporain, c’est la gratuité du crédit ; c’est pour tous les membres de la société, dispensés de fournir des garanties, soit matérielles, soit morales, le droit au crédit, digne pendant de ce qu’on appelait en 1848 le droit au travail. La gratuité du crédit se confond nécessairement avec l’abolition de l’intérêt. L’intérêt de l’argent une fois aboli, pourquoi conserverait-on la rente de la terre ? pourquoi le loyer des maisons ? Les maisons et les terres ne sont-elles pas des capitaux aussi bien que les billets de banque et les espèces sonnantes ? La faculté d’habiter les unes et de cultiver les autres ne doit-elle pas être regardée comme un véritable crédit ? Or, si les capitaux et les immeubles, si les valeurs et les signes de la valeur appartiennent indistinctement à tout le monde, ils n’appartiennent plus à personne, ils sont la propriété de l’État, et nous voilà encore une fois dans le communisme.
Mais, à parler rigoureusement, la conséquence qu’apporterait avec elle la gratuité du crédit serait encore moins la communauté de la propriété que celle de la misère. Qui se donnerait la peine d’amasser des capitaux qui ne devraient produire aucun intérêt ? de faire construire des maisons qui se loueraient gratis ? de faire défricher des terres qui seraient au premier occupant ? Les capitaux absents, le crédit n’est plus qu’un mot vide de sens. La gratuité du crédit n’est donc pas autre chose que la destruction du crédit.
La gratuité du crédit fait naturellement penser au Manifeste dans lequel, il n’y a pas longtemps, la soi-disant Commune de Paris nous promettait des « institutions propres à universaliser le pouvoir et la propriété. » Universaliser le pouvoir, s’il y a une pensée renfermée dans ces mots, c’est amener la destruction du pouvoir et laisser le champ libre à l'anarchie. Universaliser la propriété, si l'on entend par là, non le progrès du bien-être et de la richesse publique, tel qu'on peut l’attendre avec certitude du développement de l'industrie, de instruction et de la moralité des peuples, mais une mesure législative ou une action gouvernementale ; universaliser la propriété, c’est l’anéantir en lui enlevant son caractère individuel."
"Le droit au travail était revendiqué surtout par l’école fouriériste ou phalanstérienne, et se distingue essentiellement de la liberté du travail. Il consiste dans le prétendu droit qui appartiendrait à chaque membre de la société de réclamer d’elle un emploi et des moyens d’existence, sans être astreint d’ailleurs à aucune condition d’intelligence ou de valeur personnelle. [...]
Si l’État se voit obligé de pourvoir à tout, il faut qu’on lui laisse le droit de disposer de tout ; il ne saurait prendre à sa charge toutes les existences sans posséder les moyens de soutenir un tel fardeau, et la somme de ces moyens est la même que celle des richesses que recèle le corps social."
"[M. Louis Blanc] a consacré tant d’années de sa laborieuse vie, tant de productions de sa plume féconde à développer dans le cœur des masses pauvres et ignorantes toutes les passions envieuses et implacables que peuvent exciter la richesse, le pouvoir, la supériorité de l’intelligence ou de l’instruction et même la simple aisance." (p.18)
"[La Commune] pille les caisses des compagnies, elle fait saisir ou mettre en pièces le mobilier des particuliers, elle ordonne la démolition des maisons de ses adversaires, elle supprime des offices qui représentent des patrimoines privés, elle supprime des journaux et ferme des imprimeries." (p.21)
"Quant à la famille, ce premier fondement des sociétés humaines, cette première école de dévouement et de respect sur les ruines de laquelle ne pourront germer que brutales passions et orgueil sauvage, pour savoir en quelle estime la tient la Commune, il suffit de se rappeler ce fameux décret, où admettant à une pension les veuves des gardes nationaux morts sous les armes, elle efface toute distinction entre les femmes soi-disant légitimes et les autres. La patrie, encore plus maltraitée que la famille, est formellement reniée. On a remplacé son glorieux drapeau par un autre qui ne peut guère nous rappeler que la livrée du bagne et la soif du sang. C’est celui que, dans les arènes, on agite sous les yeux du taureau sauvage pour attiser sa fureur. Est-ce le même effet que l'on veut produire sur le peuple ? Avec le drapeau de la patrie on s’efforce de répudier toutes ses traditions et tous ses souvenirs, on a décrété la destruction de ses monuments les plus chers, on voudrait supprimer jusqu’à son histoire.
Il ne faudrait pas se figurer que ces violences et ces ruines se sont rencontrées par hasard. Elles procèdent toutes du même principe, qui est celui du communisme. Pour réussir à absorber l'individu dans cette masse confuse, inconsciente, impersonnelle, qui n’est plus seulement l'Etat ou la Commune, mais la communauté, il faut le dépouiller de ses plus nobles prérogatives, de ses plus généreux instincts, de ses plus précieuses facultés ; il faut lui ôter la liberté, la responsabilité morale, la puissance et jusqu’à l’idée du dévouement et du sacrifice, par conséquent la famille, la patrie, la religion ; il faut qu’à la place d’une âme on ne laisse plus subsister qu’une unité dans un nombre ; il faut éteindre toutes les splendeurs et abaisser tous les sommets de la nature humaine." (pp.22-24)
"La Commune de Paris n’est qu’un instrument et une émanation de la Société internationale des travailleurs. C’est là qu’est le véritable danger de notre temps, c’est là que se trame depuis des années une formidable conspiration contre la liberté et la civilisation de l’Europe." (p.25)
"Le temps est venu où chacun dans sa sphère, par un moyen ou par un autre, est obligé de se prononcer pour la société ou pour le socialisme. Une voie de conciliation ou de transaction entre ces deux puissances contraires, il n’y en a pas, et celui qui a la prétention d’en proposer une se fait justement soupçonner de complicité ou de démence."(pp.25-26)
-Adolphe Franck, préface du 15 mai 1871 à Le Communisme jugé par l’histoire. Depuis son origine jusqu'en 1871, Librairie E. Lachaud, 1871 (1848 pour la première édition), 99 pages.