« La Révolution d’Octobre a ouvert une nouvelle ère dans l’histoire de l’humanité. » (p.
« L’URSS consacre désormais de 25 à 30% de son produit national brut à des dépenses militaires (contre 7 à 8% pour les États-Unis). » (p.11)
« Sous le couvert de la propriété d’Etat, existent aujourd’hui en URSS des rapports d’exploitation semblables à ceux qui existent dans les autres pays capitalistes. » (p.14)
« [Trotsky, comme Staline, affirme que] « dans les sociétés civilisées », c’est « la loi (qui) fixe les rapports de production », ce qui fait apparaître les rapports de production comme inscrits dans la superstructure et non pas comme correspondant aux rapports qui s’établissent dans le procès social de production et de reproduction. » (p.25)
« On peut beaucoup mieux comprendre l’ampleur de la répression, ses formes et les contradictions qui s’y sont manifestées, lorsqu’on met ces faits en rapport non pas [comme le fait Staline] principalement avec l’activité des services d’espionnage étrangers et avec la « veulerie » des citoyens soviétiques, mais avec une lutte de classes à la fois acharnée et aveugle. » (p.29)
« Les thèses « économistes » [le développement des forces productives comme condition suffisante du passage au socialisme], sous la forme où elles triomphent à partir de la fin des années 1920, n’ont fondamentalement pas été mises en cause par les différents courants « oppositionnels ». » (p.35)
« [Lénine] n’a jamais hésité à aller « contre le courant », si bien qu’il a été mis plus d’une fois en minorité au sein du Comité central, y compris sur des questions essentielles. » (p.36)
« La gestion des entreprises soviétiques repose sur deux principes essentiels : la direction unique responsable vis-à-vis des instances supérieures et l’ « autonomie financière » orientant l’entreprise vers la recherche d’un profit. Lorsque ces deux principes ont été introduits en 1918 et 1921, Lénine avait souligné qu’ils correspondaient à une « retraite » provisoire, imposée par les circonstances de l’époque et que leur application introduisait des rapports capitalistes dans le secteur d’Etat. Parlant de l’ « autonomie financière » accordée aux entreprises d’Etat, Lénine indique qu’elle place dans une large mesure ces entreprises sur « des bases commerciales capitalistes » (cf., Lénine, O.C, tome 42, p.396). Depuis 1965, l’autonomie financière des entreprises et la recherche de la rentabilité ont été considérablement développées. » (p.42)
« La première étape de la Révolution soviétique victorieuse est celle de l’instauration du pouvoir prolétarien et des transformations économiques et politiques initiales liées à cette instauration. Cette étape couvre les mois qui vont de l’insurrection d’octobre 1917 au début des insurrections blanches (fin mai 1918).Pendant ces quelques mois, le pouvoir soviétique s’efforce de briser le pouvoir économique que donne à la bourgeoisie la propriété des principaux moyens de production et de circulation, en nationalisant les grandes entreprises industrielles, les mines, les banques, etc., et en plaçant l’ensemble de l’économie sous le contrôle de la classe ouvrière, tout en évitant de procéder à des nationalisations étendues. » (p.47)
« Le déclenchement des insurrections blanches et des interventions des armées impérialistes conduit au développement de pratiques économiques et politiques très différentes de celles qui avaient d’abord été envisagées. Ces pratiques –qui accordent un rôle prédominant aux appareils d’Etat et à la contrainte étatique, notamment sous la forme de réquisition des produits agricoles –caractérisent le « communisme de guerre ». Celui-ci correspond à une période qui va de juin 1918 à mars 1921.
Au terme de la période de guerre civile et d’intervention étrangère, la Russie est dévastée et se trouve au bord de la famine. Les pratiques du « communisme de guerre » ne paraissent pas capables d’aider au redressement de la situation. Une nouvelle politique économique (ou NEP) est alors adoptée. Cette politique se présente d’abord comme un retour au « capitalisme d’Etat » de l’hiver 1917-1918. La conception de la NEP connaît diverses transformations jusqu’à son abandon, en 1919. Un de ses principaux aspects est le rétablissement de la liberté du commerce des produits agricoles et l’abandon des réquisitions. » (p.48)
« La bourgeoisie russe et les propriétaires fonciers ont perdu le pouvoir le 25 octobre 1917 [7 novembre 1917]. Ce jour-là, les ouvriers en armes ainsi que les soldats et les marins de Pétrograd et de Cronstadt, qui forment les forces insurrectionnelles de la révolution dirigée par le parti bolchevik, sont entrés en action. En quelques heures, tous les bâtiments publics importants de la capitale tombent aux mains des forces révolutionnaires. Au petit matin du 26 octobre, le Palais d’Hiver, siège du gouvernement provisoire de Kérenski, est occupé à son tour. Les ministres qui y siègent sont faits prisonniers. […]
Au soir du 25 octobre se réunit le IIe Congrès panrusse des Soviets de Russie. Les bolcheviks y sont en majorité. Dans la nuit du 25 au 26, le Congrès (dont la plupart des mencheviks et S.R. se sont retirés) confirme à son tour le renversement du gouvernement provisoire. Il déclare expirés les pouvoirs du précédent Comité exécutif central des Soviets et il prend lui-même en main le pouvoir. Dans les heures qui suivent, le IIe Congrès panrusse des Soviets décide la formation d’un gouvernement provisoire ouvrier et paysan, portant le nom de Conseil des commissaires du Peuple et formé de dirigeants du parti bolchevik. Le Congrès charge le gouvernement « d’entamer des pourparlers immédiats en vue d’une paix juste et démocratique » et adopte le « décret sur la terre » qui abolit la propriété des propriétaires fonciers.
L’insurrection armée a triomphé presque simultanément à Moscou (alors la deuxième capitale) et dans les grands centres urbains. Ce triomphe témoigne de la perte d’autorité, aux yeux des masses populaires, de l’ancien gouvernement provisoire. Aussi Kérenski, qui est parvenu à s’échapper de Pétrograd, n’est-il plus obéi par l’essentiel de l’armée. Seules quelques troupes le suivent encore, mais elles sont si peu nombreuses et si démoralisées que l’offensive qu’il essaie de monter contre Pétrograd, au lendemain des journées d’Octobre, échoue lamentablement. L’épreuve des armes confirme ainsi que la bourgeoisie a bien perdu le pouvoir et que celui-ci est désormais exercé par les Soviets sous la direction du parti bolchevik. » (p.56)
« La Russie d’avant octobre 1917 est à la fois un pays impérialiste et un pays fortement dépendent de l’impérialisme mondial (principalement des impérialismes français et anglais) qui y a investi des milliards de francs, soit en prêts à l’Etat tsariste, soit dans l’extraction du pétrole et du charbon et dans les industries sidérurgiques et mécaniques.
La dépendance de l’impérialisme russe vis-à-vis du capital anglais et français est une des sources de sa faiblesse ; elle est elle-même une conséquence de la forme spécifique du développement de l’impérialisme russe dont le capitalisme industriel repose sur des bases extrêmement limitées. » (p.57)
« Il faut […] rappeler les traités [d’Aïgoun en 1858, de Pékin en 1860] imposés par la Russie à la Chine pendant la deuxième moitié du XIXème siècle.
Ces opérations, réalisées en conjonction avec les agressions franco-britanniques contre la Chine, ont permis au tsarisme d’arracher à ce pays près d’un million et demi de kilomètres carrés. » (p.58-59)
« En 1913, le prolétariat russe représente 14% de la population, mais ce prolétariat est fortement concentré dans quelques grands centres industriels […] En 193, la paysannerie représente 67% de la population. » (p.59)
« Fin février 1917, le seul organe pouvant parler au nom de la révolution qui vient de triompher est le Soviet de Pétrograd, appuyé par les Soviets qui naissent un peu partout à travers la Russie. Ce pouvoir soviétique, soutenu par les corps de troupes insurgés, n’a apparemment en face de lui aucun autre pouvoir. Le seul organe qui aurait pu prétendre s’opposer à lui, le Comité issu de la Douma d’Empire (parodie de « parlement » tsariste), ne jouit d’aucun prestige auprès des masses révolutionnaires, car il est composé de représentants de la bourgeoisie et de la propriété foncière. Or, le Soviet de Pétrograd, constitué principalement de mencheviks et de S.R., passe un accord avec le Comité de la Douma. En vertu de cet accord, conclu le 1er mars, se forme un gouvernement provisoire composé de politiciens bourgeois, et le Soviet s’engage à soutenir ce gouvernement sous certaines conditions. Ainsi prend naissance une situation que Lénine a caractérisé comme une « dualité du pouvoir ». » (p.60-61)
« On estime qu’il existait 400 Soviets en mai, 600 en août et 900 en octobre. Parallèlement se développe le mouvement des comités d’usine et se constituent des Soviets de quartiers dans les villes d’une certaine importance. » (p.61)
« Au Ier Congrès panrusse des Soviets, en juin, on ne compte encore que 105 bolcheviks sur 1090 délégués, mais les bolcheviks jouent déjà un rôle dominant dans la section ouvrière du Congrès où une résolution exprimant leur position est adoptée par 173 voix contre 144. En octobre, les bolcheviks, s’appuyant sur la classe ouvrière, sont majoritaires au IIe Congrès des Soviets tout comme au Soviet de Pétrograd. » (p.63)
« Au cours de l’été, l’échec sanglant de l’offensive décidée par Kérenski, et la propagande de mieux en mieux organisée des bolcheviks transforment rapidement la situation. En octobre, les soldats du front comme ceux de l’arrière soutiendront massivement les positions des bolcheviks.
Par contre, les paysans proprement dits s’engagent avec beaucoup plus de réticence dans le mouvement soviétique et ils sont loin de se rallier massivement aux initiatives et aux positions bolcheviques. » (p.64)
« Le centre de gravité de l’organisation de la « paysannerie » n’est pas constitué par le système soviétique mais par le système des comités agraires qui s’installent principalement au niveau des provinces, des arrondissements et des districts, c’est-à-dire loin des villages. Ces comités travaillent en collaboration avec le gouvernement provisoire. Ils sont dominés par la petite bourgeoisie « rurale » (agronomes, instituteurs, représentants des zemstvos, organisateurs de coopératives, etc.). Politiquement, ces comités sont massivement sous l’influence des S.R. et la situation ne changera guère entre février et octobre. » (p.64-65)
« Le renversement du pouvoir de la bourgeoisie exercé par le gouvernement provisoire de Kérenski et l’instauration d’un nouveau pouvoir sont le résultat d’un affrontement armé qui prend la forme d’une insurrection. » (p.69)
-Charles Bettelheim, Les luttes de classes en URSS. 1ère période 19717-1923, Maspero/Seuil, 1974, 524 pages.
« L’URSS consacre désormais de 25 à 30% de son produit national brut à des dépenses militaires (contre 7 à 8% pour les États-Unis). » (p.11)
« Sous le couvert de la propriété d’Etat, existent aujourd’hui en URSS des rapports d’exploitation semblables à ceux qui existent dans les autres pays capitalistes. » (p.14)
« [Trotsky, comme Staline, affirme que] « dans les sociétés civilisées », c’est « la loi (qui) fixe les rapports de production », ce qui fait apparaître les rapports de production comme inscrits dans la superstructure et non pas comme correspondant aux rapports qui s’établissent dans le procès social de production et de reproduction. » (p.25)
« On peut beaucoup mieux comprendre l’ampleur de la répression, ses formes et les contradictions qui s’y sont manifestées, lorsqu’on met ces faits en rapport non pas [comme le fait Staline] principalement avec l’activité des services d’espionnage étrangers et avec la « veulerie » des citoyens soviétiques, mais avec une lutte de classes à la fois acharnée et aveugle. » (p.29)
« Les thèses « économistes » [le développement des forces productives comme condition suffisante du passage au socialisme], sous la forme où elles triomphent à partir de la fin des années 1920, n’ont fondamentalement pas été mises en cause par les différents courants « oppositionnels ». » (p.35)
« [Lénine] n’a jamais hésité à aller « contre le courant », si bien qu’il a été mis plus d’une fois en minorité au sein du Comité central, y compris sur des questions essentielles. » (p.36)
« La gestion des entreprises soviétiques repose sur deux principes essentiels : la direction unique responsable vis-à-vis des instances supérieures et l’ « autonomie financière » orientant l’entreprise vers la recherche d’un profit. Lorsque ces deux principes ont été introduits en 1918 et 1921, Lénine avait souligné qu’ils correspondaient à une « retraite » provisoire, imposée par les circonstances de l’époque et que leur application introduisait des rapports capitalistes dans le secteur d’Etat. Parlant de l’ « autonomie financière » accordée aux entreprises d’Etat, Lénine indique qu’elle place dans une large mesure ces entreprises sur « des bases commerciales capitalistes » (cf., Lénine, O.C, tome 42, p.396). Depuis 1965, l’autonomie financière des entreprises et la recherche de la rentabilité ont été considérablement développées. » (p.42)
« La première étape de la Révolution soviétique victorieuse est celle de l’instauration du pouvoir prolétarien et des transformations économiques et politiques initiales liées à cette instauration. Cette étape couvre les mois qui vont de l’insurrection d’octobre 1917 au début des insurrections blanches (fin mai 1918).Pendant ces quelques mois, le pouvoir soviétique s’efforce de briser le pouvoir économique que donne à la bourgeoisie la propriété des principaux moyens de production et de circulation, en nationalisant les grandes entreprises industrielles, les mines, les banques, etc., et en plaçant l’ensemble de l’économie sous le contrôle de la classe ouvrière, tout en évitant de procéder à des nationalisations étendues. » (p.47)
« Le déclenchement des insurrections blanches et des interventions des armées impérialistes conduit au développement de pratiques économiques et politiques très différentes de celles qui avaient d’abord été envisagées. Ces pratiques –qui accordent un rôle prédominant aux appareils d’Etat et à la contrainte étatique, notamment sous la forme de réquisition des produits agricoles –caractérisent le « communisme de guerre ». Celui-ci correspond à une période qui va de juin 1918 à mars 1921.
Au terme de la période de guerre civile et d’intervention étrangère, la Russie est dévastée et se trouve au bord de la famine. Les pratiques du « communisme de guerre » ne paraissent pas capables d’aider au redressement de la situation. Une nouvelle politique économique (ou NEP) est alors adoptée. Cette politique se présente d’abord comme un retour au « capitalisme d’Etat » de l’hiver 1917-1918. La conception de la NEP connaît diverses transformations jusqu’à son abandon, en 1919. Un de ses principaux aspects est le rétablissement de la liberté du commerce des produits agricoles et l’abandon des réquisitions. » (p.48)
« La bourgeoisie russe et les propriétaires fonciers ont perdu le pouvoir le 25 octobre 1917 [7 novembre 1917]. Ce jour-là, les ouvriers en armes ainsi que les soldats et les marins de Pétrograd et de Cronstadt, qui forment les forces insurrectionnelles de la révolution dirigée par le parti bolchevik, sont entrés en action. En quelques heures, tous les bâtiments publics importants de la capitale tombent aux mains des forces révolutionnaires. Au petit matin du 26 octobre, le Palais d’Hiver, siège du gouvernement provisoire de Kérenski, est occupé à son tour. Les ministres qui y siègent sont faits prisonniers. […]
Au soir du 25 octobre se réunit le IIe Congrès panrusse des Soviets de Russie. Les bolcheviks y sont en majorité. Dans la nuit du 25 au 26, le Congrès (dont la plupart des mencheviks et S.R. se sont retirés) confirme à son tour le renversement du gouvernement provisoire. Il déclare expirés les pouvoirs du précédent Comité exécutif central des Soviets et il prend lui-même en main le pouvoir. Dans les heures qui suivent, le IIe Congrès panrusse des Soviets décide la formation d’un gouvernement provisoire ouvrier et paysan, portant le nom de Conseil des commissaires du Peuple et formé de dirigeants du parti bolchevik. Le Congrès charge le gouvernement « d’entamer des pourparlers immédiats en vue d’une paix juste et démocratique » et adopte le « décret sur la terre » qui abolit la propriété des propriétaires fonciers.
L’insurrection armée a triomphé presque simultanément à Moscou (alors la deuxième capitale) et dans les grands centres urbains. Ce triomphe témoigne de la perte d’autorité, aux yeux des masses populaires, de l’ancien gouvernement provisoire. Aussi Kérenski, qui est parvenu à s’échapper de Pétrograd, n’est-il plus obéi par l’essentiel de l’armée. Seules quelques troupes le suivent encore, mais elles sont si peu nombreuses et si démoralisées que l’offensive qu’il essaie de monter contre Pétrograd, au lendemain des journées d’Octobre, échoue lamentablement. L’épreuve des armes confirme ainsi que la bourgeoisie a bien perdu le pouvoir et que celui-ci est désormais exercé par les Soviets sous la direction du parti bolchevik. » (p.56)
« La Russie d’avant octobre 1917 est à la fois un pays impérialiste et un pays fortement dépendent de l’impérialisme mondial (principalement des impérialismes français et anglais) qui y a investi des milliards de francs, soit en prêts à l’Etat tsariste, soit dans l’extraction du pétrole et du charbon et dans les industries sidérurgiques et mécaniques.
La dépendance de l’impérialisme russe vis-à-vis du capital anglais et français est une des sources de sa faiblesse ; elle est elle-même une conséquence de la forme spécifique du développement de l’impérialisme russe dont le capitalisme industriel repose sur des bases extrêmement limitées. » (p.57)
« Il faut […] rappeler les traités [d’Aïgoun en 1858, de Pékin en 1860] imposés par la Russie à la Chine pendant la deuxième moitié du XIXème siècle.
Ces opérations, réalisées en conjonction avec les agressions franco-britanniques contre la Chine, ont permis au tsarisme d’arracher à ce pays près d’un million et demi de kilomètres carrés. » (p.58-59)
« En 1913, le prolétariat russe représente 14% de la population, mais ce prolétariat est fortement concentré dans quelques grands centres industriels […] En 193, la paysannerie représente 67% de la population. » (p.59)
« Fin février 1917, le seul organe pouvant parler au nom de la révolution qui vient de triompher est le Soviet de Pétrograd, appuyé par les Soviets qui naissent un peu partout à travers la Russie. Ce pouvoir soviétique, soutenu par les corps de troupes insurgés, n’a apparemment en face de lui aucun autre pouvoir. Le seul organe qui aurait pu prétendre s’opposer à lui, le Comité issu de la Douma d’Empire (parodie de « parlement » tsariste), ne jouit d’aucun prestige auprès des masses révolutionnaires, car il est composé de représentants de la bourgeoisie et de la propriété foncière. Or, le Soviet de Pétrograd, constitué principalement de mencheviks et de S.R., passe un accord avec le Comité de la Douma. En vertu de cet accord, conclu le 1er mars, se forme un gouvernement provisoire composé de politiciens bourgeois, et le Soviet s’engage à soutenir ce gouvernement sous certaines conditions. Ainsi prend naissance une situation que Lénine a caractérisé comme une « dualité du pouvoir ». » (p.60-61)
« On estime qu’il existait 400 Soviets en mai, 600 en août et 900 en octobre. Parallèlement se développe le mouvement des comités d’usine et se constituent des Soviets de quartiers dans les villes d’une certaine importance. » (p.61)
« Au Ier Congrès panrusse des Soviets, en juin, on ne compte encore que 105 bolcheviks sur 1090 délégués, mais les bolcheviks jouent déjà un rôle dominant dans la section ouvrière du Congrès où une résolution exprimant leur position est adoptée par 173 voix contre 144. En octobre, les bolcheviks, s’appuyant sur la classe ouvrière, sont majoritaires au IIe Congrès des Soviets tout comme au Soviet de Pétrograd. » (p.63)
« Au cours de l’été, l’échec sanglant de l’offensive décidée par Kérenski, et la propagande de mieux en mieux organisée des bolcheviks transforment rapidement la situation. En octobre, les soldats du front comme ceux de l’arrière soutiendront massivement les positions des bolcheviks.
Par contre, les paysans proprement dits s’engagent avec beaucoup plus de réticence dans le mouvement soviétique et ils sont loin de se rallier massivement aux initiatives et aux positions bolcheviques. » (p.64)
« Le centre de gravité de l’organisation de la « paysannerie » n’est pas constitué par le système soviétique mais par le système des comités agraires qui s’installent principalement au niveau des provinces, des arrondissements et des districts, c’est-à-dire loin des villages. Ces comités travaillent en collaboration avec le gouvernement provisoire. Ils sont dominés par la petite bourgeoisie « rurale » (agronomes, instituteurs, représentants des zemstvos, organisateurs de coopératives, etc.). Politiquement, ces comités sont massivement sous l’influence des S.R. et la situation ne changera guère entre février et octobre. » (p.64-65)
« Le renversement du pouvoir de la bourgeoisie exercé par le gouvernement provisoire de Kérenski et l’instauration d’un nouveau pouvoir sont le résultat d’un affrontement armé qui prend la forme d’une insurrection. » (p.69)
-Charles Bettelheim, Les luttes de classes en URSS. 1ère période 19717-1923, Maspero/Seuil, 1974, 524 pages.