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    Clément Homs, De quelques divergences entre Moishe Postone et la « Wertkritik »

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Clément Homs, De quelques divergences  entre Moishe Postone et la « Wertkritik » Empty Clément Homs, De quelques divergences entre Moishe Postone et la « Wertkritik »

    Message par Johnathan R. Razorback Mar 18 Mai - 20:53

    "Les Allemands n'ont jamais accepté ce qui était perçu chez Postone comme une prétention à vouloir présenter un vrai Marx, un Marx redressé, un Marx redécouvert, un  Marx enfin révélé. Comme si les différents courants marxistes n'avaient finalement jamais rien compris à Marx.

    Pour les Allemands finalement, la formule rabâchée que Marx n'aurait jamais été marxiste, n'est pas totalement exacte ou du moins trop caricaturale. Aux yeux de la « critique de la valeur », le marxisme traditionnel a très bien interprété Marx, mais il a seulement interprété - et c'est là ce qui est fondamental - qu'une ligne argumentative au sein de l'oeuvre de Marx, celle aujourd'hui la moins pertinente. Il ne s'agit donc pas pour la « Wertkritik » de sauver Marx du marxisme traditionnel, mais d'affirmer plutôt la présence d'un « Double Marx »."

    "Deux lignes argumentatives totalement imbriquées dans la pensée de Marx (enchevêtrées aussi bien dans son œuvre de jeunesse que dans son œuvre de maturité, et parfois même dans une seule phrase, il n'y a donc là rien ici de véritablement conscient chez Marx."

    "La distinction entre un « Marx exotérique » et un « Marx ésotérique » que fait la branche allemande, relève exactement de cette distinction : le premier Marx (celui du marxisme traditionnel) ne serait valable que pour la description de la configuration historique du XIXe siècle et le marxisme traditionnel a assimilé totalement le capitalisme à cette configuration libérale centrée sur le marché et propriété privée ; tandis que le deuxième Marx serait celui qui aurait commencé - seulement - à saisir le noyau véritable du capitalisme quel que soit sa configuration historique particulière. C'est-à-dire le Marx encore aujourd'hui pertinent, celui qui critique l'économie politique en soi, au niveau de la critique catégorielle des formes/catégories sociales de base de la forme de vie capitaliste - travail, valeur, argent, marchandise et Etat -, (catégories historique et négative dans la pensée du Marx ésotérique, que le positivisme marxiste n'a cessé d'ontologiser) et ce quel que soit la configuration historique du capitalisme centrée sur le Marché ou centrée sur l'Etat. C'était là une contradiction interne à la réinterprétation théorique de Postone, que d'affirmer à la fois la distinction entre le niveau du noyau et de la dynamique fondamentale que saisit le Marx de la critique des formes/catégories et les différentes configurations historiques (que Postone n'étudiait pas encore dans TTDS, laissant seulement entendre que sa réinterprétation permettrait dans des travaux à venir de penser ces configurations), tout en disant qu'il venait de redresser la théorie marxienne contenue dans « Le Capital » sans voir que justement le marxisme traditionnel pouvait constituer une assez bonne compréhension de la configuration libérale du capitalisme au XIXe siècle. Mais aujourd'hui c'est justement de cette contradiction qu'il me semble sortir notamment dans ses textes comme « La théorie critique et le XXe siècle »."

    "Ce n'est pas seulement la mesure de la valeur (qu'est-ce-qu'on produit dans une heure sociale ?) qui est sujet à une évolution dynamique, c'est également la question de la masse de la valeur, de la substance de la valeur qu'il faut comprendre dans une trajectoire et non pas de manière statique. La partie de travail vivant qui crée la valeur devient toujours plus mince. Même si on constate une expansion de la masse de travailleurs, le travail productif (au sens marxien) a toujours tendance à diminuer à cause de l'expansion continuelle des faux frais notamment des activités d'Etat qui ne sont pas productrices de valeur, ce qui induit une diminution de la masse totale de valeur au niveau global. On ne retrouve donc pas chez Postone de théorie de l'évolution de cette masse totale de la valeur. Quand Postone essaye de tirer des conséquences de sa reformulation théorique, elle sont trop platement politiques, et formulées en terme de critique de l'idéologie, critique de l'antisémitisme, critique des limites de la démocratie, etc. Ces perspectives sont comprises de manière assez statique et n'ont finalement plus aucun rapport avec la théorie de la dynamique qu'il a fondé. Les considérations en termes d'action révolutionnaire sont donc faites dans un registre beaucoup plus traditionnel vis-à-vis du marxisme. Pour Lohoff, Postone n'arrive donc pas assez à lier la haute théorie élaborée dans TTDS et les phénomènes plus concrets de l'évolution contemporaine du monde capitaliste lors de ces dernières années. Il n'y a pas chez Postone cette capacité de passer du plus abstrait au plus concret voire aux formes empiriques (ce que faisait magistralement Kurz), justement parce qu'il lui manque une théorie puissante de la crise interne du capitalisme."
    -Clément Homs, De quelques divergences  entre Moishe Postone et la « Wertkritik », 3 Novembre 2017: http://www.palim-psao.fr/article-postone-et-la-critique-de-la-valeur-119836393.html



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