"Presque oublié aujourd'hui, Georges Valois fut l'un des écrivains politiques important du début du siècle. Ayant dû abandonner ses études à l'âge de 15, à cause de ses origines populaires, il avait été rapidement attiré par les milieux de gauche. Il commença par fréquenter différents groupes de tendance libertaire: L'Art social, de Charles-Louis Philippe, Les Temps nouveaux, de Jean Grave, L'Humanité nouvelle, de Charles Albert et Hamon. Parmi les collaborateurs de la revue qu'animait L'Humanité nouvelle figurait notamment Georges Sorel, qui devait exercer sur Valois une influence décisive." (p.35)
"Influencé par Sorel, et aussi par la pensée de Proudhon et de Nietzsche, Georges Valois écrivit son premier livre: L'homme qui vient, philosophie de l'autorité. C'était l’œuvre d'un militant syndicaliste révolté par la corruption démocratique, aspirant à un régime fort. Ce régime, Georges Valois pensait que ce devait être la monarchie: il la concevait "comme un pouvoir réalisant ce que la démocratie n'avait pu faire contre la ploutocratie". Ayant présenté son manuscrit à Paul Bourget, celui-ci le communiqua à Charles Maurras. Telle fut l'origine des relations entre l'ancien socialiste libertaire et le directeur de L'Action française." (p.36)
"Relatant après sa rupture avec Maurras son premier contact avec celui-ci, Valois écrivait: "C'est sur le problème économique et social que nous nous heurtâmes immédiatement. Dans la suite, Maurras s'abstint de renouveler cette dispute. Sa décision avait été prise ; il avait compris qu'il était préférable de m'associer à son œuvre et de m'utiliser en s'efforçant de m'empêcher de produire toute la partie de mon œuvre qu'il n'acceptait pas". On comprend sans peine que ce que Valois gardait d'esprit socialiste et révolutionnaire n'ait pas convenu à Maurras. Il ne faut pas oublier cependant qu'à cette époque Maurras s'exprimait en termes fort sévères contre le capitalisme, auquel il opposait l'esprit corporatif de l'Ancien Régime. Tout en défendant les principes d'ordre et d'autorité, il n'hésitait pas à défendre les syndicats contre le faux ordre et l'autorité abusive des dirigeants républicains. C'est ainsi qu'il fut le seul grand journaliste de droite à flétrir la sanglante répression organisée par Clemenceau, président du Conseil, contre les grévistes de Draveil, dans les derniers jours de juillet 1908:
"Cuirassiers, dragons et gendarmes", écrivait Maurras dans L'Action française [1er et 4 août 1908], se sont battus comme nos braves troupes savent se battre. A quoi bon ? Pourquoi ? Et pour qui ?
"Nous le savons. C'est pour le vieillard à peine moins sinistre que Thiers, à peine moins révolutionnaire, puisse venir crier à la tribune qu'il est l'ordre, qu'il est la propriété, qu'il est le salut. Nous ne dirons pas à ce vieillard sanglant qu'il se trompe. Nous lui dirons qu'il ment. Car il a voulu ce carnage. Cette tuerie n'est pas le résultat de la méprise ou de l'erreur. On ne peut l'imputer à une faute de calcul. Il l'a visée... Ce fidèle ministre d'Édouard VII ne mérite pas d'être flétri en langue française. L'épithète qui lui revient, je la lui dirai en anglais, où elle prendra quelque force: Bloody !"
Les jours suivants, Maurras écrivait encore:
"La journée de Draveil a été ce qu'on a voulu qu'elle fût. M. Clemenceau n'a pratiqué ni le système du laisser-faire ni le système des justes mesures préventives, parce que dans les deux cas, surtout dans le second, il y avait d'énormes chances d'éviter cette effusion de sang qu'il lui fallait pour motiver les arrestations de vendredi et pour aboutir à l'occupation administrative et à la pénétration officielle de la Confédération générale du travail."
Il est normal que le Maurras de cette époque ait pu attirer Georges Valois." (p.36-37)
"Il attira aussi, pendant quelque temps, Georges Sorel lui-même: "Je ne pense pas, écrivait ce dernier à Pierre Lasserre en juin 1909, que personne (sauf probablement Jaurès) confonde l'ardente jeunesse qui s'enrôle dans l'Action française avec les débiles abonnés du Gaulois." (p.38)
"En 1922, l'idée de rallier les élites du monde du travail à la solution monarchiste plus semblait donc assez vaine. [...]
Son idée principale était de lancer à travers toute la France une "convocation des états généraux", créant ainsi la représentation réelle avec des forces nationales, par opposition à la représentation artificielle du parlementarisme. Maurras pouvait difficilement être contre un principe aussi conforme à sa doctrine, et notamment à sa fameuse distinction entre le pays réel et le pays légal. Il donna donc son accord pour ce projet. Celui-ci n'eut qu'un commencement de réalisation, l'assassinat par une militante anarchiste du meilleur ami de Valois à l'Action française, Marius Plateau, ayant interrompu le travail en cours. Les autres dirigeants de l'Action française étaient plus ou moins hostiles au projet de Valois, auquel ils préféraient la préparation de leur participation aux élections de 1924. Mais, à ces élections, les candidats de l'Action française furent largement battus.
C'est alors que Georges Valois songea à mener son combat en marge de l'Action française, sans rompre cependant avec celle-ci. Il prépara notamment "une action en direction des communistes, pour extraire des milieux communistes des éléments qui n'étaient attachés à Moscou que par déception de n'avoir pas trouvé jusque-là un mouvement satisfaisant pour les intérêts ouvriers". Naturellement, l'action comportait une large participation ouvrière à tout le mouvement, par incorporation de militants ouvriers au premier rang du mouvement.
Pour appuyer cette action, Valois décidait de créer un hebdomadaire, Le Nouveau Siècle.
Dans le premier numéro du journal, paru le 25 février 1925, on peut lire une déclaration que vingt-huit personnalités -parmi lesques Jacques Arthuys, Serge André, René Benjamin, André Rousseaux, Henri Ghéon, Georges Suarez, Jérôme et Jean Tharaud, Henri Massis- ont signée aux côtés de Valois. Le Nouveau siècle, y lit-on notamment, est fondé pour "exprimer l'esprit, les sentiments, la volonté" du siècle nouveau né le 2 août 1914. Il luttera pour les conditions de la victoire, que l'on a volée aux combattants: "Un chef national, la fraternité française, une nation organisée dans ses familles, ses métiers et ses provinces, la foi religieuse maîtresse d'elle-même et de ses œuvres ; la justice de tous et au-dessus de tous".
"Nous travaillerons, disent encore les signataires, à former ou à reformer les légions de la victoire, légions de combattants, de chefs de famille, de producteurs, de citoyens". On peut penser qu'il s'agit de faire la liaison entre différents mouvements nationaux tels que l'Action française, les Jeunesses patriotes et quelques autres. Mais le 11 novembre de cette même année 1925, Georges Valois annonce la fondation d'un nouveau mouvement, le Faisceau qui sera divisé en quatre sections: Faisceau des combattants, Faisceau des producteurs, Faisceau civique et Faisceau des jeunes." (p.46-47)
"Valois fut bientôt désagréablement surpris de voir que Maurras cherchait à faire subventionner L'Action française par le principal commanditaire de son propre hebdomadaire, qu'il avait lui-même encouragé à aider L'Action française à un moment donné.
D'autres difficultés surgirent. Maurras reprocha à Valois l'orientation qu'il donnait à sa maison d'édition. Mais Valois eut surtout le sentiment que les campagnes de son hebdomadaire "concernant les finances, la monnaie et la bourgeoisie" déplaisaient souverainement, sinon à l'Action française elle-même, du moins à certaines personnalités politiques ou financières avec lesquelles l'Action française ne voulait pas se mettre en mauvais termes. Un incident vint transformer ces difficultés en pure et simple rupture. Tout en animant son hebdomadaire, Valois continuait à donner des articles à L'Action française. Maurras lui écrivit à propos de l'un d'eux, regrettant de ne pas avoir pu supprimer cet article faute de temps, et se livrant à une vive critique de fond:
"Il suffit de répondre "non" à telle ou telle de vos questions pour laisser en l'air toute votre thèse. Il n'est pas vrai que "la" bourgeoisie soit l'auteur responsable du parlementarisme. Le régime est au contraire né au confluent de l'aristocratie et d'une faible fraction de la bourgeoisie. [...] Les éléments protestants, juifs, maçons, métèques y ont joué un très grand rôle. L'immense, la déjà immense bourgeoisie française n'y était pour rien. Pour rien.
"Maigre rectification historique ? Je veux bien. Mais voici la politique, et cela est grave. Depuis vingt-six ans, nous nous échinons à circonscrire et à limiter l'ennemi ; à dire: non, la révolution, non le parlementarisme, non, la république, ne sont pas nés de l'effort essentiel et central du peuple français, ni de la plus grande partie de ce peuple, de sa bourgeoisie. Malgré tous mes avis, toutes mes observations et mes adjurations, vous vous obstinez au contraire, à la manœuvre inverse, qui est d'élargir, d'étendre, d'épanouir, de multiplier l'ennemi ; c'est, maintenant, le bourgeois, c'est-à-dire les neuf dixièmes de la France. Eh bien, non et non, vous vous trompez, non seulement sur la théorie, mais sur la méthode et la pratique. Vous obtenez des résultats ? Je le veux bien. On dirait en Provence que vous aurez une sardine en échange d'un thon. Je manquerais à tous mes devoirs si je ne vous le disais pas en toute clarté. Personne ne m'a parlé, je n'ai vu personne depuis que j'ai lu cet article et ai dû le laisser passer, et si je voyais quelqu'un, je le défendrais en l'expliquant, comme il m'est arrivé si souvent ! Mais, en conscience, j'ai le devoir de vous dire que vous vous trompez et que cette politique détaille. Je ne puis l'admettre à l'Af."
Pour Georges Valois, l'explication de l'attitude de Maurras était claire: "Maurras et ses commanditaires avaient toléré ma politique ouvrière, tant qu'ils avaient pu la mener sur le plan de la littérature, mais du jour où je déclarais que nous passions à l'action pratique, on voulait m'arrêter net".
Entre les deux hommes, une explication décisive eut lieu. Maurras reprocha notamment à Valois de détourner de l'argent de L'Action française vers son propre hebdomadaire. Valois contesta bien entendu cette affirmation, et démissionna de l'Action française et des organisations annexes de celle-ci auxquelles il appartenait.
La rupture était-elle fatale ? Y avait-il réellement incompatibilité totale entre la pensée de Maurras et celle de Valois ? Il est intéressant d'examiner à ce propos les "bonnes feuilles" d'un livre de Valois, parues dans l'Almanach de l'Action française de 1925 -c'est-à-dire un peu plus d'un an avant sa rupture avec celle-ci-, livre intitulé: La Révolution nationale. (Notons en passant que c'est probablement à Valois que le gouvernement du Maréchal Pétain emprunta le slogan du nouveau régime de 1940).
Valois affirme d'abord que l'Etat français a crée une situation révolutionnaire, parce qu'il s'est révélé "totalement incapable d'imaginer et d'appliquer les solutions à tous les problèmes nés de la guerre". Et selon Valois, cette révolution a commencé le 12 août 1914 avec ce que Maurras a appelé la monarchie de la guerre: c'est le moment où l'esprit héroïque s'est substitué à l'esprit mercantile et juridique. Mais après l'armistice, l'esprit bourgeois a repris le dessus, et cet esprit a perdu la victoire. Les patriotes le comprennent, ils se rendent compte qu'ils doivent détruire l'Etat libéral et ses institutions politiques, économiques sociales, et le remplacer par un Etat national." (p.48-50)
"L’œuvre de la révolution nationale ne se limitera pas à la restauration de l'Etat ; celle-ci étant accomplie, la France prendra l'initiative d'une politique européenne:
"Alors, sous son inspiration [la France], les peuples formeront le faisceau romain, le faisceau de la chrétienté, qui refoulera la barbarie en Asie ; il y aura de nouveau une grande fraternité européenne, une grande paix romaine et franque, et l'Europe pourra entrer dans le grand siècle européen qu'ont annoncé les combattants, et dont les premières paroles ont été celles que Maurras a prononcées au début de ce siècle, lorsque par l'Enquête sur la monarchie, il rendit à l'esprit ses disciplines classiques"." (p.52)
"A la fin de l'année 1925, le Faisceau bénéficiait de concours assez importants pour que Valois pût décider de transformer Le Nouveau Siècle hebdomadaire en quotidien.
Mais, pour ses anciens compagnons de l'Action française, Georges Valois devenait ainsi un gêneur et même un traître, dont il fallait au plus vite ruiner l'influence. En décembre 1925, les camelots du roi réussirent à interrompre une réunion du Faisceau. Un peu plus tard, les militants de Valois se vengèrent en organisant une "expédition" dans les locaux de L'Action française. Le quotidien de Maurras déclencha une très violente campagne contre Valois, qu'il accusait d'être en rapport avec la police, d'avoir volé les listes d'adresses de l'Action française au profit de son mouvement, d'avoir indûment conservé la Nouvelle Librairie nationale, d'émarger aux fonds secrets, et enfin d'être à la solde d'un gouvernement étranger, le gouvernement italien.
Après une année de polémiques, Valois intenta un procès à l'Action française. Ce fut l'un des plus importants procès de presse de cette époque."
(p.53-54)
"En 1927, le Faisceau déclinait rapidement ; Le Nouveau Siècle quotidien redevenait hebdomadaire et disparut l'année suivante. Cet échec avait plusieurs causes. La violente campagne de l'Action française contre Valois impressionnait vivement les sympathisants de celle-ci et l'ensemble des "nationaux". Le style paramilitaire, l'uniforme que Valois imposait à ses militants paraissaient ridicules à beaucoup de gens. D'autre part, l'opinion publique se méfiait d'un mouvement s'inspirant trop directement d'un régime politique étranger. Les bailleurs de fonds du mouvement et du journal s'en rendirent compte, et coupèrent les vivres à Valois. Celui-ci fut bientôt mis en accusation par certaines personnalités du mouvement: né d'une dissidence, le Faisceau eut lui-même ses dissidents, entraînés par l'un des fondateurs du mouvement, Philippe Lamour. Valois restait avec quelques milliers de partisans ; ceux-ci se séparèrent finalement de lui, pour former un Parti fasciste révolutionnaire, dont l'existence ne fut pas moins éphémère que celle du Faisceau.
Valois s'était efforcé de rompre avec les schémas idéologiques de l'Action française, aussitôt après l'avoir quittée. Férocement antisémite au début de son action, il estimait en 1926 que la rénovation économique et sociale qu'il appelait de ses vœux ne pouvait aboutir sans la participation des Juifs." (p.57)
"D'autant plus qu'à cette ouverture envers Israël, Valois ajoutait quelques mois plus tard un renoncement à l'idéal monarchique au profit de la République:
"Nous avons tous au Faisceau le grand sentiment de 1789, la grande idée de la Révolution française et que résume le mot de la carrière ouverte aux talents. C'est-à-dire aux possibilités d'accession de tous aux charges publiques. Nous sommes ennemis de tout pouvoir qui fermerait ses propres avenues à certaines catégories de citoyens Là-dessus nous avons tous la fibre républicaine" [Le Nouveau Siècle, 21 juin 1926]."
"En mars 1928, à l'heure où Le Nouveau Siècle disparaît, Valois publie un Manifeste pour la République syndicale. [...] En quoi il ne fait que revenir aux aspirations de sa jeunesse, d'avant la rencontre de Maurras.
La publication du Manifeste est rapidement suivie de la fondation par Valois et son fidèle ami Jacques Arthuys du Parti républicain syndicaliste. Parmi les personnalités qui donnèrent leur adhésion à cette nouvelle formation figure notamment René Capitant, futur ministre du général de Gaulle. Mais, de l'aveu même de Valois, ce parti ne sera en fait qu'un groupes d'études, sans influence comparable à celle du Faisceau.
Dès lors, Valois s'exprimera surtout à travers plusieurs revues, tout en continuant à publier des essais sur la conjoncture politique de son temps. Les revues qu'il suscitera s'appelleront Les Cahiers bleus, puis Les Chantiers coopératifs, et enfin Le Nouvel Age. Parmi leurs collaborateurs, on doit citer notamment Pietro Nenni, le grand leader socialiste italien, Pierre Mendès France, Bertrand de Jouvenel et Jean Luchaire: quatre noms qui suffisent à situer l'importance de l'action intellectuelle de Georges Valois dans les années de l'entre-deux-guerres." (p.59)
"Vers 1935, Valois tente de se faire réintégrer dans les formations de gauche. Il n'y parvient pas. [...] C'est en vain qu'il écrit à Marceau Pivert pour solliciter son admission au parti socialiste: d'abord acceptée, sa demande sera finalement rejetée par les hautes instances de ce parti. [...]
Sa pensée devient parfois contradictoire: ancien apologiste des vertus viriles suscitées par la guerre, il se proclame soudain pacifiste devant l'absurdité d'un éventuel conflit mondial, tout en reprochant à Léon Blum de ne pas soutenir militairement l'Espagne républicaine..." (p.60)
"Louis Dimier fut l'une des personnalités intellectuelles qui adhérèrent à l'Action française dès sa fondation. [...] professeur dans l'enseignement libre, et catholique convaincu." (p.65)
"Au lendemain de la guerre de 14-18, pendant laquelle L'Action française, organe de l'antigermanisme et de l'union sacrée, avait considérablement étendu son influence dans le pays." (p.73)
"La guerre devait ajourner davantage encore la possibilité de ce "coup de force" que Maurras maintenait en théorie. Dès 1914, l'Action française soutint sans réserve ceux des gouvernants qui lui semblaient les plus résolus à la défense nationale. C'est alors que Maurras déclara:
"On ne fait pas de révolution devant l'ennemi."
Et pourquoi ? demandait Louis Dimier." (p.76-77)
"Ainsi l'Action française, après avoir proclamé sa volonté de mettre fin au régime républicain "par tous les moyens", y compris la pure et simple subversion, prenait-elle de plus en plus l'allure d'un parti conservateur. La décision prise par le mouvement en 1919 de présenter des candidats aux élections accentuait encore un peu plus ce caractère. Elle étendait sans doute son influence, mais c'était au détriment de l'intégrité de sa doctrine." (p.77-78)
"Louis Dimier accepta de figurer parmi ses candidats. [...] Mais il se rendit compte que le mouvement avait plus de perdre qu'à gagner dans cette entreprise. [...]
Maurras, pourtant, n'envisageait pas cette participation de l'Action française aux élections comme une occasion parmi d'autres de rappeler les principes essentiels du mouvement. "Nous voulons passer, nous menons l'affaire pour aboutir", déclara-t-il à Louis Dimier. [...]
Le résultat fut un échec impressionnant, qui donna à Louis Dimier l'envie de se séparer de l'Action française (seul Léon Daudet fut élu)." (p.78-79)
-Paul Sérant, Les Dissidents de l'Action française, Paris, Éditions Pierre Guillaume de Roux, 2016 (1978 pour la première édition), 417 pages.
"Influencé par Sorel, et aussi par la pensée de Proudhon et de Nietzsche, Georges Valois écrivit son premier livre: L'homme qui vient, philosophie de l'autorité. C'était l’œuvre d'un militant syndicaliste révolté par la corruption démocratique, aspirant à un régime fort. Ce régime, Georges Valois pensait que ce devait être la monarchie: il la concevait "comme un pouvoir réalisant ce que la démocratie n'avait pu faire contre la ploutocratie". Ayant présenté son manuscrit à Paul Bourget, celui-ci le communiqua à Charles Maurras. Telle fut l'origine des relations entre l'ancien socialiste libertaire et le directeur de L'Action française." (p.36)
"Relatant après sa rupture avec Maurras son premier contact avec celui-ci, Valois écrivait: "C'est sur le problème économique et social que nous nous heurtâmes immédiatement. Dans la suite, Maurras s'abstint de renouveler cette dispute. Sa décision avait été prise ; il avait compris qu'il était préférable de m'associer à son œuvre et de m'utiliser en s'efforçant de m'empêcher de produire toute la partie de mon œuvre qu'il n'acceptait pas". On comprend sans peine que ce que Valois gardait d'esprit socialiste et révolutionnaire n'ait pas convenu à Maurras. Il ne faut pas oublier cependant qu'à cette époque Maurras s'exprimait en termes fort sévères contre le capitalisme, auquel il opposait l'esprit corporatif de l'Ancien Régime. Tout en défendant les principes d'ordre et d'autorité, il n'hésitait pas à défendre les syndicats contre le faux ordre et l'autorité abusive des dirigeants républicains. C'est ainsi qu'il fut le seul grand journaliste de droite à flétrir la sanglante répression organisée par Clemenceau, président du Conseil, contre les grévistes de Draveil, dans les derniers jours de juillet 1908:
"Cuirassiers, dragons et gendarmes", écrivait Maurras dans L'Action française [1er et 4 août 1908], se sont battus comme nos braves troupes savent se battre. A quoi bon ? Pourquoi ? Et pour qui ?
"Nous le savons. C'est pour le vieillard à peine moins sinistre que Thiers, à peine moins révolutionnaire, puisse venir crier à la tribune qu'il est l'ordre, qu'il est la propriété, qu'il est le salut. Nous ne dirons pas à ce vieillard sanglant qu'il se trompe. Nous lui dirons qu'il ment. Car il a voulu ce carnage. Cette tuerie n'est pas le résultat de la méprise ou de l'erreur. On ne peut l'imputer à une faute de calcul. Il l'a visée... Ce fidèle ministre d'Édouard VII ne mérite pas d'être flétri en langue française. L'épithète qui lui revient, je la lui dirai en anglais, où elle prendra quelque force: Bloody !"
Les jours suivants, Maurras écrivait encore:
"La journée de Draveil a été ce qu'on a voulu qu'elle fût. M. Clemenceau n'a pratiqué ni le système du laisser-faire ni le système des justes mesures préventives, parce que dans les deux cas, surtout dans le second, il y avait d'énormes chances d'éviter cette effusion de sang qu'il lui fallait pour motiver les arrestations de vendredi et pour aboutir à l'occupation administrative et à la pénétration officielle de la Confédération générale du travail."
Il est normal que le Maurras de cette époque ait pu attirer Georges Valois." (p.36-37)
"Il attira aussi, pendant quelque temps, Georges Sorel lui-même: "Je ne pense pas, écrivait ce dernier à Pierre Lasserre en juin 1909, que personne (sauf probablement Jaurès) confonde l'ardente jeunesse qui s'enrôle dans l'Action française avec les débiles abonnés du Gaulois." (p.38)
"En 1922, l'idée de rallier les élites du monde du travail à la solution monarchiste plus semblait donc assez vaine. [...]
Son idée principale était de lancer à travers toute la France une "convocation des états généraux", créant ainsi la représentation réelle avec des forces nationales, par opposition à la représentation artificielle du parlementarisme. Maurras pouvait difficilement être contre un principe aussi conforme à sa doctrine, et notamment à sa fameuse distinction entre le pays réel et le pays légal. Il donna donc son accord pour ce projet. Celui-ci n'eut qu'un commencement de réalisation, l'assassinat par une militante anarchiste du meilleur ami de Valois à l'Action française, Marius Plateau, ayant interrompu le travail en cours. Les autres dirigeants de l'Action française étaient plus ou moins hostiles au projet de Valois, auquel ils préféraient la préparation de leur participation aux élections de 1924. Mais, à ces élections, les candidats de l'Action française furent largement battus.
C'est alors que Georges Valois songea à mener son combat en marge de l'Action française, sans rompre cependant avec celle-ci. Il prépara notamment "une action en direction des communistes, pour extraire des milieux communistes des éléments qui n'étaient attachés à Moscou que par déception de n'avoir pas trouvé jusque-là un mouvement satisfaisant pour les intérêts ouvriers". Naturellement, l'action comportait une large participation ouvrière à tout le mouvement, par incorporation de militants ouvriers au premier rang du mouvement.
Pour appuyer cette action, Valois décidait de créer un hebdomadaire, Le Nouveau Siècle.
Dans le premier numéro du journal, paru le 25 février 1925, on peut lire une déclaration que vingt-huit personnalités -parmi lesques Jacques Arthuys, Serge André, René Benjamin, André Rousseaux, Henri Ghéon, Georges Suarez, Jérôme et Jean Tharaud, Henri Massis- ont signée aux côtés de Valois. Le Nouveau siècle, y lit-on notamment, est fondé pour "exprimer l'esprit, les sentiments, la volonté" du siècle nouveau né le 2 août 1914. Il luttera pour les conditions de la victoire, que l'on a volée aux combattants: "Un chef national, la fraternité française, une nation organisée dans ses familles, ses métiers et ses provinces, la foi religieuse maîtresse d'elle-même et de ses œuvres ; la justice de tous et au-dessus de tous".
"Nous travaillerons, disent encore les signataires, à former ou à reformer les légions de la victoire, légions de combattants, de chefs de famille, de producteurs, de citoyens". On peut penser qu'il s'agit de faire la liaison entre différents mouvements nationaux tels que l'Action française, les Jeunesses patriotes et quelques autres. Mais le 11 novembre de cette même année 1925, Georges Valois annonce la fondation d'un nouveau mouvement, le Faisceau qui sera divisé en quatre sections: Faisceau des combattants, Faisceau des producteurs, Faisceau civique et Faisceau des jeunes." (p.46-47)
"Valois fut bientôt désagréablement surpris de voir que Maurras cherchait à faire subventionner L'Action française par le principal commanditaire de son propre hebdomadaire, qu'il avait lui-même encouragé à aider L'Action française à un moment donné.
D'autres difficultés surgirent. Maurras reprocha à Valois l'orientation qu'il donnait à sa maison d'édition. Mais Valois eut surtout le sentiment que les campagnes de son hebdomadaire "concernant les finances, la monnaie et la bourgeoisie" déplaisaient souverainement, sinon à l'Action française elle-même, du moins à certaines personnalités politiques ou financières avec lesquelles l'Action française ne voulait pas se mettre en mauvais termes. Un incident vint transformer ces difficultés en pure et simple rupture. Tout en animant son hebdomadaire, Valois continuait à donner des articles à L'Action française. Maurras lui écrivit à propos de l'un d'eux, regrettant de ne pas avoir pu supprimer cet article faute de temps, et se livrant à une vive critique de fond:
"Il suffit de répondre "non" à telle ou telle de vos questions pour laisser en l'air toute votre thèse. Il n'est pas vrai que "la" bourgeoisie soit l'auteur responsable du parlementarisme. Le régime est au contraire né au confluent de l'aristocratie et d'une faible fraction de la bourgeoisie. [...] Les éléments protestants, juifs, maçons, métèques y ont joué un très grand rôle. L'immense, la déjà immense bourgeoisie française n'y était pour rien. Pour rien.
"Maigre rectification historique ? Je veux bien. Mais voici la politique, et cela est grave. Depuis vingt-six ans, nous nous échinons à circonscrire et à limiter l'ennemi ; à dire: non, la révolution, non le parlementarisme, non, la république, ne sont pas nés de l'effort essentiel et central du peuple français, ni de la plus grande partie de ce peuple, de sa bourgeoisie. Malgré tous mes avis, toutes mes observations et mes adjurations, vous vous obstinez au contraire, à la manœuvre inverse, qui est d'élargir, d'étendre, d'épanouir, de multiplier l'ennemi ; c'est, maintenant, le bourgeois, c'est-à-dire les neuf dixièmes de la France. Eh bien, non et non, vous vous trompez, non seulement sur la théorie, mais sur la méthode et la pratique. Vous obtenez des résultats ? Je le veux bien. On dirait en Provence que vous aurez une sardine en échange d'un thon. Je manquerais à tous mes devoirs si je ne vous le disais pas en toute clarté. Personne ne m'a parlé, je n'ai vu personne depuis que j'ai lu cet article et ai dû le laisser passer, et si je voyais quelqu'un, je le défendrais en l'expliquant, comme il m'est arrivé si souvent ! Mais, en conscience, j'ai le devoir de vous dire que vous vous trompez et que cette politique détaille. Je ne puis l'admettre à l'Af."
Pour Georges Valois, l'explication de l'attitude de Maurras était claire: "Maurras et ses commanditaires avaient toléré ma politique ouvrière, tant qu'ils avaient pu la mener sur le plan de la littérature, mais du jour où je déclarais que nous passions à l'action pratique, on voulait m'arrêter net".
Entre les deux hommes, une explication décisive eut lieu. Maurras reprocha notamment à Valois de détourner de l'argent de L'Action française vers son propre hebdomadaire. Valois contesta bien entendu cette affirmation, et démissionna de l'Action française et des organisations annexes de celle-ci auxquelles il appartenait.
La rupture était-elle fatale ? Y avait-il réellement incompatibilité totale entre la pensée de Maurras et celle de Valois ? Il est intéressant d'examiner à ce propos les "bonnes feuilles" d'un livre de Valois, parues dans l'Almanach de l'Action française de 1925 -c'est-à-dire un peu plus d'un an avant sa rupture avec celle-ci-, livre intitulé: La Révolution nationale. (Notons en passant que c'est probablement à Valois que le gouvernement du Maréchal Pétain emprunta le slogan du nouveau régime de 1940).
Valois affirme d'abord que l'Etat français a crée une situation révolutionnaire, parce qu'il s'est révélé "totalement incapable d'imaginer et d'appliquer les solutions à tous les problèmes nés de la guerre". Et selon Valois, cette révolution a commencé le 12 août 1914 avec ce que Maurras a appelé la monarchie de la guerre: c'est le moment où l'esprit héroïque s'est substitué à l'esprit mercantile et juridique. Mais après l'armistice, l'esprit bourgeois a repris le dessus, et cet esprit a perdu la victoire. Les patriotes le comprennent, ils se rendent compte qu'ils doivent détruire l'Etat libéral et ses institutions politiques, économiques sociales, et le remplacer par un Etat national." (p.48-50)
"L’œuvre de la révolution nationale ne se limitera pas à la restauration de l'Etat ; celle-ci étant accomplie, la France prendra l'initiative d'une politique européenne:
"Alors, sous son inspiration [la France], les peuples formeront le faisceau romain, le faisceau de la chrétienté, qui refoulera la barbarie en Asie ; il y aura de nouveau une grande fraternité européenne, une grande paix romaine et franque, et l'Europe pourra entrer dans le grand siècle européen qu'ont annoncé les combattants, et dont les premières paroles ont été celles que Maurras a prononcées au début de ce siècle, lorsque par l'Enquête sur la monarchie, il rendit à l'esprit ses disciplines classiques"." (p.52)
"A la fin de l'année 1925, le Faisceau bénéficiait de concours assez importants pour que Valois pût décider de transformer Le Nouveau Siècle hebdomadaire en quotidien.
Mais, pour ses anciens compagnons de l'Action française, Georges Valois devenait ainsi un gêneur et même un traître, dont il fallait au plus vite ruiner l'influence. En décembre 1925, les camelots du roi réussirent à interrompre une réunion du Faisceau. Un peu plus tard, les militants de Valois se vengèrent en organisant une "expédition" dans les locaux de L'Action française. Le quotidien de Maurras déclencha une très violente campagne contre Valois, qu'il accusait d'être en rapport avec la police, d'avoir volé les listes d'adresses de l'Action française au profit de son mouvement, d'avoir indûment conservé la Nouvelle Librairie nationale, d'émarger aux fonds secrets, et enfin d'être à la solde d'un gouvernement étranger, le gouvernement italien.
Après une année de polémiques, Valois intenta un procès à l'Action française. Ce fut l'un des plus importants procès de presse de cette époque."
(p.53-54)
"En 1927, le Faisceau déclinait rapidement ; Le Nouveau Siècle quotidien redevenait hebdomadaire et disparut l'année suivante. Cet échec avait plusieurs causes. La violente campagne de l'Action française contre Valois impressionnait vivement les sympathisants de celle-ci et l'ensemble des "nationaux". Le style paramilitaire, l'uniforme que Valois imposait à ses militants paraissaient ridicules à beaucoup de gens. D'autre part, l'opinion publique se méfiait d'un mouvement s'inspirant trop directement d'un régime politique étranger. Les bailleurs de fonds du mouvement et du journal s'en rendirent compte, et coupèrent les vivres à Valois. Celui-ci fut bientôt mis en accusation par certaines personnalités du mouvement: né d'une dissidence, le Faisceau eut lui-même ses dissidents, entraînés par l'un des fondateurs du mouvement, Philippe Lamour. Valois restait avec quelques milliers de partisans ; ceux-ci se séparèrent finalement de lui, pour former un Parti fasciste révolutionnaire, dont l'existence ne fut pas moins éphémère que celle du Faisceau.
Valois s'était efforcé de rompre avec les schémas idéologiques de l'Action française, aussitôt après l'avoir quittée. Férocement antisémite au début de son action, il estimait en 1926 que la rénovation économique et sociale qu'il appelait de ses vœux ne pouvait aboutir sans la participation des Juifs." (p.57)
"D'autant plus qu'à cette ouverture envers Israël, Valois ajoutait quelques mois plus tard un renoncement à l'idéal monarchique au profit de la République:
"Nous avons tous au Faisceau le grand sentiment de 1789, la grande idée de la Révolution française et que résume le mot de la carrière ouverte aux talents. C'est-à-dire aux possibilités d'accession de tous aux charges publiques. Nous sommes ennemis de tout pouvoir qui fermerait ses propres avenues à certaines catégories de citoyens Là-dessus nous avons tous la fibre républicaine" [Le Nouveau Siècle, 21 juin 1926]."
"En mars 1928, à l'heure où Le Nouveau Siècle disparaît, Valois publie un Manifeste pour la République syndicale. [...] En quoi il ne fait que revenir aux aspirations de sa jeunesse, d'avant la rencontre de Maurras.
La publication du Manifeste est rapidement suivie de la fondation par Valois et son fidèle ami Jacques Arthuys du Parti républicain syndicaliste. Parmi les personnalités qui donnèrent leur adhésion à cette nouvelle formation figure notamment René Capitant, futur ministre du général de Gaulle. Mais, de l'aveu même de Valois, ce parti ne sera en fait qu'un groupes d'études, sans influence comparable à celle du Faisceau.
Dès lors, Valois s'exprimera surtout à travers plusieurs revues, tout en continuant à publier des essais sur la conjoncture politique de son temps. Les revues qu'il suscitera s'appelleront Les Cahiers bleus, puis Les Chantiers coopératifs, et enfin Le Nouvel Age. Parmi leurs collaborateurs, on doit citer notamment Pietro Nenni, le grand leader socialiste italien, Pierre Mendès France, Bertrand de Jouvenel et Jean Luchaire: quatre noms qui suffisent à situer l'importance de l'action intellectuelle de Georges Valois dans les années de l'entre-deux-guerres." (p.59)
"Vers 1935, Valois tente de se faire réintégrer dans les formations de gauche. Il n'y parvient pas. [...] C'est en vain qu'il écrit à Marceau Pivert pour solliciter son admission au parti socialiste: d'abord acceptée, sa demande sera finalement rejetée par les hautes instances de ce parti. [...]
Sa pensée devient parfois contradictoire: ancien apologiste des vertus viriles suscitées par la guerre, il se proclame soudain pacifiste devant l'absurdité d'un éventuel conflit mondial, tout en reprochant à Léon Blum de ne pas soutenir militairement l'Espagne républicaine..." (p.60)
"Louis Dimier fut l'une des personnalités intellectuelles qui adhérèrent à l'Action française dès sa fondation. [...] professeur dans l'enseignement libre, et catholique convaincu." (p.65)
"Au lendemain de la guerre de 14-18, pendant laquelle L'Action française, organe de l'antigermanisme et de l'union sacrée, avait considérablement étendu son influence dans le pays." (p.73)
"La guerre devait ajourner davantage encore la possibilité de ce "coup de force" que Maurras maintenait en théorie. Dès 1914, l'Action française soutint sans réserve ceux des gouvernants qui lui semblaient les plus résolus à la défense nationale. C'est alors que Maurras déclara:
"On ne fait pas de révolution devant l'ennemi."
Et pourquoi ? demandait Louis Dimier." (p.76-77)
"Ainsi l'Action française, après avoir proclamé sa volonté de mettre fin au régime républicain "par tous les moyens", y compris la pure et simple subversion, prenait-elle de plus en plus l'allure d'un parti conservateur. La décision prise par le mouvement en 1919 de présenter des candidats aux élections accentuait encore un peu plus ce caractère. Elle étendait sans doute son influence, mais c'était au détriment de l'intégrité de sa doctrine." (p.77-78)
"Louis Dimier accepta de figurer parmi ses candidats. [...] Mais il se rendit compte que le mouvement avait plus de perdre qu'à gagner dans cette entreprise. [...]
Maurras, pourtant, n'envisageait pas cette participation de l'Action française aux élections comme une occasion parmi d'autres de rappeler les principes essentiels du mouvement. "Nous voulons passer, nous menons l'affaire pour aboutir", déclara-t-il à Louis Dimier. [...]
Le résultat fut un échec impressionnant, qui donna à Louis Dimier l'envie de se séparer de l'Action française (seul Léon Daudet fut élu)." (p.78-79)
-Paul Sérant, Les Dissidents de l'Action française, Paris, Éditions Pierre Guillaume de Roux, 2016 (1978 pour la première édition), 417 pages.
Dernière édition par Johnathan R. Razorback le Lun 28 Jan - 13:36, édité 3 fois