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    Théodore Reinach, De l'état de siège, étude juridique et historique, 1885

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Théodore Reinach, De l'état de siège, étude juridique et historique, 1885 Empty Théodore Reinach, De l'état de siège, étude juridique et historique, 1885

    Message par Johnathan R. Razorback Lun 28 Sep - 17:19

    https://ia700407.us.archive.org/14/items/deltatdesigeetu00reingoog/deltatdesigeetu00reingoog.pdf

    "Les mesures d'exceptions sont, dans le droit public, l'équivalent des actes de légitime défense dans le droit privé ; elles dérivent d'un principe antérieur et supérieur à toute législation positive, que le bon sens populaire a exprimé dans ces formules énergiques: "Aux grands maux il faut de grands remèdes. - Salus populi suprema lex esto". [note en bas de page: Cicéron, De legibus, III, 4, §8]
    Si ce principe même soulève peu de difficultés, l'accord cesse dès que l'on cherche à en déterminer la conséquence
    ." (p.7)

    "Poursuivre jusque dans ses transformations les plus lointaines et les plus récentes l'institution politique qui s'appelle dictature chez les Romains, suspension de l'habeas corpus en Angleterre, état de siège en France et en Allemagne, tel est le but de ce travail." (p.8 )

    "Son universalité prouve le besoin permanent auquel [cette institution] répond." (p.8 )

    "La peur, la colère, la haine sont mauvaises conseillères ; c'est aux heures de calme, c'est en pleine possession de son sang-froid, que le législateur doit peser d'avance les pouvoirs qui lui sont indispensables pour réprimer l'insurrection ou repousser l'invasion étrangère. [...] Ce n'est pas au moment où l'application s'en impose que l'on peut sainement expliquer et discuter les dispositions d'une loi d'état de siège ; le sifflement des balles de l'émeute, le grondement du canon de l'étranger retentissent jusque dans le cabinet du jurisconsulte et troublent singulièrement la quiétude d'esprit nécessaire pour faire œuvre d'interprète impartial." (p.9-10)

    "Nous n'avons d'autre mérite que d'avoir choisi une heure propice à une œuvre toute de raison et de réflexion, et d'autre espérance que de voir ces pages, commentaires de textes qui se réveillent quand la patrie est en danger, rester éternellement inutiles." (p.10)

    "L'institution qui se rapproche le plus de la dictature romaine est l'æsymnétie de certaines républiques grecques. Le nom d'Æsymnète [...] que l'on rencontre déjà chez Homère [...] paraît avoir eu d'abord le sens très général de magistrat [...] Plus tard on voit un magistrat ordinaire de ce nom à Téos, à Cymé et à Chalcédoine [...] mais dans d'autres cités le rôle joué par l'æsymnète correspond exactement à la définition d'Aristote et de Théophraste: "l'æsymnète est un tyran électif". Son pouvoir naît de la lutte prolongée des factions qui divisent l'Etat, et qui, épuisées par leurs efforts stériles, s'accordent pour abdiquer entre les mains d'un chef puissant et respecté, investi du droit de vie et de mort [...] C'est donc un véritable tyran qui ne diffère du tyran ordinaire que par la légalité de son élévation. Elu "suivant les circonstances et pour la durée nécessaire", l'æsymnète ne se démet, en général, de ses fonctions que lorsqu'il juge l'ordre et la paix suffisamment assurés. Pittacus, choisi par les Mityléniens pour les défendre contre les bannis groupés autour d'Alcée, garda ainsi le pouvoir pendant dix ans. D'ordinaire l'æsymnète ne se contentait pas de gouverner ; il réformait les lois défectueuses et le peuple était censé avoir approuver d'avance toutes les lois nouvelles qu'il édicterait [...]." (p.11-13)

    "Denys d'Halicarnasse dit que les Romains empruntèrent aux Grecs l'institution de la dictature, mais cela n'est guère probable. A l'époque où Rome eut ses premiers dictateurs, elle ne connaissait pas les institutions helléniques ; d'ailleurs le dictateur diffère de l'æsymnète par deux caractères importants: il est élu pour une durée limitée d'avance, et il ne possède point le pouvoir législatif. [...]
    Le dictateur romain n'était nommé que dans les circonstances extraordinaires et pour six mois seulement
    ." (p.14)

    "On ne sait précisément ni le nom ni la date du premier dictateur ; il est probable néanmoins que la lex de dictatore creando fut portée environ dix ans après l'expulsion des rois. Il n'y a aucune raison sérieuse de révoquer en doute l'existence de cette loi, citée par Tite-Live et par Denys d'Halicarnasse [...]. Voici probablement à quel besoin elle répondait. La dualité du pouvoir suprême, organisée après la révolution de 509 av. J.C., était favorable au maintien de la liberté, mais elle l'était beaucoup moins à la conduite prompte et énergique des opérations militaires qui, plus que toute autre entreprise humaine, exigent l'unité de direction. Or à cette époque, où Rome ne luttait pas pour l'empire, mais pour l'existence, où la guerre avec les peuples voisins était son état normal, les plus grands dangers pouvaient et devaient naître du conflit de vues divergentes chez les consuls ou du choc de leurs ambitions rivales. Pour remédier à cet éparpillement de forces, on imagine la dictature, c'est-à-dire le rétablissement temporaire de la monarchie ; et le remède parut si heureux qu'on l'employa sans hésiter toutes les fois que survenait une guerre menaçante et que l'accord le plus parfait ne paraissait pas régner entre les consuls." (p.15)

    "La durée maxima des pouvoirs du dictateur, fixée à six mois, est celle d'une campagne militaire dans l'usage des anciens. En sa qualité de généralissime, le dictateur exerce une juridiction disciplinaire illimitée à l'armée et dans Rome même, changée en camp à l'approche du péril. Le nom que lui donnaient les anciens livres des pontifes, magister populi, signifie littéralement chef des patriciens, c'est-à-dire de l'infanterie romaine ; telle était, en effet, la fonction qui lui était plus particulièrement dévolue sur les champs de bataille. Aussi, comme jadis le roi, devait-il obtenir l'autorisation spéciale des curies pour pouvoir monter à cheval, et dès son entrée en fonctions il s'adjoignait un général de cavalerie, le magister equitum, héritier du tribunus celerum du temps des rois." (p.16)

    "La dictature ne conserva pas longtemps le caractère exclusivement militaire qu'elle avait à l'origine ; bientôt le Sénat imagina d'employer contre les ennemis du dedans l'arme qui avait si bien réussi contre les ennemis du dehors. La dictature devint la ressource habituelle du patriciat dans ses luttes acharnées contre les revendications de la plèbe ; grâce à l'énergique concentration de pouvoirs qu'elle opérait entre les mains d'un seul homme, elle servit à briser les résistances les plus opiniâtres, et souvent la simple menace de créer un dictateur suffit à réprimer les velléités factieuses. Dès lors cette institution mérite pleinement le nom de remède suprême, ultimum auxilium, que lui donnent les auteurs, et il fut vrai de dire, avec l'empereur Claude, qu'elle trouvait son emploi "dans les guerres les plus redoutables et dans les commotions civiles les plus dangereuses" (in asperioribus bellis aut in civili motu difficiliore) [...]." (p.16-17)

    "A côté de ces deux variétés principales de la dictature, la dictature rei (c'est-à-dire belli) gerundæ causa, et la dictature seditionis sedandæ causa, -que l'on réunit parfois sous l'appellation commune de dictature optimo jure, -les auteurs et les fastes nous révèlent la création assez fréquente de dictateurs investis de certaines fonctions spéciales, de courte durée, et peu dignes, ce semble, d'un pareil déploiement d'autorité. Ce sont les dictateurs imminuto jure que l'on voit chargés de planter le clou annal au Capitole, de célébrer les jeux ou les féries latines, de dresser la liste du Sénat, de diriger des enquêtes, de convoquer et de présider les comices." (p.17)

    "A la différence des autres magistrats du peuple romain, le dictateur n'était pas élu par le peuple." (p.18-19)

    "C'est le Sénat qui décidait qu'il y avait lieu à la nomination d'un dictateur ; mais il ne désignait pas le titulaire. Ce choix appartenait aux consuls en exercice, soit qu'on ait voulu par là consoler les premiers magistrats de l'Etat de la subordination temporaire à laquelle on les réduisait, soit qu'on ait cherché à assurer par cette cooptation le bon accord entre le futur dictateur et ses auxiliaires [...]. Le sort ou une entente préalable désignait celui des consuls qui nommait le dictateur." (p.19)

    "Aucune règle ne paraît avoir limité la liberté de choix du consul: il suffisait que le titulaire eût le jus honorum ; aussi, dès que les lois Liciniennes eurent admis les plébéiens au partage du consulat, trouve-t-on des dictateurs plébéiens (356 av. J.C)." (p.20)

    "Ajoutons que le Sénat, s'il ne participait pas directement à la nomination, conservait en fait la haute main sur elle ; le plus souvent, sans doute, il désignait officieusement aux consuls le candidat de son choix, et n'autorisait la nomination qu'après s'être assuré de leur docilité." (p.20)

    "Les pouvoirs du dictateur duraient six mois au plus, et ne pouvaient être prorogés. Même avant l'expiration de ce délai, le dictateur abdiquait d'ordinaire dès que la crise était passée. S'il cherchait à prolonger ses fonctions au-delà du terme légal, il encourait la peine de mort." (p.22)

    "1. L'autorité d'un magistrat peut être tenue en échec par l'autorité d'un collègue, ou d'un magistrat de rang égal ou supérieur au sien. C'est le célèbre principe: Par majorve potestas plus valeto [...]. En vertu de ce principe, l'opposition d'un magistrat compétent, notifiée en temps utile, enlève toute efficacité aux actes quelconques posés par un autre magistrat: décrets, projets de loi, condamnations, arrestations, convocations, tout tombe devant l'exercice du droit d'intercessio. L'intercessio de collègue à collègue, contemporaine de l'établissement de la république, fut bientôt complétée par l'intercessio des tribus de la plèbe. C'était là leur véritable, on peut dire leur unique fonction: s'opposer à la présentation et au vote de mesures contraires aux intérêts de la plèbe, et arracher des mains des consuls les plébéiens innocents, quelquefois même les coupables.
    2. L
    'intercessio exige la présence du magistrat tutélaire sur le lieu même de l'acte ; de plus, tous les magistrats peuvent être d'accord pour commettre une iniquité. Aussi une seconde garantie était-elle nécessaire: on la trouva dans la provocatio ad populum, introduite par la loi Valeria, du consul Poplicola, l'année même de l'expulsion des rois (509 av. J.C). Cette loi porta une grave atteinte au pouvoir de juridiction criminelle des consuls: tout citoyen condamné par eux à la peine de mort ou aux verges, dans l'enceinte de la ville et dans le rayon du premier mille, put appeler de la sentence aux comices centuriates ; l'application de la peine était suspendue jusqu'au vote des comices. Pour marquer aux yeux la différence introduite par la loi Valeria entre l'imperium domi et l'imperium militiæ, les consuls supprimèrent désormais les haches de leurs insignes dans la ville, et ordonnèrent à leurs licteurs d'incliner leurs faisceaux devant le peuple.
    Suspendue pendant le gouvernement décemviral, la
    provocatio fut expressément confirmée par les Douze Tables [...]. Deux lois promulguées immédiatement après la chute d'Appius Claudius et de ses collègues (449), la loi Valeria Horatia (2ème loi Valeria de provocatione) et le plébiscite Duilium, défendirent même, sous la triple peine de la sacertas, des verges et de la mort, toute proposition tendant à la création d'une magistrature sine provocatione, comme l'avait été le décemvirat [...]. Ce sont peut-être les mêmes lois qui introduisirent la provocatio contre les condamnations à l'amende dépassant un certain chiffre ; seulement en ce cas elle devait être portée devant les comices par tribus.
    3. Le système des garanties individuelles se complétait par le principe de la responsabilité des magistrats. Ce principe n'était pas inscrit dans des lois solennelles, comme il l'est dans beaucoup de constitutions modernes ; en revanche, il était appliqué. Les consuls, tribuns et préteurs, à leur sortie de charge, ne répondaient pas seulement devant le peuple des infractions positives qu'ils avaient pu commettre contre la loi, mais encore de tout acte préjudiciables aux intérêts de la République. Les condamnations sévères qui furent prononcées à diverses reprises contre les magistrats incapables ou félons produisirent un effet d'intimidation salutaire ; loin d'être "les rois d'une année" que la plèbe redoutait autrefois, les consuls tombèrent peu à peu sous la dépendance des tribuns de la plèbe et du Sénat ; les premiers les tenaient par la menace d'une accusation, le Sénat par la protection que leur offrait son autorité morale.
    Tel est l'ensemble des garanties qui, avec le caractère annal et l'origine élective des magistratures, faisaient du gouvernement de Rome, à la belle époque de la république, un des régimes les plus tempérés et les mieux équilibrés que le monde ait connus, malgré l'apparente omnipotence des magistrats. Mais cet équilibre pouvait devenir un danger aux heures de crise suprême: l'
    intercessio permettait à un seul tribun d'entraver toute la marche du gouvernement, la provocatio retardait singulièrement la répression énergique des crimes contre l'Etat, la crainte de la responsabilité paralysait les détenteurs du pouvoir.
    Toutes ces causes de faiblesse disparaissaient avec la nomination d'un dictateur
    ." (p.23-26)

    "Trois mots résument les pouvoirs propres du dictateur: il est exempt de l'intercessio, il n'est pas soumis à la provocatio, il n'est pas responsable.
    1. L'absence d'
    intercessio contre les actes du dictateur n'avait pas été établie par un texte spécial, mais elle résultait de la nature même de l'institution. En effet, le dictateur étant investi de la potestas maxima et de l'imperium maximum, n'ayant par conséquent ni collègue, ni égal, ni, à plus forte raison, de supérieur, ne tombait pas sous l'empire de la règle: Par majorve potestas plus valeto. Bien plus, la nomination du dictateur avait pour effet de suspendre tous les autres magistrats en exercice. Consuls, préteurs, édiles, conservaient bien nominalement leurs fonctions - la preuve en est qu'à l'expiration de la dictature une nouvelle investiture ne leur était pas nécessaire - mais ce n'était plus qu'un simple titre qui ne leur conférait ni imperium, ni potestas ; on leur enlevait leurs licteurs, emblème de leur puissance, et ils ne pouvaient plus agir que comme délégués du dictateur et sous ses auspices. Même le magister equitum, auxiliaire indispensable du dictateur, avait la potestas consularis, mais sans imperium.
    Quant aux tribuns de la plèbe, ils n'étaient pas suspendus ; l'origine contractuelle de leur magistrature, et les dispositions expresses de la lex sacrata, qui avait stipulé que leur pouvoir ne serait jamais interrompu, s'y opposaient ; en revanche l'intercessio des tribuns contre les actes du dictateur n'était pas admise. [...]
    2. L'exemption de la
    provocatio paraît avoir été mentionnée expressément par la loi introductive de la dictature [...] ; elle dérogeait ainsi à la première loi Valeria. Quant à la seconde loi Valeria et au plébiscite Duilium, on ne pouvait les invoquer contre le dictateur, car ces lois ne visaient que l'avenir sans toucher aux institutions existantes ; de plus, elles ne parlaient que de magistrats créées, c'est-à-dire élus, et la dictature, on l'a vu, n'était pas élective. Aussi, après comme avant la chute des décemvirs, l'appel contre les sentences, même capitales, du dictateur, demeura-t-il interdit. Nullum nisi in cura parendi auxilium, dit Tite-Live: "Il n'y avait d'autre ressource que d'obéir". Un autre historien atteste que le dictateur pouvait faire mourir plébéiens, patriciens, sénateurs, et jusqu'aux magistrats, puisque leurs pouvoirs étaient suspendus ; il n'y avait d'exception que pour les tribuns, protégés par leur caractère sacro-saint. Comme symbole de cette confusion de l'imperium domi et de l'imperium militiæ chez le dictateur, ses licteurs, au nombre de vingt-quatre, portaient la hache dans les faisceaux, même à l'intérieur de la ville.
    3. Il ne sert de rien à un magistrat d'avoir en droit des pouvoirs illimités s'il peut, à sa sortie de charge, être poursuivi pour l'usage qu'il en a fait. L'irresponsabilité venait compléter la liberté d'action du dictateur ; mais elle ne le couvrait évidemment que tant qu'il restait dans la limite de ses attributions et ne violait pas les lois en vigueur: il était irresponsable, mais non pas
    legibus solutus. Parmi ces lois qu'il devait respecter, on peut citer l'inviolabilité tribunitienne, et la règle spéciale qui lui défendait de disposer des fonds publics sans l'autorisation préalable du Sénat: sur ce point unique, ses pouvoirs étaient inférieurs à ceux des consuls [...]." (p.26-29)

    "Une loi dont nous ne connaissons exactement ni le nom ni la date, mais qui est probablement identique à la 3ème loi Valeria de provocatione (300 av. J.C), vint soumettre la dictature à la provocatio. C'était la dépouiller d'une de ses prérogatives les plus précieuses, et à partir de ce moment les mots optimo jure furent retranchés avec raison de la formule d'investiture des dictateurs [...]
    Les tribuns de la plèbe, encouragés par le peuple, commencèrent à s'arroger le droit d'intercéder contre les dictateurs. Cette
    intercessio, vis-à-vis des dictateurs rei gerundæ causa, n'eût d'abord que la valeur d'une protestation morale et ne s'exerça guère qu'en matière de recrutement." (p.31)

    "Enfin l'immixtion des comices dans l'élection des dictateurs porta le dernier coup à leur indépendance. Pendant la guerre d'Annibal, en l'absence des consuls, le peuple, réuni probablement en comices par tribus, nomma Q. Fabius Maximus pro dictatore (217 av. J.C.). Peu après, des dissentiments s'étant élevés entre Fabius et son maître de la cavalerie, les tribuns firent voter un plébiscite qui donnait à ce dernier les mêmes droits qu'au dictateur ; par là l'unité de commandement, principal but visé par l'institution de la dictature, était sacrifiée à son tour. Enfin en 210, on vit le Sénat lui-même ordonner au consul de se faire désigner par un plébiscite le candidat qu'il devait nommer dictateur." (p.32-33)

    "Ces dernières expériences achevèrent de déconsidérer la dictature, et l'on n'y recourut plus depuis la fin de la deuxième guerre punique: la dernier dictature militaire est de l'an 216 av. J.C., la dernière dictature spéciale de l'an 203." (p.33)

    "Les circonstances qui avaient amené la création et le maintien de cette magistrature n'existaient plus. Le triomphe définitif des revendications plébéiennes, en effaçant la principale cause des discordes intérieures, rendait inutile la dictature seditionis sedandæ causa ; la dictature rei gerendæ causa, par sa courte durée, se prêtait mal aux conditions nouvelles des guerres longues et lointaines entreprises par la République [...]." (p.33-34)

    "La dictature fut définitivement abolie après la mort de Jules César par la loi Antonia, proposée par Marc-Antoine (44 av. J.C.). Octave ne crut pas nécessaire de ressusciter un titre aussi impopulaire [...] mais s'il tenait peu au nom, s'il sut même se faire applaudir en le refusant, il subsista à l'anarchie, où venaient de sombrer les libertés publiques, un régime qui ressemblait singulièrement à la chose. Quand les dictatures temporaires disparaissent, la dictature perpétuelle commence." (p.34-35)

    "Pendant le siècle qui suivit la guerre d'Annibal, une double transformation s'accomplit dans la constitution romaine. D'une part, la composition des comices, et par suite le mécanisme électoral, fut modifié dans un sens démocratique. D'autre part, la véritable direction des affaires passa des consuls au Sénat, qui n'avait été, dans le principe, que leur conseil. Grâce à son alliance avec les tribuns de la plèbe, le Sénat sut tirer à lui peu à peu les finances, la diplomatie, l'administration des provinces, la sûreté intérieure, tout jusqu'à la direction suprême des opérations de guerre ; les consuls furent réduits au rôle d'agents exécutifs.
    Le Sénat était en théorie un corps ouvert, puisqu'il se composait de la réunion des anciens magistrats, triés par les censeurs. Mais en réalité, les magistratures curules, qui donnaient accès au Sénat, étaient dans la possession exclusive d'un nombre assez restreint de familles, qui seules étaient assez riches, assez considérées, et soutenues par une clientèle assez forte, pour conquérir les suffrages d'une multitude de plus en plus vénale. Ces familles, unies entre elles par des intérêts communs d'ambition et de fortune, finirent par constituer une aristocratie nouvelle, une aristocratie d'argent et de robe, qui hérita des traditions orgueilleuses et cupides du patriciat, sans hériter de ses fortes vertus. Maîtresse du sol italique, maîtresse des magistratures et par elles du Sénat, cette aristocratie s'y cantonna comme dans une citadelle inexpugnable, et lorsque, par extraordinaire, elle consentait à s'ouvrir à un homme nouveau, dont le mérite s'imposait, ce n'était qu'à la condition qu'il adoptât ses principes jalousement conservateurs, parfois même qu'il les exagérât, pour faire pardonner son origine.
    Tant que Carthage et la Macédoine furent debout, le Sénat justifia ses usurpations par ses services ; mais lorsque la chute de ces deux rivales eut livré à Rome l'empire du monde civilisé, elle se regarda et vit qu'elle n'avait fait que changer de maîtres. Alors entre l'aristocratie sénatoriale et une démocratie désunie et versatile, mais forte parce qu'elle était le nombre, et audacieuse parce qu'elle était la misère, s'engagea une lutte opiniâtre, à la fois politique et sociale, qui dura un siècle et se termina par la soumission des deux adversaires sous un maître commun. Cette lutte, qui commence avec les Gracques, se présente tour à tour sous les aspects les plus divers. Tantôt elle reste sur le terrain légal, tout se borne à des projets de loi révolutionnaires et à des brigues électorales acharnées ; tantôt on procède par complots, par émeutes, par guerres civiles. Plus d'une fois le gouvernement, c'est-à-dire le Sénat, se trouva placé dans cette situation critique où l'ordre matériel n'est plus assuré, quoique la sédition n'ait pas encore éclaté ouvertement, où un jour, une heure d'hésitation ou de faiblesse peut compromettre à jamais le salut de l'Etat. Était-il suffisamment armé par les lois ordinaires pour faire face à des situations pareilles ? Il faut avouer que non.
    Des deux objets qu'une législation bien faite doit constamment avoir en vue, parce qu'ils sont également indispensables à la société civile, - la liberté et l'ordre-, la législation d'alors n'assurait que le premier. C'était la dictature qui, dans l'ancienne constitution, était chargée de pourvoir au second, mais la dictature, condamnée par les mœurs, énervée par les lois, était devenue une arme émoussée ; pour lui rendre sa force, il aurait fallu reprendre en sens inverse tout un travail législatif: le peuple ne l'aurait pas voulu, le Sénat ne l'aurait pas pu. Y eût-on réussi, quelle apparence, dans la décadence de l'esprit civique que tout révélait, de remettre pour six mois le pouvoir absolu entre les mains d'un homme, qui aurait été tenté de s'y éterniser ? La race des Cincinnatus et des Fabius était éteinte, et si Sylla abdiqua au bout de deux ans, ce fut par lassitude [...].
    D'autre part, les pouvoirs des magistrats ordinaires étaient manifestement insuffisants pour réprimer une sédition naissante. L'emploi de la force armée dans l'enceinte du pomœrium leur est interdit ; ils ne peuvent compter que sur leurs licteurs et sur les citoyens de bonne volonté. Sous prétexte que la rue est à tout le monde, il ne peuvent même pas, avant la loi
    Julia municipalis, assurer la libre circulation dans la ville [...] ; sous prétexte que le domicile privé est sacré, ils ne peuvent arracher aucun citoyen de chez lui [...]. Bien plus, les gens de qualité ont le privilège de pouvoir se constituer prisonniers chez des particuliers distingués et d'échapper par là à toute prison préventive [...]. Si l'on ajoute à toutes ces entraves coutumières celles qui naissent de l'intercessio tribunitienne, si facile à acheter, des lois de provocatione "véritables lois d'habeas corpus [...]", enfin d'une organisation défectueuse de la police et des prisons, on reconnaîtra que la sédition aurait eu le temps de se constituer, de s'emparer des édifices publics et de mettre le feu aux quatre coins de Rome, avant que des magistrats, vraiment respectueux de la légalité, eussent seulement pu arrêter un seul de ses chefs.
    Si la dictature est impossible, et si le consulat est impuissant, que fera le Sénat ? Assistera-t-il muet et désarmé au triomphe de l'émeute ? Sacrifiera-t-il sa cause, qu'il identifie avec celle de la république, à un scrupule de légalité ? L'aristocratie ne le pensa pas. Ne pouvant ou ne voulant recourir à la dictature, elle imagina de transformer, dans ces moments de crise, les consuls et les autres magistrats dévoués à ses intérêts en dictateurs momentanés, qui avaient tout de l'ancien magister populi, hormis le nom. Comme les consuls tenaient ce pouvoir extraordinaire uniquement du Sénat, et ne pouvaient compter que sur lui pour se justifier d'en avoir usé, cette combinaison avait l'avantage de ne pas exiger du Sénat une abdication, même passagère ; il conservait la direction suprême de la résistance, et c'était lui en réalité qui s'érigeait en dictateur.
    Voilà, en deux mots, la théorie du sénatusconsulte
    ultimum."(p.36-40)

    "Mesures de défense militaire. Le decretum tumultus. - Parmi les mesures d'ordre purement militaire auxquelles le Sénat a recours dans les crises aiguës, la plus importante est le decretum tumultus. Le tumultus est à Rome une institution, ou si l'on aime mieux, une coutume très ancienne, dont l'origine remonte à l'époque lointaine où les incursions des Gaulois et les attaques des peuples italiens menaçaient l'existence même de la République [...]. A la nouvelle d'un péril de ce genre, le Sénat proclamait qu'il y avait tumulte, et ordonnait à tous les citoyens, les consulaires exceptés, de quitter la toge, habit de paix, pour revêtir le sagum, ou casaque militaire. Cette décision, qui s'appelait decretum tumultus ou senatus auctoritas sagaria, coïncidait généralement avec la nomination d'un dictateur [...].
    L'effet principal du
    decretum tumultus était de modifier les règles ordinaires du recrutement militaire. On sait qu'au bon temps de la république Rome n'avait pas d'armée permanente. Tous les citoyens valides étaient astreints au service militaire de 17 à 46 ans. Chaque année, à la séance qui suivait l'entrée en charge des consuls, le Sénat fixait le chiffre du contingent ; puis, à la date marquée par un édit des consuls, on procédait au Capitole à l'appel solennel des citoyens inscrits sur les listes de recrutement. Si les volontaires ne se présentaient pas en assez grand nombre, les consuls choisissaient eux-mêmes les hommes les plus propres au service et les portaient sur le rôle de la conscription ; cette opération s'appelait delectus, et des peines sévères atteignaient le citoyen qui manquait à l'appel de son nom.
    Des causes d'exemptions assez nombreuses avaient été admises par l'usage. Les unes constituaient un droit et s'appelaient
    vacationes ; elles avaient été établies en faveur de certains employés publics. Les autres étaient admises à titre gracieux et portaient le nom de beneficia. Tels étaient le grand nombre d'années de service, les campagnes, les blessures, la qualité d'habitant d'une colonie maritime, etc. Enfin les tribuns de la plèbe qui assistaient à l'opération du delectus pouvaient, sans alléguer aucun motif, couvrir de leur protection les hommes qui ne répondaient pas à l'appel (qui militiam detrectabant), ou qu'ils voulaient, par faveur, soustraire à leurs obligations militaires.
    L'intervention officieuse des tribuns disparaissait ou aurait dû disparaître en cas de
    tumultus, puisque le recrutement était alors dirigé par un dictateur. Les causes légales d'exemption n'étaient pas davantage respectées. D'ordinaire on ne procédait même pas à un delectus régulier, qui eût demandé trop de temps. Le dictateur montait au Capitole, y déployait deux enseignes, l'une rouge pour rallier les fantassins, l'autre bleue pour les cavaliers, et prononçait l'appel sacramentel: Qui rempublicam salvam esse vult me sequatur. Ceux qui se rendaient à cet appel se liaient aussitôt par le serment militaire, sans que l'on s'inquiétât de savoir s'ils remplissaient ou non les conditions légales d'âge et de cens. Il en allait de même en pays latin et allié ; des commissaires extraordinaires parcouraient les campagnes et les villes et enrôlaient, sans autre formation que le serment, tous les ingénus aptes au service ; il semble que l'on ne regardait pas, en pareil cas, aux traités qui fixaient le nombre d'auxiliaires que chaque peuple allié devait fournir à la république. Ce recrutement sommaire à Rome et en Italie s'appelait conjuratio, et les soldats ainsi enrôlés étaient dits milites tumultuarii ou subitarii [...]. Ils ne servaient que pendant la durée du tumulte.
    Le
    tumultus survécut à la désuétude de la dictature et aux grandes guerres qui donnèrent à Rome l'empire du monde. Les lois organiques des colonies le mentionnent [...] et nous savons qu'on y recourut pendant la guerre sociale. A la suite de cette guerre et de la conquête du droit de cité par les Italiens, l'ancien delectus fut remplacé par une opération appelée conquisitio qui se faisait dans les différents districts par le moyen de délégués (conquisitores) ; on ne sait au juste comment l'on procédait en cas de tumulte, mais le principe était toujours la levée en masse.
    Comme on avait fait fréquemment usage du
    tumultus à l'occasion de troubles intestins ou d'incursions qui n'avaient pas le caractère d'une guerre véritable, on en arriva à considérer le decretum tumultus comme une mesure moins grave que la déclaration de guerre. Pendant le conflit entre Antoine et le Sénat, alors que Cicéron réclamait hautement une déclaration de guerre formelle contre Antoine, des sénateurs plus timorés se bornaient à proposer un décret de tumulte. Cicéron se moque de leur subtilité et soutient que là où il y a tumultus, il y a forcément bellum ; mais s'il était dans la vérité logique, ses adversaires étaient dans la vérité légale: car l'usage permettait bien au Sénat de décréter le tumulte, mais la guerre ne pouvait être déclarée que par le peuple.
    L'état de tumulte était probablement levé par le Sénat dans les mêmes formes qui avaient entouré sa proclamation. La reprise de la toge
    (saga ponere) marquait officiellement la fin de la crise [...]." (p.49-53)

    "Le justitium. - Concurremment avec le tumultus nous voyons fonctionner dans l'ancienne Rome une autre institution qui tend au même but, le justitium. Comme l'indique l'étymologie du mot [...] le justitium est la suspension du droit, ou, plus exactement, des procédures légales. Cette suspension était autrefois prononcée par le dictateur [...]." (p.53)

    "Le justitium se traduit pratiquement par l'inaction forcée de tous les magistrats chargés de rendre la justice, et par l'interruption des transactions privées si nombreuses qui exigeaient à Rome l'intervention gracieuse des magistrats. [...] L'interruption du cours de la justice avait un double but: elle donnait aux magistrats les loisirs nécessaires pour préparer, de concert avec le dictateur, l'organisation de la défense nationale ; elle arrachait de force les citoyens à leurs occupations civiles et leur permettait de se consacrer tout entiers à leurs devoirs militaires." (p.54)

    "Comme le tumultus, le justitium continua à être en usage après l'abandon de la dictature. Il était alors proclamé par les consuls, quelquefois par un simple préteur, mais toujours après le vote préalable du Sénat, ex auctoritate patrum." (p.56)

    "Combattre ou plaider -et plaider c'est encore combattre- voilà toute la vie d'un vieux Romain. Il lui faut l'intervention d'un magistrat pour acheter un fonds de terre, pour vendre un esclave, un bœuf, pour tester, pour affranchir. Presque tous les intérêts de famille et de fortune aboutissent à un procès réel ou fictif, une cessio in jure ; et le temps que le citoyen n'emploie pas à débattre ses propres intérêts, il la consacre à trancher lui-même comme judex privatus les différends de ses voisins, à donner des consultations à ses clients, à rendre la justice à sa famille, à entendre plaider les avocats célèbres. Ainsi le droit, comme la religion, dont il est issu, pénètre tous les moments, se mêle aux moindres actes de la vie du Romain ; suspendre les procédures, c'est tarir la source de ses profits, entraver son négoce, détruire l'occupation de sa journée. Il n'y a pas de constatation plus solennelle du danger public, pas de mesure plus propre à frapper vivement les esprits et à hâter la solution de la crise par la gravité même qu'elle lui imprime. Les mêmes hommes qui siègent aujourd'hui comme magistrats au tribunal, qui débattent comme plaideurs leurs affaires privées, doivent être, demain, généraux et soldats, n'ayant d'autre pensée que de repousser l'invasion étrangère ou d'exterminer l'ennemi intérieur ; c'est le tumultus qui leur fait changer d'habit, c'est le justitium qui leur fait changer d'âme [...]." (p.61-62)

    "Le decretum contra rempublicam. - Le tumultus et le justitium étaient des mesures de défense suffisantes contre un ennemi extérieur, et la légalité n'en a jamais été contestée. Mais lorsque le danger venait du dedans, ces moyens, quoique employés à diverses reprises par le Sénat, n'atteignaient pas le but et pouvaient même favoriser les fauteurs de désordres en jetant le trouble et la consternation dans les esprits. Ce qui importait dans des crises pareilles, ce n'était pas de lever une armée plus ou moins considérable, et forcément mêlée d'éléments bien divers, mais de réunir quelques hommes résolus et de frapper quelques têtes ; les chefs de la sédition une fois abattus, la sédition tombait d'elle-même. La mise hors la loi de ces chefs par un vote du Sénat constitue le decretum contra rempublicam factum videri [...].
    Quoique ce décret ne vise en apparence que les faits, il équivaut, en pratique, lorsqu'il survient à la suite du S. C.
    ultimum, à la désignation des auteurs de ces faits comme ennemis publics." (p.62-32)

    "Origine de l'institution de l'état de siège. Constitutions révolutionnaires. - L'histoire des lois de salut public commence en France avec la Révolution de 1789. Sous l'ancien régime, où il n'existait pas, à proprement parler, de constitution, les pouvoirs du gouvernement étaient réellement illimités en tout temps ; il n'était donc pas nécessaire de les augmenter dans les moments de crise. Toutes les restrictions de la liberté des citoyens qui, dans notre législation actuelle, résultent exceptionnellement de la proclamation de l'état de siège, constituaient à cette époque des mesures ordinaires qui rentraient dans l'exercice naturel des droits du souverain. Ainsi la liberté individuelle était paralysée par les lettres de cachet ; le droit aux juges naturels par la justice réservée et la nomination fréquente de commissions extraordinaires - sans parler des lettres de jussion, des lits de justice et de l'exil des parlements ; quand au droit de réunion, au droit d'association, à la liberté de la presse, ils étaient inconnus, et la librairie était abandonnée au bon plaisir du ministère.
    Cet état de choses changea en 1789. L'Assemblée constituante, en même temps qu'elle abolissait le système féodal, qu'elle décrétait la séparation des pouvoirs, et proclamait la souveraineté nationale et le régime représentatif, organisa ou fonda les diverses libertés qui sont considérées, à bon droit, comme le corollaire indispensable du gouvernement parlementaire: liberté individuelle, inviolabilité du domicile privé, liberté de culte, liberté de presse et de réunion, droit de chaque citoyen à être jugé par ses juges naturels, droit de propriété garanti contre les confiscations arbitraires et les expropriations non accompagnées d'indemnité [...]. Les hommes de l'Assemblée poussaient si loin la haine du régime absolu qu'ils venaient de détruire, qu'ils refusèrent de prévoir la nécessité de le rétablir jamais, même à titre provisoire, même devant l'émeute ou devant l'étranger. [...]
    Le législateur croyait de bonne foi que les lois ordinaires suffisaient au salut de l'Etat, même dans les circonstances extraordinaires: en cela seul, il ne se montra pas disciple fidèle de Montesquieu et de Rousseau.
    Les événements se chargèrent bientôt de prouver qu'on s'était trompé dans ces prévisions optimistes ; mais, malgré les enseignements de l'année 1792 [...], ni l'Assemblée législative, ni la Convention, ne trouvèrent le temps de combler la lacune que la Constituante avait laissée dans notre droit public, et d'organiser régulièrement une institution plus ou moins analogue à la dictature romaine: bien au contraire, on s'avisa de consacrer expressément le droit à l'insurrection "quand le gouvernement viole le droit du peuple." (Const. 1793, art. 35). Toutefois la pression des événements fut plus forte que les systèmes, l'imminence du danger national fit oublier une légalité impraticable. La Constitution de 1793, suspendue, sur la proposition de Saint-Just, "jusqu'à la conclusion de la paix générale", dormit paisiblement dans un coffret de bois précieux, surmonté d'un modèle de charrue, derrière le fauteuil du président de l'Assemblée ; pendant trois ans la France vécut sous le despotisme effectif du Comité de salut public d'abord, de la Convention elle-même ensuite.
    C'était déjà la mise en pratique de la dictature, ce n'en était pas encore l'institution légale. La crise terminée, on se persuada qu'elle ne renaîtrait plus, et la Constitution de l'an III créa un pouvoir faible, divisé, et aussi désarmé contre la sédition qu'en 1791. Par là, on ouvrait la porte à l'anarchie, sans autre issue que le coup d'Etat
    ." (p.89-92)
    -Théodore Reinach, De l'état de siège et des institutions de salut public. Étude historique et juridique, Librairie Cotillon, 1885, 314 pages.


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