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    Françoise Parot et Marc Richelle, Introduction à la psychologie. Histoire et Méthodes

    Johnathan R. Razorback
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    Françoise Parot et Marc Richelle, Introduction à la psychologie. Histoire et Méthodes Empty Françoise Parot et Marc Richelle, Introduction à la psychologie. Histoire et Méthodes

    Message par Johnathan R. Razorback Sam 13 Nov - 14:25

    https://fr.book4you.org/book/3380597/5cc7c7?dsource=recommend

    "La psychologie, par son objet, s’enracine nécessairement dans les [sciences de la vie et de la santé] et dans les [sciences humaines] [car] il n’est pas possible de comprendre l’être humain sans recourir à la biologie et sans l’inscrire dans la société."

    "[Cet ouvrage] vise à fournir une réflexion sur la démarche de la psychologie moderne en la rattachant à son histoire, y compris à son passé philosophique qui en fait comprendre l’émergence et dont les débats majeurs se perpétuent en elle, en dépit des proclamations de rupture entre psychologie philosophique et psychologie scientifique."

    " [Première partie : histoire]

    "Chaque homme est un organisme plus ou moins stable et le produit changeant de la culture dans laquelle il vit ; de plus, l’image de l’homme que construit, avec d’autres, la psychologie a un impact idéologique puisque l’homme est aussi un être social, un acteur du monde dans lequel il vit qui n’est pas qu’un monde naturel."

    "Au siècle dernier, [la question de la scientificité de la psychologie] a été résolue d’une façon qui pèse encore fortement sur le critère de la vérité en psychologie : on a considéré que n’était vrai que ce qui était objectif, c’est-à-dire en fait observable ; l’image de l’homme (et peut-être même l’homme lui-même) en a été appauvrie puisqu’il était « réduit » à un ensemble de comportements effectivement observables et mesurables. Puis on s’est avisé que cet appauvrissement pourrait être évité en demandant à la biologie de vérifier les dires des psychologues y compris sur ce qu’ils n’observent pas directement, tant et si bien qu’aujourd’hui on considère souvent comme vraiment scientifiques en la matière les seules approches « biologisées » : il est vrai que l’individu procède de telle et telle façon dans telle situation quand on trouve le substrat biologique (quel qu’il soit) responsable de ce fonctionnement. Cette position, qui à la fin du XIXe semblait permettre de se débarrasser de la métaphysique, de la philosophie, donne aujourd’hui de l’homme l’image d’un organisme et non d’un sujet ; on pourrait se demander quel type d’idéologie sert cette conception, à quoi elle sert dans notre société."

    "Pour Platon comme pour Aristote, le monde réel, la Nature, excède l’ensemble des faits seulement observables : la connaissance de la Nature ne peut être élaborée que par le travail que la raison, la dialectique, opère sur les données de l’observation. [...] Dans cette pensée antique, on voit donc prendre forme une distinction, fondamentale pour la psychologie contemporaine, entre ce qui est patent, sensible, et ce qui est latent, à construire à partir du sensible. L’exemple le plus évident aujourd’hui en est la thèse freudienne d’une distinction entre le contenu conscient du rêve, patent pour le dormeur et le contenu latent qui ne peut qu’être, par un effort, construit à partir du contenu patent ; mais on pourrait tout aussi bien trouver un exemple semblable dans les travaux sur la cognition pour lesquels le comportement patent et observable n’est qu’un indice de structures ou d’opérations cognitives latentes et inobservables, mais postulées tout aussi réelles que le comportement."

    "Le XIIe est en effet une période de profonds changements dans la vision du monde, dans la culture même de l’Europe : en raison de mutations économiques, du développement considérable du commerce qui va mal s’accommoder de la loi des Evangiles. Le renouveau des villes et des échanges, la constitution de fortunes individuelles vont nécessiter l’élaboration d’un code des rapports économiques, d’une définition des droits de chacun. La vie monastique ne peut plus constituer le modèle de la vie profane, tant celle-ci fait entendre de nouvelles exigences. [...]
    Idée d’une confiance qui s’installe dans le pouvoir de la connaissance naturelle et non plus seulement inspirée par la lecture des Saintes Ecritures."

    "Au XIIIe siècle, cette thèse en vertu de laquelle Dieu lui-même ne peut être capricieux soulève de vives objections. Elles viennent de ceux qui y voient une offense à la toute-puissance divine qui serait ici soumise à l’ordre de la Nature imaginé par les thomistes à la mesure de la raison humaine et accessible à elle. Des moines s’insurgent contre cette thèse, un courant en quelque sorte « intégriste », qui va parvenir à déclencher une réaction de la papauté : les œuvres de Thomas d’Aquin, qui sera pourtant canonisé en 1323, sont interdites en 1277, trois ans après sa mort."

    "Il existe par exemple une version un peu simpliste de nominalisme en psychologie, très éloignée de la profondeur philosophique de G. d’Occam mais qui a le mérite d’être exprimée très clairement. Elle a d’autre part des effets pratiques immédiats, ce qui révèle l’importance de ces prises de position dans des débats apparemment très abstraits. Cette version concerne la conception de la maladie mentale, de la névrose en particulier, telle qu’elle est développée par H. J. Eysenck, un clinicien anglais. Il écrit :

    « Comme le terme “névrose” est très souvent employé par les psychiatres, aussi bien que par les profanes, on pourrait s’attendre à ce que sa signification soit claire et qu’il se laisse définir facilement. Ce n’est pas le cas : en effet, on peut douter qu’il existe vraiment une “chose” que l’on puisse appeler névrose, et si elle existe, il s’avère difficile de la cerner. La névrose est bien entendu un concept et les concepts n’ont pas d’existence réelle au sens où on l’entend, par exemple, pour des tables ou des chaises, des vaches ou des cochons (…) L’intelligence est un concept, de même que la gravitation, la chaleur ou l’électricité. De tels concepts résument des cas individuels qui ont quelque chose en commun. Le concept “intelligence” résume les cas individuels où il y a activité, fructueuse ou non, de solution de problème (…) La “névrose” est un terme couramment employé pour désigner le comportement accompagné d’une forte émotion, mal adapté, et qui apparaît à la personne qui en est le siège comme insensé, inadéquat, mais elle est impuissante à changer. »

    (La névrose et vous, Bruxelles, Dessart & Mardaga, 1979, p. 13.)

    Certes, il n’est pas évident que G. d’Occam reconnaîtrait là son influence, mais il s’agit bien de nominalisme, banalisé, aussi peu philosophique que possible, mais efficace. Pour Eysenck, « névrose », comme « humanité », n’est qu’un terme, pratique pour désigner la somme de symptômes. Ainsi, la maladie n’existe pas réellement, seuls existent des symptômes pris individuellement. C’est notre intellect qui les unifie sous un seul terme, en leur attribuant même une structure, des liens entre eux, qu’ils n’ont pas dans la réalité.

    Les conséquences pratiques de cette conception de la maladie « névrose » ont été appliquées par un courant contemporain : la thérapie comportementale. Pour ses praticiens, chaque symptôme doit être considéré individuellement, soigné isolément sans prendre en considération une structure sous-jacente à plusieurs symptômes, fictive, non réelle. L’idée de déplacement de symptômes ici n’a, par exemple, plus aucun sens. Toute pratique fondée sur une représentation de la névrose comme engendrant un groupe de symptômes structurés (comme la pratique de la psychanalyse) est illusoire et non scientifique puisqu’elle raisonne sur des entités non réelles.

    On peut trouver de nombreux exemples de conceptions nominalistes dans les ouvrages de behavioristes, de B. F. Skinner en particulier."
    -Françoise Parot et Marc Richelle, Introduction à la psychologie. Histoire et Méthodes, PUF, 2013 (1992 pour la première édition), 464 pages.




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    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

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    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".

    Johnathan R. Razorback
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    Françoise Parot et Marc Richelle, Introduction à la psychologie. Histoire et Méthodes Empty Re: Françoise Parot et Marc Richelle, Introduction à la psychologie. Histoire et Méthodes

    Message par Johnathan R. Razorback Jeu 14 Juil - 19:29

    " [Deuxième partie. Méthodes]

    "La logique s’attache à mettre en formules, aussi sobres que possibles, les règles du raisonnement correct. Ces règles sont valables indépendamment des objets, réels ou imaginaires, vérifiés ou seulement supposés, sur lesquels porte le discours. En elle-même, la logique ne cherche pas sa validation dans la réalité : elle se borne à définir et à codifier ce qui fonde un raisonnement valide pour ce qui concerne sa consistance interne. Il va de soi que le contrôle dans le réel propre aux disciplines empiriques doit, pour être convaincant, s’appuyer sur un raisonnement logique. Il est donc élémentaire pour tout scientifique d’en connaître et d’en respecter les règles, et mieux vaut, à cette fin, en prendre une connaissance explicite, même si une part importante s’en trouve implicitement pratiquée dans notre raisonnement courant."

    "Piaget, dans son œuvre fondatrice d’épistémologie génétique, telle qu’il la qualifiait lui-même, et qui fut tout à la fois, peut-être avant tout, une contribution à la psychologie de la cognition. L’idée maîtresse de Piaget, faisant écho aux recherches historiques auxquelles il vient d’être fait allusion, rattache la pensée logique la plus abstraite, le raisonnement mathématique le plus épuré aux activités sensori-motrices du nourrisson, débouchant progressivement, au titre encore d’actions intériorisées, sur des opérations déjà proches des formes plus achevées de raisonnement logico-mathématique, mais néanmoins liées à des supports concrets — au stade dit, précisément, des opérations concrètes —, pour s’en détacher enfin à un niveau purement formel.

    L’œuvre de Piaget illustre l’un des points de jonction entre psychologie et logique ou mathématique : c’est à la psychologie que revient la tâche de décrire comment se constituent chez l’individu les compétences logico-mathématiques, et plus largement comment fonctionne le sujet lorsqu’il met en œuvre ces compétences, se conformant plus ou moins strictement à des règles formalisées, ou s’en écartant pour des raisons à identifier. C’est là un des domaines privilégiés de la psychologie cognitive contemporaine, dont on devine sans peine qu’il exige du psychologue une information solide en logique et en mathématique."

    "Docimologie, ou science de l’évaluation des rendements scolaires."

    "Toute science empirique se heurte, dans sa démarche de vérification dans le réel, à un problème de techniques. Elle ne progresse que si elle dispose d’instruments appropriés pour observer et expérimenter ce qu’elle s’est donné pour tâche d’étudier. Hypothèses et théories demeurent en suspens, modèles formels restent vains si les procédés concrets ne sont pas disponibles, qui permettront de vérifier et de mettre à l’épreuve les premières, d’appliquer les seconds. La mise au point de tels procédés dépend à la fois de l’ingéniosité des expérimentateurs et des développements, selon leurs voies propres, de diverses technologies. Le chercheur scientifique est fabricant et utilisateur d’outils, non moins que formulateur d’hypothèses ; bricoleur, artisan, technicien non moins que producteur de discours raisonnés ; homo faber tout autant que homo loquens. Une technique est un instrument concret de contrôle de l’objet à étudier, et l’une des conditions sine qua non de la découverte."

    "Il a fallu attendre le début du XIXe siècle pour que s’impose peu à peu aux biologistes, informés par l’usage toujours plus efficace du microscope, l’idée que tout être vivant, plante ou animal, est constitué d’une combinaison d’unités élémentaires, de cellules, présentant des apparences diverses, participant à des ensembles aux fonctions variées, mais construites, pourtant, selon un plan fondamental commun. La diversité des organismes et, au sein de ceux-ci, la diversité des organes trouvent leur principe unificateur fondamental dans la cellule, véritable siège de la vie. L’importance de cette découverte de l’unité de description pertinente n’a cessé de se confirmer à travers les progrès de la biologie moderne, depuis la formulation par Schwann en 1839, de la théorie cellulaire.

    La découverte de l’unité minimale pertinente dans la chaîne parlée n’est pas moins éclairante, dans le champ de la linguistique, que celle de la cellule en biologie. On peut faire remonter au moins aux origines de l’écriture phonétique la prise de conscience par l’homme des sons — consonnes et voyelles — constitutifs du langage. L’analyse des multiples réalisations de ces sons et de leur évolution à travers l’histoire des langues a permis aux linguistes du xixe siècle d’élaborer une phonétique descriptive et historique. Mais il fallut attendre le second quart du XXe siècle pour que, avec les linguistes de l’école de Prague, Troubetzkoi et Jakobson notamment, on s’avise du fait que les sons n’ont de valeur dans la langue que par les rapports qu’ils entretiennent avec les autres sons. La distinction [t]/[d] n’importe que dans la mesure où ton et don ont des sens différents. Pour l’anglophone, [s]/ [θ] se distinguent comme dans sick et thick, alors que le francophone prononçant [θac] pour [sac] manifestera simplement un léger défaut de prononciation risquant peu d’entraîner une véritable confusion de sens. Au son pris comme unité phonétique, s’est substitué le son pris comme unité phonologique, chargée de valeur significative.

    Mais, pour le psychologue, quelles sont les unités pertinentes ? Les conduites s’enchaînent le plus souvent comme un flux continu ; comment le subdiviser pour y voir clair ? Et faut-il le subdiviser ? Nous verrons au chapitre suivant comment les méthodes d’observation ont tenté de résoudre ce problème. Il s’inscrit cependant dans quelques interrogations fondamentales pour le psychologue qu’il convient au moins d’évoquer, sinon d’approfondir — ce qui nous emmènerait dans des débats qui ont traversé toute l’histoire de la psychologie et ne sont pas près de se clore. Nous en simplifierons les données en les ramenant à trois thèmes : celui du niveau de résolution de l’analyse ; celui de la distinction entre unités structurales et unités fonctionnelles ; celui enfin de l’observable et de l’inférable."

    "Un animal sauvage, un renard, se met en chasse, à la recherche d’une proie. Il quitte son terrier, il entreprend un trajet, guidé par des indices olfactifs, auditifs, visuels qui le renseignent sur la localisation du gibier éventuel, il traque une proie et finalement fonce sur elle et la mange. Deuxième exemple : un pianiste s’assied devant son clavier, se recueille un instant, puis attaque une sonate de Beethoven, qu’il exécute jusqu’au bout.

    Qu’il s’agisse du renard ou du pianiste, nous pouvons appréhender le comportement en cause en sa globalité ou au contraire le réduire en ses éléments successifs les plus menus ; d’un côté, n’envisager que la chasse alimentaire, ou l’exécution complète d’une œuvre pianistique ; de l’autre, analyser dans chaque cas la succession de gestes, voire, à la limite, d’actions musculaires élémentaires, et de prises d’informations sensorielles venant les déclencher ou les moduler. La première manière de procéder rend d’emblée justice à l’organisation générale des conduites observées, à leur signification dans la vie de l’individu, sans se préoccuper des détails d’exécution ; la seconde accentue au contraire ceux-ci, éventuellement au point de perdre de vue la signification d’ensemble. Pour reprendre l’opposition discutée depuis longtemps chez les psychologues, la première est molaire, la seconde moléculaire. Certains ont proposé de faire du niveau molaire le niveau propre de la psychologie, le moléculaire étant réservé à la physiologie. Cette subdivision des tâches n’est pas justifiée, car si cela a un sens d’envisager les conduites dans leur totalité, il faut bien que la machinerie physiologique qui les soustend obéisse elle-même à des schémas de fonctionnement global. C’est d’ailleurs aux psychophysiologistes que nous devons l’une des démonstrations les plus convaincantes de la notion de schéma global d’action, dans ce que l’on appelle le programme moteur. Revenant à l’exemple de notre pianiste, il apparaît impossible de rendre compte de l’organisation de son jeu en le réduisant à un enchaînement de petits mouvements des doigts et des mains dont chacun constituerait en quelque sorte le déclencheur du suivant — comme le suggérerait une explication en termes de stimulus-réponse. Compte tenu de la rapidité que peut atteindre son exécution, cette explication défierait les contraintes de l’appareil neuromusculaire (et notamment la durée de la conduction de l’influx nerveux). Il faut donc invoquer une organisation centrale anticipée de l’exécution, un programme moteur qui soit mis en œuvre comme un projet d’action, dont chaque étape ne doit pas attendre, pour se réaliser, l’achèvement de l’étape antérieure, mais simplement la commande centrale qui l’a située dans l’ensemble dès le départ. C’est notamment à [Karl] Lashley que l’on doit ce concept devenu central en psychologie et en psychophysiologie contemporaine."
    -Françoise Parot et Marc Richelle, Introduction à la psychologie. Histoire et Méthodes, PUF, 2013 (1992 pour la première édition), 464 pages.




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