"Défi que d'exposer, dans le contexte d'une crise qui peut devenir grave, les problèmes géopolitiques de son propre pays à ses concitoyens." (p.
"La proportion des abstentions s'accroît depuis une quinzaine d'années -30% en 1997-, et cela est le signe d'un profond malaise politique.
Pour bien des Français, celui-ci résulte moins de l'orchestration de diverses affaires de corruption que des désillusions successives en matière de lutte contre le chômage et de la disparition (ou de l'éclipse) d'une espérance messianique révolutionnaire, en l’occurrence le socialisme ou plutôt le communisme. Mais la disparition de la "menace communiste" a aussi démobilisé une partie de ceux qui entendaient s'y opposer pour défendre la liberté." (p.12)
"Le problème de l'immigration occupe désormais une place majeure dans la vie politique française." (p.16)
"Je définis comme nationalistes, qu'il s'agisse du présent ou de périodes plus anciennes, des gens qui, à l'instigation d'un parti organisé, se proclament les vrais et les meilleurs Français en dénonçant -prétendument au nom de la nation et de ses intérêts- la présence dans notre pays d'une catégorie d'habitants qu'ils qualifient de traîtres ou d'étrangers." (p.16-17)
"Il ne suffit pas de dénoncer les pratiques et les déclarations du Front national, il faut aussi comprendre les raisons pour lesquelles ce mouvement a pris une telle influence dans notre pays. L'ampleur tout à la fois du chômage et de l'immigration n'est pas une explication suffisante, comme le prouve le cas de l'Allemagne où la proportion des chômeurs et des immigrés est sensiblement plus forte qu'en France. [...]
Nous verrons que les causes du succès du Front national sont complexes et qu'elles tiennent à l'évolution du contexte national et international depuis quinze ans. Mais on peut avancer que son audience tient pour une grande part au fait qu'il est le seul mouvement politique à invoquer la nation, à s'en prétendre le défenseur." (p.20)
"Les timides débuts de l'apparition du mot "géopolitique" datent en effet à peine d'une vingtaine d'années et, sans avoir été d'abord clairement défini, il a été utilisé par des journalistes: leur rôle a été important dans sa diffusion et ils lui ont donné implicitement des significations assez variables selon les situations qu'ils avaient à commenter." (p.25)
"Le succès de certains mots et des idées nouvelles qu'ils expriment plus ou moins clairement (avec des souvenirs qui réapparaissent) n'est pas sans répondre à une nouvelle conjoncture au plan national et international, comme à l'état d'esprit d'une notable partie de l'opinion, à des besoins latents de dire autrement les choses et d'envisager d'une autre façon les situations pour mieux les comprendre." (p.25)
"Les hommes et les femmes qui actuellement abordent la cinquantaine avaient vingt ans en mai 68, et leurs aspirations d'alors continuent de peser lourd dans une sorte de refus de la nation." (p.26)
"Geo-politik: si l'abréviation du mot "géographie" évoque nettement le territoire, on peut être surpris de l'emploi du mot "politique" qui, lui, fait normalement référence aux problèmes de la cité (polis) et au rôle des citoyens. Or c'est surtout par la guerre que les rivalités territoriales se traitent entre les Etats. Les géographes allemands auraient plutôt dû forger le terme "géo-polémologie" ou "géo-stratégie". Je sais bien qu'en Allemagne on lisait beaucoup Clausewitz et que, dans son livre De la guerre enfin publié en 1832, il écrit cette phrase devenue célèbre: "La guerre n'est qu'une partie des rapports politiques, elle n'est rien d'autre que la continuation des relations politiques avec l'appui d'autres moyens". Cette formule fut abondamment reprise dès 1915 par Lénine." (p.29)
"Si le terme "géopolitique" fut utilisé en 1918 par les géographes allemands lors de la chute du IIe Reich, c'est qu'au milieu de cette crise un grand débat politique opposait alors leurs concitoyens les uns aux autres sur ce qu'il concevait de faire face aux exigences des vainqueurs: quelles régions fallait-il accepter de céder ? quelles autres fallait-il absolument conserver, quitte à reprendre la guerre ? fallait-il signer le traité de Versailles en espérant que sa révision serait possible ? Ce débat, assorti de multiples publications, continua durant toutes les années 1920, jusqu'à ce que le parti national-socialiste, qui l'avait grandement utilisé, y mît fin après 1933 en proclamant la géopolitique science allemande au service de ses ambitions et de ses volte-face: c'est ainsi que les "lois de la géopolitique" (sic) furent soudainement invoquées pour annoncer le pacte germano-soviétique d'août 1939, alors que la veille encore les "judéo-bolcheviks" étaient présentés comme les pires adversaires du peuple allemand...
Au lendemain du conflit, dès les débuts de la guerre froide, le mot "géopolitique" fut considéré comme d'essence nazie, et son emploi fut proscrit. A l'Est comme à l'Ouest, les deux superpuissances ne tenaient pas à ce que l'on reparle trop de nations et de territoires dans leurs zones d'influence respectives. Cela ne les empêchait pas de prendre des décisions -comme le partage de Yalta ou le tracé des nouvelles frontières de la Pologne- que l'on qualifierait aujourd'hui sans conteste de géopolitiques, mais le mot était proscrit.
Il fallut plus de trente ans pour que, sur une toute autre aire de conflit, l'Indochine, le mot "géopolitique" réapparût. En dépit du tabou qui en interdisait l'emploi (surtout pour les affaires européennes), il revint sans susciter de critiques, dans l'étonnement provoqué par la guerre Vietnam-Cambodge.
Il fut ensuite utilisé de plus en plus souvent pour désigner des rivalités moins surprenantes: la guerre Iran-Irak, le conflit israélo-arabe, la guerre du Liban, la guerre d'Afghanistan, le conflit du Sahara occidental, etc. "Géopolitique" devint, grâce aux journalistes, un terme à la mode et apparut alors, plus ou moins confusément, comme une façon nouvelle d'analyser les conflits, en accordant autant d'importance aux cartes, aux enjeux territoriaux et aux rivalités locales de pouvoir qu'aux idéologies et au grand affrontement planétaire du capitalisme et du communisme." (p.30-31)
"Cet intérêt soudain des journalistes pour ce qu'on appelle désormais les questions géopolitiques, les drames géopolitiques, etc., attira l'attention d'un petit groupe de jeunes géographes parisiens, ceux de la revue Hérodote, qui s'intéressaient depuis plusieurs années à ce même genre de problèmes, notamment dans les pays du tiers monde, au Vietnam, en Amérique latine, au Maghreb, pays dans lesquels j'étais personnellement impliqué de diverses façons. Mais il n'était pas question pour eux d'user du mot "géopolitique" qui, à leurs yeux comme à ceux de tous les membres de leur corporation, symbolisait alors la pire déviation du raisonnement géographique. Ces géographes, bien qu'universitaires, avaient de la géographie une conception très "active" (comme disait Pierre George) et déploraient qu'à l'Université l'analyse des problèmes politiques, et notamment des rivalités territoriales, fût depuis des décennies implicitement mais systématiquement écartée. A telle enseigne que certains maîtres de la géographie universitaire ont pu dire qu'étudier des frontières, "ce [n'était] pas de la géographie". Pourtant, celles-ci figurent bien sur les cartes et certaines ont même été tracées par des géographes (mais ils n'étaient pas professeurs). Les géographes d'Hérodote étaient donc partis en guerre en 1976 contre cette conception atrophiée de la géographie et l'image fastidieuse de celle-ci qui s'étaient établies dans les universités.
C'est alors qu'ils redécouvrirent l’œuvre énorme du très grand géographe libertaire Élisée Reclus (1830-1905), tombée dans l'oubli en dépit de tout son intérêt et de toute sa modernité: elle traite en particulier des conflits territoriaux avec une grande précision, et c'est la raison pour laquelle les universitaires l'escamotèrent par la suite. Mais Reclus n'était pas professeur, puisqu'il avait été proscrit après la Commune de Paris. Pourtant, en dépit de la taille de ses ouvrages, son œuvre considérable -sa Géographie universelle et L'Homme et la Terre, notamment- eut un très grand nombre de lecteurs, car elle était vendue et diffusée en fascicules qui pouvaient être reliés ensuite. Non seulement Reclus a traité en géographe et en penseur politique des conflits aussi bien entre les puissances impérialistes qu'entre les peuples colonisés, mais ses conceptions libertaires ont fait qu'il a présenté de façon critique et équitable les mobiles et les arguments de chacun des protagonistes de ces conflits.
Je me suis largement inspiré d'Élisée Reclus et j'ai en quelque sorte développé et systématisé sa démarche pour l'analyse des rivalités de pouvoir sur des territoires, en construisant une méthode permettant de confronter les arguments (fussent-ils tout à fait de mauvaise foi) que les dirigeants destinent habituellement à leurs partisans et à l'opinion internationale." (p.31-32)
"Les définitions habituelles de la nation [...] ne font guère référence à un territoire, et surtout pas à son territoire. Dans plusieurs d'entre elles, celui-ci est même complètement passé sous silence ; c'est notamment le cas de la définition d'Ernest Renan." (p.37)
"Non seulement la nation est une idée géopolitique [...] mais c'est le concept géopolitique fondamental. En effet, c'est pour la défense ou la reconquête et la libération d'une partie du territoire national que l'Etat-nation, mais aussi la nation même dépourvue d'Etat parce qu'elle n'était pas encore indépendante, se sont lancés dans des guerres bien souvent héroïques, effroyables et ruineuses en vérité." (p.38)
"Je dirais pour ma part qu'en termes d'évolution historique, pour un même groupe de population parlant à peu près la même langue et occupant le même territoire, la différence que l'on peut faire entre l'époque où "il est un peuple" et celle où "il devient nation" tient essentiellement à l'apparition et à la diffusion de l'idée d'indépendance.
En se référant à de nombreux exemples historiques, en Europe et surtout dans les régions du tiers monde qui ont été soumises à une domination coloniale, on peut dire qu'un peuple, même s'il est conscient des différences avec ses voisins, ne se pose pas tellement le problème de son indépendance (ou une très petite proportion de la population seulement se pose cette question). Notamment, il accepte (ou semble accepter) d'être dirigé par un souverain d'origine étrangère qui parle une autre langue. [...]
En revanche, même si une population n'est pas encore indépendante, c'est-à-dire même s'il n'y a pas encore d'Etat indépendant où l'on parle sa langue, elle est à mon sens déjà une nation lorsque les catégories sociales les plus "éclairées", peut-on dire, commencent à se poser le problème de l'indépendance et à trouver anormal et illégitime d'être dirigées par des étrangers. A partir de ce moment-là, l'indépendance va devenir l'enjeu primordial, et progressivement cette population, malgré ses contradictions internes, se lancera dans toute une série de luttes pour y parvenir, en dépit des pertes qui en résultent." (p.39-40)
"Si les populations urbaines d'Alsace et du nord de la Lorraine (Metz notamment) étaient pour une grande part francophones, les populations rurales étaient alors très majoritairement de langue et de culture germaniques. En 1871, le Reich s'estime donc en droit de les annexer." (p.45)
"Étrange défaite en effet, dont les causes profondes n'ont jamais été clairement établies." (p.50)
"Les Européens d'Algérie ne se sont pas tenus à l'écart de la vie politique française. Ils y interviennent même activement, notamment lors de l'affaire Dreyfus qui leur donne le prétexte de mener une campagne antisémite forcenée contre les Juifs algériens devenus citoyens français depuis 1870. C'est comme député d'Alger qu'entre au Parlement en 1898 Édouard Drumont dont le livre La France juive (1886), qui a déjà connu un énorme succès politique, redouble encore d'influence durant l'affaire Dreyfus." (p.54)
"Après la défaite de 1870, il est décidé que l'histoire et la géographie doivent faire partie de l'enseignement primaire et a fortiori des lycées, pour lesquels il faut former des professeurs d'histoire et de géographie dans les universités. Bientôt le Tour de France de deux enfants (1877) deviendra, pour près de quarante ans, le livre de lecture courante pour la plupart des petits Français. Il s'agit d'un manuel d'instruction civique républicaine et de "géopolitique" patriotique: la découverte des diverses régions de France et de leur histoire par deux petits Lorrains chassés de chez eux par les Prussiens et qui sont à la recherche d'un oncle itinérant. Ce livre a inculqué un sentiment et une idée de la France qui expliquent, parmi d'autres facteurs, le courage et l'abnégation de ces millions de paysans qui furent les soldats de la Grande Guerre." (p.82-83)
"L'idée de nation dans sa complexité et dans la richesse de son évolution historique ne doit pas être réduite aux slogans nationalistes, ni aux schémas de ses contempteurs. Si elle a été dans le passé un argument ou un prétexte pour des tyrannies, des oppressions et des persécutions politiques, elle a signifié aussi pour un grand nombre d'hommes l'indépendante et la liberté." (p.91)
"De graves difficultés géopolitiques apparaissent lorsque tel ou tel de ces mouvements culturels, sous prétexte d'assurer sa propre promotion et sa cohésion, demande qu'une reconnaissance officielle assortie de financement lui soit accordée, puis qu'un territoire -qu'il s'agisse de région ou de quartier- lui soit reconnu et que des quotas lui soient réservés dans certaines instances ou dans certains emplois." (p.92)
"Depuis la déclaration de guerre, au printemps 1792, l'armée française n'avait cessé de subir des revers et s'était même débandée plusieurs fois. Lorsque, à Valmy, les Français crient "Vive la nation !", ce n'est pas par arrogance nationaliste -et pour se féliciter à l'avance d'une victoire assurée, mais tout au contraire pour se cramponner au terrain et ne pas fuir comme ils l'ont déjà fait plusieurs fois depuis les débuts de cette guerre mal engagée." (p.94)
"Il est révélateur qu'un volumineux Traité de science politique qui fait autorité (quatre gros volumes dirigés par Madeleine Grawitz et Jean Leca, PUF, 1985) ne comprenne aucun chapitre ni même paragraphe traitant de la nation, l'index n'indiquant que trois brèves allusions ! Pas même un passage pour expliquer un tel silence. Preuve que la nation est considérée par ces spécialistes du politique comme une idée complètement dépassée, voire indigne de propos tant soit peu "scientifiques"." (p.99)
"Pour nombre d'intellectuels le thème du progrès est désormais un leurre qu'il faut dénoncer: le XXe siècle est l'ère des illusions, des catastrophes et des naufrages, la modernité n'a plus aucun sens, et quand on est vraiment "branché", on parle de la "postmodernité"." (p.113)
"[Depuis 1945], la croissance de la France a été brillante, beaucoup plus forte que celle de la Grande-Bretagne pour laquelle l'idée de déclin est plus proche des réalités." (p.113)
"Les historiens de la société japonaise soulignent aujourd'hui que l'on peut utilement comparer les problèmes structurels du Japon féodal avant la "révolution" Meiji (1868) et ceux de la France à la fin de l'Ancien Régime. [...]
Le Japon est en effet le seul cas de véritable féodalité hors de l'Europe occidentale. [...]
Lorsque le Japon fut contraint de s'ouvrir sous la pression militaire occidentale (en 1865), ce sont les samuraï -ou du moins la majeure partie d'entre eux- qui, devant l'imminence de la domination étrangère, se dressèrent contre l'impuissance de l'appareil féodal et renoncèrent d'eux-mêmes à leurs privilèges féodaux comme à leurs fiefs, obligeant les récalcitrant à faire de même, afin d'assurer, par cette révolution sous l'égide d'une autorité impériale restaurée, une cohésion nouvelle de la nation, son indépendance et l'accélération de nouvelles étapes de sa modernisation. Les samuraï conservèrent ainsi leur rôle dirigeant et, devenus les cadres administratifs et surtout militaires d'un Etat bureaucratique, poussèrent le pays dans un effort méthodique de développement, puis, hélas ! dans une expansion impérialiste qui devait aboutir à la catastrophe de 1945." (p.118-119)
"Au XIXe siècle et dans la première moitié du XXe, [la croissance démographique française fut] très inférieure à celle des Etats voisins, notamment l'Allemagne où la population, en dépit d'une forte émigration, s'accroissait rapidement.
C'est à la demande de l'état-major, pour tenter de pallier l'insuffisance numérique de l'armée française face à l'armée allemande, qu'est passée en 1890 la loi entraînant la naturalisation automatique des enfants nés en France de famille immigrée, afin qu'ils accomplissent le service militaire." (p.129)
"Littré, dont le rôle intellectuel et politique fut considérable au début de la IIIe République." (p.142)
"La conférence de Renan, le 11 mars 1882, est à replacer dans le contexte des "grandes lois Jules Ferry": celle qui institue l'instruction primaire laïque, gratuite et obligatoire sera votée onze jours plus tard ; elle a été précédée par les lois sur la liberté de la presse (1881) et de réunion, et suivie par celle autorisant les syndicats (1884).
Mais Jules Ferry, c'est aussi la politique coloniale, notamment en Tunisie et en Indochine, et la droite la dénonce sous prétexte qu'on disperse ainsi l'armée qui devrait rester tournée contre l'Allemagne. Si la droite s'oppose autant à la politique coloniale, c'est parce qu'à ce moment-là c'est la gauche qui la conduit et qui en retire quelques avantage dans l'opinion et même auprès des cadres de l'armée. En fait, l'hostilité de la droite, qui renversera Ferry en 1885 sous le prétexte d'une opération mal menée au Tonkin, tient pour l'essentiel aux lois sur les syndicats, sur la liberté de la presse, et surtout aux textes qui réduisent le rôle des congrégations religieuses dans l'enseignement des jeunes filles et instaurent l'instruction primaire laïque, gratuite et obligatoire." (p.159)
"Le fait que l'Etat n'assure plus en Corse la protection de citoyens contre les agissements de bandes armées qui se réclament d'un mouvement ouvertement séparatiste et pourtant minoritaire en dit long sur ce que d'aucuns appellent la crise de l'Etat-nation. Cela veut dire que des Français peuvent désormais être chassés d'un lieu ou d'une région faisant jusqu'alors partie du territoire de la République française si des groupes politiques, prétendant agir au nom d'une majorité ethnique locale, décident de pratiquer ce genre de "purification ethnique"." (p.218)
"Une grave contradiction se fait jour dans tous les pays développés entre la minorité privilégiée qui participe à la mondialisation financière et la majorité de concitoyens beaucoup moins fortunés dont la vie se déroule au niveau local et national. Cependant, selon les pays, cette contradiction est envisagée très différemment, compte tenu de leur histoire et de leurs traditions politiques.
Robert Reich considère que la "sécession" des riches est moins marquée au Japon et en Allemagne, où "le sens d'une culture commune, d'un héritage partagé et d'un destin commun est encore suffisamment fort pour inciter les profiteurs de la mondialisation à continuer d'aider les perdants", et pour maintenir les conditions d'une forte productivité et de capacités de développement pour l'ensemble de la population, ce qui est la condition du progrès pour l'avenir." (p.300-301)
-Yves Lacoste, Vive la Nation. Destin d'une idée géopolitique, Fayard, 1997, 339 pages.
"La proportion des abstentions s'accroît depuis une quinzaine d'années -30% en 1997-, et cela est le signe d'un profond malaise politique.
Pour bien des Français, celui-ci résulte moins de l'orchestration de diverses affaires de corruption que des désillusions successives en matière de lutte contre le chômage et de la disparition (ou de l'éclipse) d'une espérance messianique révolutionnaire, en l’occurrence le socialisme ou plutôt le communisme. Mais la disparition de la "menace communiste" a aussi démobilisé une partie de ceux qui entendaient s'y opposer pour défendre la liberté." (p.12)
"Le problème de l'immigration occupe désormais une place majeure dans la vie politique française." (p.16)
"Je définis comme nationalistes, qu'il s'agisse du présent ou de périodes plus anciennes, des gens qui, à l'instigation d'un parti organisé, se proclament les vrais et les meilleurs Français en dénonçant -prétendument au nom de la nation et de ses intérêts- la présence dans notre pays d'une catégorie d'habitants qu'ils qualifient de traîtres ou d'étrangers." (p.16-17)
"Il ne suffit pas de dénoncer les pratiques et les déclarations du Front national, il faut aussi comprendre les raisons pour lesquelles ce mouvement a pris une telle influence dans notre pays. L'ampleur tout à la fois du chômage et de l'immigration n'est pas une explication suffisante, comme le prouve le cas de l'Allemagne où la proportion des chômeurs et des immigrés est sensiblement plus forte qu'en France. [...]
Nous verrons que les causes du succès du Front national sont complexes et qu'elles tiennent à l'évolution du contexte national et international depuis quinze ans. Mais on peut avancer que son audience tient pour une grande part au fait qu'il est le seul mouvement politique à invoquer la nation, à s'en prétendre le défenseur." (p.20)
"Les timides débuts de l'apparition du mot "géopolitique" datent en effet à peine d'une vingtaine d'années et, sans avoir été d'abord clairement défini, il a été utilisé par des journalistes: leur rôle a été important dans sa diffusion et ils lui ont donné implicitement des significations assez variables selon les situations qu'ils avaient à commenter." (p.25)
"Le succès de certains mots et des idées nouvelles qu'ils expriment plus ou moins clairement (avec des souvenirs qui réapparaissent) n'est pas sans répondre à une nouvelle conjoncture au plan national et international, comme à l'état d'esprit d'une notable partie de l'opinion, à des besoins latents de dire autrement les choses et d'envisager d'une autre façon les situations pour mieux les comprendre." (p.25)
"Les hommes et les femmes qui actuellement abordent la cinquantaine avaient vingt ans en mai 68, et leurs aspirations d'alors continuent de peser lourd dans une sorte de refus de la nation." (p.26)
"Geo-politik: si l'abréviation du mot "géographie" évoque nettement le territoire, on peut être surpris de l'emploi du mot "politique" qui, lui, fait normalement référence aux problèmes de la cité (polis) et au rôle des citoyens. Or c'est surtout par la guerre que les rivalités territoriales se traitent entre les Etats. Les géographes allemands auraient plutôt dû forger le terme "géo-polémologie" ou "géo-stratégie". Je sais bien qu'en Allemagne on lisait beaucoup Clausewitz et que, dans son livre De la guerre enfin publié en 1832, il écrit cette phrase devenue célèbre: "La guerre n'est qu'une partie des rapports politiques, elle n'est rien d'autre que la continuation des relations politiques avec l'appui d'autres moyens". Cette formule fut abondamment reprise dès 1915 par Lénine." (p.29)
"Si le terme "géopolitique" fut utilisé en 1918 par les géographes allemands lors de la chute du IIe Reich, c'est qu'au milieu de cette crise un grand débat politique opposait alors leurs concitoyens les uns aux autres sur ce qu'il concevait de faire face aux exigences des vainqueurs: quelles régions fallait-il accepter de céder ? quelles autres fallait-il absolument conserver, quitte à reprendre la guerre ? fallait-il signer le traité de Versailles en espérant que sa révision serait possible ? Ce débat, assorti de multiples publications, continua durant toutes les années 1920, jusqu'à ce que le parti national-socialiste, qui l'avait grandement utilisé, y mît fin après 1933 en proclamant la géopolitique science allemande au service de ses ambitions et de ses volte-face: c'est ainsi que les "lois de la géopolitique" (sic) furent soudainement invoquées pour annoncer le pacte germano-soviétique d'août 1939, alors que la veille encore les "judéo-bolcheviks" étaient présentés comme les pires adversaires du peuple allemand...
Au lendemain du conflit, dès les débuts de la guerre froide, le mot "géopolitique" fut considéré comme d'essence nazie, et son emploi fut proscrit. A l'Est comme à l'Ouest, les deux superpuissances ne tenaient pas à ce que l'on reparle trop de nations et de territoires dans leurs zones d'influence respectives. Cela ne les empêchait pas de prendre des décisions -comme le partage de Yalta ou le tracé des nouvelles frontières de la Pologne- que l'on qualifierait aujourd'hui sans conteste de géopolitiques, mais le mot était proscrit.
Il fallut plus de trente ans pour que, sur une toute autre aire de conflit, l'Indochine, le mot "géopolitique" réapparût. En dépit du tabou qui en interdisait l'emploi (surtout pour les affaires européennes), il revint sans susciter de critiques, dans l'étonnement provoqué par la guerre Vietnam-Cambodge.
Il fut ensuite utilisé de plus en plus souvent pour désigner des rivalités moins surprenantes: la guerre Iran-Irak, le conflit israélo-arabe, la guerre du Liban, la guerre d'Afghanistan, le conflit du Sahara occidental, etc. "Géopolitique" devint, grâce aux journalistes, un terme à la mode et apparut alors, plus ou moins confusément, comme une façon nouvelle d'analyser les conflits, en accordant autant d'importance aux cartes, aux enjeux territoriaux et aux rivalités locales de pouvoir qu'aux idéologies et au grand affrontement planétaire du capitalisme et du communisme." (p.30-31)
"Cet intérêt soudain des journalistes pour ce qu'on appelle désormais les questions géopolitiques, les drames géopolitiques, etc., attira l'attention d'un petit groupe de jeunes géographes parisiens, ceux de la revue Hérodote, qui s'intéressaient depuis plusieurs années à ce même genre de problèmes, notamment dans les pays du tiers monde, au Vietnam, en Amérique latine, au Maghreb, pays dans lesquels j'étais personnellement impliqué de diverses façons. Mais il n'était pas question pour eux d'user du mot "géopolitique" qui, à leurs yeux comme à ceux de tous les membres de leur corporation, symbolisait alors la pire déviation du raisonnement géographique. Ces géographes, bien qu'universitaires, avaient de la géographie une conception très "active" (comme disait Pierre George) et déploraient qu'à l'Université l'analyse des problèmes politiques, et notamment des rivalités territoriales, fût depuis des décennies implicitement mais systématiquement écartée. A telle enseigne que certains maîtres de la géographie universitaire ont pu dire qu'étudier des frontières, "ce [n'était] pas de la géographie". Pourtant, celles-ci figurent bien sur les cartes et certaines ont même été tracées par des géographes (mais ils n'étaient pas professeurs). Les géographes d'Hérodote étaient donc partis en guerre en 1976 contre cette conception atrophiée de la géographie et l'image fastidieuse de celle-ci qui s'étaient établies dans les universités.
C'est alors qu'ils redécouvrirent l’œuvre énorme du très grand géographe libertaire Élisée Reclus (1830-1905), tombée dans l'oubli en dépit de tout son intérêt et de toute sa modernité: elle traite en particulier des conflits territoriaux avec une grande précision, et c'est la raison pour laquelle les universitaires l'escamotèrent par la suite. Mais Reclus n'était pas professeur, puisqu'il avait été proscrit après la Commune de Paris. Pourtant, en dépit de la taille de ses ouvrages, son œuvre considérable -sa Géographie universelle et L'Homme et la Terre, notamment- eut un très grand nombre de lecteurs, car elle était vendue et diffusée en fascicules qui pouvaient être reliés ensuite. Non seulement Reclus a traité en géographe et en penseur politique des conflits aussi bien entre les puissances impérialistes qu'entre les peuples colonisés, mais ses conceptions libertaires ont fait qu'il a présenté de façon critique et équitable les mobiles et les arguments de chacun des protagonistes de ces conflits.
Je me suis largement inspiré d'Élisée Reclus et j'ai en quelque sorte développé et systématisé sa démarche pour l'analyse des rivalités de pouvoir sur des territoires, en construisant une méthode permettant de confronter les arguments (fussent-ils tout à fait de mauvaise foi) que les dirigeants destinent habituellement à leurs partisans et à l'opinion internationale." (p.31-32)
"Les définitions habituelles de la nation [...] ne font guère référence à un territoire, et surtout pas à son territoire. Dans plusieurs d'entre elles, celui-ci est même complètement passé sous silence ; c'est notamment le cas de la définition d'Ernest Renan." (p.37)
"Non seulement la nation est une idée géopolitique [...] mais c'est le concept géopolitique fondamental. En effet, c'est pour la défense ou la reconquête et la libération d'une partie du territoire national que l'Etat-nation, mais aussi la nation même dépourvue d'Etat parce qu'elle n'était pas encore indépendante, se sont lancés dans des guerres bien souvent héroïques, effroyables et ruineuses en vérité." (p.38)
"Je dirais pour ma part qu'en termes d'évolution historique, pour un même groupe de population parlant à peu près la même langue et occupant le même territoire, la différence que l'on peut faire entre l'époque où "il est un peuple" et celle où "il devient nation" tient essentiellement à l'apparition et à la diffusion de l'idée d'indépendance.
En se référant à de nombreux exemples historiques, en Europe et surtout dans les régions du tiers monde qui ont été soumises à une domination coloniale, on peut dire qu'un peuple, même s'il est conscient des différences avec ses voisins, ne se pose pas tellement le problème de son indépendance (ou une très petite proportion de la population seulement se pose cette question). Notamment, il accepte (ou semble accepter) d'être dirigé par un souverain d'origine étrangère qui parle une autre langue. [...]
En revanche, même si une population n'est pas encore indépendante, c'est-à-dire même s'il n'y a pas encore d'Etat indépendant où l'on parle sa langue, elle est à mon sens déjà une nation lorsque les catégories sociales les plus "éclairées", peut-on dire, commencent à se poser le problème de l'indépendance et à trouver anormal et illégitime d'être dirigées par des étrangers. A partir de ce moment-là, l'indépendance va devenir l'enjeu primordial, et progressivement cette population, malgré ses contradictions internes, se lancera dans toute une série de luttes pour y parvenir, en dépit des pertes qui en résultent." (p.39-40)
"Si les populations urbaines d'Alsace et du nord de la Lorraine (Metz notamment) étaient pour une grande part francophones, les populations rurales étaient alors très majoritairement de langue et de culture germaniques. En 1871, le Reich s'estime donc en droit de les annexer." (p.45)
"Étrange défaite en effet, dont les causes profondes n'ont jamais été clairement établies." (p.50)
"Les Européens d'Algérie ne se sont pas tenus à l'écart de la vie politique française. Ils y interviennent même activement, notamment lors de l'affaire Dreyfus qui leur donne le prétexte de mener une campagne antisémite forcenée contre les Juifs algériens devenus citoyens français depuis 1870. C'est comme député d'Alger qu'entre au Parlement en 1898 Édouard Drumont dont le livre La France juive (1886), qui a déjà connu un énorme succès politique, redouble encore d'influence durant l'affaire Dreyfus." (p.54)
"Après la défaite de 1870, il est décidé que l'histoire et la géographie doivent faire partie de l'enseignement primaire et a fortiori des lycées, pour lesquels il faut former des professeurs d'histoire et de géographie dans les universités. Bientôt le Tour de France de deux enfants (1877) deviendra, pour près de quarante ans, le livre de lecture courante pour la plupart des petits Français. Il s'agit d'un manuel d'instruction civique républicaine et de "géopolitique" patriotique: la découverte des diverses régions de France et de leur histoire par deux petits Lorrains chassés de chez eux par les Prussiens et qui sont à la recherche d'un oncle itinérant. Ce livre a inculqué un sentiment et une idée de la France qui expliquent, parmi d'autres facteurs, le courage et l'abnégation de ces millions de paysans qui furent les soldats de la Grande Guerre." (p.82-83)
"L'idée de nation dans sa complexité et dans la richesse de son évolution historique ne doit pas être réduite aux slogans nationalistes, ni aux schémas de ses contempteurs. Si elle a été dans le passé un argument ou un prétexte pour des tyrannies, des oppressions et des persécutions politiques, elle a signifié aussi pour un grand nombre d'hommes l'indépendante et la liberté." (p.91)
"De graves difficultés géopolitiques apparaissent lorsque tel ou tel de ces mouvements culturels, sous prétexte d'assurer sa propre promotion et sa cohésion, demande qu'une reconnaissance officielle assortie de financement lui soit accordée, puis qu'un territoire -qu'il s'agisse de région ou de quartier- lui soit reconnu et que des quotas lui soient réservés dans certaines instances ou dans certains emplois." (p.92)
"Depuis la déclaration de guerre, au printemps 1792, l'armée française n'avait cessé de subir des revers et s'était même débandée plusieurs fois. Lorsque, à Valmy, les Français crient "Vive la nation !", ce n'est pas par arrogance nationaliste -et pour se féliciter à l'avance d'une victoire assurée, mais tout au contraire pour se cramponner au terrain et ne pas fuir comme ils l'ont déjà fait plusieurs fois depuis les débuts de cette guerre mal engagée." (p.94)
"Il est révélateur qu'un volumineux Traité de science politique qui fait autorité (quatre gros volumes dirigés par Madeleine Grawitz et Jean Leca, PUF, 1985) ne comprenne aucun chapitre ni même paragraphe traitant de la nation, l'index n'indiquant que trois brèves allusions ! Pas même un passage pour expliquer un tel silence. Preuve que la nation est considérée par ces spécialistes du politique comme une idée complètement dépassée, voire indigne de propos tant soit peu "scientifiques"." (p.99)
"Pour nombre d'intellectuels le thème du progrès est désormais un leurre qu'il faut dénoncer: le XXe siècle est l'ère des illusions, des catastrophes et des naufrages, la modernité n'a plus aucun sens, et quand on est vraiment "branché", on parle de la "postmodernité"." (p.113)
"[Depuis 1945], la croissance de la France a été brillante, beaucoup plus forte que celle de la Grande-Bretagne pour laquelle l'idée de déclin est plus proche des réalités." (p.113)
"Les historiens de la société japonaise soulignent aujourd'hui que l'on peut utilement comparer les problèmes structurels du Japon féodal avant la "révolution" Meiji (1868) et ceux de la France à la fin de l'Ancien Régime. [...]
Le Japon est en effet le seul cas de véritable féodalité hors de l'Europe occidentale. [...]
Lorsque le Japon fut contraint de s'ouvrir sous la pression militaire occidentale (en 1865), ce sont les samuraï -ou du moins la majeure partie d'entre eux- qui, devant l'imminence de la domination étrangère, se dressèrent contre l'impuissance de l'appareil féodal et renoncèrent d'eux-mêmes à leurs privilèges féodaux comme à leurs fiefs, obligeant les récalcitrant à faire de même, afin d'assurer, par cette révolution sous l'égide d'une autorité impériale restaurée, une cohésion nouvelle de la nation, son indépendance et l'accélération de nouvelles étapes de sa modernisation. Les samuraï conservèrent ainsi leur rôle dirigeant et, devenus les cadres administratifs et surtout militaires d'un Etat bureaucratique, poussèrent le pays dans un effort méthodique de développement, puis, hélas ! dans une expansion impérialiste qui devait aboutir à la catastrophe de 1945." (p.118-119)
"Au XIXe siècle et dans la première moitié du XXe, [la croissance démographique française fut] très inférieure à celle des Etats voisins, notamment l'Allemagne où la population, en dépit d'une forte émigration, s'accroissait rapidement.
C'est à la demande de l'état-major, pour tenter de pallier l'insuffisance numérique de l'armée française face à l'armée allemande, qu'est passée en 1890 la loi entraînant la naturalisation automatique des enfants nés en France de famille immigrée, afin qu'ils accomplissent le service militaire." (p.129)
"Littré, dont le rôle intellectuel et politique fut considérable au début de la IIIe République." (p.142)
"La conférence de Renan, le 11 mars 1882, est à replacer dans le contexte des "grandes lois Jules Ferry": celle qui institue l'instruction primaire laïque, gratuite et obligatoire sera votée onze jours plus tard ; elle a été précédée par les lois sur la liberté de la presse (1881) et de réunion, et suivie par celle autorisant les syndicats (1884).
Mais Jules Ferry, c'est aussi la politique coloniale, notamment en Tunisie et en Indochine, et la droite la dénonce sous prétexte qu'on disperse ainsi l'armée qui devrait rester tournée contre l'Allemagne. Si la droite s'oppose autant à la politique coloniale, c'est parce qu'à ce moment-là c'est la gauche qui la conduit et qui en retire quelques avantage dans l'opinion et même auprès des cadres de l'armée. En fait, l'hostilité de la droite, qui renversera Ferry en 1885 sous le prétexte d'une opération mal menée au Tonkin, tient pour l'essentiel aux lois sur les syndicats, sur la liberté de la presse, et surtout aux textes qui réduisent le rôle des congrégations religieuses dans l'enseignement des jeunes filles et instaurent l'instruction primaire laïque, gratuite et obligatoire." (p.159)
"Le fait que l'Etat n'assure plus en Corse la protection de citoyens contre les agissements de bandes armées qui se réclament d'un mouvement ouvertement séparatiste et pourtant minoritaire en dit long sur ce que d'aucuns appellent la crise de l'Etat-nation. Cela veut dire que des Français peuvent désormais être chassés d'un lieu ou d'une région faisant jusqu'alors partie du territoire de la République française si des groupes politiques, prétendant agir au nom d'une majorité ethnique locale, décident de pratiquer ce genre de "purification ethnique"." (p.218)
"Une grave contradiction se fait jour dans tous les pays développés entre la minorité privilégiée qui participe à la mondialisation financière et la majorité de concitoyens beaucoup moins fortunés dont la vie se déroule au niveau local et national. Cependant, selon les pays, cette contradiction est envisagée très différemment, compte tenu de leur histoire et de leurs traditions politiques.
Robert Reich considère que la "sécession" des riches est moins marquée au Japon et en Allemagne, où "le sens d'une culture commune, d'un héritage partagé et d'un destin commun est encore suffisamment fort pour inciter les profiteurs de la mondialisation à continuer d'aider les perdants", et pour maintenir les conditions d'une forte productivité et de capacités de développement pour l'ensemble de la population, ce qui est la condition du progrès pour l'avenir." (p.300-301)
-Yves Lacoste, Vive la Nation. Destin d'une idée géopolitique, Fayard, 1997, 339 pages.