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    Pierre-Benjamin Girard, Environnement et géographie : un binôme prometteur !

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Pierre-Benjamin Girard, Environnement et géographie : un binôme prometteur ! Empty Pierre-Benjamin Girard, Environnement et géographie : un binôme prometteur !

    Message par Johnathan R. Razorback Lun 22 Mar - 16:33

    "Dans le Dictionnaire de la géographie, Jacques Lévy et Michel Lussault identifient trois courants majeurs dans la géographie : « l’analyse spatiale », « la géographie culturelle » et « la nouvelle géographie de l’environnement » dont il souligne l’aspect encore flou. Ainsi, « la nouvelle géographie de l’environnent » apparait comme un courant encore « non réellement identifié ».

    Cependant, la géographie s'est toujours attardée sur l'analyse des milieux et de l'environnement. Au 19ème siècle, elle s’apparente à une géographie des sciences naturelles appuyée par une démarche holiste, et basée sur une réflexion déterministe. Au début du 20ème siècle, la géographie va s’intéresser à l’homme tout en gardant une posture naturaliste (géographie vidalienne) amenant une approche positiviste de la géographie. Cette première ouverture vers les sciences sociales va se concrétiser dans les années 1960 avec l’apparition d’une géographie sociale, dites « hors sol » qui ne s’apparente plus à une géographie purement physique, du recensement et de l’idiographie, mais qui s’ouvre indiscutablement aux sciences sociales. La construction d’une science pouvant réunir société et nature se voit être compromise et se solde par une division entre géographie humaine et géographie physique. Cependant, les années 70 vont apparaitre comme une décennie charnière dans les rapports sociétés et environnements à travers la signature de nombreux accords internationaux :

    2 février 1971, la convention RAMSAR relative aux zones humides est signée (Entrée en vigueur le 21 décembre 19754).
    1972, le Club de Rome dénonce les risques d’une croissance économique débridée dans l’ouvrage intitulé « Halte à la croissance ».
    5-16 juin 1972, Conférence des Nations unies sur l’environnement à Stockholm qui aboutit à la création du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUE) qui devient complémentaire au PNUD.
    1973, signature de la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (entrée en vigueur le 1er juillet 19755).
    Ces différents accords internationaux font échos à une croissance économique et une démographie exponentielle depuis la fin de la seconde guerre mondiale, mais aussi à une anticipation des probables pénuries énergétiques. Ces énergies non renouvelables (ou renouvelables sur un très long terme) comme le pétrole ou encore le gaz commencent à être sérieusement remises en cause ainsi que leurs impacts sur l’environnement.

    La géographie au cœur des sciences sociales

    C’est donc à travers une évolution historique et sociétale des nouvelles préoccupations internationales, que la géographie va pouvoir envisager une réappropriation du lien entre « action des sociétés et action naturelle ». Face à ces différentes remises en cause environnementale, la géographie devrait se placer en première ligne afin de composer avec ces nouvelles dynamiques.

    Durant les années soixante-dix à quatre-vingt-dix, la géographie française s’est désarticulée à contrecourant des impulsions scientifiques de l’époque. Tandis que dans les pays anglo-saxons et en Europe de l’Est la géographie allait vers l’environnement sous l’influence de l’écologie, la géographie française s’est effacée devant l’écologie, et l’environnement. (Bertrand, 2010)

    Cependant, et depuis les années 90, la géographie participe au débat environnemental, malgré une prédominance des théories de l’écologie (développement du concept d’écosystème qui s’est largement imprégné dans la société) à l’échelle mondiale. Aussi, la géographie va s’appuyer sur diverses sciences pour étoffer ses analyses et construire son discours. Ces réflexions vont s’accompagner des savoirs des sciences physiques et écologiques avec Jean-Paul Deléage notamment : « L’évolution des sociétés humaines met aujourd’hui en jeu les équilibres fondamentaux de la biosphère et la survie de l’humanité » (Deléage, 2010). L’anthropologie va également servir d’outil à la géographie à travers les écrits de Philippe Descola, qui décrédibilise le dualisme entre nature et culture en imposant la nature comme une production sociale. Il met en avant une « écologie des relations » qui n’instaure pas de rupture entre humains et non humains. Les relations entre humains n’apparaissent donc pas comme supérieures aux relations entre humains et non humains. Pour appuyer son discours, il distingue quatre « modes d’identification » : l’Animisme, le Totémisme, l’Analogisme et le Naturalisme. Ce dernier représente les sociétés occidentales qui marquent une frontière entre « soi et autrui » en mettant en avant l’idée de « nature ». « La nature serait ce qui ne relève pas de la culture, la culture différencie l’humain du non humain mais également les sociétés humaines entre elles ».

    Le naturalisme est simplement la croyance que la nature existe, autrement dit que certaines entités doivent leur existence et leur développement à un principe étranger aux effets de la volonté humaine. Typique des cosmologies occidentales depuis Platon et Aristote, le naturalisme produit un domaine ontologique spécifique, un lieu d’ordre ou de nécessité où rien n’advient sans une cause, que cette cause soit référée à l’instance transcendante ou qu’elle soit immanente à la texture du monde. Dans la mesure où le naturalisme est le principe directeur de notre propre cosmologie et qu’il imbibe notre sens commun et notre principe scientifique, il est devenu pour nous un présupposé en quelque sorte « naturel » qui structure notre épistémologie et en particulier notre perception des autres modes d’identification. (Descola, 1996).

    Philippe Descola s’est également inspiré des travaux de Bruno Latour pour développer ses thèses ethnographiques. Ce dernier tente de réexaminer la frontière classique entre l’autorité des hommes et les mondes naturels. Latour propose de prendre en compte dans la Constitution des pays, les humains et non-humains en créant un « parlement des choses » où chaque « chose » serait représentée par des scientifiques portant les compétences dans un domaine particulier. Tout comme Descola, il efface le dualisme Homme-Nature au profit d’une complémentarité. « La diversité, ce n’est pas une liste d’espèces et de variétés, mais plutôt les interactions existantes entre les organismes vivants » (Weber, 2007).

    La nouvelle géographie de l’environnement est donc un domaine d’étude très actuel qui s’est construit autour de préoccupations environnementales contextualisées. Elle s’est développée grâce à une interdisciplinarité propice à la création d’un éventail plus large de réflexion. Après s’être appuyée sur d’autres sciences, la géographie a développé ses propres outils d’analyse tout en apportant sa propre définition sur des concepts déjà usités. Elle parait à ce jour pertinente pour tenter de répondre de manière complexe aux nouveaux enjeux environnementaux. Pour cause, son interdisciplinarité permet une vision d'ensemble et un recul nécessaire pour répondre aux nouveaux défis environnementaux. Trop souvent oubliée, ou mise à l'écart, la géographie est devenue à ce jour un outil d'analyse et d'action incontournable.
    -Pierre-Benjamin Girard, "Environnement et géographie : un binôme prometteur !", 16 janvier 2017: https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/environnement-et-geographie-un-188597




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