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    Silvia Federici, Caliban et la Sorcière

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Silvia Federici, Caliban et la Sorcière Empty Silvia Federici, Caliban et la Sorcière

    Message par Johnathan R. Razorback Ven 4 Oct 2019 - 10:35

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Silvia_Federici

    https://fr.1lib.fr/book/5460597/4cf21b

    "Caliban et la Sorcière reprend les principaux thèmes d’un projet de recherche sur les femmes dans la « transition » entre féodalisme et capitalisme auquel je me suis attachée depuis le milieu des années 1970, en collaboration avec une féministe italienne, Leopoldina Fortunati. Les premiers résultats de cette recherche ont paru dans un ouvrage publié en Italie en 1984: Il Grande Calibano. Storia del corpo sociale ribelle nella prima fase del capitale.

    Mon intérêt pour cette recherche a été au départ motivé par les débats qui eurent lieu autour du mouvement féministe aux États-Unis, à propos de l’origine de « l’oppression » des femmes, et des stratégies politiques que le mouvement devait mettre en œuvre dans sa lutte pour la libération des femmes. À cette époque, la réalité de la discrimination sexuelle était analysée principalement selon deux axes, correspondant aux deux branches principales du mouvement des femmes, à savoir féministes radicales et féministes socialistes. Toutefois, d’après moi, aucune des deux ne fournissait d’explication satisfaisante quant à l’origine de l’exploitation sociale et économique des femmes. Mon désaccord avec les féministes radicales portait sur leur tendance à comprendre la discrimination sexuelle et la domination patriarcale sur la base de structures culturelles transhistoriques, censées opérer indépendamment des rapports de production et de classes. Les féministes socialistes, quant à elles, admettaient que l’histoire des femmes ne pouvait être distinguée de l’histoire des différents systèmes d’exploitation et, dans leurs analyses, elles envisageaient d’abord les femmes en tant que travailleuses de la société capitaliste. La limite de leur position, telle que je la comprenais à l’époque, était de ne pas parvenir à représenter la sphère de la reproduction comme source de création de valeur et d’exploitation. L’origine des différences de pouvoir entre femmes et hommes se rapportait donc à l’exclusion des femmes du développement capitaliste. Une telle position nous obligeait à nouveau à expliquer la pérennité du sexisme dans l’espace des rapports capitalistes par des dispositions culturelles.

    C’est dans ce contexte que devait prendre forme l’idée d’ébaucher l’histoire des femmes dans la transition entre féodalisme et capitalisme. La thèse qui inspira cette recherche fut tout d’abord énoncée par Mariarosa Dalla Costa et Selma James, ainsi que par d’autres militants du
    Wages for Housework Movement. Elles rédigèrent dans les années 1970 un ensemble de documents largement controversés, mais qui finirent par transformer le discours sur les femmes, la reproduction et le capitalisme. Les plus influents furent The Power of Women and the Subversion of the Community de Mariarosa Dalla Costa et Selma James (1971), et Sex, Race and Class de Selma James (1975). Contre l’orthodoxie marxiste, qui expliquait « l’oppression » des femmes et la subordination aux hommes comme étant un reliquat des rapports féodaux, Dalla Costa et James affirmaient que l’exploitation des femmes a joué un rôle central dans le processus d’accumulation capitaliste, dans la mesure où les femmes ont produit et reproduit la marchandise capitaliste la plus essentielle : la force de travail. Selon Dalla Costa, le travail domestique non payé a été la fondation sur laquelle l’exploitation des travailleurs salariés, « l’esclavage salarié », a été bâtie, et le secret de sa productivité. La différence de pouvoir entre femmes et hommes dans la société capitaliste ne peut s’expliquer ni par l’inadéquation entre travail domestique et accumulation capitaliste (une inadéquation que dément la fermeté des règles régissant la vie des femmes), ni par la survivance de dispositions culturelles intemporelles. Il faut plutôt interpréter cette différence comme l’effet d’un système social de production qui ne fait pas de la production et de la reproduction du travailleur une activité socio-économique et une source d’accumulation capitaliste." (pp.13-14)
    -Silvia Federici, Caliban et la Sorcière. Femmes, corps et accumulation primitive, Entremonde/Senonevero, Genève-Paris/Marseille, 2014 (2004 pour la première édition anglaise), 410 pages.





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