https://fr.wikipedia.org/wiki/Daniel_Marc_Weinstock
https://www.cairn.info/revue-rue-descartes-2009-1-page-63.htm
"Les monuments, les lieux historiques, les plaques commémoratives ponctuent l’espace des villes et racontent en quelque sorte l’« histoire » des sociétés dont les villes font partie. Ils honorent les grands disparus, et tentent de donner une présence à certains des événements qui représentent les « mythes fondateurs » de ces sociétés. Quelles sont les questions de justice qui sont soulevées par les décisions d’aménager l’espace symbolique d’une ville de certaines manières plutôt que d’autres. Existe-t-il un droit de tous les citoyens d’une ville de participer aux processus décisionnels qui tendent à fonder les mythes collectifs ? Comment la fixité des espaces publics créés à des fins commémoratives peut-elle être rendue compatible avec la fluidité des mythes qui conviennent à des populations dont la composition tend à être fluide, comme le sont les populations urbaines ? Peut-on donner de la consistance à l’idée de mythes « ouverts » auxquels correspondraient des espaces publics inclusifs, c’est-à-dire capables de représenter la pleine étendue des points de vue présents dans une société tant sur son passé que sur les valeurs que devrait véhiculer son avenir ? Il ne s’agit bien évidemment ici que d’identifier un certain nombre de questions normatives liées de manière indissoluble au caractère spatial des liens entre citoyens à l’intérieur de la ville, afin de valider l’idée selon laquelle la spatialité rend la ville, et donc le questionnement normatif à propos de la ville, sui generis par rapport à l’espace traditionnel pour la philosophie politique que représente l’État-nation."
"Il ne s’agit pas ici de nier que l’État devra se charger d’effectuer une répartition des richesses comme celle qui est envisagée dans les théories de Rawls et de Dworkin. Ce que je voudrais cependant porter à l’attention du lecteur, c’est que d’autres dimensions de la mission des institutions de justice distributive deviennent apparentes lorsque l’on se situe dans le contexte des dimensions spatiales de la ville. Il y sera en effet moins question de répartition équitable de ressources abstraites, mais d’accès égal à des institutions remplissant des fonctions importantes pour la satisfaction des intérêts des citoyens (écoles, hôpitaux, alimentation, etc.). Or, la question de savoir si l’accès des citoyens d’un grand espace urbain à ce genre d’institution est organisé de manière juste ne peut pas être réduite à celle de savoir si la distribution de ressources s’effectue entre eux de manière qui correspond aux canons de la justice entendue de manière purement abstraite."
-Daniel M. Weinstock, « Pour une philosophie politique de la ville », Rue Descartes, 2009/1 (n° 63), p. 63-71. DOI : 10.3917/rdes.063.0063. URL : https://www.cairn.info/revue-rue-descartes-2009-1-page-63.htm
https://www.cairn.info/revue-rue-descartes-2009-1-page-63.htm
"Les monuments, les lieux historiques, les plaques commémoratives ponctuent l’espace des villes et racontent en quelque sorte l’« histoire » des sociétés dont les villes font partie. Ils honorent les grands disparus, et tentent de donner une présence à certains des événements qui représentent les « mythes fondateurs » de ces sociétés. Quelles sont les questions de justice qui sont soulevées par les décisions d’aménager l’espace symbolique d’une ville de certaines manières plutôt que d’autres. Existe-t-il un droit de tous les citoyens d’une ville de participer aux processus décisionnels qui tendent à fonder les mythes collectifs ? Comment la fixité des espaces publics créés à des fins commémoratives peut-elle être rendue compatible avec la fluidité des mythes qui conviennent à des populations dont la composition tend à être fluide, comme le sont les populations urbaines ? Peut-on donner de la consistance à l’idée de mythes « ouverts » auxquels correspondraient des espaces publics inclusifs, c’est-à-dire capables de représenter la pleine étendue des points de vue présents dans une société tant sur son passé que sur les valeurs que devrait véhiculer son avenir ? Il ne s’agit bien évidemment ici que d’identifier un certain nombre de questions normatives liées de manière indissoluble au caractère spatial des liens entre citoyens à l’intérieur de la ville, afin de valider l’idée selon laquelle la spatialité rend la ville, et donc le questionnement normatif à propos de la ville, sui generis par rapport à l’espace traditionnel pour la philosophie politique que représente l’État-nation."
"Il ne s’agit pas ici de nier que l’État devra se charger d’effectuer une répartition des richesses comme celle qui est envisagée dans les théories de Rawls et de Dworkin. Ce que je voudrais cependant porter à l’attention du lecteur, c’est que d’autres dimensions de la mission des institutions de justice distributive deviennent apparentes lorsque l’on se situe dans le contexte des dimensions spatiales de la ville. Il y sera en effet moins question de répartition équitable de ressources abstraites, mais d’accès égal à des institutions remplissant des fonctions importantes pour la satisfaction des intérêts des citoyens (écoles, hôpitaux, alimentation, etc.). Or, la question de savoir si l’accès des citoyens d’un grand espace urbain à ce genre d’institution est organisé de manière juste ne peut pas être réduite à celle de savoir si la distribution de ressources s’effectue entre eux de manière qui correspond aux canons de la justice entendue de manière purement abstraite."
-Daniel M. Weinstock, « Pour une philosophie politique de la ville », Rue Descartes, 2009/1 (n° 63), p. 63-71. DOI : 10.3917/rdes.063.0063. URL : https://www.cairn.info/revue-rue-descartes-2009-1-page-63.htm