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    Guillaume d'Ockham, Court traité du pouvoir tyrannique

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Guillaume d'Ockham, Court traité du pouvoir tyrannique Empty Guillaume d'Ockham, Court traité du pouvoir tyrannique

    Message par Johnathan R. Razorback Jeu 25 Jan - 10:28

    "La pensée d'Ockham demeure [...] à l'intérieur de certaines limites étroites: s'il nie que le pape possède la moindre plénitude de puissance -tant en matière spirituelle qu'en matière temporelle- il nie tout aussi bien que l’empereur puisse posséder une telle puissance ou que l'Église ne soit, au fond, qu'une fonction ou un département de la société civile. A cet égard, il est aux antipodes de l'extrêmisme d'un Marsile de Padoue, dont on sait qu'il a explicitement critiqué les positions." (p.10-11)

    "Si Ockham connaît Aristote et s'il l'utilise parfois, il n'est pas aristotélicien et il n'adhère en rien à la thèse selon laquelle la vie politique serait -par la participation et l'exercice des vertus cardinales- une forme d'excellence de la vie humaine proprement terrestre ; sa conception du gouvernement séculier est infiniment plus pragmatique, puisqu'il le conçoit avant tout comme un instrument de pacification au service de la liberté des individus et de la communauté chrétienne. Sa défense de l'empire est donc menée moins au nom de l'idée que la politique séculière pourrait constituer un domaine de formation de valeurs autonomes et indépendantes de la loi divine, qu'au nom de l'idée que l'immixtion du souverain pontife dans les affaires séculières -de basses œuvres par définition- serait nuisible à la propagation de la foi elle-même. C'est du point de vue de la foi que Ockham va par conséquent s'attacher à montrer que la gestion des affaires temporelles des hommes n'a été déterminée ni par le Christ ni par sa loi, et qu'elle ne figure pas au nombre des tâches régulières et essentielles dont le Sauveur a chargé Pierre lorsqu'il lui a confié -à lui et à ses successeurs- le soin des fidèles." (p.11)

    "Le pouvoir que l'empereur a de disposer des choses temporelles n'est nullement arbitraire, car le peuple qui l'a élu -ou les représentants de ce peuple- peut exercer sur lui une puissance de déposition lorsqu'il outrepasse tellement évidemment les limites et la définition de son pouvoir que celui-ci cesse d'être utile et bénéfique à ceux qui lui sont assujettis." (p.18-19)

    "Tout gouvernement doit être institué pour l'avantage commun de ceux qui sont gouvernés -comme le montrait Aristote- et non pas pour l'avantage exclusif de celui qui gouverne ; or tout gouvernement absolu et arbitraire tourne nécessairement à l'avantage exclusif de celui qui le détient puisqu'il ne peut jamais être de l'intérêt des sujets d'être assujettis à la volonté arbitraire d'un autre. S'il ne peut jamais être bénéfique à quiconque d'être placé sous le pouvoir arbitraire d'un autre homme, et si le pouvoir de Pierre a été institué par le Christ pour le bénéfice des fidèles, on doit en conclure que le pouvoir de Pierre ne saurait en aucun cas être un pouvoir plénier et arbitraire." (p.29)

    "L'abus d'une puissance légitime ne détruit pas ipso facto la légitimité de cette puissance et, de même que le bon exercice d'un pouvoir usurpé ne rend pas celui-ci légitime, le mauvais emploi d'une puissance légitime ne détruit pas cette légitimité ; par conséquent, si un prince abuse de sa puissance mais que le peuple ne le corrige pas alors qu'il aurait la capacité de le faire, sa légitimité demeure. La notion d'exercice inadéquat, autorisant l'intervention occasionnelle du souverain pontife au temporel, est donc extrêmement circonscrite: elle exige non seulement que les droits temporels des princes soient exercés d'une manière contraire au principe de leur institution, mais aussi qu'il n'y ait aucune personne laïque qui puisse se charger de corriger cet exercice." (p.50)

    "Le point de vue d'Ockham est [...] qu'un homme est propriétaire de quelque chose en sa qualité d'homme, parce qu'il a acquis une propriété par des moyens naturels, parce que cette propriété lui est nécessaire, parce qu'il n'en a pas spolié autrui, parce qu'il l'a acquise de quelqu'un qui la possédait en droit et pouvait la lui céder, parce qu'il en a acquitté le prix, etc. Aux yeux d'Ockham, le droit de propriété, ainsi que le droit de succession qui en est la conséquence, sont donc établis par le droit naturel et par la loi humaine, non par la loi divine." (p.63)

    "Que l'on soit fidèle ou infidèle, on acquiert un droit authentique sur les choses matérielles et temporelles de trois manières distinctes, qui sont toutes trois indépendantes de la loi divine: tout d'abord par l'occupation des choses qui n'appartiennent à personne ; ensuite, en recevant une chose en don de la part de personnes qui en sont légitimement propriétaires et qui sont habilitées à les donner à des tiers ; et enfin, en achetant ces choses à ceux qui en sont les légitimes propriétaires." (p.64)
    -Jean-Fabien Spitz, introduction à Guillaume d'Ockham, Court traité du pouvoir tyrannique sur les choses divines et humaines -et tout spécialement sur l'Empire et sur ceux qui sont assujettis à l'Empire- usurpé par ceux que certains appellent "Souverains pontifes", PUF, coll. Fondements de la politique, 1999, 336 pages.

    "Écoutez ceci, vous tous les peuples ; prêtez vos oreilles, vous qui vivez à la surface du globe terrestre, car je vais parler de choses de grande importance et qu'il vous est nécessaire de connaître. Je me lamente et gémis en effet des iniquités et des injustices qui ont été commises à votre encontre à vous tous -et au préjudice du monde entier- par celui qui se vante d'occuper aujourd'hui la chaire de saint Pierre, et par d'autres qui, en grande nombre, l'ont précédé dans l'exercice de ce pouvoir tyrannique et de cette méchanceté.
    Le désarroi qui m'afflige n'est pas moins grand lorsque je vois que vous ne vous souciez pas de rechercher avec exactitude à quel point ce pouvoir indignement usurpé qui s'exerce sur vous est opposé à l'honneur de Dieu, dangereux pour la foi catholique, et contraire aux droits et libertés qui vous ont été accordés par Dieu et par la nature ; et, ce qui est pire encore, vous rejetez ceux qui veulent vous informer de la vérité, vous défigurez leurs arguments, et vous les condamnez.
    " (p.95)
    -Guillaume d'Ockham, Court traité du pouvoir tyrannique sur les choses divines et humaines -et tout spécialement sur l'Empire et sur ceux qui sont assujettis à l'Empire- usurpé par ceux que certains appellent "Souverains pontifes", PUF, coll. Fondements de la politique, 1999, 336 pages.



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