"Nous entendrons ici le terme "préclassique" dans un sens strictement chronologique: toute l'histoire de la Grèce dans la vaste période qui précède la civilisation de la Grèce classique, dont on place conventionnellement le début vers 480 avant J. C., au moment où les Perses saccagent l'Acropole d'Athènes, où la flotte grecque détruit la flotte ennemie à Salamine, mais dont les premières tendances se manifestent dès la fin du VIe siècle. Les réformes de Clisthène l'Athénien, après 508, sont, dans le domaine des institutions politiques, l'une des manifestations de ces changements.
Il s'agit donc d'une très longue période, qui recouvre toute la préhistoire et la protohistoire de la Grèce, des premières occupations humaines du Paléolithique aux fermiers du Néolithique, de l'Age du Bronze à l'Age du Fer, des palais crétois et mycéniens aux États-cités d'une Grèce dite archaïque. [...]
Ce qui donne une apparence d'unité à cette longue période, du moins pour l'historien, c'est l'absence presque totale de sources textuelles directes, et en tout cas l'absence complète de textes historiques. Le premier système d'écriture de la Grèce (l'écriture dite hiéroglyphique crétoise) n'apparaît en Crète qu'après 2000 et reste indéchiffré ; les textes en grec mycénien (linéaire B), déchiffrés depuis 1952, appartiennent déjà à une période tardive, celle de la fin du Bronze récent (1400-1200 environ), et, comme les textes précédents, ne sont que des inventaires administratifs et comptables des palais mycéniens. Ce n'est que dans le courant du VIIIe siècle que les épopées homériques, l'Iliade et l'Odyssée, sont composées, et le poète Hésiode, le plus ancien auteur dont le nom nous doit parvenu, appartient à la fin du même siècle." (p.7-8 )
"Si l'on s'accorde à faire de Solon d'Athènes, le législateur, un personnage bien réel, le législateur de Sparte, Lycurgue, paraît plus proche de la légende que de la réalité. En remontant dans le temps, les événements, comme il est naturel, s'estompent encore: s'il a bien existé une ville de Troie, détruite à plusieurs reprises, et à peu près vers les périodes indiquées par les auteurs de "chronologies" de l'époque hellénistique, rien n'indique avec certitude qu'une coalition de chefs mycéniens soit la cause de l'une de ces destructions." (p.9)
"L'occupation humaine au Paléolithique ancien reste encore incertaine: seules quelques rares trouvailles de surface, des galets de la région de Corfou ou la découverte controversée d'un crâne dans la grotte de Pétralona en Chalcidique, près de Thessalonique, pourraient correspondre à cette période: âgé d'au moins 200 000 ans, ce crâne pourrait dater de 350 000 ans (l'occupation humaine en Europe remontant à plus de 700 000 ans) et serait ainsi le plus ancien vestige d'une présence de l'homme en Grèce." (p.13)
"Le Néolithique [6500-3300] de la Grèce se caractérise, en particulier, par ce que l'on a appelé la colonisation des îles de l'Égée. La navigation, à l'intérieur du bassin égéen, existe depuis la fin du Paléolithique ; mais ce n'est qu'au Néolithique que des établissements permanents apparaissent dans ces îles.
C'est en Crète que se situe la première installation de deux à quatre millénaires avant les autres [...]
Ce n'est guère qu'au Néolithique récent que des traces d'occupation apparaissent dans les Cyclades (Kéos, Naxos, Théra, Amorgos, Paros, Saliagos et Siphnos), dans la plupart des îles du Dodécanèse, au nord-est à Samos, Chios, Psara, Lesbos, Lemnos, Samothrace, Thasos, et dans les Sporades du Nord (Kyra Panagia et Youra)." (p.19)
"L'utilisation du grec remonte au moins au XVe siècle, et probablement plus anciennement: à partir de là, toutes les possibilités sont ouvertes. Le grec des tablettes mycéniennes résulte-il d'une longue évolution, ou a-t-il été introduit en Grèce par des groupes de populations extérieures, indo-européennes, à une date récente ? On a proposé, sans succès semble-t-il, les environs de 1600, et, le plus souvent, la fin du IIIe millénaire, en particulier la transition entre le BA II et le BA III vers 2300. Ce qui est sûr, c'est que le grec, qui conserve des traces d'un substrat "préhellénique", n'est pas une langue autochtone." (p.30)
"A partir de 2000 environ apparaît en Crète d'abord puis, quelques siècles plus tard, en Grèce continentale, un système économique et politique nouveau, le système palatial, qui durera jusque vers 1200 avant de s'effondrer rapidement et définitivement, laissant place aux "siècles obscurs". C'est l'époque du roi Minos, le souverain légendaire de Cnossos, dont le palais, fouillé à partir du début de notre siècle par Arthus Evans, révéla une civilisation disparue ; c'est ensuite l'époque de Mycènes riche en or, d'Agamemnon et ses ancêtres, qu'Henri Schliemann, le fouilleur de Troie, nourri des textes homériques, s'efforça de faire revivre. Ces civilisations, minoenne et mycénienne, dont la culture s'est répandue bien au-delà des limites de la mer Égée, sont aujourd'hui assez bien connues." (p.33)
"Les textes égyptiens surtout font référence à un pays, le pays Keftiou, que la plupart des historiens s'accordent aujourd'hui à identifier à la Crète ; des fresques du Nouvel Empire représentent ces habitants du pays Keftiou avec leur coiffure bouclée caractéristique. Enfin, une liste inscrite sur le monument funéraire d'Aménophis III à Kom el-Hetan (Thèbes d'Égypte) comporte une série de noms de lieux égéens, comme Cythère, Mycènes, Nauplie et, pour la Crète, Amnisos, Cnossos, Kydônia, qui reflètent la connaissance directe par les Égyptiens de la Grèce du début du XIV siècle." (p.35)
"On retiendra des recherches que Troie et Mycènes ont été en relation pendant une longue partie de leur histoire (Troie est l'un des sites égéens qui ont livré le plus de céramique mycénienne, importée ou imitée), que deux destructions violentes, l'une par tremblement de terre, l'autre par action humaine, ont eu lieu au XIIIe et au début du XIIe siècle, et que les légendes épiques ont pu trouver là un cadre pour les exploits de leurs héros. Mais il n'y a pas de preuve archéologique de l'historicité de la guerre de Troie." (p.73)
"On a généralement désigné sous ce terme de "siècles obscurs" (Dark Ages) la période qui sépare la chute de la civilisation mycénienne de la "Renaissance" du VIIIe siècle. Cette appellation, utilisée d'abord par les historiens anglo-saxons, a un double sens: elle désigne à la fois une époque considérée comme sombre pour les populations, un temps de déclin et de difficultés, et une période que nos connaissances ne parviennent pas à éclairer. De 1180 jusque vers 750 en effet, l'écriture disparaît: aucun témoignage écrit n'existe pendant plus de quatre siècles." (p.75)
"Qu'il y ait une continuité dans le domaine des croyances religieuses n'est guère contestable: les tablettes en linéaire B fournissent les noms de divinités du panthéon grec ; même si l'on peut dans certains cas hésiter à dire si tel nom est celui d'un dieu ou un simple anthroponyme, les contextes dans lesquels ils apparaissent sur les tablettes permettent d'affirmer que Dionysos, ou Héphaïstos, faisaient déjà partie du panthéon mycénien. Ce qui est en cause dans le débat, c'est de savoir si des formes institutionnalisées du culte se sont maintenues dans les mêmes lieux en Grèce de l'époque mycénienne de l'époque géométrique.
Les recherches récentes ont bien montré que d'une manière générale les sanctuaires de l'époque archaïque n'ont pas succédé à des sanctuaires mycéniens. Le sanctuaire de Phylakopi, dont l'existence se poursuit jusque vers 1120, ou celui de Tirynthe (jusque vers 1090) cessent alors définitivement. Ni à Delphes ni à Olympie n'ont pu être mis en évidence d'ancêtres mycéniens aux grands sanctuaires ; on a démontré que le Télestérion d'Éleusis consacré à Déméter n'avait pas remplacé un temple mycénien, mais vraisemblablement un édifice civil. A Kalapodi, en Phocide, l'activité religieuse ne se manifeste qu'à partir de l'HR III C ; l'ensemble culturel primitif (bâtiment à fosse sacrificielle et autel extérieur) sera réorganisé dans la seconde moitié du IXe siècle. L'un des rares exemples de lieu sacré où le culte continue sans interruption du Bronze moyen jusqu'au début de notre ère est le sanctuaire de nature de Katô Symi, sur la côte sud de la Crète. Utilisé depuis 1800 environ, consacré à l'époque archaïque à Hermès et Aphrodite, c'est un simple lieu de culte en aire ouverte, où s'introduisent, à une date indéterminée, de nouvelles divinités." (p.99)
"Après des "siècles obscurs" pendant lesquels l'organisation politique et sociale reste difficilement saisissable, se met en place le système de la polis grecque, des États-cités. C'est cet aspect politique, au sens premier du terme, de l'histoire qui a concentré l'intérêt des spécialistes de cette période, même si quelques voix discordantes ont tenté de relativiser son importance. Le milieu du VIIIe siècle marquerait une révolution structurelle, une révolution sociale issue d'une crise dans les rangs de l'aristocratie (les agathoi) des siècles obscurs. L'ensemble de la période correspondrait à la formation de cette cité grecque qui aboutira à l'Athènes classique.
Définir la cité grecque, ce système où l'Etat tend à s'identifier au corps civique, à l'ensemble des citoyens, est chose difficile, et cette difficulté à en donner une définition unique, qui soit valable pour tous les États-cités de Grèce, explique que les historiens aient des opinions divergentes sur le moment de son apparition: est-ce dès la fin du VIIIe siècle, avec les premières colonisations, le développement des grands sanctuaires, ou seulement vers la fin du VIe, quand Athènes, avec l'aide de Sparte, met fin à la tyrannie des Pisistratides ? C'est dans cette période en tout cas que surviennent quelques-uns des développements majeurs de la civilisation grecque archaïque: expansion en Méditerranée, réapparition de l'écriture, développement des sanctuaires, naissance de la "pensée grecque"." (p.105-106)
-Jean-Claude Poursat, La Grèce préclassique. Des origines à la fin du VIème siècle, Nouvelle histoire de l'Antiquité, tome 1, Éditions du Seuil, coll. Points, 1995, 225 pages.
Il s'agit donc d'une très longue période, qui recouvre toute la préhistoire et la protohistoire de la Grèce, des premières occupations humaines du Paléolithique aux fermiers du Néolithique, de l'Age du Bronze à l'Age du Fer, des palais crétois et mycéniens aux États-cités d'une Grèce dite archaïque. [...]
Ce qui donne une apparence d'unité à cette longue période, du moins pour l'historien, c'est l'absence presque totale de sources textuelles directes, et en tout cas l'absence complète de textes historiques. Le premier système d'écriture de la Grèce (l'écriture dite hiéroglyphique crétoise) n'apparaît en Crète qu'après 2000 et reste indéchiffré ; les textes en grec mycénien (linéaire B), déchiffrés depuis 1952, appartiennent déjà à une période tardive, celle de la fin du Bronze récent (1400-1200 environ), et, comme les textes précédents, ne sont que des inventaires administratifs et comptables des palais mycéniens. Ce n'est que dans le courant du VIIIe siècle que les épopées homériques, l'Iliade et l'Odyssée, sont composées, et le poète Hésiode, le plus ancien auteur dont le nom nous doit parvenu, appartient à la fin du même siècle." (p.7-8 )
"Si l'on s'accorde à faire de Solon d'Athènes, le législateur, un personnage bien réel, le législateur de Sparte, Lycurgue, paraît plus proche de la légende que de la réalité. En remontant dans le temps, les événements, comme il est naturel, s'estompent encore: s'il a bien existé une ville de Troie, détruite à plusieurs reprises, et à peu près vers les périodes indiquées par les auteurs de "chronologies" de l'époque hellénistique, rien n'indique avec certitude qu'une coalition de chefs mycéniens soit la cause de l'une de ces destructions." (p.9)
"L'occupation humaine au Paléolithique ancien reste encore incertaine: seules quelques rares trouvailles de surface, des galets de la région de Corfou ou la découverte controversée d'un crâne dans la grotte de Pétralona en Chalcidique, près de Thessalonique, pourraient correspondre à cette période: âgé d'au moins 200 000 ans, ce crâne pourrait dater de 350 000 ans (l'occupation humaine en Europe remontant à plus de 700 000 ans) et serait ainsi le plus ancien vestige d'une présence de l'homme en Grèce." (p.13)
"Le Néolithique [6500-3300] de la Grèce se caractérise, en particulier, par ce que l'on a appelé la colonisation des îles de l'Égée. La navigation, à l'intérieur du bassin égéen, existe depuis la fin du Paléolithique ; mais ce n'est qu'au Néolithique que des établissements permanents apparaissent dans ces îles.
C'est en Crète que se situe la première installation de deux à quatre millénaires avant les autres [...]
Ce n'est guère qu'au Néolithique récent que des traces d'occupation apparaissent dans les Cyclades (Kéos, Naxos, Théra, Amorgos, Paros, Saliagos et Siphnos), dans la plupart des îles du Dodécanèse, au nord-est à Samos, Chios, Psara, Lesbos, Lemnos, Samothrace, Thasos, et dans les Sporades du Nord (Kyra Panagia et Youra)." (p.19)
"L'utilisation du grec remonte au moins au XVe siècle, et probablement plus anciennement: à partir de là, toutes les possibilités sont ouvertes. Le grec des tablettes mycéniennes résulte-il d'une longue évolution, ou a-t-il été introduit en Grèce par des groupes de populations extérieures, indo-européennes, à une date récente ? On a proposé, sans succès semble-t-il, les environs de 1600, et, le plus souvent, la fin du IIIe millénaire, en particulier la transition entre le BA II et le BA III vers 2300. Ce qui est sûr, c'est que le grec, qui conserve des traces d'un substrat "préhellénique", n'est pas une langue autochtone." (p.30)
"A partir de 2000 environ apparaît en Crète d'abord puis, quelques siècles plus tard, en Grèce continentale, un système économique et politique nouveau, le système palatial, qui durera jusque vers 1200 avant de s'effondrer rapidement et définitivement, laissant place aux "siècles obscurs". C'est l'époque du roi Minos, le souverain légendaire de Cnossos, dont le palais, fouillé à partir du début de notre siècle par Arthus Evans, révéla une civilisation disparue ; c'est ensuite l'époque de Mycènes riche en or, d'Agamemnon et ses ancêtres, qu'Henri Schliemann, le fouilleur de Troie, nourri des textes homériques, s'efforça de faire revivre. Ces civilisations, minoenne et mycénienne, dont la culture s'est répandue bien au-delà des limites de la mer Égée, sont aujourd'hui assez bien connues." (p.33)
"Les textes égyptiens surtout font référence à un pays, le pays Keftiou, que la plupart des historiens s'accordent aujourd'hui à identifier à la Crète ; des fresques du Nouvel Empire représentent ces habitants du pays Keftiou avec leur coiffure bouclée caractéristique. Enfin, une liste inscrite sur le monument funéraire d'Aménophis III à Kom el-Hetan (Thèbes d'Égypte) comporte une série de noms de lieux égéens, comme Cythère, Mycènes, Nauplie et, pour la Crète, Amnisos, Cnossos, Kydônia, qui reflètent la connaissance directe par les Égyptiens de la Grèce du début du XIV siècle." (p.35)
"On retiendra des recherches que Troie et Mycènes ont été en relation pendant une longue partie de leur histoire (Troie est l'un des sites égéens qui ont livré le plus de céramique mycénienne, importée ou imitée), que deux destructions violentes, l'une par tremblement de terre, l'autre par action humaine, ont eu lieu au XIIIe et au début du XIIe siècle, et que les légendes épiques ont pu trouver là un cadre pour les exploits de leurs héros. Mais il n'y a pas de preuve archéologique de l'historicité de la guerre de Troie." (p.73)
"On a généralement désigné sous ce terme de "siècles obscurs" (Dark Ages) la période qui sépare la chute de la civilisation mycénienne de la "Renaissance" du VIIIe siècle. Cette appellation, utilisée d'abord par les historiens anglo-saxons, a un double sens: elle désigne à la fois une époque considérée comme sombre pour les populations, un temps de déclin et de difficultés, et une période que nos connaissances ne parviennent pas à éclairer. De 1180 jusque vers 750 en effet, l'écriture disparaît: aucun témoignage écrit n'existe pendant plus de quatre siècles." (p.75)
"Qu'il y ait une continuité dans le domaine des croyances religieuses n'est guère contestable: les tablettes en linéaire B fournissent les noms de divinités du panthéon grec ; même si l'on peut dans certains cas hésiter à dire si tel nom est celui d'un dieu ou un simple anthroponyme, les contextes dans lesquels ils apparaissent sur les tablettes permettent d'affirmer que Dionysos, ou Héphaïstos, faisaient déjà partie du panthéon mycénien. Ce qui est en cause dans le débat, c'est de savoir si des formes institutionnalisées du culte se sont maintenues dans les mêmes lieux en Grèce de l'époque mycénienne de l'époque géométrique.
Les recherches récentes ont bien montré que d'une manière générale les sanctuaires de l'époque archaïque n'ont pas succédé à des sanctuaires mycéniens. Le sanctuaire de Phylakopi, dont l'existence se poursuit jusque vers 1120, ou celui de Tirynthe (jusque vers 1090) cessent alors définitivement. Ni à Delphes ni à Olympie n'ont pu être mis en évidence d'ancêtres mycéniens aux grands sanctuaires ; on a démontré que le Télestérion d'Éleusis consacré à Déméter n'avait pas remplacé un temple mycénien, mais vraisemblablement un édifice civil. A Kalapodi, en Phocide, l'activité religieuse ne se manifeste qu'à partir de l'HR III C ; l'ensemble culturel primitif (bâtiment à fosse sacrificielle et autel extérieur) sera réorganisé dans la seconde moitié du IXe siècle. L'un des rares exemples de lieu sacré où le culte continue sans interruption du Bronze moyen jusqu'au début de notre ère est le sanctuaire de nature de Katô Symi, sur la côte sud de la Crète. Utilisé depuis 1800 environ, consacré à l'époque archaïque à Hermès et Aphrodite, c'est un simple lieu de culte en aire ouverte, où s'introduisent, à une date indéterminée, de nouvelles divinités." (p.99)
"Après des "siècles obscurs" pendant lesquels l'organisation politique et sociale reste difficilement saisissable, se met en place le système de la polis grecque, des États-cités. C'est cet aspect politique, au sens premier du terme, de l'histoire qui a concentré l'intérêt des spécialistes de cette période, même si quelques voix discordantes ont tenté de relativiser son importance. Le milieu du VIIIe siècle marquerait une révolution structurelle, une révolution sociale issue d'une crise dans les rangs de l'aristocratie (les agathoi) des siècles obscurs. L'ensemble de la période correspondrait à la formation de cette cité grecque qui aboutira à l'Athènes classique.
Définir la cité grecque, ce système où l'Etat tend à s'identifier au corps civique, à l'ensemble des citoyens, est chose difficile, et cette difficulté à en donner une définition unique, qui soit valable pour tous les États-cités de Grèce, explique que les historiens aient des opinions divergentes sur le moment de son apparition: est-ce dès la fin du VIIIe siècle, avec les premières colonisations, le développement des grands sanctuaires, ou seulement vers la fin du VIe, quand Athènes, avec l'aide de Sparte, met fin à la tyrannie des Pisistratides ? C'est dans cette période en tout cas que surviennent quelques-uns des développements majeurs de la civilisation grecque archaïque: expansion en Méditerranée, réapparition de l'écriture, développement des sanctuaires, naissance de la "pensée grecque"." (p.105-106)
-Jean-Claude Poursat, La Grèce préclassique. Des origines à la fin du VIème siècle, Nouvelle histoire de l'Antiquité, tome 1, Éditions du Seuil, coll. Points, 1995, 225 pages.