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    John Scheid, Œuvre

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Message par Johnathan R. Razorback Mar 22 Sep - 18:10

    https://fr.wikipedia.org/wiki/John_Scheid

    https://www.college-de-france.fr/site/john-scheid/index.htm

    John Scheid, Auguste et le grand pontificat. Politique et droit sacré au début du Principat : https://www.jstor.org/stable/43851039

    "La crise réelle qui affecta la vie religieuse romain au cours du Ier siècle av. J.C. [...] [fut le] contre-coup nécessaire des bouleversements de la res publica, elle ne fut nullement l'effet, comme on a trop souvent voulu le croire, d'une sorte de fatalité inhérente à cette religion "païenne"." (p.118)

    "Le scandale religieux et les procédures répressives qu'il peut provoquer sont toujours accompagnés d'un contenu émotif, si immédiat et et intense que nous pouvons supposer que l'impiété met à nu le fait religieux bien plus sûrement que la pratique cultuelle ou la théologie "de routine", que ne suscite généralement aucune émotion immédiate et par là hautement révélatrice." (p.119)

    "Les Romains ne disposaient d'aucun traité sur l'impiété en tant que telle. Pour réfléchir sur ce délit nous devons glaner un peu partout des renseignements, juxtaposer des lois sacrées, des décrets et des interdits ponctuels, analyser les exempla invoqués dans les ouvrages historiques ou philosophiques, évoquer les scandales provoqués par les impiétés notoires. Bref, mis à part une page du De Legibus de Cicéron dont l'aspect théorique est connu, l'équivalent d'un "décalogue" ou d'une constitution religieuse n'existe pas." (p.120)

    "Le Romain commettait ou risquait de commettre facilement et fréquemment des fautes, tant dans ses attitudes cultuelles que par des infractions aux principes religieux généraux." (p.122)

    "Infractions au cours d'une cérémonie religieuse, notamment pendant le sacrifice." (p.122)

    "Diverses causes des invalidations de fête. L'instauratio s'impose:
    -quand une cérémonie est viciée par un crime, ou par la simple présence dans l'assistance d'un criminel ou d'un impie ;
    -quand il y a erreur dans l'accomplissement des différents rites de la fête ;
    -quand la fête est interrompue ;
    -quand un prodige se produit au cours des cérémonies." (p.123)

    "En 104 ou 103, le pontife M. Aemilius Scaurus fut accusé par le tribun Cn. Domitius Ahenobarbus d'avoir porté atteinte aux sacra du peuple romain en célébrant les sacra p.R. deum Penatium à Lavinium avec moins de correction et de pureté rituelles qu'il ne convenait. J.-L. Ferrary a montré que la multae irrogatio de Domitius était très grave, puisque d'après les nouvelles dispositions de la loi Cassia, la condamnation pouvait avoir comme effet de chasser du sénat le prince de l'assemblée. [...@ Il est vraisemblable que la faute religieuse de Scaurus était utilisée avec la conduite irresponsable de M. Iunius Silanus -lui aussi accusé par Domitius en 104 ou 103- pour justifier la défaite d'Arausio. En d'autres mots la faute religieuse de Scaurus avait, d'après l'exégèse de Domitius, causé la rupture de la pax deorum et entraîné par là le châtiment divin. Toute cette affaire se profile sur un arrière-plan politique où l'on décèle les rivalités entre clan des Metelli et clan des Scipions d'une part, les attaques populaires contre le monopole religieux et politique des nobiles de l'autre. Scaurus fut absous de justesse, ce qui nous montre l'importance et l'ardeur du débat." (p.124)

    "En 184 Caton le Censeur nota un certain L. Veterius à qui il reprochait surtout d'avoir abandonné ses cultes familiaux, sanctionnant ainsi par une dégradation civique et vraisemblablement l'ignominie une négligence grave dans les obligations religieuses privées. Dans le cas présent il n'y avait pas eu de signe visible d'une rupture de la pax deorum qui de toute façon ne concernait que Veturius et sa famille. [...] Cette dégradation [...] non seulement [...] déclassait Veturius mais elle le frappait d'ignominie, autrement dit la nota censoria écartait Veterius de la vie civique et politique. Or cette mise-à-l'écart était justement celle qui frappait les impies [...] infamie qui interdisait aussi à l'impie de participer aux sacrifices, actes civiques par excellence."
    (pp.125-126)

    "Les règles religieuses auxquelles les prêtres étaient soumis sont toutes extérieures, il ne s'agit en aucun cas d'une pureté intérieure. [...] Dans tous les cas connus [de conflits] le problème est identique. Le grand pontife signifie à une famine ou à un rex sacrorum que l'acte qu'il s'apprête à accomplir en raison des charges publiques qu'il cumule avec ses fonctions sacerdotales, lui est interdit. Le grand pontife rappelle ou précise une prescription religieuse dont la violation doit par conséquent être considérée comme un délit religieux. Les prêtres refusent de se soumettre et le grand pontife leur inflige une multa.
    Cette première du conflit met clairement en évidence la conception romaine du délit religieux: le prêtre commet une infraction religieuse, mais le pontife ne sanctionne pas l'affront fait par le prêtre aux dieux, la violation d'une loi divine. Ce qu'il punit c'est la désobéissance du prêtre à un ordre émanant de la plus haute autorité religieuse. Les arbitrages exercés dans un deuxième temps par les comices tributes (réunissant dans ce cas 17 tribus) après la provocation du prêtre sanctionné confirment à leur tour cette conception. En effet, le peuple ne tranchait pas du tout sur le plan religieux -ce pour quoi il n'avait aucune compétence- mais sur un plan profane, celui de la violation d'une prescription par le prêtre. Considérant que le comportement du prêtre était en quelque sorte justifié par le conflit réel et nouveau entre ius sacrum et ius publicum, entre ses obligations religieuses et publiques, les comices cassaient la multa au cas où le prêtre se soumettait à l'ordre du grand pontife. La procédure montre par conséquent qu'un délit commis par un prêtre n'était envisagé à Rome que du point de vue profane, communautaire puisque seule était en cause la volonté de la cité exprimée par la prescription du grand pontife. L'offense ne visait pas les dieux, mais la communauté elle-même. Il n'est pas surprenant dans ce contexte que les motivations politiques aient joué un rôle prédominant, car qu'est-ce que la volonté de la cité sinon l'expression d'une opinion politique majoritaire ou prépondérante ? Ainsi quand ces grands pontifes qui ont interdit à un prêtre de quitter l'Italie partent en fin de compte eux-mêmes en province -contre la tradition-, il ne vient à l'idée de personne de protester." (pp.128-129)

    "Etre pieux consiste à respecter scrupuleusement la tradition commune, qu'il s'agisse d'une loi, d'un ordre émanant d'une autorité religieuse ou simplement de la tradition conservée par les pontifes. Le délit religieux consiste, pour l'individu, à violer des règles publiques." (p.130)

    "Pour la cité dans son ensemble, le délit religieux peut causer la rupture de la pax deorum s'il n'est pas découvert et expié, et ce conflit peut entraîner des désastres pour la communauté." (p.130)

    "Est impie et inexpiable l'individu qui viole délibérément (prudenter) les prescriptions rituelles. Seul le mépris public sanctionne toutefois l'impie ; si la communauté le poursuit, c'est sur un plan profane. La faute théologique proprement dite de l'individu n'intéresse pas la ciuitas, la catégorie du délit religieux en soi est inconnue du droit romain." (p.130)

    "Cicéron tenta de prouver quelques années plus tard que le délit de Clodius avait "pris corps" grâce à un prodige interprété par les haruspices: il conviendrait que la communauté l'assumât désormais. Sa demande resta sans effet." (p.133)

    "Il était strictement interdit de brûler ou d'enterrer le mort à l'intérieur de la ville." (p.136)

    "Le sacrilège de Pleminius.
    Après la prise de Locres en 204, le légat de Scipion, Pleminius, livre la ville au pillage, viole les temples et notamment le trésor du sanctuaire de Proserpine. Une ambassade locrienne se plaint de ce forfait devant le sénat. Irrités contre Pleminius et son supérieur, Scipion, les sénateurs s'informent auprès des pontifes sur les mesures religieuses à prendre et envoient sur place une commission [...] Arrivés à Locres cette commission restitue au double les trésors volés, offre les sacrifices expiatoires prescrits. Ensuite elle arrête Pleminius, le juge coupable et l'envoie à Rome pour paraître devant le peuple. Scipion quant à lui est applaudi par la commission. [...]
    Le délit commis par Pleminius engage et menace au premier chef la communauté romaine elle-même. [...]
    Le sacrilège de Pleminius est expié par la respublica [...]
    Pleminius reste lui-même bien entendu inexpiable. [...] Capturé et transporté à Rome il meurt au fond d'un cachot, avant même d'avoir pu être jugé." (pp.138-139)

    "Fréquemment les impiétés ou les délits des empereurs détestés annoncent et justifient, dans les chroniques impériales, la mort de l'impie et bien entendu la damnatio memoriae grâce à laquelle la cité pieuse se désolidarisait des actes impies qu'elle avait été obligée de tolérer ; la mort du monstre peut dans une certaine mesure être assimilée à un sacrifice expiatoire -dans le cas de Caligula les conjurés utilisèrent même le langage sacrificiel." (p.142)

    "Agir malgré des auspices contraires constituait à un délit grave [...] Dans son traité des Lois [De Legibus, 2, 21] propose même de rendre responsable de sa tête celui qui n'obéirait pas aux volontés des augures." (p.143)

    "Comices consulaires dirigées par le père des Gracques, Ti. Sempronius Gracchus. Celui-ci refusa de tenir compte de l'omen constitué par la mort du premier scrutateur. Comme cet omen provoquait certains scrupules dans le peuple, Gracchus fit un rapport au sénat. Les haruspices furent consultés (non pas à propos des règles violées, mais à propos de la signification de l'omen) et répondirent que Gracchus n'était pas un rogator légitime [...]. Gracchus s'emporta et attaqua violemment ces "Toscans et barbares" qui prétendaient critiquer la conduite d'un consul et augure. Il s'en tint à sa première décision et considéra les élections comme valides. Après quelque temps Gracchus informa toutefois le collège des augures qu'à la lecture des livres auguraux il s'était rappelé qu'il avait commis une faute ; "car, ayant franchi le pomoerium pour présider le sénat, il avait oublié à son retour, quand il traversa à nouveau le pomoerium, de prendre les auspices" (Cic, ND, 2, 11). Les augures firent un rapport au sénat et les consuls démissionnèrent.
    Cette anecdote met bien en évidence le contrôle que les Romains exerçaient sur les actes religieux: c'était à eux de décider si une action était contraire aux règles, et cela même quand un omen paraissait signaler une infraction. Ce refus d'accepter l'omen nullement contraire à la tradition, ne fut jamais reproché à Gracchus, vraisemblablement, pouvons-nous supposer, parce qu'aucune catastrophe n'est venu dénoncer la souillure. [...]
    Sa grandeur [aux yeux de Cicéron] provient de ce que, malgré l'absence d'une catastrophe, il préféra dénoncer l'erreur dans l'intérêt de la république." (pp.145-146)

    "Le parricide, le parjure et l'inceste.
    Ces trois délits ont toujours eu un caractère religieux à Rome." (p.147)

    "[Le] malheur d'action était la pierre de touche où l'on vérifiait la rupture de la pax deorum, et c'est dans un second temps que l'on recherchait quelles étaient les responsabilités de la communauté humaine dans cette rupture. [...] Le même acte, constataient-ils, pouvait entraîner la rupture de la pax deorum ou non.[Contingence de l'impiété]."(note 115 pp.148-149)

    "Le scrupule religieux était toujours un scrupule "politique". [...] Identité entre piété religieuse et piété politique." (p.151)

    "C'était par la volonté expresse de la cité qu'un citoyen devenait ou non coupable d'une infraction religieuse inexpiable. Suivant qu'il y avait accord ou non sur la culpabilité du prévenu, le délit existait ou n'existait pas. [...] La cité n'intervenait généralement que si un malheur s'abattait sur elle, ou à la rigueur quand, pour telle ou telle raison politique, l'opinion publique manifestait devant une infraction volontaire sa peur d'une catastrophe imminente." (p.152)

    "La communauté fuyait le contact du citoyen lié au délit qu'elle reconnaissait avoir commis, puisque cet individu était désormais marqué par une souillure inexpiable qui le mettait hors de la société des hommes. Il n'était pas du ressort de la cité terrestre." (p.154)

    "Nous pouvons citer deux autres exemples de répressions frappant des cultes estimés dangereux. Il s'agit de l'interdiction des collèges religieux et des compitalia en 64 puis en 55, et de nombreuses mesures qui frappèrent Isis à partir de 58 av. J.C. Dans les deux cas, la répression était motivée uniquement par des raisons politiques, les considérations proprement religieuses lui étaient étrangères." (p.159)

    "Comment expliquer alors les nombreuses répressions des disciplines magiques et astrologiques qui émaillent l'histoire romaine à partir de 139 av. J.C. ? Quels étaient les griefs retenus contre ces pratiques ? Ils étaient au nombre de deux, se référant, l'un au droit pénal, l'autre à la sécurité de l'Etat:
    1. La magie pouvait troubler la vie communautaire parce qu'un large secteur de son application était destiné à nuire. [...] Ce n'était pas l'usage de la magie en tant que telle qui était en cause mais les crimes de droit commun qui en résultaient.
    2. A une époque de fortes tensions sociales et politiques l'astrologie pouvait d'autre part susciter des troubles populaires à connotation séditieuse. L'expulsion des astrologues chaldéens en 139 av. J.C. constitue un bel exemple [...] Outre un délit pénal d'abus de confiance, le préteur reprochait donc aux astrologues de fomenter des séditions. Les expulsions des astrologues et des sorciers par M. Agrippa en 33 av. J.C., celle des astrologues par Vitellius en 69, par Vespasien en 70, enfin par Domitien en 89/90 et 93/4 sont à situer dans un contexte identique [...] c'étaient toujours les aspects séditieux que comportait une pratique subversive de la discipline qui paraissait alarmants, et c'est pour cela qu'aucune des mesures n'était vraiment permanente ni générale." (pp.160-161)

    "Un citoyen qui adhérait au judaïsme ou au christianisme ou bien, ce qui revient au même, un juif ou un chrétien qui devenait citoyen romain sans pour autant accepter de pratiquer le culte romain, commettait un délit. En effet en se définissant exclusivement comme juif ou comme chrétien, il renait aux yeux des Romains son être social et rejetait en principe toute possibilité de se réaliser dans la cité. Sa culpabilité était semblable à celle des bacchants [...] C'est dans ce contexte que les Juifs furent expulsés en 139 av. J.C., c'est pour cette raison encore que Tibère condamna en 19 ap. J.C. quatre mille affranchis juifs qui à ses yeux se soustrayaient au devoirs civiques [...]
    Pour ce qui concerne les non-Romains -du moins jusqu'en 212 ap. J.C.- la situation était différente. Libres de pratiquer la religion qu'ils entendaient, ils n'étaient poursuivis que s'ils provoquaient par leur apostolat les mouvements séditieux que nous venons de décrire.
    Pour les chrétiens cette attitude ne fut pas trop grave tant qu'ils ne se recrutaient pas parmi les membres de la classe dirigeante, pour qui la vie sociale et politique active était au plus haut point une obligation, et donc vice versa la conversion au christianisme un acte de trahison dangereux. La gravité du crime était déterminée par la place que le coupable occupait dans la hiérarchie sociale, l'importance de sa clientèle et les responsabilités politiques ou militaires qu'il exerçait le cas échéant.
    La faute était aggravée bien entendu pour les citoyens s'il était prouvé qu'ils militaient activement en faveur de la propagation de cette attitude. En outre c'était la diffusion croissante de la doctrine qui alarmait les autorités romaines. Qu'un mouvement, séditieux à son départ, quitte le cadre traditionnel de la religion poliade, proclame son caractère universel, se diffuse dans tout l'Empire, voilà qui devenait très inquiétant. Car la seule religion à vocation universelle était aux yeux de Romains le culte impérial, ciment de l'unité et consécration de l'ordre établi." (p.164)

    "L'objectif de la religion et de la piété romaines ne pouvait être que le salut de la communauté [...] Dnas la mesure où la notion du salut politique était contingente, la notion de "péché" elle aussi ne pouvait être que contingente." (p.168)
    -John Scheid, "Le délit religieux dans la Rome tardo-républicaine", 1981: https://www.persee.fr/doc/efr_0000-0000_1981_act_48_1_1360

    https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1989_num_44_5_283652_t1_1267_0000_002

    https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1990_num_45_4_278876_t1_0919_0000_001

    https://www.persee.fr/doc/raipr_0033-9075_1992_num_101_1_2991

    https://www.persee.fr/doc/efr_0000-0000_1984_act_79_1_2533

    https://www.persee.fr/doc/efr_0223-5099_1997_act_235_1_5190

    "En 83 av. J.C., les Livres [Sibyllins] furent détruits par l'incendie du Capitole, et en 76 une commission de sénateurs fut chargée de collecter en Italie et en pays grec des vers Sybillins. Ils en ramenèrent un millier qui servit pour reconstituer le fonds. Celui-ci fut contrôlé et expurgé à nouveau sur l'ordre d'Auguste, quand les Livres furent transférés au sanctuaire d'Apollon Palatin." (p.12)

    "Le cadre général des consultations était le suivant. A la suite d'un ou de plusieurs prodiges, le sénat convoqué par un magistrat décide de faire consulter les Livres par les (quin)décemvirs. [...] Les prêtres lisent à huis-clos les Livres et recueillent [...] l'oracle, assistés par deux esclaves publics. Une fois l'oracle établi, celui-ci est transmis au sénat. [...] Après avoir reçu cet édit, les sénateurs décidaient ou non d'accepter l'oracle, et recommandaient le cas échéant aux consuls d'en faire appliquer les prescriptions. Un édit de magistrat en ordonnait l'application." (p.13)

    "Nous ignorons comment les décemvirs sélectionnaient les vers Sibyllins qui servaient à construire leurs oracles." (p.17)
    -John Scheid, "Les Livres Sibyllins et les archives des quindécemvirs", Publications de l'École Française de Rome, Année, 1998, 243, pp. 11-26.

    https://www.persee.fr/doc/efr_0223-5099_1998_act_243_1_5270

    "Les pontifes mineurs étaient au moment de leur cooptation des chevaliers ou se trouvaient au seuil de leur cooptation dans le sénat. [...] Tous les pontifes mineurs appartiennent aux couches les plus brillantes de l'ordre équestre." (pp.81-82)

    "Les flamines mineurs étaient tous des chevaliers éminents, mais on ne trouve pas parmi le même nombre de grands préfets ni aucun adlecté dans le sénat." (p.82)
    -John Scheid & Maria Grazia Granino Cecere, "Les sacerdoces publics équestres", 1999.

    https://www.persee.fr/doc/efr_0223-5099_1999_act_257_1_5494

    https://www.persee.fr/doc/mefr_0223-5102_1985_num_97_1_1451

    "D'une part, le culte impérial ne concernait pas seulement l'empereur vivant, et d'autre part, la manière dont on l'envisageait variait selon l'époque et le lieu." (p.240)

    "Le culte impérial public [...] ne peut être célébré au niveau d'une cité que par des personnes de rang décurional, duumvirs ou prêtres." (p.244)

    "Ces cultes ne sont pas seulement des témoignages de loyauté politique, car ils survivent souvent pendant plusieurs générations à l'empereur concerné." (p.247)
    -John Scheid, "Comprendre le culte dit impérial. Autour de deux livres récents", 2004.

    https://www.persee.fr/doc/antiq_0770-2817_2004_num_73_1_2549

    "La projection dans le passé des concepts religieux occidentaux permettait à [Hegel] d'expliquer aisément l'évolution religieuse jusqu'aux religions chrétiennes, puisqu'elle impliquait qu'il n'y avait guère de changement majeur à attendre, puisque les comportements religieux étaient identiques en tout temps et tout lieu. Il suffisait de séparer à chaque génération de l'humanité l'ivraie du bon grain pour discerner le ferment de la véritable religion, qui conduisit progressivement au christianisme éclairé de l'époque moderne. Beaucoup d'historiens ont adopté cette démarché, U. von Wilamowitz-Moellendorf, Th. Mommsen, d'un certain point de vue G. Wissowa, Fr. Cumont, J. Toutain, et plus tard la phénoménologie religieuse [Mircea Eliade]. C'est contre ce comparatisme assimilant [...] que réagissait l'anthropologie historique de la seconde moitié du XXe siècle en insistant sur l'altérité des Anciens. [...]
    Hegel et ses successeurs [...] actuels [...] considèrent que cette religion vide d'épiciers ne pouvait satisfaire le peuple romain, qui attentait un contenu religieux plus profond
    ." (p.21)

    "La notion de personne au sens chrétien et moderne ne s'est développée qu'à partir du IVe siècle, depuis Augustin par exemple. On pourrait considérer qu'elle est un produit du christianisme plutôt qu'une de ses causes. L'individu qui se contemple, s'analyse, évalue ses relations avec son créateur, se sent coupable à son égard et envisage les conséquences métaphysiques de ses fautes, n'est pas antique, en tout cela ne correspond pas à la pensée ancestrale des Grecs ou des Romains. [...] [L'individu antique] n'était pas essentiellement intéressé au salut éternel de son âme, mais au succès terrestre de ses entreprises et de celles des communautés auxquelles il appartenait." (pp.23-24)

    "[Quant] à l'idée que les cultes dits orientaux répondent mieux à ces besoins profonds [...] ils ressemblent en fait fortement aux autres cultes traditionnels, soit parce qu'ils sont intégrés dans les cultes civiques comme ceux de Cybèle et d'Isis, soit parce qu'ils ne concernent qu'une minorité relativement petite, comme le culte de Mithra." (p.29)

    "Loi Plautia Papiria de 78 av. J.C. qui donne la citoyenneté romaine à tous les hommes libres d'Italie." (p.30)

    "Nul ne peut se défaire de cette cité originelle, et même changer de cité. Il faudrait pour cela un privilège exprès de l'empereur. [...] La citoyenneté romaine s'obtient à travers une des cités de l'empire, et même si l'empereur donne la citoyenneté à un étranger, cela signifie qu'il l'inscrit dans l'une des cinq cents ou mille colonies ou municipes romains du monde romain. Ce fait implique que chaque citoyen romain a des obligations politiques, sociales et religieuses dans sa petite patrie. Selon son rang social il doit s'impliquer plus ou moins dans la vie collective, même s'il a choisi de résider régulièrement dans une autre cité -ce statut est celui d'incola, de résident régulier. En tant que résident régulier dans une autre cité, il ajoute au contraire encore d'autres obligations à celle qui sont déjà les siennes. Il est donc difficile d'affirmer que l'individu s'ennuyait sur le plan religieux. Au contraire, chaque citoyen romain était relativement occupé par ses obligations collectives, au niveau social qui est le sien.
    On pourrait bien entendu considérer que ces obligations concernent surtout les élites sociales qui dirigent la vie collective dans ces cités fondées sur le régime censitaire, et que le commun des individus est libre comme l'air tant qu'il paie les impôts et effectue les corvées éventuellement demandées aux citoyens. Une liberté qui lui permettrait de s'approvisionner au supermarché des religions apportées de partout par la circulation d'individus et même de communautés grâce à la paix romaine. [...] On doit donc reconnaître que dans le monde romain le modèle religieux dit "civique" n'est pas une sorte de vestige isolé de pratiques anciennes et délaissées. Il participe en fait d'un modèle collectif de vie religieuse qui dépasse de loin la communauté des citoyens. Ce modèle fonctionnait à tous les niveaux de la société, dans une société qui était beaucoup plus fragmentée que les sociétés modernes. La vie religieuse correspondait à cette fragmentation sociale." (pp.30-31)
    -John Scheid, "Religion collective et religion privée", Dialogues d'histoire ancienne, Année 2013, 39-2, pp. 19-31.

    https://www.persee.fr/doc/dha_0755-7256_2013_num_39_2_3852

    "Les dieux sont effectivement installés à Rome comme des citoyens nouveaux, par des décisions publiques ou par des décrets, qu'ils deviennent propriétaires terriens, sujets de droits et devoirs, tout cela, bien entendu, sous la tutelle des magistrats et des prêtres. [...] Parallélisme entre la politique d'attribution du droit de cité et l'admission de nouvelles divinités." (p.50)
    -John Scheid, "Numa et Jupiter ou les dieux citoyens de Rome", Archives de Sciences Sociales des Religions  Année 1985, 59-1, pp. 41-53.



    Dernière édition par Johnathan R. Razorback le Mar 29 Sep - 16:50, édité 1 fois


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    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

    « Rien de grand ne s’est jamais accompli dans le monde sans passion. » -Hegel, La Raison dans l'Histoire.

    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".

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    Message par Johnathan R. Razorback Mar 29 Sep - 16:50



    "La religion romaine n'est pas régie par une doctrine révélée, rigoureusement définie, et un code moral enjoignant à l'homme à penser la "chose vraie", elle est une orthopraxie. Comme dans d'autres religions ritualistes, l'exécution du rite se trouve à la base des rapports avec les dieux. L'enjeu fondamental d'une telle religion n'est pas la recherche d'une relation intime et personnelle avec la divinité, mais l'exact accomplissement des actes rituels, le savoir-faire pratique, la connaissance précise des gestes et des paroles, et une parfaite administration du culte dans le cadre qui est le sien, la communauté." (p.49)

    "Les dieux officiels de Rome ne pouvaient accorder aux hommes la vie éternelle, et le culte était célébré en vue d'intérêts terrestres. L'enjeu principal du culte funéraire romain était moins le sort du défunt que celui de la famille vivante. La mort souillait la famille, et seulement des rites pouvaient la purifier." (p.51)

    "Les imagines, masques des morts en cire, déposées dans l'atrium des grandes familles et pourvues d'inscriptions énonçant la liste des charges et des honneurs revêtus, témoignent de l'orientation vers ce monde-ci: les masques avaient pour fonction de remémorer le passé vertueux incarné par les ancêtres ; en outre le souvenir concernait les vertus civiques représentées par ces hommes, non pas les individus eux-mêmes: leur être se réduisait à leur essence communautaire." (p.51)

    "La ruse liberté de ton et la prédominance de la volonté du célébrant dans tout acte cultuel." (p.57)

    "Le mépris et la violence avec lesquels Cicéron, Varron, Plutarque et tant d'autres Romains bien-pensants condamnaient les "superstitieux" [...] [suffit] pour prouver que cette "foi" n'était pas si froide qu'on ne le dit." (p.57)
    -M. Linder & John Scheid, Quand croire c'est faire. Le problème de la croyance dans la Rome ancienne / When Believing is Doing. The Problem of Believing in Ancient Roma, Archives de Sciences Sociales des Religions, Année 1993, 81, pp. 47-61.
    https://www.persee.fr/doc/assr_0335-5985_1993_num_81_1_1634

    https://www.persee.fr/doc/assr_0335-5985_1994_num_85_1_1424

    https://www.persee.fr/doc/rural_0014-2182_1998_num_147_1_3617

    "Pour les Romains, il ne peut pas y avoir d'action sans participation divine [...] C. Flaminius [217 avant J.C.] livra la désastreuse bataille du Lac Trasimène en négligeant et en méprisant les dieux, pour citer les termes employés [a posteriori] par Fabius Maximus (Plutarque, Fab. Max, 4, 4). Non content de prendre le consulat sans retourner à Rome [...] Flaminius engage le combat sans écouter les avertissements de son état-major et ceux des dieux [...] Ce refus de revenir à Rome signifiait non seulement qu'il ne se souciait pas de consulter le sénat, mais surtout qu'il ne prenait pas les auspices d'investiture de la manière prescrite, et qu'il ne célébrait pas, comme c'était obligatoire pour tout consul entrant en fonction, les Jeux latins du Mont Albain et les sacrifices de Lavinium [...] Bref cela signifiait que Flaminius méprisait les dieux. En refusant de les consulter, il ne les associait pas à son commandement, ce qui revient à dire qu'il agissait seul ; en ne célébrant pas les sacrifices réguliers, il les méprisait." (p.295)
    -John Scheid (1997).

    https://www.persee.fr/doc/ephe_0000-0002_1997_num_110_106_12759

    https://www.persee.fr/doc/ephe_0000-0002_1998_num_111_107_12907

    https://www.persee.fr/doc/ephe_0000-0002_1999_num_112_108_13050



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    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

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    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".


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