"Toujours se poser ces questions:
-Où se localisent les phénomènes étudiés ? Pourquoi là et pas ailleurs ?
-Cette ou ces localisations évoluent-elles, et si oui sous l'effet de quelles dynamiques ?
-Comment s'organise l'espace ou le territoire que je dois étudier ?
-Qui intervient dans cette organisation ?" (p.6)
"La notion de conflits d'acteurs peut aussi être mobilisée, lorsque les acteurs s'opposent dans un espace pour différentes raisons." (p.6)
"Si le terme "France est seul [dans l'intitulé], sans aucune autre précision, alors l'outre-mer fait partie du sujet même si il est malgré tout possible de l'exclure du sujet à condition de l'argumenter en introduction, en mentionnant par exemple que le phénomène à étudier est très marginal ou inexistant en outre-mer." (p.7)
"[Analyse du sujet en introduction]: Définitions des termes clefs, mise en relation de ces termes, chiffres clefs (éventuellement), délimitation spatiale [...], enjeux principaux." (p.
[P.9: Plan analytique et plan multiscalaire ; et p.10: plan thématique et plan typologique]
"Un croquis est une représentation cartographique qui prend en compte la réalité d'un espace, sans déformation, tandis qu'un schéma, lui, est une forme de représentation beaucoup plus simplifiée (faire par exemple une forme d'hexagone pour représenter le territoire français).
[...] Le croquis de synthèse s'apparente à une carte thématique simplifiée et constitue une réponse graphique au sujet de la dissertation. [...]
Doit avoir un titre, inscrit sur le fond de carte (reprendre l'intitulé du sujet), ainsi qu'une échelle (en général déjà indiquée) et une orientation (le nord géographique.
-Il doit posséder une légende dans laquelle les figurés sont classés et hiérarchisés, dans des parties et sous-parties: la meilleure solution est de reprendre le plan de sa dissertation pour construire la légende du croquis, car cela montre au correcteur que vous êtes capable de traduire géographiquement votre raisonnement géographique ;
-le croquis ne doit pas être surchargé, ni trop "vide": il faut entre une douzaine et une vingtaine de figurés environ [...]
Les petits croquis intermédiaires sont ceux qui sont intégrés à l'argumentation dans le cours du développement. Si la réalisation de la carte de synthèse doit être prioritaire, réaliser un ou deux croquis intermédiaires peut être un élément de valorisation de la copie. Ces croquis portent en général sur l'échelle régionale ou l'échelle locale. Leur réalisation obéit aux mêmes règles énoncées précédemment, même si leur réalisation doit prendre moins de temps que la carte de synthèse:
-ne pas les faire sur un espace trop restreint: ne pas hésiter à prendre la moitié d'une page, le correcteur préférant largement cette solution à de minuscules croquis quasiment illisibles ;
-commencer par tracer un cadre à l'intérieur duquel sera réalisé le croquis ;
-indiquer un titre, une échelle (même approximative) et une orientation ;
-faire une légende, qui ne peut ne contenir que quelques figurés.
[...]
Sauf à prendre le risque de bâcler la réalisation des illustrations, il faut consacrer environ un quart du temps de l'épreuve à cette tâche, soit par exemple environ une heure pour une épreuve qui en dure quatre." (pp.12-13)
"La géographie étant, dans son acception la plus large, l'étude de l'action des hommes et sociétés sur l'espace sur lequel ils vivent, ces notions d' "espace" et de "territoire" sont évidemment à la base de la discipline géographique mais ne doivent pas être pour autant confondues.
-Le terme "espace" désigne, très simplement et de manière neutre, une portion quelconque de la surface terrestre. Cet espace est composé de lieux, c'est-à-dire de points de la surface terrestre localisés par des coordonnées en longitude et en latitude ; le terme de "lieu" répond donc à une logique d'implantation ponctuelle (un point précisément localisé), tandis que celui d' "espace" s'inscrit plutôt dans une logique zonale (une zone, ce qui implique un certain étalement).
-Le terme de "territoire", lui, désigne un espace qui a été approprié par une société, c'est-à-dire qui est aménagé, contrôlé, borné par des frontières et géré par un pouvoir politique, fréquemment l'Etat. Le passage de l'espace au territoire résulte donc d'un processus de territorialisation, au cours duquel la société s'approprie progressivement son espace et qui dure, en règle générale, plusieurs siècles pour un Etat-nation comme la France." (p.23)
"Les Celtes, loin d'être unis, sont divisés en plusieurs groupes ethno-linguistiques parmi lesquels se trouvent les Gaulois [...] Redoutables guerriers, ils ont à plusieurs reprises menacés la puissance romaine, en particulier en 390 av. J.C., lorsqu'ils ont réussi à pénétrer dans Rome et à la saccager, provoquant un immense traumatisme chez les Romains qui redouteront toujours cette menace gauloise." (p.25)
"Dans son ouvrage La Guerre des Gaules, César fait une opposition très nette entre les Gaulois d'une part et les Germains d'autre part, et fixe la "frontière" entre ces deux peuples au niveau du Rhin: ainsi, d'après César, la frontière entre la Gaule et la Germanie est "naturellement" le Rhin. Ce choix est pourtant une décision purement arbitraire et personnelle de César qui a ainsi, selon l'heureuse expression de l'historien C. Goudineau, "inventé la Gaule" dans la mesure où il est le premier à délimiter un territoire gaulois et à l'opposer à une Germanie. Cette "invention" est en quelque sorte une ruse politique voire politicienne de César: en fin politique qu'il était, il savait que ses succès militaires auraient un impact considérable à Rome, où il n'a pas renoncé à ses ambitions politiques face à son ennemi de toujours, Pompée ; en fixant cette frontière au niveau du fleuve, il masque ainsi ses échecs à conquérir les peuples situés au-delà du Rhin et présente ses conquêtes comme formant un ensemble cohérent. Cette séparation artificielle entre une Gaule et une Germanie, outre qu'elle donne l'image -fausse- de deux ensembles homogènes, ne se justifie pas ni du point de vue topographique (certes, le Rhin créé une discontinuité spatiale, mais qui n'est pas majeure) ni du point de vue culturel voire ethnique, Gaulois et Germains appartenant à l'aire culturelle celte avec un certain nombre de traits caractéristiques communs. Même si on l'a longtemps écrit et enseigné, au moins jusqu'aux années 1960-1970, il n'est plus possible aujourd'hui de considérer la Gaule comme l'ancêtre de la France, ni les Gaulois comme "nos ancêtres".
Quoi qu'il en soit, cette frontière césarienne s'impose rapidement, et, dans le cadre de la domination romaine, devient la frontière administrative entre les provinces gauloises d'une part et les provinces germaniques d'autre part." (p.26)
"Les Celtes ont [...] bien avant l'arrivée des Romains, édifié les premières structures urbaines qu'historiens et archéologues considèrent aujourd'hui comme les villes les plus anciennes d'Europe: il s'agit des oppida (oppidium au singulier), comme Bibracte, Gergovie, Alésia ou bien encore Entremont à proximité d'Aix-en-Province. Les Romains ont poursuivis et amplifié le processus d'urbanisation du territoire gaulois, en édifiant de nouveaux espaces urbains, appelés désormais cités, par exemple Arles fondée par César en 46. av. J.C., ou en réaménageant les anciens oppida celtes. Il est symptomatique de constater aujourd'hui que non seulement la majorité des villes françaises sont d'origine antique mais qu'en plus, à l'échelle intra-urbaine, l'organisation de la ville reprend en partie celle de l'époque antique (centre historique qui correspond à la ville antique même si la strate médiévale l'a souvent fait disparaître, principaux axes qui reprennent en partie le tracé des anciens axes gallo-romains, etc.)." (p.26-27)
"Les Celtes ont également aménagé un premier réseau routier, qui est ensuite complété et densifié par les Romains. Ceux-ci ont en effet besoin d'un réseau viaire (les viae sont les voies romaines) solide, reliant les différentes cités entre elles mais aussi la Gaule aux autres provinces de l'Empire, provinces espagnoles et germaniques en particulier) et à l'Italie, à la fois dans un but stratégique et militaire (faciliter la circulation des soldats à l'intérieur des provinces et vers les frontières de l'Empire), dans un but administratif au sens large (permettre une circulation efficace des nombreux fonctionnaires, de la correspondance officielle et plus largement de l'information) et dans un objectif économique (encourager les circulations des marchandises et des commerçants). Si l'on compare une carte des réseaux routiers de la Gaule romaine avec une carte des réseaux actuels, on constate aisément une continuité: les grands axes de transports d'aujourd'hui reprennent les tracés de l'époque romaine, par exemple en vallé du Rhône ou le long de la Méditerranée vers l'Espagne (avec la célèbre via Domitia, qui longe l'actuelle autoroute A9)." (p.27)
"Cherchant à reconstituer un empire romain d'occident capable de rivaliser avec l'empire byzantin, [Charlemagne] s'emploie à conquérir un vaste empire territorial et à tenter d'unifier ses conquêtes. Le territoire français actuel est alors englobé dans le vaste Empire carolingien et ne possède pas d'unité propre, même si l'ancien royaume des Francs est toujours une entité culturellement reconnue (les sources parlent ainsi encore des "Francs" pour désigner ses habitants)." (p.27-28)
"La dynastie capétienne va véritablement faire naître le territoire français." (p.28)
"Le XVIIIe siècle, marqué par l'intensification des circulations nationales et internationales, se caractérise aussi par une amélioration du réseau des routes royales et des temps de transports: la contraction de l'espace-temps, qui s'est tant accélérée de nos jours, est en réalité déjà à l’œuvre, certes modestement, à cette époque. C'est ainsi que pour rejoindre Marseille depuis Paris, il faut environ 12 jours de diligence en 1765, puis environ 7 en 1780." (p.30)
"Les frontières de la France actuelle sont à peu près identiques à celles de la France au moment de la mort de Louis XIV (1715)." (p.31)
"Le principal déséquilibre territorial, qui est aussi le plus ancien, est celui entre Paris et la province [...]
Ce déséquilibre est un héritage très ancien, qui a commencé à se former au Moyen Age, lorsque les Capétiens entreprennent aux XIIIe et XIVe siècles une centralisation du pouvoir politique et économique à Paris dans le cadre d'un renforcement des prérogatives royales et donc d'une plus grande affirmation de l'Etat. Durant les siècles suivants, le pouvoir royal poursuit ce processus: qu'il s'agisse de Paris ou de Versailles, la monarchie française est une monarchie très centralisée et centralisatrice. La Révolution française renforce le poids politique et administratif de Paris, par exemple à travers la création des départements, tandis qu'avec la révolution industrielle du XIXe siècle la région parisienne devient un puissant centre industriel et la première région économique du pays, profitant aussi d'une forte croissance démographique qui provient essentiellement de l'exode rural, de nombreux paysans venant tenter leur chance à Paris et dans sa banlieue comme ouvriers. A cette époque, Paris est d'ailleurs, avec Londres, la seule ville millionnaire d'Europe." (p.38)
"Un autre déséquilibre traditionnel oppose l'est et l'ouest du territoire, le long d'une ligne fictive entre Le Havre et Marseille. Cette fameuse "ligne Le Havre / Marseille" s'est formée au cours du XIXe siècle dans le cadre de la révolution industrielle. Celle-ci s'est en effet surtout produite dans la partie est du territoire où sont alors apparue de grandes régions industrielles organisées autour des grandes villes: outre la région parisienne, il s'agit de la région lyonnaise, de la région marseillaise, des bassins miniers du nord, du nord-est (par exemple autour de Lille, Lens ou Metz) et du centre-est (Saint-Étienne, Le Creusot), etc. L'est du pays connaît donc une forte industrialisation associée à une rapide croissance urbaine. A l'opposé, la partie ouest, quant à elle, a été très peu concernée par la révolution industrielle, demeurant ainsi largement rurale et agricole, avec une croissance urbaine modérée et peu de véritables grandes villes en dehors de Toulouse, Bordeaux et Nantes." (p.39)
"A l'échelle nationale, le phénomène majeur, et nouveau, est l'attrait des régions du sud et de l'ouest à partir des années 1970-1980, ce qui se traduit par des flux migratoires intérieurs vers ces régions (PACA, Languedoc-Roussillon, Aquitaine, etc.) ; inversement, d'autres régions ont tendance à perdre des habitants." (p.39)
"L'expression, très utilisée en géographie, d' "organisation du territoire (ou de l'espace)", désigne la manière dont se répartissent les populations, les activités, les ressources et les grandes infrastructures sur un territoire donné, et qui évoluent en fonction des politiques d'aménagement et des dynamiques spatiales (les mobilités et les flux, l'urbanisation, la métropolisation, le développement des frontières, etc). L'organisation territoriale fait donc apparaître à la fois les évolutions et les héritages, en particulier en ce qui concerne les déséquilibres ou les disparités entre les espaces." (p.48)
"Les réseaux de transports sont nettement plus denses dans la partie est du territoire que dans la partie ouest où des régions comme Midi-Pyrénées ou l'Aquitaine font encore figure de périphéries mal reliées aux grands réseaux, surtout si l'on se place à l'échelle européenne." (p.50)
"L'autre clivage traditionnel, opposant l'est à l'ouest du territoire de part et d'autre d'une ligne Le Havre / Marseille, s'est encore plus atténué voire a quasiment disparu: en effet, les régions de l'ouest et du sud ayant connu un dynamisme très marqué depuis les années 1970, elles ont largement rattrapé leur retard et sont désormais largement urbanisées, métropolisées et industrialisées." (p.51)
"Le territoire français connaît un processus croissant de métropolisation c'est-à-dire que les grandes villes deviennent des métropoles et que ces dernières forment un réseau, où elles sont hiérarchisées entre elles (Paris étant au sommet), qui constitue désormais l'élément majeur de l'organisation du territoire français. Ce phénomène se traduit donc spatialement, à l'échelle du territoire national, par une logique de polarisation et d'archipelisation, ce qui donne ainsi l'image d'un territoire désormais dominé par ses métropoles qui forment autant de centres (d'où la notion de polycentrisme) dynamiques capables de soutenir la concurrence mondiale. [...]
A l'échelle nationale, la ligne de fracture n'est désormais plus tant entre Paris et le reste du territoire, mais entre les métropoles d'une part et le reste du territoire d'autre part." (p.51)
"Les disparités sont, par ailleurs, de plus en plus marquées à l'échelle intra-urbaine c'est-à-dire à l'intérieur des aires urbaines et à l'intérieur des villes, d'autant plus lorsqu'il s'agit de métropoles. Il s'agit là d'une ligne de fracture qui n'est certes pas nouvelle, les villes n'ayant jamais été socialement homogènes, mais qui s'est renforcée ces dernières années surtout au niveau socio-économique. Les espaces urbains sont ainsi marqués par des processus de ségrégation socio-spatiale, plus ou moins visibles dans les paysages, avec une séparation croissante entre les différentes partie de la ville ou de l'aire urbaine en fonction des catégories sociales et des niveaux de richesses." (p.53)
"Les territoires productifs "gagnants" sont ceux qui ont su tirer partie de la mondialisation en s'adaptant. Sans prétendre à l'exhaustivité, on peut par exemple retenir les cas suivants:
-les espaces agricoles performants, intégrés sur les marchés européens et mondiaux, dégageant de hauts rendements et reposant sur des exploitations agricoles solides. Il s'agit en particulier des régions de "grande culture" du Bassin parisien, véritable "grenier à blé" de l'Europe, ou bien encore des espaces de l'élevage intensif comme en Bretagne qui en est l'archétype (élevages intensifs de porcs et de volailles) ;
-les espaces industriels tertiaires, en particulier ceux appartenant au tertiaire "supérieur" regroupant les emplois les plus qualifiés considérés comme "stratégiques": hautes technologies, recherche, innovation, services financiers, etc. Ces espaces sont très majoritairement localisés dans et à proximité des métropoles, qui offrent les meilleures conditions de travail et d'accessibilité (connexion aux grands réseaux de communication de niveau européen et mondial), ce qui ne fait que renforcer le processus de métropolisation." (p.54)
"La population française a connu au cours de ces trente ou quarante dernières années trois dynamiques majeures: une croissance démographique soutenue, une tendance toujours plus forte à l'urbanisation et à la métropolisation, une mobilité de plus en plus marquée y compris à l'échelle locale avec le processus de périurbanisation qui contraint les habitants à des déplacements allongés entre leur domicile et leur lieu de travail." (p.64)
-Yannick Clavé, Géographie de la France, Éditions Ellipses, 2013, 384 pages.
-Où se localisent les phénomènes étudiés ? Pourquoi là et pas ailleurs ?
-Cette ou ces localisations évoluent-elles, et si oui sous l'effet de quelles dynamiques ?
-Comment s'organise l'espace ou le territoire que je dois étudier ?
-Qui intervient dans cette organisation ?" (p.6)
"La notion de conflits d'acteurs peut aussi être mobilisée, lorsque les acteurs s'opposent dans un espace pour différentes raisons." (p.6)
"Si le terme "France est seul [dans l'intitulé], sans aucune autre précision, alors l'outre-mer fait partie du sujet même si il est malgré tout possible de l'exclure du sujet à condition de l'argumenter en introduction, en mentionnant par exemple que le phénomène à étudier est très marginal ou inexistant en outre-mer." (p.7)
"[Analyse du sujet en introduction]: Définitions des termes clefs, mise en relation de ces termes, chiffres clefs (éventuellement), délimitation spatiale [...], enjeux principaux." (p.
[P.9: Plan analytique et plan multiscalaire ; et p.10: plan thématique et plan typologique]
"Un croquis est une représentation cartographique qui prend en compte la réalité d'un espace, sans déformation, tandis qu'un schéma, lui, est une forme de représentation beaucoup plus simplifiée (faire par exemple une forme d'hexagone pour représenter le territoire français).
[...] Le croquis de synthèse s'apparente à une carte thématique simplifiée et constitue une réponse graphique au sujet de la dissertation. [...]
Doit avoir un titre, inscrit sur le fond de carte (reprendre l'intitulé du sujet), ainsi qu'une échelle (en général déjà indiquée) et une orientation (le nord géographique.
-Il doit posséder une légende dans laquelle les figurés sont classés et hiérarchisés, dans des parties et sous-parties: la meilleure solution est de reprendre le plan de sa dissertation pour construire la légende du croquis, car cela montre au correcteur que vous êtes capable de traduire géographiquement votre raisonnement géographique ;
-le croquis ne doit pas être surchargé, ni trop "vide": il faut entre une douzaine et une vingtaine de figurés environ [...]
Les petits croquis intermédiaires sont ceux qui sont intégrés à l'argumentation dans le cours du développement. Si la réalisation de la carte de synthèse doit être prioritaire, réaliser un ou deux croquis intermédiaires peut être un élément de valorisation de la copie. Ces croquis portent en général sur l'échelle régionale ou l'échelle locale. Leur réalisation obéit aux mêmes règles énoncées précédemment, même si leur réalisation doit prendre moins de temps que la carte de synthèse:
-ne pas les faire sur un espace trop restreint: ne pas hésiter à prendre la moitié d'une page, le correcteur préférant largement cette solution à de minuscules croquis quasiment illisibles ;
-commencer par tracer un cadre à l'intérieur duquel sera réalisé le croquis ;
-indiquer un titre, une échelle (même approximative) et une orientation ;
-faire une légende, qui ne peut ne contenir que quelques figurés.
[...]
Sauf à prendre le risque de bâcler la réalisation des illustrations, il faut consacrer environ un quart du temps de l'épreuve à cette tâche, soit par exemple environ une heure pour une épreuve qui en dure quatre." (pp.12-13)
"La géographie étant, dans son acception la plus large, l'étude de l'action des hommes et sociétés sur l'espace sur lequel ils vivent, ces notions d' "espace" et de "territoire" sont évidemment à la base de la discipline géographique mais ne doivent pas être pour autant confondues.
-Le terme "espace" désigne, très simplement et de manière neutre, une portion quelconque de la surface terrestre. Cet espace est composé de lieux, c'est-à-dire de points de la surface terrestre localisés par des coordonnées en longitude et en latitude ; le terme de "lieu" répond donc à une logique d'implantation ponctuelle (un point précisément localisé), tandis que celui d' "espace" s'inscrit plutôt dans une logique zonale (une zone, ce qui implique un certain étalement).
-Le terme de "territoire", lui, désigne un espace qui a été approprié par une société, c'est-à-dire qui est aménagé, contrôlé, borné par des frontières et géré par un pouvoir politique, fréquemment l'Etat. Le passage de l'espace au territoire résulte donc d'un processus de territorialisation, au cours duquel la société s'approprie progressivement son espace et qui dure, en règle générale, plusieurs siècles pour un Etat-nation comme la France." (p.23)
"Les Celtes, loin d'être unis, sont divisés en plusieurs groupes ethno-linguistiques parmi lesquels se trouvent les Gaulois [...] Redoutables guerriers, ils ont à plusieurs reprises menacés la puissance romaine, en particulier en 390 av. J.C., lorsqu'ils ont réussi à pénétrer dans Rome et à la saccager, provoquant un immense traumatisme chez les Romains qui redouteront toujours cette menace gauloise." (p.25)
"Dans son ouvrage La Guerre des Gaules, César fait une opposition très nette entre les Gaulois d'une part et les Germains d'autre part, et fixe la "frontière" entre ces deux peuples au niveau du Rhin: ainsi, d'après César, la frontière entre la Gaule et la Germanie est "naturellement" le Rhin. Ce choix est pourtant une décision purement arbitraire et personnelle de César qui a ainsi, selon l'heureuse expression de l'historien C. Goudineau, "inventé la Gaule" dans la mesure où il est le premier à délimiter un territoire gaulois et à l'opposer à une Germanie. Cette "invention" est en quelque sorte une ruse politique voire politicienne de César: en fin politique qu'il était, il savait que ses succès militaires auraient un impact considérable à Rome, où il n'a pas renoncé à ses ambitions politiques face à son ennemi de toujours, Pompée ; en fixant cette frontière au niveau du fleuve, il masque ainsi ses échecs à conquérir les peuples situés au-delà du Rhin et présente ses conquêtes comme formant un ensemble cohérent. Cette séparation artificielle entre une Gaule et une Germanie, outre qu'elle donne l'image -fausse- de deux ensembles homogènes, ne se justifie pas ni du point de vue topographique (certes, le Rhin créé une discontinuité spatiale, mais qui n'est pas majeure) ni du point de vue culturel voire ethnique, Gaulois et Germains appartenant à l'aire culturelle celte avec un certain nombre de traits caractéristiques communs. Même si on l'a longtemps écrit et enseigné, au moins jusqu'aux années 1960-1970, il n'est plus possible aujourd'hui de considérer la Gaule comme l'ancêtre de la France, ni les Gaulois comme "nos ancêtres".
Quoi qu'il en soit, cette frontière césarienne s'impose rapidement, et, dans le cadre de la domination romaine, devient la frontière administrative entre les provinces gauloises d'une part et les provinces germaniques d'autre part." (p.26)
"Les Celtes ont [...] bien avant l'arrivée des Romains, édifié les premières structures urbaines qu'historiens et archéologues considèrent aujourd'hui comme les villes les plus anciennes d'Europe: il s'agit des oppida (oppidium au singulier), comme Bibracte, Gergovie, Alésia ou bien encore Entremont à proximité d'Aix-en-Province. Les Romains ont poursuivis et amplifié le processus d'urbanisation du territoire gaulois, en édifiant de nouveaux espaces urbains, appelés désormais cités, par exemple Arles fondée par César en 46. av. J.C., ou en réaménageant les anciens oppida celtes. Il est symptomatique de constater aujourd'hui que non seulement la majorité des villes françaises sont d'origine antique mais qu'en plus, à l'échelle intra-urbaine, l'organisation de la ville reprend en partie celle de l'époque antique (centre historique qui correspond à la ville antique même si la strate médiévale l'a souvent fait disparaître, principaux axes qui reprennent en partie le tracé des anciens axes gallo-romains, etc.)." (p.26-27)
"Les Celtes ont également aménagé un premier réseau routier, qui est ensuite complété et densifié par les Romains. Ceux-ci ont en effet besoin d'un réseau viaire (les viae sont les voies romaines) solide, reliant les différentes cités entre elles mais aussi la Gaule aux autres provinces de l'Empire, provinces espagnoles et germaniques en particulier) et à l'Italie, à la fois dans un but stratégique et militaire (faciliter la circulation des soldats à l'intérieur des provinces et vers les frontières de l'Empire), dans un but administratif au sens large (permettre une circulation efficace des nombreux fonctionnaires, de la correspondance officielle et plus largement de l'information) et dans un objectif économique (encourager les circulations des marchandises et des commerçants). Si l'on compare une carte des réseaux routiers de la Gaule romaine avec une carte des réseaux actuels, on constate aisément une continuité: les grands axes de transports d'aujourd'hui reprennent les tracés de l'époque romaine, par exemple en vallé du Rhône ou le long de la Méditerranée vers l'Espagne (avec la célèbre via Domitia, qui longe l'actuelle autoroute A9)." (p.27)
"Cherchant à reconstituer un empire romain d'occident capable de rivaliser avec l'empire byzantin, [Charlemagne] s'emploie à conquérir un vaste empire territorial et à tenter d'unifier ses conquêtes. Le territoire français actuel est alors englobé dans le vaste Empire carolingien et ne possède pas d'unité propre, même si l'ancien royaume des Francs est toujours une entité culturellement reconnue (les sources parlent ainsi encore des "Francs" pour désigner ses habitants)." (p.27-28)
"La dynastie capétienne va véritablement faire naître le territoire français." (p.28)
"Le XVIIIe siècle, marqué par l'intensification des circulations nationales et internationales, se caractérise aussi par une amélioration du réseau des routes royales et des temps de transports: la contraction de l'espace-temps, qui s'est tant accélérée de nos jours, est en réalité déjà à l’œuvre, certes modestement, à cette époque. C'est ainsi que pour rejoindre Marseille depuis Paris, il faut environ 12 jours de diligence en 1765, puis environ 7 en 1780." (p.30)
"Les frontières de la France actuelle sont à peu près identiques à celles de la France au moment de la mort de Louis XIV (1715)." (p.31)
"Le principal déséquilibre territorial, qui est aussi le plus ancien, est celui entre Paris et la province [...]
Ce déséquilibre est un héritage très ancien, qui a commencé à se former au Moyen Age, lorsque les Capétiens entreprennent aux XIIIe et XIVe siècles une centralisation du pouvoir politique et économique à Paris dans le cadre d'un renforcement des prérogatives royales et donc d'une plus grande affirmation de l'Etat. Durant les siècles suivants, le pouvoir royal poursuit ce processus: qu'il s'agisse de Paris ou de Versailles, la monarchie française est une monarchie très centralisée et centralisatrice. La Révolution française renforce le poids politique et administratif de Paris, par exemple à travers la création des départements, tandis qu'avec la révolution industrielle du XIXe siècle la région parisienne devient un puissant centre industriel et la première région économique du pays, profitant aussi d'une forte croissance démographique qui provient essentiellement de l'exode rural, de nombreux paysans venant tenter leur chance à Paris et dans sa banlieue comme ouvriers. A cette époque, Paris est d'ailleurs, avec Londres, la seule ville millionnaire d'Europe." (p.38)
"Un autre déséquilibre traditionnel oppose l'est et l'ouest du territoire, le long d'une ligne fictive entre Le Havre et Marseille. Cette fameuse "ligne Le Havre / Marseille" s'est formée au cours du XIXe siècle dans le cadre de la révolution industrielle. Celle-ci s'est en effet surtout produite dans la partie est du territoire où sont alors apparue de grandes régions industrielles organisées autour des grandes villes: outre la région parisienne, il s'agit de la région lyonnaise, de la région marseillaise, des bassins miniers du nord, du nord-est (par exemple autour de Lille, Lens ou Metz) et du centre-est (Saint-Étienne, Le Creusot), etc. L'est du pays connaît donc une forte industrialisation associée à une rapide croissance urbaine. A l'opposé, la partie ouest, quant à elle, a été très peu concernée par la révolution industrielle, demeurant ainsi largement rurale et agricole, avec une croissance urbaine modérée et peu de véritables grandes villes en dehors de Toulouse, Bordeaux et Nantes." (p.39)
"A l'échelle nationale, le phénomène majeur, et nouveau, est l'attrait des régions du sud et de l'ouest à partir des années 1970-1980, ce qui se traduit par des flux migratoires intérieurs vers ces régions (PACA, Languedoc-Roussillon, Aquitaine, etc.) ; inversement, d'autres régions ont tendance à perdre des habitants." (p.39)
"L'expression, très utilisée en géographie, d' "organisation du territoire (ou de l'espace)", désigne la manière dont se répartissent les populations, les activités, les ressources et les grandes infrastructures sur un territoire donné, et qui évoluent en fonction des politiques d'aménagement et des dynamiques spatiales (les mobilités et les flux, l'urbanisation, la métropolisation, le développement des frontières, etc). L'organisation territoriale fait donc apparaître à la fois les évolutions et les héritages, en particulier en ce qui concerne les déséquilibres ou les disparités entre les espaces." (p.48)
"Les réseaux de transports sont nettement plus denses dans la partie est du territoire que dans la partie ouest où des régions comme Midi-Pyrénées ou l'Aquitaine font encore figure de périphéries mal reliées aux grands réseaux, surtout si l'on se place à l'échelle européenne." (p.50)
"L'autre clivage traditionnel, opposant l'est à l'ouest du territoire de part et d'autre d'une ligne Le Havre / Marseille, s'est encore plus atténué voire a quasiment disparu: en effet, les régions de l'ouest et du sud ayant connu un dynamisme très marqué depuis les années 1970, elles ont largement rattrapé leur retard et sont désormais largement urbanisées, métropolisées et industrialisées." (p.51)
"Le territoire français connaît un processus croissant de métropolisation c'est-à-dire que les grandes villes deviennent des métropoles et que ces dernières forment un réseau, où elles sont hiérarchisées entre elles (Paris étant au sommet), qui constitue désormais l'élément majeur de l'organisation du territoire français. Ce phénomène se traduit donc spatialement, à l'échelle du territoire national, par une logique de polarisation et d'archipelisation, ce qui donne ainsi l'image d'un territoire désormais dominé par ses métropoles qui forment autant de centres (d'où la notion de polycentrisme) dynamiques capables de soutenir la concurrence mondiale. [...]
A l'échelle nationale, la ligne de fracture n'est désormais plus tant entre Paris et le reste du territoire, mais entre les métropoles d'une part et le reste du territoire d'autre part." (p.51)
"Les disparités sont, par ailleurs, de plus en plus marquées à l'échelle intra-urbaine c'est-à-dire à l'intérieur des aires urbaines et à l'intérieur des villes, d'autant plus lorsqu'il s'agit de métropoles. Il s'agit là d'une ligne de fracture qui n'est certes pas nouvelle, les villes n'ayant jamais été socialement homogènes, mais qui s'est renforcée ces dernières années surtout au niveau socio-économique. Les espaces urbains sont ainsi marqués par des processus de ségrégation socio-spatiale, plus ou moins visibles dans les paysages, avec une séparation croissante entre les différentes partie de la ville ou de l'aire urbaine en fonction des catégories sociales et des niveaux de richesses." (p.53)
"Les territoires productifs "gagnants" sont ceux qui ont su tirer partie de la mondialisation en s'adaptant. Sans prétendre à l'exhaustivité, on peut par exemple retenir les cas suivants:
-les espaces agricoles performants, intégrés sur les marchés européens et mondiaux, dégageant de hauts rendements et reposant sur des exploitations agricoles solides. Il s'agit en particulier des régions de "grande culture" du Bassin parisien, véritable "grenier à blé" de l'Europe, ou bien encore des espaces de l'élevage intensif comme en Bretagne qui en est l'archétype (élevages intensifs de porcs et de volailles) ;
-les espaces industriels tertiaires, en particulier ceux appartenant au tertiaire "supérieur" regroupant les emplois les plus qualifiés considérés comme "stratégiques": hautes technologies, recherche, innovation, services financiers, etc. Ces espaces sont très majoritairement localisés dans et à proximité des métropoles, qui offrent les meilleures conditions de travail et d'accessibilité (connexion aux grands réseaux de communication de niveau européen et mondial), ce qui ne fait que renforcer le processus de métropolisation." (p.54)
"La population française a connu au cours de ces trente ou quarante dernières années trois dynamiques majeures: une croissance démographique soutenue, une tendance toujours plus forte à l'urbanisation et à la métropolisation, une mobilité de plus en plus marquée y compris à l'échelle locale avec le processus de périurbanisation qui contraint les habitants à des déplacements allongés entre leur domicile et leur lieu de travail." (p.64)
-Yannick Clavé, Géographie de la France, Éditions Ellipses, 2013, 384 pages.